AccueilRomansPoesiesMusiquePhotosAquarellesAutres photosPhilatélie

                   PAGES

                     

ALFRED SWAN

 

Qui n'a jamais rêvé au plus profond de son âme de pouvoir un jour s'exprimer avec clarté et limpidité sur un sujet qui lui tenait particulièrement à coeur?

 
 

Cette pensée profonde que je vous livre telle qu'elle, mon cher lecteur, elle m'est venue tout à fait par hasard, alors que je m'apprêtais à faire mes premières recherches sur le thème de la créa-tion littéraire : thème souvent abordé par les amateurs d'art, mais rarement approfondit par ces derniers. Car il faut souligner que les écrivains laissent très peu de traces sur leurs créations et apparemment par superstition à l'égard de leur oeuvre où le mystère doit régner tels des sorcie-rs vaudous qui se taisent aussitôt qu'on leur parle de leurs pouvoirs magiques. Jamais, ils ne vous en parlerons de peur qu'on leur vole! Ce que je peux parfaitement comprendre en étant moi-même un écrivain dillétant, mais qui n'arrange vraiment pas nos affaires pour poursuivre notre récit, bien malheureusement. Mais restons optimiste, mon cher lecteur, et entrons dans le vif du sujet afin d'éclairer nos propos. Tout d'abord signalons à ceux qui ne le savent pas que la plupart de nos grandes découvertes ont été faites par hasard et non par ce qu'on pourrait appeler l'étude opiniâtre d'une chose précise.Ainsi, on pourrait dire sans bien se tromper qu'en cherchant une chose on en découvrait une autre, comme Christophe Colomb découvrant l'Amérique en croyant être arrivé aux Indes! Destin ô combien magnifique pour un homme et pour l'humanité, n'est-ce pas? Oui, j'en conviens que tout cela puisse vous paraître contradictoire voir trop beau pour être vrai. Mais c'est la vérité sur ce qu'on appelle les origines des grandes découvertes qui peuvent sceller définitivement le destin d'un homme ou d'une nation pour allez jusqu'au bout de ma pensée.

Moi même, combien de fois n'ai-je pas voulu être le plus heureux des hommes en faisant des efforts surhumains, mais sans réellement y parvenir? Je ne pourrai vous dire le nombre exact de tentatives que j'ai faites qui se sont soldées pour la plupart par des échecs cuisants. J'ai bien évi-demment analysé les raisons de mes échecs et j'ai compris que mon erreur était inscrite dans ma démarche, car je voulais absolument être heureux comme si cela se décrétait, Ah!Ah!Ah! Mon dieu quelle abominable erreur de ma part dont je rougis parfois en y pensant. Mais rassurez-vous, mon cher lecteur, tout cela est bien terminé pour moi et je savoure en ce moment mon bonheur d'être avec ma femme Clotilde dont je suis amoureux fou. Notre maison se situe sur les hauteurs de Menton où la vue m'offre un paysage magnifique fait de fleurs et de montagnes où l'étendue bleue de la mer à l'horizon me ravit chaque matin au petit déjeuner sur la terrasse. C'est exquis, je n'ai rien d'autre à dire! A propos de ce qu'on vient de parler, de ce bonheur qui nous échappe souvent, une lecture de jeunesse me revient à la mémoire qui est celle d'un poète grec vivant à Athènes en l'an 1500 av JC et qui semble nous raconter la même chose. Étrange, non?

1

LACRIUS  1500 av JC

Durant ma jeunesse, une seule chose obsédait mes pensées, c'était de jouir de la vie et de cueillir ses plus beaux fruits dans le jardin des Espérides. Je ne vous cacherai pas que les jeunes filles et les jeunes garçons ont été mes fruits préférés, ce que je vous avouerai sans aucune honte dans cet écrit voué à la postérité. Mais ce qui me choque le plus aujourd'hui, ce n'est pas cela, mais plutôt d'avoir perdu le bien auquel je tenais le plus dans ma vie qui s'appelait ma jeunesse et que je croyais auparavant éternelle! Et si le poète que je suis, vous parle de cette façon si désarman-te, c'est qu'il sait de quoi il parle, croyez-le. Car lui seul peut raviver au fond de sa mémoire les passions de son coeur qui sont toujours vivaces. Une petite anecdote si rapportant pourra vous aider à mieux comprendre ce dont il sagit. La voici.

Un soir de pleine lune, alors que je venais de terminer mon repas, j'entendis le vent se lever bru-talement au dessus de mon toit. Tout naturellement, ma curiosité me poussa à aller voir au de-hors comment les éléments étaient déchaînés. Connaissant mon tempérament téméraire, j'allai jusqu'au bord de la falaise pour voir les flots de la mer où je fus surpris par le spectacle gran-diose qu'elle m'offrait avec ses vagues énormes se fracassant contre les rochers ainsi que la vue de plusieurs bateaux en perdition à l'horizon où des marins étaient jetés dans les flots comme des fetus de paille! Que vous dire d'autre, mon ami, sinon que tous ces éléments déchaînés me rappelaient étrangement ceux de ma jeunesse avec ses passions tumultueuses où la raison fut souvent absente! Mais signalons au passage que sans cette ignorance des dangers, nous aurions été vieux avant l'âge, ne nous le cachons pas. Mais ô combien de jeunes gens morts à la fleur de l'âge par bravoure ou par naïveté? Je vous laisse imaginer le nombre, mon ami.

Pour poursuivre mon récit...Pris par la peur d'être emporté par le vent violent, je m'abritais sous un arbre où, appuyé contre, je pleurais longuement comme un petit enfant. Oui, je pleurais sur ce que j'avais perdu de plus cher à mes yeux et qui s'appelait ma jeunesse. Regardant ensuite mes deux mains, que le temps avait noué comme deux vieilles racines, je maudissais le sale tra-vail qu'il effectuait sur nous, les pauvres créatures vivantes. Puis regardant une nouvelle fois le vide qu'il y avait autour de moi, je pensais à tous mes amis qui étaient morts depuis longtemps et qui ne reviendront plus jamais me consoler de toutes mes peines et de cette nuit, tout particu-lièrement. Emporté par le désespoir, je voulus alors me jeter du haut de la falaise pour en finir avec cette vie qui n'en valait plus la peine; mais pensant à mon chien que j'avais laissé tout seul à la maison, j'abandonnai cette sombre idée et allai le rejoindre près du feu où celui-ci me mo-ntra tant d'affections. Nous étions bien tous les deux et m'en voulus terriblement d'être sorti de la maison ce soir là pour voir la tempête. La prochaine fois, je me disais, que je serai plus pru-dent afin que cela n'arrive plus.

2

Voilà, en voulant voir la tempête, notre vieux poète retrouvait le souvenir de sa jeunesse et en même temps faisait le triste constat de sa perte! Et nous pourrions aussi ajouter, pour notre plus grand bonheur, que notre vieux poète eut beaucoup de chance que quelqu'un l'attendait à la mai-son, en particulier, son chien, sinon on aurait rien su de son histoire. Voilà comment se font les histoires et arrivent jusqu'à nous par des chemins bien tortueux et disons-le clairement souvent par un heureux hasard. Car qui d'entre nous aurait eu l'idée de garder les écrits d'un vieux poète dans son placard durant 1500 ans? Reponse : personne. Et pourtant, ils sont arrivés jusqu'à nous dans un état de conservation qui nous permettent aujourd'hui de les étudier. Moi, j'appellerai ça la providence ou le destin, mais appelez-le comme vous voulez. Bien sûr, il y eut aussi dans leurs vies des mécènes et des protecteurs d'oeuvres d'arts, heureusement. Mais comment ont-ils fait ces écrits pour traverser les guerres, les révolutions, les famines et surtout le manque de pa-pier pour allumer un feu de cheminée? Ceci reste pour moi un grand mystère que seul le hasard ou la providence peut expliquer. A ce propos, cela me fait tout particulièrement sourire, quand je pense à tous ces auteurs de livres à succès ou bestsellers qui se croient éternels parce qu'ils vendent! Comme on les voit souvent à la télé, cela me fait éclater de rire à chaque fois et, en particulier, quand ils prennent cet air solennel en cette occasion, Ah!Ah!Ah!

Je trouve qu'ils en font un peu trop pour être franc avec vous où d'avoir du succès auprès de ses contemporanins est déjà une chance formidable, n'est-ce pas? Mais demandez à la postérité que son oeuvre lui survive, c'est une aberration voir une totale absurdité! Moi même, Alfred Swan, romancier de son état, j'ai connu ce genre de succès avec un de mes livres qui s' appelait "les îles gourmandes ". Je pourrai vous en parler longuement; mais sachant que je l'avais écrit suite à une invitation du prince de Monaco sur une de ses îles paradisiaques, situées dans les Caraïbes, je doute fort que ce livre reste dans la mémoire collective. Et que dire aussi des autres livres écrits dans le confort et dans le luxe sucré des plus grands hôtels de la planète? Entre nous, soyons franc, le destin d'une oeuvre est dû essentiellement au hasard. Car pour qu'elle vous survive, il faut qu'elle soit redécouverte comme un trésor par des hommes et des femmes qui ne sont plus de votre temps, mais appartiennent aux temps futurs. Vous dire alors un total mystère sur leurs goûts intellectuels, artistiques ou autres perversions etc, sans parler aussi des catastrophes qui pourraient arriver et faire brûler toutes les bibliothèques de la terre. Bref, je n'oserai pas lancer des plans sur la comète! Voilà ce que j'avais à dire sur cette folie des auteurs d'aujourd'hui qui, parce qu'ils vendent, croient avoir du génie. Tout cela est totalement absurde!

3

Je viens de faire lire ce premier chapitre à ma femme et elle m'a dit qu'elle le trouvait trop lourd et trop complexe pour être lu par le commun des mortels! Bien évidemment, j'ai été très gêné par sa remarque et on a faillit se disputer. Mais je crois que c'est elle qui a raison, car les femm-es savent si bien ce qui plait aux femmes en matière de lecture, n'est- ce pas? Et je pense que le prochain chapitre de mon livre sera plus léger, disons, comme une bulle de champagne! Oui, c' est cela que je lui est promis. Alors, elle m'a embrassé et m'a dit : Chéri, n'oublie pas que ce sont les femmes qui achètent tes livres! En me disant cela, elle m'a fait rougir, puis pour me venger, je l'ai prise par la taille et l'ai renversé sur le canapé.

-Oh chéri, arrête, tu ne vois pas que tu me fais mal? me dit-elle trouvant mon geste trop brutal. Pourtant, je me sentais bien serré contre elle, contre son sein que je sentais palpiter sous mes doigts.

Mais vas-tu me lâcher, petit vicieux! me lança-t-elle à la figure.

-Mais chérie, tu ne veux pas?

-Non, je te dis, parce que je ne pense pas que se soit le bon moment. Et puis, tu as ton livre à écrire. Tu n'as même pas fini le premier chapitre que tu veux déjà goûter au gâteau. Allez, bas les pattes!

Alfred était vraiment gêné par la réaction de sa femme Clotilde et la rougeur sur son visage tra-hissait bien évidemment son embarras. Il regagna alors le siège de son bureau comme un petit enfant en faisant l'amère constat que sa femme avait le cœur sec d'une femme d'affaire où le tra-vail devait passer avant le sexe. Et qu'en se mariant avec elle, il savait très bien que sa vie ne ser-ait pas de tout repos. Mais il lui fallait une femme comme elle aussi dure en amour qu'en affa-ire, car elle seule savait l'attacher à sa table de travail afin qu'il écrive ses chefs-d'oeuvre où, il faut le dire, l'empreinte de celle-ci était comme imprimée à l'encre invisible. Alfred Swan, le cé-lèbre auteur de romans d'amour, écrivant seul ses romans? Une complète gageure! pensa-t-il dans son for intérieur. Mais tout de même humilié par sa femme, il prévoyait une petite venge-ance dans le prochain chapitre. Bien sûr, elle n'en saura rien sauf au moment de le lire!

4

Angleterre, Château de Watergrown, propriété de Lord Bretjones, le 30 juillet 1853

Après qu'elle eut embrassé son mari, puis souhaité un bon voyage( où celui-ci devait se rendre à Londres pour une affaire d'une extrême importance), Josépha remonta aussitôt dans ses apparte- ments et s'y enferma à double tour. Mais impressionnée par l'obscurité qui y régnait, elle partit instinctivement vers la fenêtre où le rideau n'avait pas été tiré. En ouvrant celui-ci énergiqueme- nt, elle vit apparaître les premières gouttes de pluie s'abattre contre la vitre, puis quelques insta- nts plus tard, un torrent de pluie inonder le perron du château que son mari venait tout juste de quitter. Ca, c'est pas de chance pour lui! dit-elle à moitié navrée. Puis levant une dernière fois ses yeux vers cet horizon trempé, elle aperçut au loin le carrosse de son mari s'enfoncer dans la brume, puis disparaître tel un vaissau fantôme. Adieu, mon ami! dit-elle brutalement.

Quelques jours plus tôt, un coursier de sa gracieuse majesté s'etait présenté à la propriété du Lord où, toquant contre le carreau de la fenêtre qui donnait sur la salle du rez-de-chaussée, un domestique était venu à sa rencontre.

-Oui, c'est pourquoi?

-J'ai une lettre pour sir amiral Bretjones!

-Très bien, donnez la moi, je vais lui porter.

-Désolé, mais je dois lui remettre en mains propres!

-Très bien, veuillez me suivre..

Les deux hommes traversèrent la grande salle du rez-de-chaussée qui donnait sur les jardins pri- vés de Madame et Monsieur Bretjones. Ce matin, Josépha avait décidé d'y prendre son petit déj- euner avec son mari, car hier son jardinier lui avait prédit pour aujourd'hui une journée ensolei- llée et ne s'était pas trompé. Arrivé de l'autre côté, le domestique pria le coursier d'attendre.

-Attendez-moi là, je vais prévenir Monsieur.

Quelques minutes plus tard, le domestique revint et lui dit : Monsieur vous attend. Suivez la petite allée qu'il y a devant vous, celle-ci vous y ménera.

5

-Merci, répondit le coursier.

L'allée qui menait aux jardins privés de Monsieur et de Madame Bretjones était particulière étr- oite et luxuriante où de hautes herbes la bordaient, comme si la maîtresse de maison eut souhai- té en faire un passage secret pour protéger son intimité. Mais le coursier, habitué aux caprices des aristocrates, l'emprunta sans se poser de questions et arriva très rapidement à l'autre bout où ces derniers l'attendaient sans montrer en apparence une quelconque émotion où Josépha était restée assise et Moriss s'était levé par simple convenance.

-Sir amiral Bretjones?

-Oui, c'est moi.

-J'ai une lettre pour vous de sa gracieuse majesté! Aussitôt, il l'a sortit d'un étui en cuir et lui re-mit en mains propres. Lord Bretjones, très surpris par cette lettre imprévue, venant de si haut, la saisie et la retourna aussitôt du côté où le sceau royal devait se trouver, afin de voir s'il n' avait pas été rompu( car la lettre serait alors considérée comme nulle). Mais voyant que tout était en ordre, il regarda le coursier dans les yeux et lui dit : Vous pouvez maintenant disposer!

-A vos ordres, sir Amiral! répondit-il en repartant immédiatement par le même chemin.

Assise de l'autre côté de la table, Josépha semblait très inquiète et regardait son mari avec gravi-té. Mais celui-ci étrangement s'écarta de la table et partit à quelques mètres pour la décacheter, ce qui fut considérée par Josépha comme du mépris à son égard et lâcha comme une plainte à peine dissimulée. Mais Moriss se retourna et lui dit : Chérie, je vous prie de m'excuser. Mais cette lettre est hautement confidentielle et je ne peux malheureusement pas vous en parler! Au-ssitôt Josépha vexée se leva et sortit du jardin.

Mon cher lecteur, je ne sais pas comment vous expliquer la chose, mais il me faut interrompre momentanément cette histoire. Car ma femme, me lisant par dessus mon épaule, m'a arraché la feuille des mains et s'est emportée contre moi. Voilà ce qu'elle m'a dit.

-Mais comment oses-tu traiter cette pauvre Madame Bretjones! Tu n'as pas honte, Alfred ?

-Mais chérie? lui répondis-je comme surpris par sa réaction.

6

-Ne joues pas l'hypocrite, veux-tu?

-Mais je ne vois pas ce que tu veux dire par là!

-Mon pauvre Alfred, je ne sais pas comment te le dire, mais je crois qu'il est temps pour toi d' arrêter ce petit jeu avec moi..

-Mais qu'est ce tu racontes là, mon petit sucre d'orge?

-S'il te plait, ne m'appelle pas, mon petit sucre d'orge!

-Bien, bien, mais alors expliques-toi..

Si je te parles ainsi, c'est parce que je pensais jusque-là que tu étais un homme différent des au-tres qui comprenait la douleur des femmes. Mais avec ce que tu viens d'écrire, je crois, mon pauvre ami, que tu es un homme comme tous les autres, c'est à dire lâche et pervers! Mais pou-rquoi prenez-vous un plaisir fou à faire souffrir les femmes? lui dit-elle brutalement.

-Mais chérie, je n'y peux rien, car c'est l'histoire qui le veut! Et je dirai même que c'est la vie tout cours qui l'exige en ayant l'intime conviction qu'une femme digne de ce nom doit souffrir pour se sentir exister, non? je lui répondis un peu à l'emporte pièce.

-Hum, hum, c'est bien ce que je pensais, vous n'êtes qu'un mufle!

-Ah!Ah!Ah! Mais chérie, ce n'est qu'un roman! Et je n'arrive pas à comprends pourquoi tu t' em- portes comme ça, alors que tu ne connais pas la suite de l'histoire.

-Oui, ça c'est vrai..lâcha Clotilde comme apaisée.

-Peut-être que pour se venger, je lui ferai assassiner son mari par un de ses amants, hum?

-Alors là, Alfred, tu exagères!

-Ah oui? répondit-il en la regardant avec des yeux étonnés.

-Mais bien sûr que oui. Car qui pourrait croire à de telles sornnettes qu'on assassine son pauvre mari parce qu'il à été impoli avec nous. Mais c'est absurde, aucune de tes lectrices le croirait et je connais trop les femmes pour savoir ce qu'elles pensent des hommes, mon ami.

-Pourtant, c'est déjà arrivé dans la réalité! lança Alfred dont l'instinct du romancier refaisait sur-face.

7

-Oui, je sais, mais ce sont des cas particuliers qui ne représentent en aucun cas la majorité des femmes qui, ne l'oubliez pas, forme la plupart de vos lectrices : lectrices qui, soit dit en passant, ne feraient jamais de mal à leur petit mari pour des futilités de ce genre, souligna-t-elle sûre de son instinct de femme d'affaire.

-Certes, certes, répondit Alfred quelque peu embarrassé, mais si je vous disais maintenant que la reine d'Angleterre était l'amante de Lord Bretjones, me croiriez-vous?

-Ah!Ah!Ah! mon ami, mais vous divaguer complètement en ce moment. Mon dieu, mais ce n'est pas du tout réaliste ce que vous dites là!

-Et cette lettre alors qu'il a reçu de sa gracieuse majesté, hum?

Après qu'il ait dit cela, un long silence apparut entre elle et lui( car cette lettre pouvait bien con-tenir la preuve de ce qu'il affirmait, bref, que la reine d'Angleterre fut bel et bien l'amante de Lord Bretjones!). Bien qu' ébranlé pendant un cours instant par le réalisme de sa femme, Alfred reprit très rapidement son assurance et la regardait maintenant avec un petit sourire en coin.

-Mais tu veux parler de Victoria, Reine d'Angleterre et Impératrice des Indes? Mais c'est impos-sible, mon cher Alfred.  

-Comment impossible? dit-il médusé.

-Je vais te le prouver maintenant, mon pauvre ami.

-Ah oui, j'voudrais bien voir ça..lâcha-t-il interloqué.

Aussitôt Clotilde se leva sur la pointe des pieds et prit sur l'étagère, qui se trouvait au dessus du bureau de son mari, un gros livre d'Histoire, puis se mit à le feuilleter en cherchant quelque ch-ose. V..Versingex, non, c'est pas ça. Victor..ça non plus, Victoria, ça y'est, j'y suis! Hum..Victo-ria, reine de Grande Bretagne et d'Irlande, née en 1819 au Palais de Kensington à Londres. Son couronnement eut lieu en 1838 et son mariage en 1840 avec le prince Albert de Saxe-Cobou-rg-gotha. La reine Victoria lui donnera 9 enfants. Voilà c'est ce que je cherchais. Et si je sais bi-en compter, la reine avait 34 ans en 1853 et avait déjà, voyons, voyons, regardons dans le dico, ah 8 enfants! Mon cher Alfred, je crois que vous vous trompez complètement sur les moeurs de cette femme qui était une sainte pour son mari, le prince Albert de Saxe. Conclusion : Monsieur de Bretjones ne pouvait en aucun cas être l'amant de la reine Victoria! Alfred, qui s'était presque recroquevillé sur son siège pendant la leçon d'Histoire que lui avait donné sa femme, avait senti une nouvelle fois son emprise sur ses romans où il n'était en fin de compte que le jouet. Pendant un instant, il pensait que les femmes étaient toutes des monstres! Mais ne voulant pas se fâcher avec elle, il reprit aussitôt le jeu avec elle puisque, semble-t-il, il n'était que son jouet, sa bab-iole, pensa-t-il en étant profondément humilié.

8

-Mais qui te dit, ma très chère Clotilde, que tous ses enfants soient réellement de son mari, le prince de Saxe?

-Alors là, Alfred, tu dépasses les bornes! Veux-tu vraiment provoquer un incident diplomatique avec la couronne Britannique, hein, c'est que tu cherches en écrivant cela? Pense un peu au sca- ndale que cela provoquerait auprès de nos lectrices anglaises qui, par dessus tout, aiment tant leur monarchie dont la succès story ne peut pas être remise en question. Tu me déçois, Alfred, ah oui vraiment!

Cette fois-ci, complètement désabusé par sa femme, il se tut.

-Allez, dis-moi ce qu'il y a dans cette lettre? demanda-t-elle brutalement.

-Mais moi, j'en sais rien!

-Comment tu n'en sais rien?

-Non, j'en sais rien de rien. Et puis désolé de te le dire, mais je crois que tu m'as coupé la chi- que, ma p'tite Clotilde.

-Comment je t'ai coupé la chique?

-Oui, oui, coupé, comme dirait mon grand père.

-Mais j'vois pas ce que ton grand père à avoir avec ça?

-Tout ça pour te dire que si t'as envie d'écrire le roman à ma place, dit le moi franchement.

-Mais non, mon ami, c'est vous qui êtes le romancier et moi je ne fais que vous aider afin que nos lectrices puissent vous comprendre. Car sans cela, elles ne vous suivront pas là où vous voulez les emmener. N'oubliez pas, mon ami, que la grande préoccupation des femmes reste l' Amour avec un grand A. Et qu'un roman sans histoire d'amour serait voué à l'échec commerci-al!

-Merci de me le rappeler! lâcha Alfred, une fois de plus désabusé par les propos de son épouse-femme-d'affaire.

9

-Mais rassures-toi, mon chéri, je ne veux en aucune façon prendre ta place. Pour la simple rais-on que les hommes ont je crois beaucoup plus de talents que les femmes pour écrire des romans d'amour.

-Ah oui, tu le crois vraiment ? lui demanda-t-il quelque peu étonné.

-Oh oui, c'est certain; car les hommes en matière d'amour ont quant même le beau rôle, alors que les femmes restent passives malgré elles.

-Tu veux dire quoi par passives?

-Je veux dire qu'elles sont constamment en attente du bonheur et donc phantasment beaucoup plus qu'elles n'agissent. Pour résumer ma pensée, je dirai que les romans d'amour écrits par les femmes manque de virilité, si tu me permets cette expression,

-Tu dis ça parce que tu es une femme!

-Non, non, pas du tout. Mais parce que je trouve qu'un roman écrit par une femme ne m'appren-ds rien sur moi-même où il me semble bien que tout ce qu'elle raconte, je le sais déjà. Alors que de lire un roman d'amour écrit par un homme, ça, ça m'excite!

-Ah vous les femmes, vous êtes toutes les mêmes! lâcha Alfred en regardant son épouse qui se croisait les jambes sur le sofa.

Silence

-Mon ami, je vois que nous parlons depuis tout à l'heure. Mais que comptez-vous faire au juste avec ce cher lord Bretjones? lui demanda-t-elle brutalement.

-Moi?

-Oui, toi.

-J'en sais rien.

-Mais pourquoi ne l'enverrais-tu pas à la guerre?

-A la guerre? Mais quelle guerre?

-J'sais pas, mais pourquoi ne pas regarder dans le livre d'Histoire pour le savoir, hum?

-Hé ben, ma petite Clotilde, tu n'y vas pas avec le dos de la cuillère!

10

-Allez, laisse-moi faire! dit-elle en s'emparant du gros livre qu'elle ouvrit sur ses genoux.

Hum, hum, 1853, Histoire de la couronne Britannique, début de la guerre de Crimée. Hé ben, je sais maintenant où envoyer ton cher amiral Bretjones!

Alfred, quelque peu embarrassé par les initiatives de son épouse en matière de roman, se mit à regarder au plafond.

-Oh, tu m'écoutes, chéri?

-Oui, oui, je t'écoute!

-Écoute un peu, la guerre de Crimée commença par une simple querelle de moines à Béthléeme entre chrétiens latins et chrétiens orthodoxes. Ce conflit, selon les dires des observateurs de l'ép- oque, aurait pû être résolu très rapidement. Mais comme la Russie impériale avait des vues d' expansion du côté de la Méditerranée, elle profita de cet incident pour exiger du sultan Abdul Medjid des garanties pour assurer la protection des chrétiens orthodoxes qui vivaient sur son te-rritoire. Mais le sultan refusa et les troupes du tsar aussitôt envahirent les principautés moldo-valaques( Moldavie et Valachie). Ce qui fut considéré par les Ottomans comme une déclaration de guerre et nous étions alors en juillet 1853.

-Bravo, chérie, bravo! lança tout à coup Alfred en applaudissant.

Clotilde, gênée, reposa le livre sur le canapé et essayait de savoir pourquoi Alfred l'applaudiss- ait.

-Mais qu'est-ce qui te prends, chéri?

-Moi, rien, je voulais seulement applaudir ton sens inné de l'Histoire et plus particulièrement ton irréalisme.

-Mon irréalisme?

-Oui, celui de croire que je pourrai, en tant que romancier, suivre pas à pas l'Histoire pour raco-nter une histoire d'amour qui eut réellement lieu. Alors là, ma chère Clotilde, je crois que vous perdez la tête!

-Ah oui, vous le croyez vraiment?

11

-Oh oui et pour la simple raison qu'un romancier se sert de l'Histoire comme un pretexte où un cadre où ses personnages seront mis en scène par lui-même. Je suis désolé, ma p'tite Clotilde, mais je ne suis pas un historien et ne veut en aucune façon le devenir. Alain Decault, c'est pas mon trip, voilà tout! dit-il brutalement.

Mais qu'est ce que vous dites là, mon ami? Je ne vous demande en aucune façon de devenir Al-ain Decault, mais uniquement de vous en inspirer. Car j'ai lu avant-hier dans la revue spécialis-ée "Éditeurs, chiffres à l'appui" que la tendance actuelle du roman était à l'épopée historique où se mêlait tragiquement l'amour, le sang et la gloire. Et montrait chiffres à l'appui que les lectric-es en étaient très friands pour des raisons qu'on ne pouvait malheureusement pas encore expliq-uer. Mais les spécialistes de la littérature et les sociologues avaient avancé que les femmes, dev-enant de plus en plus libres, souhaitèrent goûter elles aussi au pouvoir et surtout le prendre aux hommes! C'est ce qu'ils avaient dit en toute objectivité.

-Quoi, qu'est ce tu racontes là? Les femmes veulent prendre le pouvoir maintenant?

-Oui, je suis désolé de te le dire, mon pauvre Alfred, mais c'est la tendance actuelle et les chiff- res sont là pour le confirmer. Je te dirai même qu'elles veulent le prendre pas uniquement dans le Roman, mais aussi dans la réalité!

-Alors là, on aura tout entendu! s'écria-t-il quelque peu sonné par les propos de sa femme.

Silence 

Ne sachant plus quoi lui répondre, malgré que sa fierté d'homme fut bien écornée, il savait très bien qu'elle avait entièrement raison sur la nouvelle condition des femmes. Et conscient, en tant que romancier de ces dames, qu'un jour les femmes prendraient le pouvoir aux hommes. Tout d' abord par le Roman où elles se mettraient en scène déguisées en commandantes ou en générales, puis par les urnes et si les urnes ne marchaient pas, elles le prendraient tout simplement par la force. Bref, quand la guerre des sexes aura lieu où la population des femmes aura dépassé celle des hommes. Alfred savait déjà tout ça et il ne pouvait pas s'en prendre à Clotilde qui lui avait dit de la manière la plus simple du monde. Elle, elle sait ce que veulent les lectrices en matière de fantasmes et, en tant que romancier de ces dames, je ne peux malheureusement pas m'y oppo-ser, pensa-t-il en la regardant d'une manière terrorisée.

12

-Alors qu'est-ce que tu décides ? lui demanda-t-elle d'une voix tranchée.

-Bon, ben, si c'est la tendance, je suis bien obligé de te suivre, non?

-Mais je crois que vous n'avez pas trop le choix, mon ami! dit-elle comme un couperet.

Clotilde se leva et sortit du bureau d'Alfred.

L'air pensif, il se demandait s'il devait continuer son travail ou bien sortir dehors pour se chang- er les idées. Mais le seul fait de devoir croiser sa femme dans le salon, cela le découragea et res-ta comme ça insensible devant sa feuille blanche où son écriture fine et délicate avait noirci à moitié le papier. Et la suite, bon dieu? semblait lui demander la feuille. Alfred entendait très bi-en cet appel, mais les nouvelles exigences de sa femme en matière de roman l'avait comme téta-nise. Il réfléchit un instant et se dit : De toute façon, c'est moi qui écrit le roman et pas elle. Mais c'est fou, comme les femmes elles sont en voulant être à la fois à l'intérieur et à l'extérieur du Roman, ce qui n'est pas possible! Car le créateur a nullement besoin de témoins pour créer son oeuvre. Mais je crois bien que ce sont tous ces médias avec leurs caméras et appareils pho-tos qui lui sont montés à la tête pour penser ainsi. Et tous les créateurs vous le diront mieux que moi, si l'on pouvait filmer ou raconter la vraie vie, ce serait quelque chose de formidable, mais malheureusement nous ne sommes pas tous des génies! En sachant bien que les génies étaient en fait des gens comme tout le monde, mais qui se permettaient des libertés hors du commun afin de dire à tous les Hommes la triste vérité. Mais lui, en tant que romancier de ces dames, il s'y re-fusait entièrement à la dire afin de ne pas choquer son public, qu'il gérait comme un magasin de sucreries et d'épices orientales où se trouvait forcément une caisse enregistreuse à la sortie!

Retour aux jardins privés des Bretjones où Moriss se retrouvait maintenant seul suite à son atti-tude impardonnable qui avait humillié sa femme qu'on pouvait désormais comprendre entièrem-ent.

13

Bien évidemment qu'il s'en voulait d'avoir été brutal avec elle. Mais bon dieu, comprendra-t-elle un jour que je suis aussi l'amiral Bretjones qui est au service de sa royale majesté, la reine Vict-oria? s'emportait-il contre lui-même. Mais pourquoi ne veut-elle pas comprendre que ma vie ne lui appartient pas uniquement, mais aussi à mon pays pour lequel je suis prêt à mourir s'il me le demandait! réitéra-t-il d'une façon poignante. Pendant un instant, il avait le sentiment d'être éca-rtelé entre ces deux femmes aux visages sévères qui s'appelaient Josépha et Victoria où chacu-ne semblait lui demander de mourir pour elle et Lord Bretjones souffrait, bien évidemment, de ne pouvoir satisfaire ce désir complètement fou! Mais du fait de son éducation rigide, faite à l' anglaise, il avait déjà fait son choix depuis tout jeune. Et s'il devait mourir un jour, ce serait en premier pour la couronne Britannique, puis en second pour sa future épouse! s'avoua-t-il en lançant une sorte de God Save the Queen silencieux. Après avoir décacheté la lettre, puis déplié l'unique feuille qu'elle contenait, le visage de l'amiral prit tout à coup un air grave et solennel. Conscient de son rang social et militaire plus rien ne semblait lui faire peur et lut posément cette lettre qui ressemblait en tout point à un ordre de mission. Voici le contenu de la lettre.

Palais de Buckingham, le 15 Juillet 1853

Cher Amiral Bretjones, si je vous écris personnellement depuis mon palais de Buckingham, cr- oyez-bien que ce n'est pas encore une de mes fantaisies, mais pour vous annoncer une très mau-vaise nouvelle concernant l'avenir de l'Europe. Voilà, l'Empire Ottoman vient de déclarer la gu-erre à la Russie suite à la fin de l'ultimatum envoyé au général Gortschakoff. Et comme vous le savez, très certainement, nous sommes obligés d'entrer dans ce conflit afin d'éviter le démantèle-ment de la région où les intérêts la couronne Britannique sont étroitement liés à ceux des Otto-mans. Je vous demanderai donc de revenir ici à Londres au plus vite afin de rejoindre votre état major et nous trouver la meilleur solution, en termes de delai et de coût, pour nous faire gagner cette guerre. Important à signaler, n'essayez pas de joindre le vice amiral Makensy qui à l'heure actuelle est en mer et se dirige vers le Bosphore afin d'évaluer nos besoins en termes de vaissea-ux et de troupes. "

14

En lisant ces toutes premières lignes, l'amiral fut en vérité à moitié surpris, sachant qu'il avait déjà entendu pas mal de bruits courir sur ce possible ce conflit dans les couloirs du ministère de la défense où bien évidemment tout le monde avait spéculé. Maintenant, on y était en plein ded-ans! constata-t-il comme soulagé de n'être plus dans le doute. Puis de toute façon, la Russie ne peut pas gagner cette guerre. Car si elle la gagne, ce serait la perte de tous nos intérêts économi-ques et politiques dans la région, ce qui serait inadmissible pour la couronne britannique! en conclua t-il d'un air martial.

Suite de la lettre

Mon cher amiral, voyez-vous, depuis que j'entretiens avec vous cette liaison épistolère qui est pour moi d'un grand soutient, je ne serai certainement pas là où je suis. C'est à dire assise sur mon trône à veiller sur l'avenir de l'Empire Brtiannique et sur ses 800 cents millions de sujets par le monde. Car sans vos conseils en matière de stratégie politique, je serai bien impuissante à gouverner avec raison dans ce monde peuplés d'insensés, n'est-ce pas? Et pour votre totale loya-uté envers votre reine, mon cher amiral Bretjones, je voudrais vous en remecier du fond du co-eur, car les mots me semblent bien dérisoires pour exprimer ce que je ressens en ce moment! A ce propos, peu de gens savent que mon destin est entre vos mains ; ma famille l'ignore et persis-te à croire qu'elle m'a tout donné, mais elle se trompe!"

Lord Bretjones s'arrêta tout à coup sur cette dernière phrase, puis lissa sa fine moustache com- me en signe de fierté. Car il connaissait tout sur cette femme dont le plus gros défaut était sa na-ture phantasque qui l'empêchait à proprement parler de gouverner avec justice et sévérité. Appa-remment ses leçons lui avait servit! saisissait-il par la simple lecture de cette lettre où son élève la reine Victoria montrait enfin de la maturité où analyse politique et décision était en parfaite adéquation. Je suis fière d'elle! pensa-t-il en reprenant le cours de la lecture.

15

C'est fou comme je me surprends à vous faire des confidences, mon ami, vous qui m'avez app- ris à ne montrer aucune faiblesse à mes ennemis! Je dois très certainement vous décevoir en ce moment, non? Un petit sourire gagna aussitôt le visage de l'amiral qui comprenait par ces mots que son petit bébé politique avait lui aussi du coeur. Ce qui était assez rare de trouver parmi to-us ces gens qui occupaient le pouvoir qui, il faut le dire, préféraient plutôt s'envoyer des bou-lets de canons que des billets doux. Mais non, mais non, ma petite, tu n'es pas ridicule, tu es tout simplement délicieuse! dit-il du bout des lèvres. La suite de la lettre concernait les rumeurs sur la soi-disant sécheresse de coeur de sa femme. Mais l'amiral, emporté par cet ordre de mission, passa outre, comme on passe sur une chose tout à fait anecdotique et sans importance. Propos de femmes! pensa-t-il avec ironie.

Au début de son règne et dans la même année, la malheureuse essuya deux attentats contre sa personne où miraculeusement elle s'en sortit à chaque fois! Pour la prévenir, je lui avais dit, si elle voulait vivre longtemps, qu'elle devait absolument changer la sentence à l'égard de ces fous qui perpétraient ces attentats contre elle. Car ces derniers, déclarés comme fous, échappaient so-uvent à la justice et étaient remis en liberté quelques semaines plus tard. Je l'optemperais à du-rcir la sentence pour celui ou celle qui voudrait intenter à la vie de la reine où 20 ans de prison suffiraient à convaincre les plus récalcitrants! lui avais-je conseillé. Quelques temps plus tard, elle fit voter la loi au parlement et à partir de ce jour, elle n'eut plus aucun problème avec les attentats. Par la suite, elle m'en remercia et je devins tout naturellement son conseiller personn-el. Je ne vous cacherai pas qu'à la chambre des Lords, on m'envie beaucoup d'être le conseiller personnel de la reine. Mais dire qu'on me jalouse serait exagéré, car mes chers Lords on d' autres chats à fouetter aussi bien dans le domaine politique que domestique, Ah!Ah!Ah! En fait, ils ont tellement de biens et de propriétés ici en Angleterre qu'ils passent le plus gros de leur temps à faire fructifier leurs affaires. Personnellement, j'ai toujours pensé que de mélanger les affaires personnelles et celles de son pays était une très mauvaise chose en considérant que la politique ne devait pas servir les intérêts personnels de ceux qui la faisaient, mais à l'enrichissement de leur pays. Car à long terme, ce système ne pouvait qu'imploser vu que la population de jour en jour s'instruisait en prenant conscience de ses droits.

16

Où laissez les gens dans la misère n'était pas une bonne chose même si certains y trouvaient des intérêts, comme d'avoir une main d'oeuvre à bon marché pouvant servir aussi bien à cultiver les terres qu'à lever une armée sans y laisser sa fortune. Je suis parfaitement conscient que tout cela comporte beaucoup d'avantages pour notre pays. Mais en tant que royaliste, je n'ai pas le droit de m'y opposer sauf quand l'injustice sert la politique, ce dont j'ai toujours été un fervent opposant. En fait, peu de gens connaissent mes pensées sur ce sujet brûlant. La raison est simple, c'est que je ne veux froisser personne, ni mes amis ni ma famille qui m'ont tout donné. Suis-je un hypo-crite pour autant? Certainement pas. Car je vous avouerai sincèrement que ce n'est pas à moi de changer ce monde où il y a tant de malheureux. Je suis désolé de vous le dire, mais moi dans ce monde, j'y suis parfaitement heureux et comblé par mes pairs. Alors pourquoi irai-je contre mon bonheur, mes amis? Ce serait insensé, n'est-ce pas? C'est à ceux qui n'ont rien de se battre. Je sais que c'est dur de l'entendre, mais je pense qu'il faudra très certainement plusieurs générations d'hommes et de femmes pour changer les choses, afin que ce monde devienne plus juste. Tenez, à ce propos, Napoleon, qui avait essayé de changer le monde en voulant abattre toutes les mon-archies de la terre, en a refroidit plus d'un lorsqu'il s'est couronné empereur lui-même, Ah!Ah!Ah! Oh mon dieu, la nature humaine, quel despote! Personnellement, j'ai toujours pensé du fond du coeur que l'aristocratie existera toujours, car c'est la manière la plus simple d'organiser le po-uvoir. C'est à dire un pouvoir copié directement sur la nature où c'est souvent le plus fort ou le plus riche qui commande les autres et organise la société autour de lui grâce à ses fidèles com-pagnons de combat.

L'ordre, ce sont les gens qui le veulent et ce n'est pas moi qui l'exige! En parlant de cet ordre un-iversel voulut par le peuple afin qu'il prospère, j'en viens à me demander si le tsar de Russie n' était pas devenu fou en voulant s'emparer des principautés Moldo-Valaques? Son empire est dé-jà immense et très riche. Alors pourquoi cette idée farfelue d'expansion vers la Méditérranée : un caprice, une guerre pour s'amuser? Le tsar s'ennuierait-il dans son palais à Saint-Petersbou-rg? Ah!Ah!Ah! Si c'est le cas, je ne pense pas qu'il gagnera cette guerre, c'est mon intime convi-ction. Car de mémoire militaire, on a jamais gagné une guerre pour des futilités comme celles là où le tsar de Russie semble avoir perdu complètement la boule. Je suppose qu'en ce moment, à Londres, on doit être forcément de mon avis. Mais comme pour l'instant, nous n'avons pas ga-gné cette guerre, il nous faut rester vigilant. Cette analyse me semble bonne et je l'exposerai à notre état major d'ici 3 ou 4 jours! finit par dire l'amiral en repliant la lettre et en quittant le jardin avec plein d'élan martial.

18

Alfred Swan, proche de la crampe littéraire, lâcha son stylo et ferma les yeux quelques instants, puis les rouvrit pour relire ce dernier passage où, semble-t-il, son esprit de romancier s'était réconcilié avec lui-même. Oh merde, je l'a tiens enfin mon histoire! sécria-t-il d'une manière eu-phorique en pensant à Clotilde qui sera heureuse de le savoir. Flute, son idée d'envoyer Bre-tjones à la guerre, ah sincèrement, je n'y aurai pas pensé. Mais c'est là, je crois le point fort des femmes dans le roman où celles-ci ne semblent avoir aucun scrupule à jouer avec la vie des ho-mmes dont le courage doit servir à magnifier la grande histoire d'amour dont chacune rêve de vivre intensément. C'est ce qui sépare l'homme et la femme, me semble-t-il. Car la femme dans la vie est terriblement romantique, alors que l'homme est un parfait goujat prêt à tout pour sau-ver sa peau, Ah!Ah!Ah! C'est dire un véritable continent qui sépare nos deux protagonistes, n' est-ce pas? Et puis zut, si elles croient que l'homme est prêt a se sacrifier pour elles, elles peuv-ent toujours rêver! pensa Alfred comme soulagé de ranger son manuscrit dans le tiroir, qu'il fer-ma aussitôt à clef, puis sortit de son bureau pour entrer dans le salon.

-Clotilde, Clotilde, tu es là? Aucune réponse. Mais où est elle donc passée?

Alfred s'engoufra ensuite dans la cuisine et vit, posé sur la table, un postit de couleur jaune. Il le prit et le lut. Voilà ce qui était écrit dessus. Mon Chéri, ne t'inquiète pas, je suis partie faire des courses au centre ville. Je reviendrai dans 1 heure ou 2. Médusé, il regarda la pendule qui mar- quait 15H30.

Alors celle là, elle s'en fait pas. Pendant que moi je travaille, Madame va faire du shopping! Ah, les femmes toujours prêtent à trouver un prétexte pour sortir en ville et se montrer dans leurs plus beaux habits, Aaah! soupira t-il en collant le postit sur la porte du frigo. Puis l'ouvrant d'un geste rapide, il vit bien effectivement qu'il était plein! Ah, j'en étais sûr, mais bon. dit-il comme désabusé. Alfred, dont la littérature avait donné comme de l'appétit, plongea sa main à l'intérieur et sortit une assiette de foie gras qu'il posa sur la table ainsi qu'un couteau du tiroir, puis s'ins-talla devant son bloc de foie gras, les yeux et la bouche grands ouverts prêt à tout avaler. Oh zut, le pain, j'allais oublier! Il se leva et alla vers la corbeille à pain où il plongea sa main. Mais à sa grande surprise constata qu'elle était vide! Bon, je crois que je vais devoir utiliser les moyens du bord pour goûter à ce fois gras, dit-il en allant vers le placard pour y sortir un vieux pain de mie dont la date de péremption était bien évidemment dépassée. A la guerre comme à la guerre! lan-ça-t-il en ouvrant le paquet où une odeur de pain industriel lui fit faire une grimace. Hou, c'est horrible, mais j'espère bien que le foie gras fera passer l'ensemble. Alfred étala alors une tranche de foie gras sur son vieux pain de mie et vit bien effectivement que l'ensemble était agréable au palais. 

19

Mon dieu, ça ressemble étonnament à un repas prit au bord d'un champ de bataille, Ah!Ah!Ah, ria-t-il comme désabusé. Puis reprenant son souffle, il se leva et partit se servir un verre d'eau au robinet pour faire passer le tout. Houuu..ça fait du bien par où ça passe! Mais sincèrement, je n'aurai pas osé ouvrir un vieux bordeaux pour accompagner cette chose. Mais c'est dingue, il suffit qu'il manque un ingredient pour que tout rate, comme un diner sans amis ou un roman écrit sans passion ou bien comme sa femme qui aurait oublié d'acheter du pain pour la maison, hum? se surprit-il à se demander comme faisant une crise à sa femme. En réfléchissant un inst-ant sur cette situation visiblement grotesque, il s'écria dans la cuisine : Comment moi, Alfred, dandy et romancier de son état, j'en voudrai à ma femme pour un morceau de pain? Mon dieu, Alfred, ressaisis-toi, ce rôle de bof ne te va vraiment pas du tout, mais vraiment pas du tout! finit-il par se dire en débarrassant la table et en la nettoyant avec méticulosité jusque la dernière miette. Puis sortit sur le terrasse pour se dégourdir les jambes où la vue était superbe. Respirant profondément l'air saturé de parfums exotiques, il se disait : Mon dieu, pour tout l'or du monde, je ne changerai ma place contre une autre! Car c'est bien ici que je me sens le plus heureux et nulle part ailleurs. Et les hommes pourraient bien me torturer, me faire de vilaines choses, moi, j'aurai toujours dans ce monde un endroit où me cacher pour pleurer dans ma solitude. Alfred, ému jusqu'aux larmes et embrassant à nouveau l'horizon, vit bel et bien que le paradis existait sur la terre : un paradis où se reflétait dans le bleu de la mer des astres d'or et d'argent!

Mais en ce moment une seule tache assombrissait ce tableau idyllique, c'était la figure de son fils Aurélien : un enfant illégitime qu'il avait eu avec une célèbre cantatrice de l'opéra Garnier, Mademoiselle Joséphine. Alfred à l'époque en était très amoureux au point de passer toutes ses nuits enfermé avec elle à l'opéra. Où comme deux amants éperdus, faisant l'amour sur la scène, ils rêvaient, bizzarement, que cette union donnerait naissance au plus grand ténor que la terre n' ait jamais connu afin d'enflammer les scènes du monde entier! Rêve d'artiste, bien évidemment! Mais le résultat fut moins glorieux que cela, car cet enfant malheureusement n'hérita aucun do-ns de sa mère, mais uniquement les défauts de son père, qui était alors un coureur de jupons et aimant la vie facile. Alfred, connaissant parfaitement ses défauts de jeunesse, était en ce mom-ent très soucieux sur l'avenir de son fils. Car la semaine dernière, celui-ci était venu le voir à la maison, non pas pour lui demander de ses nouvelles, mais uniquement pour lui demander de l'argent afin qu'il paye ses dettes de jeu. Vous dire le désarroi d'Alfred et de Clotilde!

20

Malgré cela, il restait compatissant avec lui, avec ce fils qui lui ressemblait tant par ses frasques que par ses defauts qui avaient fait le charme de sa jeunesse, mais aussi, le drame pour sa fami- lle qu'il avait dû quitter très jeune pour pouvoir assumer sa nature de jouisseur et d'excentrique. Mais la chance qui l'avait eu, dès sa toute premiere experience de jeu, fut de gagner un jack pot de 700 000 euros au casino de Monte-Carlo! Ce qui lui avait évité la galère indescriptible du jo-ueur de casino qui était prêt a se prostituer ou bien à vendre ses enfants pour pouvoir se refaire, tel était le vice immoral de cet être voué au malheur s'il ne faisait pas un gros gain avant sa vieil-lesse. Souvent, il y pensait au point d'avoir des sueurs froides durant certaines nuits où revisitant ces instants de très haute intensité, la gorge serrée, il attendait que le jack pot lui tombe dessus comme un signe du destin!

Pour lui, ce rêve était devenu réalité. Mais dans le cas contraire, j'aurais très certainement fini dans la Seine ou bien SDF et Clotilde je ne l'aurais jamais rencontré, ce qui aurait été pour moi le véritable drame de ma vie! pensait-il d'une manière lucide. Après ces quelques frayeurs et co-nsulté sa banque par Internet où son compre était bien garni, une sorte de rictus anima son visa-ge comme le symbole de sa réussite, non lié au mérite, mais seulement au hasard! Cette chose, qui normalement aurait effrayé plus d'un travailleur honnête, au contraire le ranimait d'une joie indéfinissable au point de se croire l'égal d'un demi-dieu, bref, en nageant au dessus de la mêlée où les hommes vaincus se battaient pour un trognon de pain! Jouant désormais sur du velour, il avait appris à jouer intelligemment, c'est à dire avec les hommes et les femmes, bref, avec le réel. Avec le sentiment très fort que la chance l'avait propulsé dans un monde qui n'était pas le sien, mais qui acceptait sa presence grâce au "bling-bling" que faisait l'argent. Mon dieu, comme il était facile de feindre quand vous arriviez à montrer sur votre visage ce côté lustré de la réu-ssite où les autres ne vous voyaient plus comme un concurrent, mais comme un animal de la même espèce que la leur. Où l'on formait une sorte de clan pour la soirée où le mépris des aut-res, pour ceux qui n'avaient pas réussi, était une manière de se croire exceptionnel, comme dans ces publicités de bonbons Suisse où seuls les enfants excptionnels y avaient droit, bref, aux We-rtier's original. Cet enfant Suisse, que l'on portait en chacun de nous, était un monstre conçu par nos parents boursouflés par l'ambition. Eux, au moins, les parents savaient très bien que leur progéniture n'était pas géniale, mais feraient tout pour rabaisser celle des autres pour que l'on n'aperçoive que la leur! Il faut dire que cette stratégie était en place chez les familles fortunées depuis des générations et qu'elle ne changerait pas d'ci tôt vu qu'elles possédaient 90% de la ri-chesse mondiale. Bref, pourquoi vouloir changer une équipe qui gagne, mon cher lecteur?

21

Cet enfant Suisse avec les années prenait du poids et ne trouvait plus alors sur son passage que des loques humaines qu'il suffisait de frôler pour les voir tomber à ses genoux! C'est fou, com- me la machine était efficace! pensaient-ils avec un grand réalisme. Bref, c'était la chronique d' une victoire annoncée et non la chronique d'une mort annoncée superbement écrite par Gabriel Garcia Marquez. Nous étions véritablement dans un système où le jeu était pipé d'avance et cela l'inquiètait d'autant plus que son fils Aurélien ne semblait pas avoir de chance au jeu! remarqu-ait-il comme épouvanté par un destin qui se dessinait en tragédie. Soyons franc, je ne pourrai l' aider que pendant un certain temps et après ce sera sûrement la rupture entre nous et c'est ce que j'appréhende le plus, préssentait-il sans se faire d'illusions à moins qu'il ne change? Mais il n'y croyait guère. Visiblement, les temps avaient bien changé où autrefois on voulait le bonheur des gens, mais aujourd'hui on était prêt à les mettre sur la paille pour s'enrichir personnellement. Moi, la chance que j'ai eu, c'était d'appartenir à une génération d'hommes encore sain d'esprit qui savait s'arrêter quand la vie d'un homme se trouvait en jeu. Mais aujourd'hui tout le monde  s'en fou royalement et l'egoïsme monstrueux à gagner tous les esprits et gâte le moment présent telle une verrue sur le nez. Alfred en avait les larmes aux yeux de ne pouvoir trouver une solution pour son fils Aurelien. Il faudrait un jour que je lui dise d'arrêter de jouer. Mais suis-je credible dans ce rôle : lui qui sait tout de ma vie et de mes frasques? Non, non, je demanderai plutôt à Clotilde de lui en parler, car elle seule connaît le prix de l'argent. Ne sommes-nous pas a nous deux une entreprise? Mais pourra-t-il le comprendre, lui qui vivait pour l'instant dans l'insouc-iance de la jeunesse?

22

Pour Alfred, nul doute que sa femme lui avait sauvé la vie. Et sans cette rencontre, liée au pur hasard ou à la bonne fortune( qu'il considérait comme la plus importante de sa vie), il aurait sû-rement tout reperdu au jeu, ce qui l'aurait entraîné vers sa perte. L'amour lui avait donc sauvé la vie sans aucun doute et l'assumait entièrement tel un homme qui ne savait pas comment remerci-er son sauveur. Clotilde savait qu'elle le tenait entre ses griffes, mais n'en abusait pas trop, parce qu'elle tenait beaucoup a lui. Alfred, sauvé des eaux, au point de la laisser diriger le menage? Oui, on pouvait le dire sans le nier et malgré cette grande hypocrisie qui avait accompagné sa vie de jeune homme, mais qui avait éclaté à son contact telle une bulle de savon. L'instinct de sa femme ne s'était pas trompé. Et pour ne pas le perdre, elle lui avait proposé un étrange marché où ses dons( sa folle imagination) serait mis en collaboration avec son esprit d'entreprise. Doué du sens de la repartie et de la mise en scène, il écrirait des romans d'amour destinés exclusivem-ent aux femmes où elle serait le chef d'orchestre et Alfred l'instrumentiste d'où il tirait ses folles histoires que seules les femmes étaient prêtes à croire. Leur premier roman dont le titre était " Cécilia, la reine impératrice" se déroulait sur une île des Bahamas et eut beaucoup de succés. L'histoire racontait les aventures d'une jeune femme qui, la tête pleine d'ambitions, s'éprenait des hommes de pouvoirs locaux afin de leur soutirer de l'argent par ses charmes. Mi-espionne, mi-courtisane, ses amants, la sentant indispensable à créer des intrigues sur l'ile, lui cédèrent un hô-tel dans un des plus beau site de l'ile. D'une architecture coloniale et d'un blanc éclatant, celui-ci était devenu le QG où opérait Cécilia, une jeune femme extrêmement belle qui avait soif de richesses et de pouvoir. A la fin, elle finira par s'emparer de l'ile et se faire couronner Impéra-trice des Bahamas! Cette histoire est tirée d'une histoire vraie qui eut lieu au 14 ème siècle qu' Alfred eut la chance de découvrir lors d'un voyage aux Bahamas en visitant l'unique biblio-thèque de l'ile. Cette histoire fabuleuse, retranscrite dans un vieux livre gagné par la moisissure, racontait la vie d'une jeune aventurière Irlandaise dont la blancheur de la peau parut à l'époque, comme un miracle auprès de cette population à la peau foncée où elle fut aussitôt considérée comme une divinité!

23

Mais par malchance pour lui, au cours de ce voyage aux Bahamas, il rencontra plusieurs de ses amis de la Jet set qui, il faut le dire, l'importunèrent plus qu'autre chose. Car ils voulaient tout le temps faire la fête ou bien l'inviter sur leurs yatchs faire des parties de pêche aux gros, alors que lui esperait trouver le calme pour pouvoir s'imprégner de l'histoire de cette jeune Irlandaise dont le destin fut exceptionnel. Mais ne voulant point leur en parler ou leur faire sentir qu'il était en train de l'écrire, il ne refusa aucune de leur invitation. Ce qui fut considéré par Clotilde comme une bonne chose afin de se faire connaitre du grand monde et, en particulier, du monde des aff-aires et des medias vu qu'elle était le grand stratège dans leur entreprise et lui, le nègre, l'esclave courbé au travail. Parfois, il avait l'impression de se prostituer quand sa femme lui demandait de ne rien refuser à ces gens de la "haute" et de leur lire, au cours d'une de ces soirées mondaines, le début de son nouveau roman, ce qui le faisait bouillir d'avance et rougir d'avoir ecrit des choses si puerilles destinées à la gente feminine. Un coup comme celui-là, il se souvenait qu'elle lui en avait fait un au Palm Beach Hôtel situé en Floride. Et bien qu'il fut très applaudit par ces dames de la haute, il fut déconcerté par ce qu'il avait écrit. Mais sa femme-homme-d'affaire, ne voulant pas qu'il le montre, pendant une bonne partie de la soirée, lui avait envoyé des coups de pieds dans les chevilles afin de lui faire retrouver le sourire. Mais surtout le rôle qu'elle lui avait taillé sur mesure, c'est a dire un jeune romancier aimant l'argent et le succès, ce qui charmait d'avance ces gens de la haute bourgeoisie qui méprisaient les pauvres bien qu'ils eussent eux aussi du gé-nie. Oui, je sais, un paradoxe. Mais souvent les apparences étaient trompeuses et donnaient du talent a ceux qui n'en avait pas et la cuillère de bois à ceux qui en avait. Ainsi est la vie, injuste. Et Alfred savait très bien qu'en laissant ces genies dans la misère que l'ordre établi ne serait ja-mais bousculé et que les gens riches y gagneraient largemenent en leur refusant la parole pour qu'ils puissent garder leurs privilèges de riches. Quelques fois, ne pouvant supporter un instant de plus les tyrannies et goûts de luxe de sa femme, il partait seul dans les bas quartiers des Baha-mas afin de sentir dans sa propre chair, le desespoir de ces gens qui mouraient de faim et d'indi-gnations devant ces grands hôtels de luxe où le touriste américain s'arrêtait pour ses vacances. Et bizarrement, ce touriste semblait devenir aveugle quand il se trouvait devant cette misère au poi-nt d'avoir peur qu'elle lui gâche son séjour. Tel était alors le grand égoïsme de notre époque où l'homme se refusait de penser et de protester contre tout cela, afin de faire partie lui aussi de cette grande illusion où tout le monde voulait jouer au riche!

24

Pas loin d'un quai où se tenait une sardinerie, il donna un billet de dix dollars à un vieil homme qui n'avait que les os sur la peau. Alfred parla un petit peu avec lui en anglais et fut surpris que le vieux lui dise qu'il attendait que le patron de la sardinerie lui donne des déchets pour se nour- rir. Et le vieux rouspetait en disant que le patron était un salaud et qu'il préférait mieux donner ces restes aux chiens qu'à un vieux qui n'avait plus la force de travailler! Alfred était choqué. Le billet de dix dollars l'avait rendu bavard, mais surtout apte à dire la vérité. En fait, l'argent lui avait redonné une certaine dignité et il en profitait comme tout le monde pour se venger, com-me les riches qui méprisaient les pauvres en leur confisquant les moyens d'agir en les emprison-nant au travail. Dans un sens, c'était une guerre sans fin puisque tout le monde se trouvait dans le besoin, ce satané besoin qui nous faisait parfois devenir des bêtes enragées pour nos sembla-bles, n'est-ce pas? Le vieux, content d'avoir gagné sa journée, l'invita à boire un rhum dans une paillote à proximité qu'Alfred accepta et l'aida même à se relever tellement l'homme semblait fatigué par la vie et surtout par l'humanité. A la paillote, le vieux choisit un rhum des plus che-rs, car c'était primordial pour lui de se payer parfois cette petite fantaisie. Le barman, qui le co-nnaissait, ne se pria pas de se moquer de lui en lui disant qu'il avait du gagner au loto pour ce payer ce rhum grand cru. Mais ce dernier l'envoya balader par des expressions mi-anglaises, mi-langues locales qui firent sourire Alfred.

De cette rencontre, il sortit complètement indigné par l'humanité, mais paradoxalement agrandit par la vie de cet homme qui voulait vivre malgré tous ses échecs parmi les hommes. Cet hom- me, malgré une apparence effrayante, lui avait donné comme une leçon de vie qu'il ne pouvait renier en tant qu'homme ni en tant que romancier sachant que toutes les experiences des homm-es devaient servir aux autres hommes à mieux s'en sortir dans la vie et c'est ce qu'a toujours fait l'humanité depuis les temps ancestraux. Pour Alfred, combattre la misère était une lutte sans fin, car souvent l'homme pour s'enrichir appauvrissait les autres. C'est dire une veritable quadrature du cercle que même les plus grands savants ou genies avaient renoncé à résoudre par le fait que tout le monde acceptait cette cruelle vérité. Par contre, cet homme ne lui avait pas donné une le-çon de courage, comme on aurait pu le penser, mais plutôt d'obstination à vivre malgré une vie ratée. Tout ceci étant pour lui tout à fait respectable vu que le destin d'un homme ou d'une femme était rarement lié à ses talents, mais plutôt au hasard. Et en côtoyant ces gens de la "hau-te", il comprit que la plupart avait acquise leur fortune par héritage et non par leur travail, com-me ils voulaient le faire croire à tout le monde! Ce qui en faisait de sombres hypocrites qui se permettaient ensuite de critiquer les pauvres de leur infortune ou de leur manque de courage ou d'intelligence. Plusieurs fois, il assista à ce genre de moqueries où le sarcasme des riches envers les pauvres ressemblait à du mépris, oui, à du plus haut mépris! Par leur façon simpliste de voir les choses en noir et blanc ou en binaire, comme étant leur plus grand défaut. En ne voulant pas voir chez les autres leurs talents ou leur genie parce qu'ils étaient fauchés, ce qui arrangeait bien leur amour propre, Ah!Ah!Ah! Mais connaissant bien sa nature jouisseuse et joueuse, il ne pou-vait pas se permettre de tomber dans ce misérabilisme écoeurant, comme on le ressentait dans les romans d'Emile Zola ou de Victor Hugo, mais très supportable chez Dickens. Non par cyni-sme, mais parce que son esprit de joueur le forçait d'une certaine façon à forcer le destin et c'est ce qui lui avait permis de réussir!

25

Ce clochard rencontré dans une rue des Bahamas, il est vrai, l'avait emu jusqu'aux larmes avec le besoin d'écrire un jour son histoire, celle de ce vieil homme déchu par la vie! Peut-être l'écrirait-il à la façon d'un vieil homme et la mer d'Ernest Hemingway? se demandait-il en ayant le debut du livre. Mais pour l'instant, il n'en parlerait pas a sa femme sachant qu'elle trouverait le sujet trop apitoyant pour le faire lire à ses lectrices dévoreuses de sentiments dont les nouveaux goûts s'orientaient actuellement vers le vampirisme, la soif de sang et de pouvoirs! Ce qui l'éffrayait d' avance en tant que romancier, puisque devant s'adapter sans cesse aux goûts de ces dames où la tragédie ne semblait avoir ni de fin ni de point final. La femme serait-elle un monstre qui s'ign-orait? La femme serait-elle actuellement en manque de sexe? se demandait-il orageusement. Et ce manque de sexe en ferait elle un monstre? L'hystèrie de la femme ne la transformerait-elle pas en monstre avide de pouvoirs au point de vouloir le voler aux hommes? Toutes ces questions étranges qu'Alfred se posait en ce moment semblaient lui turlipiner l'esprit au point de vouloir lui faire changer sa littérature. Et à chaque fois que cela arrivait, il voyait sa femme apparaitre en spectre au dessus de sa tête tel un serpent venimeux et lui lançer des foudres d'avoir osé penser cela. Sans conteste, c'était pour lui son combat intérieur où il devait lutter contre ces forces fém-inines qui voulaient l'anéantir, non en tant que forces viriles, mais en tant que libre penseur où la femme voulait le soumettre à ses exigences tel un esclave. Bref, bande et tais-toi! tel était le rêve caché de ces dames pour que l'homme satisfasse tous ses désirs, mais qu'elles ne voulaient surt-out pas exprimer en plein jour de peur qu'on les prenne pour des monstres! pensait lucidement Alfred, comme un retour vers l'humanité primaire.  
Retour au château de Watergrown

Depuis le depart de son mari, il n'avait cessé de pleuvoir sur la propriété où Josepha crut sentir son cœur se liquéfier en regardant par la fenêtre l'eau du ciel inonder ses terres et gonfler les to-rrents avoisinants avec furie! Et cela la désolait plus que tout de savoir qu'elle n'aurait aucune visite durant plusieurs jours, bref, le temps que la pluie cesse et que les chemins redeviennent à nouveau frequentables par les hommes, les chevaux et les carrosses.

Visiblement, ce depart précipité causé par cette lettre( jugée hautement confidentielle par son mari) l'avait comme révolté au point de lui vouloir désormais du mal. Avec l'affreuse sensation d'être considérée par ce dernier comme une potiche et non comme une épouse pouvant partici-per aux decisions importantes de la vie de son couple et à la carrière de son mari. Amèrement, elle constatait que son mariage avec cet homme autoritaire, un amiral de la Royal Navy, était un fiasco et s'en mordait maintenant les doigts sachant que ces hommes étaient tous des monstres froids intéressés uniquement par la guerre, le combat et la mort! Subitement, elle comprit qu' elle vivait avec un mort en sursis! d'où cette étrange impression de vivre avec un fantôme, com-me cette image du carrosse de son mari s'enfonçant dans la brume et disparaitre emporté par les éléments de l'horizon. Je vis avec un fantôme! pensa-t-elle soudainement en regardant par la fe-nêtre la brume descendre du ciel et envelopper d'un voile funèbre le château. Mon dieu, quelle horreur de vivre avec cet homme sans coeur sauf quand je lui résiste! s'écria-t-elle avec les yeux plein de flammes. Et pour ne rien vous cacher, j'ai remarqué à maintes reprises, quand je lui rés-istais, qu'il me voyait aussitôt comme une place forte à emporter et employait alors toute sa fougue pour me vaincre. Ainsi sont les militaires aimant jouer comme de grands enfants avec des places fortes, des soldats de plomb et des canons. Si un jour, il me voyait céder à la première de ses attaques, j'en suis sûr qu'il m'abandonnerait sur la champ de bataille telle une ville vain-cue d'avance! Ma vie ressemble étrangement à celle d'une femme de marin et qu'il soit simple marin pêcheur ou amiral de sa royale majesté, cela ne change rien à l'affaire. Car elle doit atte-ndre éternellement son retour sans savoir s'il reviendra vivant d'une simple partie pèche à la morue ou d'une bataille navale. Voilà donc le martyr pour cette femme qui doit savoir s'occuper durant l'absence de son mari. Mais à vrai dire, je ne tiens pas autant à lui qu'on pourrait le pen-ser, car pour l'instant, il ne m'a pas donné d'enfants!

26

Peut-être est-il sterile ou moi? En fait, pour l'instant nous en savons rien, car nous sommes encore bien jeunes tous les deux, j'ai 20 ans de moins que lui qui en a 42. Bref, seule dans l'in-certitude et sans le moindre enfant qui aurait pu égayer mes journées, il me semble être mal-heureuse avec lui, avec cet homme qui ne pense qu'à défendre son pays et qu'à sa reine Victoria qui m'a t-on dit entretiendrait avec lui une relation épistolaire. Me tromperait-il? Serait-ce là son secret? Et si cette lettre était un rendez-vous galant avec cette femme qui est déjà mariée? Mon mari serait il un dépravé ou peut-être aurait-il des ambitions démesurées? Josepha épuisée de penser à tout cela s'effondra dans son fauteuil avant de perdre connaissance.

Aussitôt l'obscurité tomba autour d'elle où seul le feu dans la cheminée semblait veiller au bon-heur de sa maîtresse, comme voulant donner vie à ce château lugubre qui était une vieille poss-ession de l'amiral Brestjones depuis plusieurs générations de lords.

-Madame, Madame, vous vous sentez bien? demanda subitement Naïma, son esclave noir qui, depuis le depart de l'amiral, lui apportait son repas dans sa chambre. Mais la voyant dans un tel état d'abattement, elle se demandait si sa maîtresse n'était pas souffrante?

-Non, non, ne vous inquiétez pas, Naïma, ce n'est qu'une fatigue passagére! dit-elle en la regard- ant comme un être venant d'une autre planète. Naïma était une esclave ramenée des Antilles par son mari qui l'avait choisi comme tout blanc par des critères raciaux : dentition, force physique et le tout muni d'un bon caractère, bref, soumis, comme étaient tous les noirs malgré eux et les destinaient tout particulièrement à l'esclavage, ce qui en faisait le drame, voir leur malédiction! Car dans l'Histoire, maintes fois les blancs avaient essayé de mettre d'autres blancs en esclavage, mais le résultat fut des plus déplorables. Car le blanc se fatiguait extrêmement vite, mais son plus grand défaut était son caractère d'une nature méchante, voire vindicative. Étrangement, plus on était faible physiquement plus on avait l'esprit méchant, ce qui terrorisait d'avance ces pro-priètaires d'esclaves dont plusieurs d'entre eux avaient été assassinés après avoir humilié leur esclave blanc!

27

Les noirs par contre, constataient les blancs, n'avaient pas ce défaut et les corriger ne les rend- aient pas plus méchants qu'ils étaient( au point de vouloir assassiner leur maitre!), mais les ren-daient plus dociles et augmentait ainsi leur valeur à la revente. Comme le spéculait l'esprit rac-iste de ces blancs qui méprisait les peuples qui avaient oublié le combat pour la liberté! Par con-tre, les indiens d'Amérique, qui s'étaient battus jusqu'au bout contre les blancs, avaient été vain-cus, non par la cavalerie, comme on le voyait d'une manière caricaturale dans les westerns amé-ricains, mais par des millions d'emigrés européens qui rêvaient de fonder une nation pour assu-rer leur avenir. Bref, une bataille contre le monde entier que les indiens d'Amérique ne pouvai-ent gagner en aucune façon, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Mais aussi par le fait qu'ils étaient des hommes libres et qu'ils se suicidaient aussitôt qu'on les mettait en prison, d'après les chro-niqueurs de l'époque. Alors les blancs refusèrent de les mettre en esclavage, mais les parquèrent dans des réserves, prémices des camps de concentration tel qu'on les verra plus tard. Mais du peuple noir que pouvait-on en penser? Mais pourquoi ne s'était-il jamais rassemblé afin de bat-tre les blancs et de laisser dans l'Histoire une date mémorable sauvant leur honneur? Malheure-usement, on ne retrouvait aucune trace de ces grandes batailles, mais seulement des révoltes qui ont été vite réprimées dans le sang par les blancs, qui ne voulaient pas perdre une source de ma-in d'oeuvre pratiquement gratuite pour les classes aisées ainsi que pour les grands propriétaires terriens. Les zoulous, en Afrique du sud, avaient essayé de sauver leur honneur, mais s'y étaient pris tellement mal qu'ils avaient été tous humiliées par des troupes militaires moins nombreu-ses, mais mieux organisées. Bref, ils avaient été vaincus par le pouvoir blanc dont la nouvelle divinité s' appelait l'argent et non plus cet honneur guerrier qui semblait si désuet dans ce siècle des lumières et du progrès technique.

28

Josepha, en levant les yeux sur Naïma, semblait déjà tout connaître sur son histoire et sur sa trag-édie. Car devant elle, se tenait une athlète, presque une demi-déesse que les dieux olympiens et l' Eglise chrétienne avaient déchu en voyant dans cette peau noire comme la couleur du diable. Par cet esprit manichéen qui ressortait à chaque fois dans ces périodes troubles où il lui fallait just-ifier ses actions sur les âmes. Car étrangement, l'Eglise s'est toujours crue propriétaire de nos âmes, comme si elles lui appartenaient depuis la création du monde! S'agissait-il ici d'un Etat dans l'Etat qui essayait de voler le pouvoir à ceux qui en avait la légitimité? Question rude, oui je sais, sachant qu'on pourrait alors accuser le Vatican de fomenter un futur coup d'Etat afin d' imposer sa dictature, celle de l'Eglise. Josepha, qui était capable de réflexion sur ses questions importantes de société( alors que son mari l'en croyait incapable pour des raisons machistes) reg-ardait Naïma maintenant comme une égale en lui demandant de garder son costume local, son madras, pour servir ainsi que sa coiffe aux couleurs chatoyante afin de donner un peu de couleur à cette campagne anglaise si terne et si morne durant les mois d'hiver. Son mari au debut n'était pas de son avis, mais il avait dû accepter ses exigences ou requêtes pour le militaire qu'il était. Non, pour ce que l'on aurait pu croire, mais tout simplement pour le charme de l'exotisme! lui avait-il dit avec ironie. De plus, elle avait exigé de lui, pour le choix de sa servante, qu'il ne brise aucune famille, comme son voeux le plus cher. Une fois de plus, son mari très embarrassé par de telles exigences, avait dû prendre un couple d'esclaves où Naïma avait un mari et un fils âgé de 10 ans nommé Légitimus. Mais lord Bretjones, qui ne souhaita pas garder le mari dans sa prop-riété, l'avait proposé comme valet de pied à un de ses amis, lord Padington qui habitait à Lon-dres. Une fois l'an, Naïma avait le droit de quitter la propriété pour allez voir son mari avec ce grand plaisir de se promener en ville où s'agitait autour d' elle tant de monde. Car à Watergrown, on avait l'impression d'être enterré vivant ou, pour être plus juste, d'être englouti sous des tonnes d'eaux qui n'en finissaient pas de tomber du ciel. Ici, la vie au Château, était morne et axée uni-quement sur la domesticité, bref, sur cette vision moderne de l'esclavage qui semblait comme alourdir d'un poids insurmontable, les épaules des dieux déchus!

29

-Et votre fils légitimus, comment va-t-il? demanda Josepha.

-Il va très bien..et je voudrais remercier beaucoup Madame pour le soin qu'elle porte pour son éducation et pour le précepteur qu'elle lui a choisi. Il m'a dit à plusieurs reprises qu'il ne savait pas comment vous remercier.
-Ah oui?
-Oh oui, Madame, car il aime tant apprendre et voudrait plus tard ressembler à ces gentlemens que l'amiral reçoit parfois au château.
-Ah oui?
-Oui, c'est ce qu'il m'a dit.

-Naïma, je pense que votre fils est sûrement un enfant précoce et ceci ne fait aucun doute pour moi. Mais je vous en supplie de le ramener à la réalité, car mon mari n'invite ici au chateau que des aristocrates dont votre fils Légitimus, malheureusement, ne pourra jamais entrer dans le cer-cle!

Naïma, entendant cela, resta tout à coup interdite.

-Pour la simple raison que la société anglaise n'est pas encore assez évoluée pour accepter en son sein, un fils d'esclave! Excusez-moi de vous le dire en toute franchise, mais c'est la vérité que je vous dois. Car je voudrais en aucune façon que votre fils se fasse des illusions sur son avenir.

Choquée une fois de plus par ce qu'elle venait d'entendre, elle mit sa main sur sa bouche, comme pour étouffer un cri venant du plus profond de ses entrailles.

Mais soyez sûre de mes bonnes intentions pour lui. Car lui donner une bonne instruction ne pou-rra que l'aider à mieux s'en sortir dans la vie. Ainsi, il pourra négocier sa place auprès d'un aris-tocrate comme majordome ou de secrétaire. Mais d'être un homme libre, enlevez-lui ça de la tête, mon amie!

Naïma, remise une fois de plus devant la réalité des choses, remercia Madame pour la vérité de ses propos.

30

-Madame, je ne sais pas comment vous remercier pour..

-Mais non, ne dites rien, je vous devais la vérité pour votre fils. Et si mon mari avait des ambion-ns cachées pour lui, pour l'instant il ne m'en a pas parlé. Partez avec cette idée que le destin n'est peut-être pas entièrement écrit pour lui.

-Oh merci, Madame, merci Madame! Répondit-elle rassurée en posant son plateau sur la petite table, puis repartit finir son service.

-Je souhaite à Madame un bon appétit! dit-elle avant de refermer la porte

-Merci Naïma, expédia-t-elle en se retournant sur son plateau repas tout en se disant que cette petite discution l'avait comme ouvert l'appétit.

-Hum, ça à l'air bon! Mais que m'a t-elle préparé? s'interrogeait-elle avec gourmandise.

Au milieu du plateau se trouvait une soupière en porcelaine de Chine d'où s'échappaient de bonn-es odeurs de légumes du jardin que Naïma avait assaisonnés avec des épices venant des Antilles. C'est elle, la première, qui lui avait dit d'acheter telle ou telle épice afin de donner plus de goût aux plats. Car en Angleterre les plats étaient souvent indigestes pour ceux qui avait un palais dé-licat ou habitués aux plats de caractère. C'était semble-t-il le climat du pays, souvent pluvieux et brumeux, qui donnait aux Anglais des goûts excentriques en matière de cuisine ou l'on mélange-ait souvent le sucré et le salé donnant pour ainsi dire le vertige aux Français habitués à la bonne gastronomie. Mélanger du chocolat avec des champignons n'aurait pas dérangé plus que cela le goût d'un Anglais, alors qu'il aurait fait vomir plus d'un français, Ah!Ah!Ah! Cela sentait la cor-riande ainsi que la cannelle sur le plateau repas. Sur une petite soucoupe, il y avait une tartelette à la cannelle et, dans une grande assiette, un blanc de poulet au citron déposé sur son manteau de riz piqué de poivre des Antilles ressemblant à des perles multicolores.

31

Josepha, étonnée de voir tant de couleurs, essaya d'en attraper quelques unes avec sa fourchette pour les goûter. Mais n'y arrivant pas, elle préféra commencer par la soupe et s'en servit une bon-ne louche. Puis se calant dans sa chaise, elle commença à engloutir son repas avec une vérocité qui lui était jusque là inconnue, mais qui l'enchantait à vrai dire en étant assise seule devant le feu de la cheminée et cette satanée pendule qui semblait manger le temps des hommes, comme un ogre. Etrangement, elle resta imperturbable quand celle-ci sonna 11 heures du soir. Son repas ter-miné, son esprit semblait accaparé par des pensées malsaines à l'égard de son mari et de ses liais- ons épistolaires avec la reine Victoria à laquelle il semblait prêt à donner sa vie avant la sienne! Demain, j'irai voir dans son bureau de quoi il s'agit exactement! projetait-elle avec l'espoir qu'il ait laissé son secrétaire ouvert, sinon elle fouillerait partout pour savoir où il avait caché ses sa-tanées clefs. Contente d'avoir un passionnant projet pour les jours à venir, elle partit se coucher le coeur plein de promesses, bonnes ou mauvaises, en fait, elle s'en moquait un peu à vrai dire. Avec ce fort sentiment de redevenir une femme passionnée qui avait besoin pour son équilibre de mettre un visage aussi bien sur celui de l'amour que sur celui de la haine. Un ennemi pour une femme devait avoir absolument un visage et qu'il soit celui d'un diable déguisé en ange ou l'inv-erse, elle mettrait toute son âme et toute son intelligence pour le découvrir afin d'arrêter ses agissements dont le but était de faire du mal aux autres. Et si la reine Victoria était déjà mariée, peut-être voulait-elle jouer avec mon époux, comme on s'amuse avec un jouet? Lui, il ne le sait pas, mais moi, en tant que femme, je pouvais le ressentir par la distance qu'il prenait avec moi, lorsque je voulais exprimer mes idées ou mes opinions sur tel ou tel événement politique. Mais lui ce monstre, à chaque fois, me souriait ironiquement et semblait complètement dénigrer mon avis pour m'occuper des problèmes domestiques et non de la chose politique!

32

Mon dieu, comme si certains avaient le monopole de parler politique et pas les autres! Décidém-ent, cette vieille Angleterre commençait vraiment à me sortir par le nez! s'idignait Josepha avant de moucher la bougie sur sa table de nuit.
-Ohé, ohé, Alfred, tu dors?
-Heu, heu, oui, qu'est-ce qu'il y a?
C'est Clotilde qui rentrait des courses et, voyant son mari assoupi dans le sofa, s'interrogeait sur son état.
-Je pense que tu as dû trop travailler sur ton roman, mon chéri.
-Mais non, je t'assure, j'ai seulement eu l'envie après ton depart de manger un morceau dans la cuisine et c'est je crois cette chose qui m'a donné envie de dormir, comme une sorte de soporifi-que.
-Mais qu'est ce que ta as bien pu manger pour être dans cet état, mon amour?
-Du fois gras qu'il y avait dans le frigo et du pain de mie industriel que j'ai trouvé dans le placard!
-Mais tu es fou! Tu aurais pu mourir intoxiqué, mon chéri! Mais tous ces produits sont périmés depuis longtemps!
-Ah oui? l'interrogeait-il avec un regard effrayé.
-Mais oui, bon dieu!
-Mais alors qu'est-ce qu'ils faisaient dans le frigo et dans le placard s'ils étaient avariés? lui dem-anda-t-il d'un ton réprobateur.
-Mais, je ne sais pas, tu aurais pu quant même regarder les dates d'expirations, mon chéri, non?
-En fait, pour le pain de mie, j'avais un petit doute. Mais pour le fois gras, ça m'a complètement passé au dessus de la tête et j'en ai mangé un bon morceau.
-Mon dieu, mon dieu, mon chéri, mais comme tu es négligent! Un peu plus, tu mourrais intoxiq-ué. Et c'est une chance que tu ne sois pas sorti avec ta voiture cet après-midi, car vu ton état, tu aurais pu attraper un accident, ce qui m'aurait rendue folle!

33

Alfred, écoutant le cœur de sa femme parler ainsi, se sentit comme un enfant protégé, dorloté et malgré que celle-ci ne soit pas si parfaite que cela( en laissant le foie gras avarié dans le frigo ainsi que le pain de mie dans le placard) pensa-t-il en la regardant d'un air étrange.
-Il est vrai aussi qu'il n'y avait plus de pain dans la corbeille! lança-t-il brutalement.
-Comment, comment, mais qu'est-ce que tu racontes là, Alfred?
-Oh, oh, mais ne te fâches pas, je disais ça comme ça! lui dit-il, comme voulant réparer son erre-ur.
Pendant un instant, Clotilde resta muette devant de telles accusations de son mari et de l'écume semblait sortir de sa bouche ainsi que des flammes de ces yeux. Alfred, prenant peur, se blottit aussitôt dans le sofa par crainte d'être assassiné par sa femme pour une telle broutille!
Puis retrouvant son calme, Clotilde lui dit : Mais pourquoi donc tu n'es pas sorti chercher du pa-in?
-Mais chéri!
-Je te prie de pas m'appeler ainsi! Alors qu'est ce tu me réponds?
Mais moi, j'en sais rien..lâcha-t-il d'un ton presque suppliant.
Je voudrais te confirmer une chose, mon cher époux, qu'il est indiqué nulle part dans notre contr-at de mariage que c'est à la femme d'aller chercher du  pain! 
-Mais bien sûr que je le sais. Mais je ne voulais pas dire ça!
-Mais tu cherches quoi au juste? lui lança-t-elle d'un ton de commandeur.
-Mais rien..
-Bon, ok, l'affaire est close! dit-elle d'un air victorieux.

34

Une fois de plus, elle s'était imposée devant son mari qui en vérité voulait plus la taquiner que lui faire de réelles violences. Mais Clotilde, en tant que femme, le ressentit au fond d'elle-même comme une offense à sa dignité, bref, comme un harcèlement subit depuis sa plus tendre enfance par tous ces hommes qui avaient jusque là accompagné sa vie. Aujourd'hui, c'était son mari, ma-is hier, c'était toute sa famille! En étant consciente que la famille n'était pas ce lieu idylliquement décrit par les sociologues dans les magazines people ou par les politiciens démagogues( où soi-disant les enfants s'épanouissaient dans le bonheur!), mais plutôt un champ de bataille où tout le monde réglait ses comptes. Ludovic, mon frère cadet, était le fils préféré de ma mère, parce qu'il avait le don de la faire rire, ce qui lui valait alors tous les éloges et surtout ses regards chargés d' amour qui nous rendaient tous extrèmement jaloux, ne nous le cachons pas. Plusieurs fois, elle avait dit à table en notre présence qu'elle le trouvait si intelligent qu'elle voyait en lui le futur président de la république ou peut-être premier ministre de France! Mon père, témoin des balour-dismes de maman, faisait alors mine de ne pas comprendre et détournait souvent la discution par une expression qui lui était propre et très efficace pour changer de sujet : Heu..quelqu'un peut-il me passer le poivre? Alors nous autres, les frustrès d'amour et de gloires, nous nous jetions sur le poivre pour servir notre sauveur. Gerard, mon autre frère, était quant à lui plus effacé, mais non moins efficace à semer le trouble dans nos discutions en disant à chaque fois à celui qui cro-yait avoir raison : Bon d'accord, tout cela est bien beau. Mais à ce que je sâche, tu n'es pas dieu le père pour nous faire croire à de telles sornnettes, n'est-ce pas? Bref, Gerard, jetait à chaque fois un pavé dans la marre pour montrer que lui aussi avait le droit d'exister au sein de cette famille, qui déjà s'entredéchirait. Il est vrai aussi que maman n'était pas étrangère à ce jeu de massacre. Mais pouvait-on reprocher à sa propre mère d'être ainsi? En fait, je crois qu'elle voulait que ses garçons deviennent des hommes et qu'ils apprennent très tôt à se battre que se soit autour d'une table ou plus tard dans la société des hommes. Moi, j'ai hérité de tous ses défauts pour ainsi dire.

A table, pour en placer une, il fallait vraiment se battre sinon on était mort ou du moins jugé ain- si par les autres. Bruno, mon autre frère, parlait pour ne rien dire, mais était heureux de faire du bruit. Ma soeur Beatrice l'imitait en faisant aboyer son chien qu'elle appelait " mon ecxellence " quand la discution tournait au vinaigre. Bref, nous étions une vraie famille de fous que maman voulait, semble-t-il, ignorer royalement! Mais moi, je savais que ça ne tournait pas bien rond au sein de notre famille et qu'à l'avenir elle se disloquerait pour ses raisons. Et je ne me suis pas tro-mpée, puisque à ma majorité je suis partie vivre ailleurs, alors que mon père souhaitait me voir rester à la maison. Mais ma mère lui a dit : Mais ne penses-tu pas qu'elle est assez grande pour savoir ce qu'elle a à faire, hum? Papa, une fois de plus, par manque de caractère abdiqua et me souhaita bonne chance. Moi, les larmes aux yeux, je compris ce jour là que ma maman ne m'avait jamais véritablement aimé ni Beatrice non plus, mais seulement ses trois fils qu'elle adorait pour des raisons qui m'échappent encore aujourd'hui. Depuis ce jour, j'ai rompu tout lien avec ma mè-re, ce qui me rend véritablement malheureuse sachant qu'elle est l'auteur de mes jours, n'est-ce pas? Le seul lien qu'il me reste avec ma famille, je le dois à mon père qui me donne des nouvell-es de mes frères et soeurs. En fait, je me tiens au courant de leur état de santé et de ce qu'ils font aujourd'hui. Dernièrement, j'ai appris que Gerard avait été arrêté par la police pour détention de stupéfiant! Je devine que maman doit être hors d'elle même de savoir qu'un de ses fils ait si mal tourné et que ses voisins ont sûrement été mis au courant! Mon père m'a appris aussi que Ludo-vic travaillait en ce moment à l'assemblée nationale auprès d'un ministre comme adjoint ou con-seiller, je ne sais plus exactement. Sans être cynique, je dirai que tout ceci était parfaitement pré-visible par nous tous, vu que ma mère l'avait depuis son plus jeune âge comme auréolé d'une future gloire. Quant à moi, si aujourd'hui je suis devenu une femme dure et autoritaire, c'est a cause d'elle ainsi que le choix pour ma vocation littéraire".

35

C'est ainsi que Clotilde voyait sa famille : une famille détruite par la jalousie, l'ambition et l'ava-risme et ferait tout pour ne pas terminer la "dernière de la classe" pour ainsi dire.
Après cette petite défaite concédée à sa femme, Alfred regagna vite son bureau pour y noter ce qu'il avait rêvé pendant sa lourde digestion où, il faut le dire, l'histoire de Josepha s'était poursui-vie toute seule d'une façon mystérieuse. A point de se demander si la littérature avait un lien étr-oit avec la digestion ou le ventre et non avec le cerveau, le centre de l'intellect? Avec le sentim-ent très fort que l'acte d'écrire fut plutôt une activité physique qu'une réelle activité intellectue-lle, comme tout le monde voulait le croire pour des raisons d'amour propre, bien évidemment. Criez au public que vous avez écrit votre chef-d'oeuvre avec votre ventre et non avec votre cer-veau, vous verrez soudainement une armée de fous( les intelletuels) se lever contre vous et vous mettre au piloris, Ah!Ah!Ah! En fait, vous n'aurez aucune chance de vous faire entendre par ces gens dont le métier était d'asservir le peuple à leurs idées délirantes. De plus, vous risquez de rab-aisser la littérature au niveau des entrailles et des intestins, ce qui serait pour les écrivains offic-iels une véritable déclaration de guerre à leur amour propre, Ah!Ah!Ah!. Non, non, soyons plus fin que cela, car la littérature ne doit pas être gangrenée par la vérité! N'est-ce pas cela que son épouse-femme-d'affaire lui avait fait comprendre un jour en lui jetant à la figure : Dont forget, Alfred, business is buisness! tout en lui mettant sous le nez le magazine "Éditeurs, chiffres à l' appui", le magazine des écrivains d'aujourd'hui qui voulaient vendre? Dont la société se trouvait à Paris en collectant toutes les informations auprès des maison d'editions pour connaître les nou-velles tendances de la littérature, ou disons pour être plus juste, de ce qui s'écrivait dans les livres et qui rencontrait du succès. Ce qui n'était plus véritablement de la littérature, mais une véritable entreprise commerciale. Moi personnellement, en tant que nègre de mon épouse-femme-d'affai-re, je n'étais pas contre. Mais parfois, ça m'agaçait de dire des mensonges à mon public et unique-ment pour qu'il achète mes livres, Ah!Ah!Ah!

36

Désormais, en France où ailleurs, il n'y avait plus de littérature dans les livres, mais de la statisti-que appliquée au commerce pour être franc avec vous. Bref, la grande tendance d'aujourd'hui où l'on voulait gagner à tous les coups, ce que je ne trouvais pas immoral du tout pour vous dire le fond de ma pensée. Car en tant qu'ancien flambeur de casino, j'ai comme tout le monde essayé de trouver la martingale ou la méthode pour gagner à tous les coups. Mais malheureusement, je n'y suis jamais arrivé à cause de mes moyens qui ne me permettaient pas d'appliquer une formule ma-thématique sur la table des jeux et de jouer toutes les combinaisons. Moi, je me suis seulement contenté d'avoir de la chance et ça m'a réussi. Et je ne peux que remercier le destin de m'avoir élu ainsi que d'avoir trouvé l'amour auprès de ma chère Clotilde. Mais pour les autres, les perdants, je suis désolé de le dire, mais ils sont les losers de l'histoire qui peut-être un jour se suicideront pour avoir été pris pour les dindons de la farce? La meilleure chose que je leur souhaite, c'est de prendre cette ultime descision d'arrêter de jouer pour pouvoir vivre enfin leur vie. Mais est-ce possible d'enlever à ces gens leurs rêves, leur opium? Un jour, j'écrirai un livre sur ce sujet qui sûrement emballera Clotilde : où argent, passions, drogues, magouilles d'Etat et suicides seront, j'en suis sûr, pour elle des arguments de taille pour faire un bestseller et pourquoi pas?

 

Retour au château de Watergrown

 

Ce matin, Josepha s'était levée de bonne humeur et avait demandé qu'on lui apporte son petit- déjeuner au lit, ce qui ressemblait à une petite révolution au château. Naima, réchauffée par les nouvelles moeurs de sa maîtresse, lui avait même apporté quelques petits pains truffés de pépites au chocolat en lui disant qu'ils étaient bon pour la santé( mais sans lui dire qu'ils étaient bons co-ntre la depression, ce qui aurait été une impolitesse de sa part sitôt le matin vu que sa maîtresse en avait tous les signes). Mais après ces quelques années passées à son service et dans cette vieil-le Angleterre Victorienne( où le fair play devait faire loi en toute circonstance pour ne pas dire la vérité ouvertement aux gens), elle s'était pliée à cette exigence et était repartie vers les cuisines entièrement satisfaite par ses nouvelles moeurs.

Après qu'elle ait fini son petit déjeuner, Josepha ne demanda pas qu'on desservi, mais laissa son plateau sur son lit au milieu des draps et des couvertures. Quand soudainement, elle fut prise d' une folle envie d'être libre en apercevant par la fenêtre, la pluie qui avait cessé ainsi qu'un ciel su-perbe se profiler pour la journée où ses terres gonflées par les eaux semblaient se dégorger pour le bonheur du maître métayer et des paysans. Baignant sa tête au soleil à travers la vitre, elle se sentit à nouveau revivre comme une plante qui avait été trop arrosée durant ces derniers jours. Séchant ses larmes, elle comprit à son grand étonnement qu'elle pouvait désormais être heureuse sans son mari! Mon dieu, mais suis-je devenu un monstre d'égoïsme pour ressentir tout cela? se demanda-t-elle en goûtant à ce bonheur inattendu. Ou, peut-être, n'étais-je que récompensée par tous mes sacrifices consentis pour lui? réitéra-t-elle d'une manière lucide. En fait, elle constatait que les hommes étaient souvent très ingrats, quand il sagissait de reconnaitre le sacrifice de leurs épouses à leurs vies de couples et à leurs carrières professionnelles. En ne voyant jamais les eff-orts surhumains qu'elles produisaient pour maintenir l'harmonie en son sein. Mais les hommes maladroits, d'un revers de manche, balayaient toute cette philosophie de bonne femme vu que ça les ennuyaient terriblement de les considérer comme des saintes et non comme de simples épou-ses qui leurs étaient dévouuées. Bref, une incomprèhenion totale entre nos deux protagonistes qui ne semblait pas dater d'hier, mais depuis l'aube de l'humanité : où l'homme ne faisait que pro-uver qu'il était un animal politique et la femme un animal domestique ou un être sociologique fait pour l'harmonie et la paix, c'est dire un énorme fossé entre nos deux inséparables. En fait, les femmes ne demandaient qu'une seule chose aux hommes d'être considérées comme des héros de la vie quotidienne. Mais ces derniers, du fait de leur nature, ne trouvaient rien d'héroïque à s'occ-uper des enfants, à faire la vaisselle ou à repriser les chaussettes, mais plutôt ceux qui étaient pr-êts à mourir sur un champ de bataille pour une grande idée ou pour leur pays. Comme pour la re-ine Victoria à laquelle son mari était prêt à donner sa vie! s'exclama-t-elle avec fureur, la tête ap-puyée contre le carreau de la vitre. Étrangement, elle ne pleurait pas, mais semblait heureuse d' avoir pu mettre un nom sur sa relation avec cet amiral de sa royale majesté. Qui pour elle était ni plus ni moins un amour trompé, mais dont le jeu l'intéressait à juste titre afin de savoir jusqu'où elle pourrait aller et lui jusqu'où il pourrait garder ses nerfs. A partir d'aujoud'hui, je ne boirai plus de thé en presence de ses amis, mais je demanderai à boire du café! jura-t-elle avec affront.

37

J'espère bien que tous ces petits nouveaux événements dans la vie quotidienne l'agaçeront et lui feront poser toutes sortes de questions sur moi. Peut-être reconquerais-je son amour ou seulem-ent son estime? Pour moi, c'est l'un ou c'est l'autre. Car je ne veux pas finir ma vie comme un fantôme, comme miss Crambowl qui apprit un jour que son mari avait une liaison avec un hom-me! Moi, mon problème, c'est la reine Victoria, c'est à dire une rude concurrente! pensa-t- elle d'un air enflammée en enfilant une robe de chambre pour aller faire un tour dans le jardin.

Dans le jardin, elle n'y resta que quelques minutes, le temps de respirer un peu l'air de la campag-gne et regarder l'etat de ses fleurs que les pluies avaient maltraitées durant ses derniers jours.

Puis discrètement, elle emprunta un petit escalier privé qui accédait directement au bureau de son mari que ce dernier avait fait construire pour des raisons de commodités, mais surtout pour ne pas croiser le regard des domestiques quand l'Amiral était en ébullition et avait un projet démoni-aque à proposer à la reine Victoria, bref, pour l'Empire Britannique! Après avoir repris son sou-ffle, elle s'y enferma à double tour, puis se dirigea vers le fond de la pièce où se trouvait le secré-taire en bois d'acajou de son mari. En chemin, elle vit bel et bien qu'elle se trouvait dans le bur-eau d'un amiral où tous ses objets fétiches trônaient sur des petits meubles ou bien s'affichaient sur les murs, comme ces marines explosant de couleurs violentes par le feu des canons et les cie-ux entredéchirés d'éclaircies soudaines! Mon dieu, dit-elle, comment ces hommes pouvaient-ils accepter ce sort si ingrat de mourir décapité ou amputé par les boulets de canons, puis emporté par le fond? Pour elle, tout cela ressemblait à un vrai mystère, mais comprenait tout à fait que ces hommes n'avaient pas bien le choix vu que la plupart était née sous la mauvaise étoile. Alors qu' eux, les aristocrates, avaient hérité d'immenses domaines grâce à leurs ancêtres, il est vrai, très prévoyants!

38

Et cette disposition toute particulière avait fait qu'aujourd'hui, ils détenaient tous les pouvoirs dans cette vieille Angleterre en choisissant les meilleurs places au gouvernement ou bien dans la flotte de sa royale majesté. Mais pour dire la vérité, Moriss, son mari, n'avait pas eu véritableme-nt le choix pour sa carrière malgré qu'il prétendît le contraire par amour propre, bien évidemm-ent. En devant suivre la tradition familiale, qui dèjà avait donné à l'Angleterre de prestigieux ami-raux, malgré un metier de marin des plus dangereux au monde aussi bien pour les simples mate-lots que pour les officiers, ce que Josepha reconnaissait. Mais les plus rusés des aristocrates déc-linaient souvent l'offre de la Royal Navy pour une place sans risque à la chambre des représentan-ts où le seul accident qu'on pût craindre fut de tomber de sa chaise! pouffa-t-elle de rire en y pen-sant. Et puis mon mari n'a pas autant de pouvoirs qu'il le prétend même s'il affirme qu'il est indis-pensable à la couronne britannique et à son glorieux destin. Mais d'où peut lui venir cette ignoble arrogance? La reine Victoria n'y serait-elle pas pour quelque chose? s'interrogeait-elle en s'arrêta-nt soudainement devant la maquette au 1/98 ème du navire de l'amiral Nelson(le Victory) qui ce dernier périt durant la bataille de Trafalgar contre les Français et les Espagnols. Cette maquette faite en bois précieux, métal doré et coton était un vrai chef-d'oeuvre pour Josepha dont les yeux pouvaient apercevoir dans les moindres détails, les voiles confectionnées en coton, les cordage en lin finement tressées et la coque en marqueterie imitant à merveille les planches de bois jointes entre elles par une colle invisible. Et tout en haut des mâts se dressait les drapeaux de la couronne britannique, celui du Royaume-Uni, de la croix de Saint-Georges et du White Ensign que le cons-tructeur de la maquette avait rigidifié pour qu'on y distinguât bien les couleurs.

39

Au dessus de cette maquette était plaquée sur le mur, une carte marine où toutes les possessions anglaises étaient épinglées par un petit drapeau appartenant à l'Empire Britannique. Quant aux autres possessions, qui appartenaient aux Français, aux Espagnols, aux Portugais et aux Holland- ais, sous leurs petits drapeaux respectifs étaient inscrits un grand point d'interrogation! Intriguée pendant quelques instants par cette chose bien mystérieuse, elle prit un de ces petits drapeaux et le regarda de plus près. Puis glissant son regard sur le côté, elle aperçut un petit tableau où se tro-uvait la légende de la carte où le point d'interrogation signifiait possessions temporaires. Bien sûr, bien sûr, je comprends mieux maintenant! dit-elle en reposant le petit drapeau de la France sur une petite île des Caraïbes. En remarquant aussi sur la carte, une rose des vents qui pour elle avait toujours été un grand mystère, alors qu'elle avait une réelle utilité pour les marins en leur donnant la direction des vents selon la mer et la saison où l'on se trouvait. Pour une raison inco-nnue, elle passa sa main dessus comme on passe sa main sur un talisman et fut soudainement pr-ise de visions où elle se vit transportée en un éclair de temps à l'époque des pharaons où elle était assise sur un trône au coté de son époux, le pharaon. Au dessus de leurs têtes, un symbole quasi identique était sculpté et représentait le soleil qui, par ses rayons ardents, répandait la vie dans tout l'univers! En s'y approchant d'un peu plus près, on pouvait observer que ces rayons se termi-naient par de petites mains identifées à de petites mains généreuses qui n'oubliaient jamais perso-nne quant à ses bienfaits en matière de lumière et de chaleur. Bref, le vrai symbole de la justice et non pas celui des hommes! pensa Josepha en revenant à la réalité.
Arrivée devant le secretaire de son mari( qui semblait inviolable du fait qu'il contenait des docu- ments top secrets dont il avait blindé l'accés par un volet en acier), Josepha, furieuse de le cons-tater, d'un geste brutal appuya sur le bouton à ressort qui malheureusement résista à la pression de ses doigts en le gardant clos, comme une cloche sous vide. Raaah! lança-t-elle desespérée de voir ses plans tomber à l'eau. Mais où a-t-il bien pu mettre ses clefs, le monstre? se demanda-t-elle en observant attentivement la forme de la serrure placée juste sous le bouton à ressort qui semblait correspondre à une clef tout à fait ordinaire, mais qui ne serait pas une mince affaire à dénicher dans tout ce fouillis, reconnaissait-elle très embarrassée. Mais se voulant pragmatique, elle se baissa sous le bureau pour voir s'il ne l'avait pas caché dans un recoin secret. Mais non, visiblement, il n'y avait rien de ce côté là! constata-t-elle amèrement, ce qui la rendit furieuse au point d'essayer de soulever l'un des pieds du bureau, mais sans y parvenir vu le poids du secretai-re en acajou. Le souffle coupé par toutes ces contrariétés et ses gesticulations inutiles, Josepha se retourna brusquement sur la pièce et lança un regard inquisiteur à tous les objets qui s'y trouvai-ent et se disait : Mais où a-t-il pu bien mettre cette maudite clef, notre cher grand amiral de sa ro-yale majesté? Instinctivement, elle partit vers le bateau de l'amiral Nelson et mit sa tête presque dans les cordages pour observer très scrupuleusement le moindre détail qui pouvait rappeler la forme d'une clef. Intriguée par une petite trappe qui se trouvait sur le pont donnant accès à la soute à canons, elle la souleva par un petit anneau doré, puis y engouffra sa main par curiosité. Tout à coup, elle sentit quelque chose de dure et de froid sous ses doigts. Mon dieu, je crois que je l'ai trouvée! lança-t-elle en sortant de la trappe, une petite clef en laiton qui semblait corres-pondre au secrétaire de son mari! 

40

Emportée par sa découverte, elle courut vite l'ouvrir pour enfin découvrir le secret que ces mau-dites lettres pouvaient bien renfermer( lettres qu'il recevait de la reine Victoria, mais que sa fem-me n'avait pas le droit de lire, car considérées comme secret d'Etat par son amiral de mari). En soulevant le volet en acier du secrétaire, qui lui parut peser une tonne, elle aperçut un ensemble de tiroirs disposés de part et d'autre du meuble et apparemment sans serrures. C'est une chance! dit-elle du bout des lèvres. Puis tirant le plus grand tiroir et le plus susceptible de contenir un courrier abondant, elle aperçut au fond de celui-ci un gros paquet de lettres ficelées entre elles, très certainement classées par date, pensa-t-elle en les saisissant avec soin afin de les remettre dans le bon ordre après les avoir lues. Josepha, studieuse, prit une chaise puis s'asseya devant le bureau et d'un geste fébrile défit le noeux qui les serrait. Après avoir vérifié qu'elles étaient bien par ordre de date, elles les étala sur le bureau et commença à ouvrir la dernière. Le sceau de la reine se trouvait sur le dos de l'enveloppe, ce qui la fit frémir un instant en dépliant la lettre où elle aperçut l'écriture de la reine qui était suprenement petite pour une si grande personne! pensa-t-elle avec ironie. De toute façon, à part ses titres, c'était une femme comme une autre avec ses peurs et ses angoisses et non un être supérieur tel que les gens se l'imaginaient En fait, ce piéde-stal énorme qu'était le pouvoir agrandissait tout aussi bien la personne qui s'y trouvait que les mots sortant de sa bouche. Elle pourrait dire le mot sardine qu'aussitôt les gens croiraient avoir entendu le mot baleine sortir de sa bouche, Ah!Ah!Ah! Ce qui, il est vrai, à beaucoup d'avantages quand on a que des petites choses à raconter, n'est-ce pas? Alors que moi, lorsque je parle à mon mari, celui-ci ne veut même pas m' écouter, comme si mes mots n'avaient aucun poids et ça me met alors hors de moi!  

41

Apparemment, notre grand Amiral de sa royale majesté semblait diviniser, quasi encenser ceux de la reine pour des raisons que je trouvais insupportables! pensa-t-elle avec colère en se remém-orant la scène du jardin où son mari s'était montré ignoble avec elle en s'écartant de la table pour aller décacheter la lettre soi-disant secret d'Etat! Oh chérie, je vous prie de m'excusez. Mais cette lettre est hautement confidentielle et je ne peux malheureusement pas vous en parler! lui avait-il dit avec mépris alors qu'elle brodait une taie d'oreiller. Oh, le monstre, j'étais partie si furieuse que je lui en ai voulu pendant plusieurs jours. Mais heureusement qu'il était parti à Londres que-lques temps après. Et comprenait maintenant le pourquoi de ce départ précipité.

Palais de Buckingham, le 15 Juillet 1853

Cher Amiral Bretjones, si je vous écris personnellement depuis mon palais de Buckingham, croy-ez-bien que ce n'est pas encore une de mes fantaisies, mais pour vous annoncer une très mauvai-se nouvelle concernant l'avenir de l'Europe. Voilà, l'Empire Ottoman vient de déclarer la guerre à la Russie suite à la fin de l'ultimatum envoyé au général Gortschakoff. Et comme vous le savez, très certainement, nous sommes obligés d'entrer dans ce conflit afin d'éviter le démantèlement de la région où les intérêts la couronne Britannique sont étroitement liés à ceux des Ottomans. Je vous demanderai donc de revenir ici à Londres au plus vite afin de rejoindre votre état major et nous trouver la meilleur solution, en termes de delai et de coût, pour nous faire gagner cette gu-erre. Important à signaler, n'essayez pas de joindre le vice amiral Makensy qui à l'heure actuelle est en mer et se dirige vers le Bosphore afin d'évaluer nos besoins en termes de vaisseaux et de troupes."

Mon cher amiral, voyez-vous, depuis que j'entretiens avec vous cette liaison épistolère qui est pour moi d'un grand soutien, je ne serai certainement pas là où je suis. C'est à dire assise sur mon trône à veiller sur l'avenir de l'Empire Brtiannique et sur ses 800 cents millions de sujets par le monde. Car sans vos conseils en matière de stratégie politique, je serai bien impuissante à gouv-erner avec raison dans ce monde peuplés d'insensés, n'est-ce pas? Et pour votre totale loyauté envers votre reine, mon cher amiral Bretjones, je voudrais vous en remecier du fond du coeur, car les mots me semblent bien dérisoires pour exprimer ce que je ressens en ce moment! A ce propos, peu de gens savent que mon destin est entre vos mains; ma famille l'ignore et persiste à croire qu'elle m'a tout donné, mais elle se trompe! C'est fou, comme je me surprends à vous fai-re des confidences, mon ami! Vous, qui m'avez appris à ne montrer aucune faiblesse à ses enne-mis, je dois très certainement vous décevoir en ce moment, non? Donc, afin d'éviter toutes cal-omnies ou rumeurs sur ma personne, je vous prie, mon ami, de ne jamais montrer à personne ces lettres, ni à votre femme qui, m'avez vous dit, était un monstre froid et calculateur!

42

Josepha, en lisant cela, n'en crut pas ses yeux et fit sortir de sa tête comme de la fumée! Oh le fri-pon, il me fait passer pour un monstre auprès de la reine, alors que c'est lui le monstre sans co-eur! fulminait-elle prête à déchirer cette lettre calomnieuse, mais se retint par simple stratégie.
Emportée par son tempérament de feu, elle n'arrivait pas à concevoir qu'elle put être elle aussi un monstre comme son mari. Et que le problème de leur couple se trouvait dans ce refus de le reco-nnaître en se rejetant mutuellement la faute, jamais de face, mais auprès de leurs amis respectifs. L'amiral, qui était un militaire, considérait toujours sa femme comme un bastion à conquérir et non comme une épouse douce et respectable et utilisait tantôt la force tantôt la ruse pour la met-tre à ses genoux. Mettre à genoux ses ennemis, c'était son expression favorite pour les nommer et Josepha en faisait partie, malheureusement.
Suite de la lettre
De plus, vous m'avez dit que votre femme avait des origines françaises, ce qui n'arrangeait pas vraiment ses relations avec nos chères laidies anglaises, n'est-ce pas ? Ah!Ah!Ah!
Josepha, apprenant brutalement que la reine Victoria connaissait desormais son secret de famille (dévoilè par son mari) sentit tout à coup la colère monter en elle et voulut pendant un instant la mort de celui-ci! Oh c'est sûr qu'ils avaient dû bien rire, ces deux là, sur mon défaut de famille qui me condamnait pour ainsi dire à n'avoir aucun avenir politique dans le royaume d'Angleter- re, pensa-t-elle amèrement. Mais comment se venger? s'interrogeait-elle devant cette situation hors norme où son mari était le conseiller personnel de la reine sans être considérée comme une traîtresse à son pays? Rendue nerveuse par cette grande question d'ordre politique, elle reposa la lettre sur la table et ferma les yeux pendant quelques instants afin de retrouver un peu de sérénité. Puis soudainement, tapant du poing sur la table, elle dit entre ses dents serrés : le mieux serait qu' il meurt à la guerre, le traître! Et puis, comme il veut absolument mourir pour sa reine, hé ben, l'occasion lui en ait donné en ce moment, n'est-ce pas? Et contrairement à ce que l'on aurait pu penser, elle ne disait pas cela par lâcheté. Car la plupart des hommes croyait qu'une femme bafo-uée n'aurait pas le courage de se battre en duel au pistolet ou à l'épée contre son mari pour sauver son honneur, ce qui était en partie vrai. Pour la simple raison que la plupart des femmes trouva-ient cette idée complètement farfelue avec une attirance toute naturelle pour l'empoisonnement! Et Josepha était convaincue, comme toutes ses consoeurs du sexe faible, qu'elle devait se battre avec ses armes à elle et l'empoisonnement en faisait partie, malheureusement. "En fait, nous les femmes, avions horreur de faire couler le sang de nos propres mains et nous ôtait tout courage pour le faire. Alors que pour les hommes, ça ne semblait guère les gêner et même leur procurer une certaine jouissance. C'est peut-être cela qui nous différenciait des hommes, bref, ce contact avec la chair humaine dans des circonstances effroyables. Pourtant nous aimons les corps, mais essentiellement dans les relations amoureuses, pensait Josepha blessée dans son amour propre après avoir lu cette première lettre.

43

Faire la guerre nous a toujours semblé une hérésie. Car enlever la vie aux enfants que nous avo- ns mis au monde, puis élevé est pour nous un énorme gâchis pour l'humanité. Nous les femmes, nous sommes là pour créer la vie et non pour la détruire, ce que font malheureusement les hom-mes sans le moindre scrupule! Mais peut-être qu'un jour nous deviendrons comme eux, comme ces hommes pervers et sanguinaires? se demandait curieusement Josepha en regardant froideme-nt sa situation de femme bafouée. Et s'il revenait estropié de la guerre? s'imaginait-elle avec un bonheur visible sur son visage. Je pourrais alors me venger plus facilement et lui faire manger toutes les lettres où il m'a calomniée! continua-t-elle en crachant son venin. Pour moi, tous les Anglais sont des fripons. Et si ma famille française a pu s'installer en Angleterre, ce n' est pas du fait de leur gentillesse, mais parce que mon aïeuil, fuyant les persecutions catholiques, y avait amené toute sa fortune. Dans le conté de Sussex, il y fit construire une filature, ce qui lui avait permis d'être anobli par Guillaume 3 d'Angleterre quelques décénnies plus tard. Les Anglo-Sax-ons ont toujours été intéressés par l'argent et tout particulièrement par les hommes entreprenant comme était mon aïeuil, un riche commerçant de Tours. Il s'appelait Jean Bauvilain et, suite à son anoblissement, il anglicisa son nom qui devint sir John Bodvillers. Son titre était celui de chevalier et toute sa famille adopta les moeurs des Anglais pour s'y etablir durablement et cela leur avait bien reussi. Aujourd'hui, deux cens ans plus tard, j'en suis la digne descendante et je suis devenue Lady Josepha, une jeune femme respectée par la société anglaise, mais qui subit toujours une certaine discrimination du fait de mes origines françaises qui ne contiennent malh-eureusement aucune goutte de sang noble!

C'est fou, comme ce système aristocratique était devenu retrograde en Angleterre et dans toute l'Europe par ailleurs! Le monde évoluait si vite dans ses techniques et dans ses rapports humains que l'homme de la rue se percevait chaque jour comme un moins que rien. Alors que nos chers lords, pendant ce temps là, débattaient à la Chambre sur la sauvegarde de leurs privilèges et sur la fructification de leur patrimoine. Je sais bien qu'ils ne sont pas insensibles à tous ces changeme-nts qu'ils voient s'opérer sous leurs yeux. Mais ils préfèrent ne pas en parler en public, ni à la cha-mbre des communes où siège les représentants du peuple qui voudraient soulever les questions qui s'y rattachent. Mais eux, ils font la sourde oreille et leur répondent, si c'est contre les intérêts de la couronne britannique, ils n'en débattront pas! Voila comment est la société anglaise, retro-grade et conservatrice par tradition. Et paradoxalement, nous avons été les premiers en Europe à industrialiser notre économie, non pour diminuer les injustices sociales (comme tout le monde voudrait le croire), mais essentiellement pour enrichir notre aristocratie. Ici, toutes les propriétés terriennes appartiennent aux nobles donc l'agriculture, l'élevage, les mines etc. Quand aux navires marchands, ils en sont pour la plupart propriétaires, ramenant ainsi du blé d'Amérique, du thé et du coton pour alimenter les filatures. Dans cette chasse gardée, mais que peut faire réellement l' homme ordinaire, sinon mourir de découragements? En fait, il n'y a pratiquement aucune pers-pective d'avenir pour lui et sa famille, ce qui me révolte parfois! Mais l'annoblissement de ma famille, grâce à mon ailleuil, me fait changer souvent d'avis. Car si j'étais pauvre qui réellement me viendrait en aide, mon ami? Personne, bien évidemment. Et quant à cette solidarité, soi-disant entre pauvres, je n'y ai jamais cru! Car pensez-vous vraiment que de partager sa misère avec son prochain soit un grand projet politique pour un pays? Non, certainement pas. Je pense que seule l'evolution des mentalités dans notre pays pourra résoudre tous nos problèmes de misère. Et que l'enrichissement économique de notre pays n'est en aucune façon un gage de réussite quant à ce beau projet! admettait-elle en toute lucidité.

44

Josepha, rehaussée par ses convictions, reprit la lettre et continua sa lecture
Mon cher amiral, connaissez-vous mon plat préféré?
Josepha, en lisant cela, fut consternée par les sujets traités par la reine.
C'est le bœuf aux haricots!
Josepha soudainement éclata de rire, Ah! Ah!Ah!
Le problème, mon amiral, c'est qu'ils me font lâcher des gaz et asphyxient tout mon entourage pendant la journée. Mais comme ils sont très bien éduqués, ils m'en font pas la remarque et supp-ortent très bien mes indispositions. A ce propos, j'ai demandé à mon medecin personnel, monsi-eur Brown, s'il avait un remède contre cela. Et savez-vous ce qu'il m'a répondu?
Josepha, impatiente et curieuse de connaitre la réponse, retourna la lettre pour le savoir.
Mais Majesté, il vous faut pèter, car c'est un gage pour votre bonne santé! m'a-t-il dit en levant les bras au ciel. Je ne vous cacherai pas, mon amiral, qu'il m'a fait beaucoup rire et ça m'a fait beaucoup de bien. Aussi m'a-il dit pour conserver une bonne santé qu'il fallait rire au moins 2 fois dans la journée et m'a donc proposé de suivre des séances de rires entre 10h et 10h30 du matin apres le petit-déjeuner et les soir entre 6h et 6h30. Je vous procurerai un bouffon, monsi-eur Gordon, qui pourra vous dire toutes ses amabilités pour vous faire decrocher la mâchoire, votre Majesté! insista-t-il. Le retour à cette vieille tradition du bouffon du roi m'a un peu sur-prise et m'a même enthousiasmée. Mais vous, amiral, qu'en pensez-vous? Pourrait-il se cacher derrière des espions? J'attendrai avec impatience votre reponse dans votre prochaine lettre. Car pour l'instant, je n'ai prise auncune descision concernant le retour du bouffon du roi à la cour d' Angleterre!

La suite de la lettre concernait des recettes de cuisines et surtout les desserts qu'elle raffolait où elle était prête à engager un pâtissier français au Palais de Buckingham. Mais on lui avait décon-seillé, vu les relations diplomatiques houleuses en ce moment entre la France et l'Angleterre.

Josepha, exténuée par tout ce qu'elle venait d'apprendre, reposa la lettre sur la table et se mit à réfléchir sur cette reine fantasque qui, étrangement, mélangeait dans ses lettres privées des infor-mations de hautes importances avec ses recettes de cuisines préférées. Il ne manquât plus qu'elle nous parle de ses varices pour faire trembler la couronne britannique! Ah!Ah!Ah! ria-t-elle en étouffant ses fous rires.

45

Puis voyant le temps passer extrêmement vite, Josepha rangea tout, referma tout et remit dans la soute à canon du Victory, la clef du secrétaire de son mari.
Avant de sortir de la pièce, elle vérifia que tout était en ordre, puis remonta dans sa chambre.

Retour à Menton

Alfred, épuisé, par l'écriture de son roman, s'était endormi sur sa feuille de travail où l'obscurité avait gagné sournoisement son bureau, comme s'il n'avait pas eu la force de se lever et d'aller allumer la lumière. En sachant bien que la lumière naturelle fut une chose indispensable pour écrire un bon roman et de surcroît se passant en Angleterre où là bas, il faisait continuellement gris et pluieux. Il avait même eu l'idée à un moment donné, afin de se rapprocher de cette époque Victorienne, d'écrire à la lueur d'une bougie ou d'une lampe à gaz. Avec cette idée saugrenue (souvent ancrée chez la plupart des mauvais écrivains) que plus vous étiez proches des évènem-ents, plus vous écririez facilement votre chef-d'oeuvre! Mais Alfred n'y voyant pas très clair y av-ait renoncé, Ah!Ah!Ah! Même si au début de sa carrière littéraire, il s'y était essayé en croyant un peu naïvement que tous ces artifices lui permettraient d'écrire son grand roman aussitôt sanctio-nné par les médias comme un bestseller. Pour sa femme, c'était bien évidemment le but recherc-hé. Mais pour lui, écrire était surtout jouer avec les contrastes de la vie des autres et non vouloir absolument leur ressembler. Ici, a Menton, où il faisait toujours un temps merveilleux, essayez d'imaginer une histoire se passant dans les brumes impénétrables de la vieille Angleterre semblait le subjuguer, le mettre au défit quant aux sentiments éprouvés par ces gens plongés continue-llement sous ces torrents de pluie et sous ce brouillard à découper au couteau! Ce bain continuel sur les corps affectait-il vraiment l'esprit des gens au point d'avoir des sentiments trempés voir mous comme ces plantes trop arrosées ou bien tout au contraire des sentiments bien trempés voir très dures pour ses semblables? Alfred, s'aperçut en commencant à écrire sur l'histoire de Josepha et de la reine Victoria, que c'était cette dernière proposition qui était vraie et qu'il règnait sous les pluies de la Grande Bretagne, une véritable intolérance et du mépris pour la classe laborieuse, sans richesse. Ceci montrait ni plus ni moins le caractère des Anglo-Saxons qui, issu de la race germanique, était prêt à tuer ou à massacrer des villages entiers pour s'emparer de leurs richesses. Aujourd' hui, avec la mondialisation, le monde entier était devenu un grand village et le massacre ne faisait que commencer! pensa-t-il avant de s'effondrer de fatigue sur sa table de travail.

46

-Alfred, tu viens manger?

C'est Clotilde qui l'appelait à travers la salle à manger où elle avait préparé le repas.
Mais qu'est-ce qu'il fait? se demanda-t-elle en regardant son bracelet montre qui indiquait 21h30

Ohé, le diner est prêt!

Mais n'entendant aucune réponse, elle courut aussitôt dans son bureau pour voir ce qu'il pouvait bien faire. Et le voyant affalé sur sa table de travail, elle crut un instant qu'il était mort! Mais en s'approchant de lui, elle entendit son petit ronflement régulier qu'elle connaissait très bien, ce qui la rassura. Il dort, mon bébé! dit-elle du bout des lèvres en lui passant la main dans les cheveux. Remarquant la page d'écriture sur laquelle il était en train de travailler, coincée sous l'une de ses main, Clotilde la tira doucement vers elle afin d'en prendre connaissance. En la lisant, avec une grande curiosité, ses yeux soudainement s'illuminèrent quand elle vit apparaitre des mots chargés de haines, de jalousies et le tout agrémenté d'un futur crime! Là, je crois, qu'il l'a tient enfin sa grande histoire d'amour! Bref, il a enfin compris ce que sont les femmes, Ah!Ah!Ah! C'est à dire de méchantes créatures cachées sous de jolies fleurs, ria-t-elle discrêtement en reposant la feuille sur le coin du bureau.

L'air plein de malices, elle repartit dans le salon pour se placer devant son lecteur CD (mais que voulait-elle faire exactement?). Curieusement, elle appuya sur le bouton de selection pour pass-er en revue tous les airs classiques qu'elle et son mari adoraient. Tiens, dit-elle en voyant la sym-phonie fantastique d'Hector Berliot s'afficher, celle-ci serait pas mal, non? Mais voulant quelque chose de plus en adéquation avec la situation( parfois Clotilde avait ce genre de perversion), elle continua sa selection et vit soudainement s'afficher God save the Queen, l'hymne Britannique, ce qui la mit aussitôt en joie. Ah je crois que j'ai enfin trouvé quelque chose qui pourrait le faire revenir à la réalité sans trop le brusquer, mon bébé! dit-elle en essayant d'étouffer ses fous rires. Dès qu'elle appuya sur le bouton play, l'air du God Save the Queen retentit aussitôt dans le salon d'une façon magistrale et, Clotilde pour enfoncer le clou, tourna le bouton du volume à fond. Quelques secondes plus tard, elle vit apparaître son mari dans l'encadrement de la porte du salon, les yeux effarés et les mains se bouchant les oreilles, lui crier : Mais c'est quoi tout ce boucan? Mais le volume était si fort que personne en vérité ne pouvait s'entendre. Désolé, chéri, mais je ne t'entends pas! cria-t-elle en faisant de grands gestes. Mais entendant soudainement un grand br-uit sur son plafond, elle baissa le son et se précipita dans les bras de son mari pour lui chuchoter à l'oreille : Oh chéri, excuse-moi, c'était une plaisanterie! Alfred, ne sachant plus comment réagir, se mit aussitôt à rire d'une façon incontrôlée et lui dit : Je t'aime comme tu es, ma chérie! Puis ils s'embrassèrent langoureusement pendant un long moment.

47

Après ces retrouvailles bien étranges, ils se mirent à table.

-Alors qu'est ce qu'on mange, ce soir? lui demanda-t-il en humant une bonne odeur de boeuf aux haricots lui titiller les narines. Étrangement, Alfred qui était revenu à la réalité, avait complètem-ent oublié que c'était le plat préféré de la reine Victoria, Impératrice des Indes et d'Irlande!

Cette nuit là, il lui fit l'amour comme un dieu, pètant même au lit comme la reine d'Angleterre!

Le demain matin.

Assis en face de son bureau, avec une étrange envie de faire la guerre, il se demandait si la partie de jambes en l'air qu'il avait eu cette nuit avec sa femme n'y était pas pour quelque chose et ne l'avait pas transformé en homme d'action, bref, en homme sûr de sa virilité. Pendant une fraction de secondes, il faillit en rire; mais cette fois-ci, il se retint vu qu'il avait beaucoup de travail sur la planche ou plutôt une véritable campagne militaire à mener, pensa-t-il en décapuchonnant son stylo à plume où la pointe brillait comme une épée.

La guerre de Crimée, petit rappel historique.

Une querelle de moines au Saint-Sépulcre, à Jerusalem, fut à l'origine de la guerre de Crimée. Car à cette époque, Jerusalem attirait un nombre de plus en plus important de moines chrétiens orthodoxes( environ 15000 par an) qui allaient d'une certaine façon concurrencer les moines ch-rétiens catholiques, qui officiellement étaient les gardiens du tombeau du Christ pour être exact. Et des accords de longue date avaient été signés entre le Vatican et la France pour assurer sa pro-tection par des moyens militaires. En fait, tout ceci était accepté par tout le monde, vu que les Français, par les croisades entreprises par Godefroy de bouillon, Saint-Louis et bien d'autres, avait repris la ville de Jerusalem aux musulmans d'une manière durable. Même le tsar de Russie, Nicolas 1, ne s'était jamais opposé que Jerusalem fut sous le protectorat Français. Et pour qu'il n'y eut point de doute à ce sujet, il envoya un courrier à Napoleon 3 alors "Empereur des Fran-çais"pour le confirmer. Mais un titre que Nicolas 1 ne lui reconnaissait pas. Car depuis Napoleon Bonaparte et la très célèbre bataille de la Moscova( où Napoleon avait forcé les Russes à brûler la ville de Moscou), les relations entre la France et la Russie étaient en froid où chacun héritait de la situation pour ainsi dire. Et dans ce contexte politique et historique bien particulier, les mo-ines orthodoxes avaient eux aussi des ambitions principalement religieuses. Mais n'avaient jamais exprimé d'une façon officielle que le Saint Sépulcre pût être aussi placé sous le protectorat de l' Église orthodoxe. Car celle-ci savait très bien que le nombre des moines catholiques, les francis-cains, à Jerusalem était majoritaire. Et pour ambitionner ce possible changement (de se saisir enf-in du tombeau du Christ), elle dut attendre plusieurs décennies et surtout l'effet de cette forte im-migration des moines orthodoxes à Jerusalem. Et quand ils furent assez nombreux des querelles éclatèrent pour prendre le pouvoir. Au cours de ces querelles, un vendredi saint du 10 Avril 1846, on dénombra une quarantaine de morts! Ce qui fut assez surprenant de la part de moines, n'est-ce pas?

A la suite de cela, les autorités calmèrent la situation en convoquant les parties concernées et leur demandèrent des explications. Mais chacune campant sur ses positions, ils durent envoyer des let-tres au Vatican et à la cour de Russie pour leur exposer le problème et surtout trouver une so-lution. La France et l'Eglise du Vatican étant légitimes depuis des lustres pour garder le Saint Sépulcre, la Russie ne s'y opposa pas, car elle ne voulait pas entrer sur ce terrain où une simple querelle de moines pouvait dégénérer en guerre de religion, ce que le tsar de Russie ne désirait pas. Mais pour l'instant ce qui l'intéressait, c'était de moderniser son armée et les voies de comm-unications aussi bien sur terre que sur mer. Le chemin de fer était alors une invention d'une gra-nde modernité de même que les navires de guerre pouvaient enfin utiliser la vapeur pour trave-rser les mers et les oceans..de quoi acheminer des troupes là où on le souhaitait! pensait-il plein d'ambitions démesurées.

48

Londres le 18 Juillet 1853

L'amiral Brestjone, avant d'aller au ministère de la guerre, était allé au palais de Buckingham pour informer la reine de son arrivée. Et dans la tradition aristocratique anglaise, c'eut été com- me une impolitesse de sa part de ne pas lui rendre visite et de lui témoigner sa totale soumission. Après le baise main très officiel, celle-ci l'entraîna dans ses cabinets privées afin de parler un peu plus intimement.

-Alors, mon cher Moriss, comment vous portez-vous?

-Majesté, je me porte à merveille!

-Et votre voyage s'est-il bien passé?

-Pour ne rien vous cacher, majesté, je suis parti dans des conditions météorologiques effroyables, mais heureusement que la pluie s'est calmée en chemin.

La reine, qui semblait avoir un peu de mal à garder la position debout, dit à Moriss : Asseyons- nous, vous le voulez bien? Majesté, je suis à vos ordres! lui répondit-il, ce qui faillit déclencher chez Victoria, un petit rire.

-Allons Moriss, nous sommes entre nous! et ne gâchons pas ces moments par des convenances inutiles. Vous savez bien que je vous estime beaucoup et particulièrement pour vos remarques toujours pertinentes sur la politique que je dois mener pour mon pays.

-Majesté, je vous remercie beaucoup et j'espère ne pas vous décevoir dans ce conflit avec le tsar de Russie, Nicolas 1.

-Vous voulez parler de ce fou?

-De ce fou, majesté?

-Oui, de ce fou! Car son père Paul 1 avait une haine maladive contre sa mère (Catherine 2) qui soi-disant avait tenté de l'assassiner pour mettre a la place sur le trône, son petit fils, Alexandre qu'elle adorait. A la mort de sa mère, Paul, très intelligemment, brûla tous les papiers concernant la succession qu'elle avait planifiée et c'est ainsi qu'il accéda au trône. Ce fou de Paul remit mê-me en usage, une vieille tradition moyen-âgeuse, comme les châtiments corporels à l'egad des no-bles qui ne lui obéissaient pas!

49

-Majesté,  comme vous le disiez, il y a de forte chance que ce dernier ait hérité des mêmes tares que son père!

-Ah! Ah! Ah! ria la reine.

-Ah! Ah Ah! ria Moriss qui souhaitait participer au cynisme de la reine.

-Et votre femme, comment va-t-elle?

-Oh ne m'en parlez pas! Elle en fait toujours des siennes. La dernière fois, où nos étions avec des amis, Madame a demandé à boire du café. Je vous dis pas le scandale qu'elle a provoqué autour de nous qui tenons tant à la tradition du tea-break!

-Elle a osé faire vous faire ça?

-Oui, majesté. Et j'ai aussitôt donné l'ordre a ma gouvernante, miss Beldon, qu'à partir de ce jour il ne rentrerait au château plus le moindre grain de café!

-Et comment l'a-telle pris, votre femme?

-Oh, elle est partie en furie en me disant qu'elle le boirait désormais dans sa chambre! Mais je crois que c'est une de nos servantes qui lui ramène en cachette. Des jours, je vais a la chasse au pot de café en fouillant partout jusque dans ses affaires. Mais elle le cache si bien que je ne le trouve jamais. Peut-être le cache t-elle dans un trou dans le mur, je ne sais pas?

-Votre femme a des origines françaises, ne l'oubliez pas, mon cher Moriss!

-Oui je le sais, mais je n'y peux rien..

-Les français par nature sont des insolents et votre femme a malheureusement hérité de toutes ces tares. Les Français ne respectent rien. Regardez avec la revolution de 1789, comment ils ont guillotiné leur Roi et tout ça pourquoi?

-Pour en revenir au même point de départ! coupa Moriss.

-Oui parfaitement. Et maintenant qu'ils ont nommé un pseudo empereur, Napoleon 3, ils comm- encent à comprendre enfin que l'aristocratie a des avantages que la democratie ou la republique n'a pas, comme le pouvoir fort et surtout un pouvoir humain et non système ou une machine inventé par des intellectuels!

50

Moriss, surpris par les remarques pertinentes de Victoria, était aux anges et la regardait comme une idole. Ma reine est un génie et elle ne le sait même pas! pensa-t-il fièrement.

-La révolution a appauvrit la France, c'est un fait indéniable. Mais qui nous arrangeait bien, à vrai dire.

-Oui, c'est parfaitement exact, majesté!

-Mais je remarque aussi, avec le retour d'une certaine aristocratie, que les Français se lançent à nouveaux dans les affaires avec les colonies.

-Oui je sais..mais je pense que c'est le moindre mal, n'est-ce pas?

-Pas vraiment, car ils nous font une lourde concurrence.

-Mais nous essayons de les contrer, grâce aux navires de sa royale majesté qui font un travail remarquable pour leur reprendre nos anciennes possessions. Les Français sont tellement maladro-its dans leurs colonies qu'ils font plus de la repression qu'une veritable politique commerciale. Et je pense qu'à l'avenir, ça leur jouera des tours, c'est là mon sentiment.

-Et nous, comment nous traitons nos indigènes? demanda subitement Victoria.

-Heu..je ne vous cacherai pas la vérité, majesté, mais nous constatons certains abus de la part de nos gouverneurs.

-Ah oui?

-Oui, majesté.

-Et je pense qu'on devrait leur envoyer une circulaire afin de les calmer un peu et surtout leur faire comprendre que les actes de barbaries ne sont pas bons pour le commerce!

-Vous avez entièrement raison, Moriss, et je demanderai au parlement qu'on prenne cette decisi-on.

-Majesté, je veux vous rassurer, que nous ne sommes pas les seuls dans ces actes de barbarie; les Français font de même avec leurs indigènes en Afrique.

-Sommes-nous obligés d'être si cruel envers ces gens? demanda Victoria prise soudainement de pitié.

51

-Oui, dans certains cas, majesté. Car il subsiste toujours de la resistance de la part des plus extré-mistes qui fomentent des révoltes, afin que les esclaves désertent les champs de cultures et les mines.

-C'est vraiment un grand préjudice pour nous?

-Oh oui, des millions de livres sterling par an! 

Chez les Français, les indigènes fuient les plantations pour se cacher au fond de la jungle et il en sont rendus à faire des battues pour les retrouver. Et s'ils ne veulent pas se rendre, excusez-moi, d'être cru, Majesté, mais ils les abattent comme des sangliers!

-Bon, s'ils ne veulent pas se rendre, c'est de leur entière responsabilité, n'est-ce pas?

-Oui, parfaitement, Majesté! Et la couronne britannique est malheureusement obligée d'être intra-nsigeante envers ces personnes qui voudraient s'opposer a ses intérêts ou à son expansion tout a fait légitime. Car nous apportons à ces populations, souvent inalphabêtes, le progrés, bref, la mo-dernité!

-Mon cher Moriss, vous avez entièrement raison; on ne pas vivre toute sa vie dans l'ignorance et cacher au fond de sa jungle, peuff..

-Majesté, je ne peux que louer votre bon sens et votre clairvoyance.

-Oui, clairvoyance, mais il est vrai, obtenue grâce à vous.

-Oh c'est trop Majesté!

-Non, non, ne soyez pas modeste, Moriss. Car je dois reconnaître que le talent et l'objectivité que vous mettez dans nos discutions est d'un grand secours pour moi, la reine d'Angleterre, a qui per-sonne ne veut confier ses états d'âmes ni ses visions d'avenir par crainte d'être enfermé a la tour de Londres.

Moriss, entendant cela, faillit lâcher un rire, mais se retint en se disant : Mon dieu, ma reine a vraiment le sens de l'humour et c'est pour cela que je l'aime.

-Reconnaissez, mon cher ami, que c'est un vrai handicap pour moi de mener une vraie politique dans mon pays. Car comment faire confiance au premier venu qui voudrait soi-disant être mon confident? Pas facile, n'est-ce pas?

52

-Oui, majesté, je peux comprendre entièrement vos doutes sur ces questions. Mais je suis là pour vous aider, ma chère Victoria, et personne ne pourra détruire notre amitié et cette confiance mu-tuelle que nous mettons à toutes nos conversations. Victoria, vous être une femme très intellige-nte et je doute fort qu'on puisse vous trahir par ignorance!

-Et votre femme par rapport à moi qu'elle est-elle? lança-t-elle soudainement à Moriss qui se sentit aussitôt transporté par la passion de son idole, sa reine.

-Rien, pour vous dire la vérité, Majesté! répondit-il en se mettant à genoux devant sa reine com- me pour l'implorer.

Oh ma chère Victoria! dit-il en se saisissant de ses mains brûlantes de désirs, je veux vous aimer toute ma vie. Aimez-moi comme je vous aime, je vous en supplie!

Victoria, aucunement gènée par l'ardeur de Moriss, ne lâcha point ses mains des siennes, mais les lui laissa afin que ce dernier les baigne de ses pleurs. Ainsi idolatrée, elle se sentit comme bénie des dieux et se disait, je peux mettre à mes genoux tous les hommes de la terre si je le veux! Puis stoïquement, elle retira ses mains de celles de Moriss et les lui posa sur la tête comme une mère aime tant passer sa main dans les cheveux de son enfant. Moriss, dit-elle en lui chuchotant à l'or-eille, je vous aime, mais ne le dite à personne!

Moriss, porté aux nues, leva les yeux et lui posa un baiser sur le front. Et dans son cœur et son âme en fusion, il eut le vif sentiment d'accompli une grande chose, celui d'avoir conquis le coeur de son idole. Puis se relevant dignement, il réajusta ses décorations sur sa poitrine et attendit que la reine lui dise de partir. Car dans la tradition royale, on ne devait jamais tourner le dos à sa ma-jesté d'une façon impromptue, mais attendre son signal.

-Avant de vous abandonner, mon cher ami, dit la reine, jeudi prochain, je serai au parlement afin de faire voter le budget pour la guerre que nous allons mener contre les Russes et j'espère bien vous y retrouver...

Majesté, en tant que Lord, ma place a toujours été auprès de mes amis les plus sincères! dit-il un peu pompeusement.

53

Que dire de cette étrange relation que l'amiral Bretjones entretenait avec la reine Victoria? se demandait Alfred en reposant son stylo sur sa feuille. Sur cette question brûlante, il semblait dub-itatif; mais les doutes s'envolèrent quant il comprit que cet amour hors catégorie ne pouvait qu' engendrer chez sa femme, Josepha, une terrible jalousie qui la mettait dans une totale situation d'impuissance (vu qu'elle ne pouvait se venger sans toucher indirectement à la reine) en la faisant horriblement souffrir. Avec le réel sentiment que son mariage était un fiasco en se demandant pourquoi elle s'était mariée avec cet homme vaniteux? Pour elle, c'était la grande question que toutes les femmes devaient se poser après les premières années de mariage avec un homme qu' elles commençaient véritablement à connaître. La vie de couple allait leur apprendre ce qu'ils étaient réellement l'un pour l'autre où certaines avaient eu la chance de tomber sur des hommes merveilleux, alors que d'autres sur des salopards et s'en rendaient compte que maintenant! pensa-t-elle écoeurée. Moi, je suis tombé sur un monstre qui n'aime que la mort et la gloire où parler d'amour le fait rire et c'est pour cette raison que je m'intéresse de plus en plus à la politique. Car l'amour, vu sous un angle politique, est une chose très intéressante à envisager où on s'arme d' arguments pour avoir raison et mettre son adversaire à terre qui ne peut alors que vous admirer ou vous hair, mais c'est le risque à prendre. De là à dire que c'est de l'amour, on en est très loin, mais on s'y rapprocherait tout de même. La dernière fois, face à mon mari, j'avais tellement bien argumenté sur le sujet de nos colonies, où j'étais contre, que la nuit suivante il m'a fait l'amour comme un dieu, comme pour me prouver que c'est lui qui voulait avoir le dernier mot. Les hom-mes sont assez étranges, ne trouvez-vous pas? Voyant ces résultats concrets, je me suis abonné au "Times" et au "Punch" pour me tenir au courant de l'actualité.

Mais je crois que ça le barbe de savoir que j'en sais plus que lui et il commence a me délaisser par simple stratégie. Car je n'oublie en rien qu'il est un militaire et que l'amour pour lui n'est qu' une futilité. La dernière fois, ma cousine, miss Chalson, m'a apprise que ces messieux, quand ils faisaient la guerre dans les Caraïbes, ne se gênaient pas pour faire monter des femmes à bord. Je pense que mon mari doit faire de même avec ces filles qui, parait-il, sont très belles et surtout ont des moeurs d'une très grande légèreté. Peut-être n'aime t-il que les filles faciles et que les femm-es blanches très cultivées le dégoûtent, au point d'avoir l'impression de faire l'amour avec un cer-veau et non avec une femme?

54

Toutes ces interrogations, parfaitement justifiées, tournaient dans la tête de Josepha qui, malgré ses bonnes intentions, ne pouvait apaiser son instinct de femme qui souhaitait se venger de cette humiliation. Même si dans cette histoire, vieille comme le monde, les hommes avaient toujours eu le beau rôle où les femmes voulaient absolument se marier et donc faisaient le minimum pour les séduire, bref, en bâclant souvent le travail, si l'on peut dire. Et son instinct de femme ne s'était pas trompé sur cette étrange relation qu'elle avait avec cet amiral de sa royale majesté qui entre-tenait en cachette une relation epistolère avec la reine. Avec la certitude que l'amour qu'il lui vo-uait était plus fort que celui qu'il voulait bien lui accorder en ne pouvant plus le supporter. Pour elle, cela ressemblait à une relation homosexuelle ou sado-masochiste. Peut-être qu'un jour, ils passeront à l'acte? se demanda-t-elle orageusement.

Alfred, réfléchissant à tout cela, reprit la plume et retourna à Londres, où l'amiral Bretjones était attendu au ministère de la guerre par ses collègues. 

Mais avant de retourner dans ce lieu prestigieux dont les Etats accordaient étrangement des crédi-ts illimités, alors qu'il était le ministère de la mort et non celui de la vie! Mon cher lecteur, faiso-ns un petit tour d'Europe et d'Orient afin de nous faire une idée sur la situation politique, écono-mique, littéraire, technique et artistique en ce mois d'Octobre 1853, si vous le voulez bien.

En France, Napoléon 3, neveu de Napoleon 1 que sa mère Hortense de Bauharnais appelait oui- oui pour son caractère aimable et docile, accéda au pouvoir, à la présidence de la république, le 10 décembre 1848 grâce à ses amis les notables, mais aussi grâce à l'engouement du peuple qui voyait en lui le sauveur de la France qui économiquement déclinait depuis la chute de Napoleon Bonaparte. Se voyant ainsi le digne succésseur de Bonaparte, ses ambitions de grandeurs prirent le dessus et l'entraina à faire un coup d'Etat le 2 decembre 1851 avec ses amis du parti de l'Ordre pour ensuite se faire couronner empereur des Français le 14 janvier 1852 comme son oncle. Ai-nsi naquit le second Empire Français tout en soulignant au passage, au lecteur curieux d'anec-dotes, que le 2 décembre 1851 était la date d'anniversaire du sacre de Napoleon et de Joséphine! Bref, tout ça pour dire que la France avait besoin à ce moment de redorer son blason qui, depuis les defaites de la grande armée, avait bien ternis. Ce que Napoleon 3 en fin politique avait très bien compris en allant dans le sens de l'opinion du peuple en lui proposant le suffrage universel masculin. Victor Hugo, qui avait alors un égo aussi gros que la colline de Montmartre et se pre-nant pour l'educateur du peuple, ne le supporta pas et le traita de "Napoleon le petit" dans les châ-timents, un livre de poésies satiriques pour se venger. Ce qui provoqua dans l'opinion publique une veritable fracture avec ses soi-disant idées progressistes où ce dernier n'arrivait pas à compr-endre que le peuple avait besoin de rêver lui aussi à quelque chose de grand, comme à la gloire passée de la France! Il y eut bien un debut d'insurrection à Paris, mais celle-ci ne fut pas suivi par l'ensemble des parisiens qui soutenait alors Napoleon 3 et fut écrasée par l'armée en quelques jours. On denombra une centaine de morts du côté des insurgés et près de 20000 arrestations selon la police. Mon cher lecteur, afin d'expliquer cette haine vindicative que Victor Hugo portait à Napoleon 3, il est important de se rappeler que notre grand poète en 1848 était maire du 8 ème arrondissement à Paris. Et que pour faire son job, comme on dit, il avait dû envoyer les forces de l'ordre pour réprimer les insurgés, ce qui lui restera toujours au travers de la gorge, lui qui rêvait un jour de devenir une popstar de la bonne conscience populaire, Ah!Ah!Ah! Mais dont le rêve fut anéanti par Napoleon 3, l'homme qui le força a agir contre sa conscience politique. Bref, afin d'éviter la vindicte populaire et la manu-militarie d'Etat, il dût s'exiler à Bruxelles, puis sur l'ile de Jersey où là-bas, il n'eut aucun problème pour se loger dans une belle propriété grâce à sa for-tune personnelle : fortune que son père, général d'empire, lui avait laissé comme héritage.

55

Ne nous le cachons pas, mais Victor Hugo était un homme très triche en son temps, comme Vol-taire, ce qui leur permettait des libertés hors du commun et de faire entendre leur mot à eux, bref, leur génie qui sans l'argent n'aurait jamais existé! Mais ne disons pas de mal de nos grands hom-mes d'esprits, car ces derniers étant morts, cela est bien trop facile pour nous maintenant, comme vous le conviendrez. De toute façon, Victor Hugo, malgré son éloignement avec la France, arri-vait toujours à occuper ses journées et avait commencé à jeter sur le papier ses premières idées pour un futur grand roman historique où la France serait le héros principal et la révolution la toile de fond. Le titre était trouvé "Les misères" mais qu'il changera définitivement par "Les mis-érables" vu sa situation où il se sentait tout particulièrement concerné, alors que ce n'était pas le cas. Mon bon, le malheur des grands hommes a si peu de ressemblance avec le malheur des petit-es gens qu'il nous faut aussi leur accorder cette petite jouissance, n'est-ce pas? Ah!Ah!Ah! Et quand notre grand homme d'esprit avait un peu marre d'écrire debout face au spectacle grandiose de la mer, il organisait avec ses amis des séances de spiritisme où ensemble ils arrivaient à faire parler les morts ainsi qu'à faire tourner les tables! Décidément, notre pauvre Victor, l'ami de Vol-taire et de la Raison, était tombé en quelques semaines dans la sorcellerie, bref, dans l'obscuranti-sme, Ah!Ah!Ah! Il ne faisait aucun doute que son éloignement de Paris et des lieux du pouvoir n'avaient fait qu'attiser sa haine et sa jalousie envers Napoleon 3, mais aussi envers la reine Vict-oria qu'il critiqua ouvertement un jour aux gens de l'île. La réponse fut alors immédiate et, une seconde fois, notre grand homme fut expulsé et dût partir sur l'ile voisine de Guernesey. Mais grâce à sa fortune, il n'eut aucun problème pour se reloger confortablement dans une très belle proprièté qu'il possédait à laquelle il avait donné le nom d'Houseville.

Mais pour en revenir à notre cher Napoleon 3, tout son entourage consentait qu'il était un piètre militaire ou homme de guerre, mais reconnaissait en lui un homme intelligent fait pour la recon-ciliation nationale. N'allons pas dire populaire, car le petit peuple avait toujours du mal à se nou-rrir correctement et à trouver du travail. Et Paris était décrite à l'époque comme une ville sordide et très sale où s'entassait le petit peuple dans des baraquements datant quasi du moyen-âge où l' épidémie de Cholera en 1832 fera plus 32000 victimes! Sans oublier, mon cher lecteur, les poè-mes de Baudelaire où vous sentirez toute la noirceur de Paris avec ses prostituées qui vous agu-ichaient en retroussant leurs jupes à votre passage ainsi que tous ces mendiants crasseux qui vous demandaient une pièce à chaque coin de rue!

56

N'excluons même pas"la bourse ou la vie" si vous vous etiez perdu durant la nuit dans les rues de Paris! Tout ceci avait fini par rendre malade notre poète romantique au point de décrire son mal comme une maladie des temps modernes qu'il appellera le spleen. Mot d'origine anglaise, mais sans équivalence en français, signifiant pour lui, non plus la mélancolie connue de tous les roma-ntiques, mais plutôt une grosse fatigue ou désoeuvrement issu, il faut le dire, de cette noirceur urbaine. Alors pour oublier son mal, Baudelaire, comme un fou, se jetait à corps perdu dans les paradis artificiels : jeux, alcool, prostituées et opium. Opium qu'il prenait en toute légalité (car non considéré à l'époque comme un stupéfiant pouvant nuire à la santé de la population) et ceci dans un club qui avait pignon sur rue qui s'appelait les club des hashichins. Victor Hugo avoua un jour, en lisant les poèmes de Baudelaire, y sentir comme un nouveau frisson, mais refusa d'y adhérer en y voyant comme la perdition de l'homme moderne : lui, l'educateur du peuple et le no-table qu'il était devenu. Et si je vous ai parlé de Charles Baudelaie, croyez le bien, ce n'était pas du tout anodin. Car son beau père, le général Aupick, était au parti de l'Ordre qui avait organisé le coup d'Etat du 2 decembre 1851 pour installer Napoleon 3 au pouvoir. N'allons pas dire que sa haine venait de là, mais plutôt de sa mise sous tutelle par sa mère et par son beau père : tutelle qu'il sentit très tôt comme un obstacle à sa vocation de poète épris de libertés et d'experiences borderlines menant, n'ayons pas peur de le dire, jusqu'au sordide. Sa mère et son beau père, conn-aissant les frasques du jeune homme, voulait, en fait, le protéger contre sa nature phantasque de poète qui l'entrainait souvent à faire de mauvaises rencontres qui sans états d'âmes étaient prètent à le dépouiller de la fortune qu'il avait hérité de son père Joseph-François Baudelaire, ancien prê-tre défroqué( pour la petite anecdote). Mais visiblement, une incomprehension totale entre une mère et son fils qui avait oublié l'époque dans laquelle il vivait où l'ordre était le nouveau diktat!

Moi même, je suis très frappé par l'ignorance de Charles Baudelaire en matières politiques. Etait-il vraiment si bête que cela de vouloir ignorer les souffrances du peuple et le destin d'un pays qu' était la France ou bien haïssait-il tout simplement le monde social, lui, le dandit, le grand égoïs-te aimant jouir à tout prix? Mon cher lecteur, je vous laisse méditer sur cette dernière question qui, somme toute, est cruciale pour comprendre la nature humaine où le destin collectif se mêle tragiquement aux destins individuels, n'est-ce pas?

57

Mais éloignons-nous, vous le voulez bien, de ce monde plein de noirceurs et allons du côté de la lumière vers notre cher Napoleon 3 qui, Empereur de tous les Français depuis le 2 décembre 18 52, voulait redonner à la France tout son prestige et son honneur, ce que les Français désiraient tous au fond de leur cœur malgré une misère persistante. Et les projets ne manquaient pas et éta-ient immenses pour le nouvel Empire, qui souhaitait augmenter ses richesses en annexant de nou-velles colonies en Afrique sud-saharienne, en oceanie, aux Caraibes ainsi qu'en Indochine. Et la chance semblait lui sourire avec la Nouvelle-Caledonie récemment proclamée nouvelle colonie pour le bonheur de l'Empereur dont le rêve était de rebâtir entièrement la ville de Paris où les promenades avec ses amis de la "haute" lui donnaient souvent la nausée. En se pinçant souvent le nez lors de ces pénibles marathons avec l'idée d'assainir cette ville en sachant que l'insalubrité causait beaucoup d'epidémies, comme je vous le mentionnais précédemment. Bref, redonner de l'air pur à la ville de Paris, de la lumière et de la sécurité pour ses habitants et le pouvoir en place : où l'armée pourra, en cas d'emeute, charger la foule sur les grandes avenues et lui tirer des bou-lets de canon, si cela était nécessaire. Sans oublier le tout habillé d'un bel écrin fait d'immeubles bourgeois pour redonner à Paris tout son prestige. Voilà à quoi Napoleon 3 rêvait en ce moment dont la voix ne fut pas longue à être entendue parmi ces nouveaux ambitieux qui voulaient se fai-re un nom dans ce nouvel Empire.

Georges Heugène Haussman, le futur baron Haussman, architecte de profession connu pour ses vues très modernes sur l'urbanisme, profita de l'occasion pour lui presenter ses plans mégaloma-niaques où, il faut le dire, il n'y allait pas de main morte. Puisqu'il voulait démollir la moitié de Paris pour tout reconstrure afin d'en faire une ville digne de ce nom. Etrangement Napoléon 3, qui était fasciné par cette idée de tout démolir pour tout reconstruire selon ses plans (gloriole tout à fait française!) s'enthousiasma aussitôt pour ce projet pharaonique et accepta l'offre d'Eu-gène Haussman. En reconfigurant Paris par de grands avenues et boulevards telle était la grande idée d'Haussman pour résoudre le grand problème des villes où la surpopulation était synonyme d'insécurité, d'insalubrité et d'épidémies. Et pour rester humain, on aménagerait des parcs pour la santé des parisiens en renouvelant l'air de leurs poumons (Vincennes, boulogne). Mais on constr-uirait aussi des églises pour amoindrir les effets de l'industralisation sur l'âme des gens etc. Bref, en ce moment, on ne pouvait pas être plus en phase avec lui! pensait Napoleon 3 où Paris serait saignée par de grosses artères pour enfin la guérir de son mal en étant prêt à sacrifier la moitié de la population en l'envoyant dans les banlieues. Voilà donc où se trouvait l'injustice qu'il allait co-mmêtre sur ces pauvres parisiens et sur ces nouveaux expropriés au point d'appeler désormais le baron Haussman "Attila" ou en langage moderne le buldozer. Mais Napoleon 3, en fin politique, savait qu'en donnant du travail par ce vaste chantier aux parisiens qu'il allait se faire aimer par ces derniers et il ne se trompa point. On avait estimé le projet à 500 millions de francs or et, l'emp-ereur aimant la dépense et le luxe, engagea son gouvernement à souscrire cet emprunt auprès des banques d'affaires où la speculation immobilière deviendrait le nouvel Eldorado!

Comme vous le voyez, mon cher lecteur, cette transition tombe à pic pour parler de la littérature qui n'est pas pour moi un art, mais qui fait partie de la politique et de la spéculation pour être clair avec vous. Et je m'excuse auprès de ceux qui pourraient croire le contraire, mais je suis personnellement convaincu qu'on écrit par réaction contre la sociète et non pour la sublimer.

58

Et que ceux qui la subliment ne sont sûrement pas de vrais écrivains, mais plutôt de fins politolo-gues ou hommes d'affaires; la frontière étant proche comme vous le conviendrez. Je dis cela, car beaucoup de gens font l'amalgame entre l'art, qui n'a de but que lui-même, et l'art marchand dont la littérature fait partie malheureusement. Je ne nierai pas que certains ouvrages ressemble à s'y m'éprendre à des chefs-d'oeuvre, je veux bien vous le concéder. Mais ceci n'est qu'un trompe l'oe-il en comparaison avec les oeuvres produites par la sculpture et la musique où l'on ne peut pas mentir sur ses sentiments et sur ses idées. Regardez de près ces chefs-d'oeuvre littéraires et vous y verrez tout un foisement de materiaux fait de spéculations politiques, économiques, intellectu-lles, sociales, philosophiques dont le seul but est de vous séduire afin que vous achetiez le livre et enrichir au passage les maisons d'éditions, Ah!Ah!Ah! Personnellement, je n'ai rien contre le commerce ou l'activité economique qui est vitale pour un pays et le bonheur de ses habitants. Mais ce que je voudrais dire ici, c'est seulement rectifier la vérité et remettre les choses à leur place et ne pas faire de ces grands écrivains les sauveurs de la culture ou de la nation, car leurs oeuvres sont truffées de mensonges et d'erreurs! Bref, des mensonges en vu de tirer la couvertu-re vers soi par des propos demagogiques ou populistes pour induire en erreur le peuple et l'entr-ainer vers sa perte. Vous constaterez par vous-même combien de petits livres sont truffés d' erre-urs intellectuelles et philosophiques, comme le contrat social de Jean-Jacques Rousseau, le capi-tal de Karl Marx et le petit livre rouge de Mao etc qui on entrainé des millions de morts parmi la population! Alfred Swan, qui semblait méditer sur ce grand gâchis humain, reposa sa plume sur sa page d'écriture et mit sa tête entre ses mains, comme si cette plongée dans le passé l'avait mis en fureur contre cette humanité si bête et prête à croire au premier venu qui lui promettait le bon-heur! Dégoûté, il faillit vomir et partit dans la cuisine boire un verre d'eau fraîche, mais surtout revoir la lumère du jour qui ne trichait avec personne en symbolisant pour lui la vérité de se savoir toujours en vie!

59

Le reste pour lui, c'était de la littérature et du mensonge de masse, mais il est vrai parfaitement humain puisque en adéquation avec l'état de nos moeurs, n'est-ce pas? Alfred, prenant conscien-ce qu'il faisait partie lui aussi de ce grand mensonge orchestré par la vie, repartit dans son bureau se replonger dans son roman où mensonges et vérités s'affrontaient avec violence. Comprenez bi-en, mon cher lecteur, que mon but n'était pas de démollir la littérature, mais seulement l'idée qu' on s'en faisait en France en la plaçant au dessus des nuages, comme une divinité! Moi, je la pla-cerai bien en dessous de la musique et de la sculpture. Quant à la peinture moderne ou classique n'en parlons pas, car elle était devenue de la pure spéculation économique. Les oeuvres du passé étant désormais pour nous de pures fictions, puisque complètement dépassées par notre réalité d'aujourd'hui, je les considère comme des objets morts qui ont été vendus, puis digérés par des hommes et des femmes qui ne sont plus de ce monde. Ceci est, je crois, très important à soulign-er afin de se donner une idée de ce qui cogite dans la tête d'un écrivain où la réussite sociale est son grand souci. Comme Emile Zola qui se prenait en son temps pour le porte parole de la bonne conscience populaire, Ah!Ah!Ah! Mon dieu, encore une de leurs extravagances à nos chers écriv-ains! Où visiblement, il était très facile de faire rêver les pauvres, n'est-ce pas?

Mais en cette année 1853, Emile Zola était bien trop jeune pour pouvoir dire son mot contre Na-poléon 3( qu'il aurait bien volontier assassiné avec des mots s'il avait été connu à ce moment là). Mais par chance pour la socièté française, Emile n'avait alors que 13 ans et son père, d'origine Italienne et ingenieur de profession, était mort d'une pneumonie en 1847 après avoir travaillé co-mme responsable à la constuction du barrage Zola à Aix-en-Provence : chantier dont il avait obt-enu la concession grâce à la socièté qu'il avait crée avec ses partenaires : la Socièté du canal Zola. A la suite de ce déces et la faillite de sa socièté, ce fut une longue descente aux enfers pour la fa-mille Zola dont Emile, l'enfant unique et tres choyé par sa mère, allait s'en souvenir toute sa vie au point de vouloir un jour se venger contre la socièté capitaliste(qu'il haissait de tout son coeur!) quand il sera célèbre. Ayant vécu pauvrement pendant son adolescence et sa vie de jeune hom-me, on pouvait bien évidemment le comprendre!

60

Mais le comble en ce moment, c'est que tout allait mal pour lui où ses professeurs le considé-raient guère intelligent et peu doué pour les études, mais armé d'une grande tenacité à reussir, comme son père, un immigré iltalien. Le jeune Emile, se sachant peu doué de capacités intellec-tuelles, échoua par deux fois au baccalaureat! Bref, broyant du noir, il ne voyait pas comment s'en sortir. Mais étrangement, un livre allait l'aider à sortir de ce tunnel bien noir, comme vous le conviendrez, mon cher lecteur. Honoré de Balzac en 1831 publia un conte fantastique intitulé "La peau de chagrin" qui faisait partie de ses etudes philosophiques et n'aurait jamais pensé que ce petit livre allait sauver notre pauvre Emile de la misère, mais surtout de ce marasme ambiant où l'avait plongé ses faibles capacités intellecuelles, mais toute fois armées d'une tenacité hors du commun. Ce conte racontait l'histoire d'un jeune écrivain raté qui, ayant perdu son dernier sous au jeu, comptait se jeter dans la Seine pour en finir avec cette vie qui n'en valait plus la pei-ne. Mais poussé pour une raison inconnue par son bon ou mauvais génie, il entra chez un antiqu-aire comme pour se distraire une dernière fois. Et là étrangement, le propriétaire des lieux, sent-ant le desespoir du jeune homme, lui proposa une peau de chagrin qui lui permettrait de réaliser tout ses rêves, mais avec la contrepartie de vieillir prématurement vu que la peau se réduirait au fur et à mesure que tous ses desirs seraient exhaussés. Le jeune homme, vu sa situation proche du suicide, se jeta sans hésiter sur l'occasion pour sortir de la misère et l'emporta avec lui, le coe-ur léger, cela s'entend. La suite semble comme un rêve pour le jeune homme qui avait écrit au temps de ses vaches maigres, un livre sur la théorie de la volonté, mais refusé par toutes les mai-sons d'éditions pour des raisons d'argent et de relations. Mais la peau de chagrin lui permettra de le faire publier et d'en faire un succés planétaire. Mon dieu, comme c'est beau la magie de l' arg-ent, non?

61

Vous aurez certainement compris, mon cher lecteur, que ce qui captiva notre cher Emile, ce ne fut point le côté fantastique de ce conte, mais plutôt la partie concrête symbolisée pour lui par la théorie de la volonté : théorie qu'il allait appliquer à sa vie afin d'écrire son oeuvre litteraire bâtie sur l'histoire des Rougon-Macquart: fresque romanesque d'une famille sous le second empire où le génie bien evidemment n'entrerait pas en jeu vu que la volonté était synonyme d'un long trava-il harassant et non de dons exceptionnels que vous avait donné gratuitement la nature que malh-eureusement Emile Zola n'avait pas hérité. Bref, c'était tout à fait son cas et ne se le cachait pas. Et puis rappelons, à notre cher lecteur, que nous vivions alors au siècle du travail que Rimbaud, le poète maudit, jugera sévèrement comme un siècle à bras! Alfred, qui méditait sur cette questi-on du génie, se mordait un peu les doigts en ce moment, car qu'était le genie sans le travail ou le génie à l'état pur? Lui-même en ce moment n'était-il pas en train de se contredire en écrivant son roman en luttant contre la pesanteur de son esprit? Peut-être bien que oui ou peut-être que non? se demandait-il au fond de son âme. Car pour le flambeur des salles de casinos qu'il était, le génie n'était en aucune façon le fruit d'un long travail dur et harassant, mais avait l'éclat d'un coup de dés sur le tapis vert où l'on mettait sa vie et son destin en jeu. Voilà ce qu'était pour lui le génie, une idée fulgurante suivie d'un geste admirable et non véritablement réfléchi. En resumé, une idée géniale suivie d'une action dont l'ensemble formait un tout d'une grande pureté où fond et forme ne faisait qu'un. Bref, un métal d'une grande pureté ou si vous voulez une véritable oeuvre d'art en comparaison avec ces oeuvres littéraires faits de materiaux impurs. Alfred s'est toujours senti aristocrate au fond de son coeur et non monarchiste, comme on aurait pu le croire. En fait, ce qu'il admirait chez les aristocrates, c'était leur goût de donner aux autres l'envie de se depasser, bref, de dépasser cette triste réalité où il n'y avait rien à attendre afin de créer du beau dans la vie. Et que cet autre soit riche ou non, là n'était véritablement pas la question!

62

Malheureusement, cette grande idée aristocratique fut très mal comprise par le peuple français qui par un manque évident de finesse ou d'éducation la confonda avec la domesticité! Bien évide-mment, tout cela ne pouvait en fin de compte que mal se terminer, comme vous le conviendrez, mon cher lecteur. Mais revenons à nos moulins et explorons à nouveau ce vaste monde que nous offre la littérature pour comprendre qu'elle est nullement un art, mais de la pure spéculation po-litique, intellectuelle et économique afin d'agiter le monde par ses côtés les moins nobles. Puis-que réalisée à l'ombre du danger, il faut s'attendre qu'elle vous terrasse par derrière et non par de-vant comme le génie le ferait afin de vous donner une chance de vous defendre, n'est-ce pas? En fait, c'est là où se tenaient les véritables tensions entre la droite et la gauche où la droite est issue, on peut le dire, des idées aristocratiques malgré qu'elle clame avoir la notion la plus républicaine de l'Etat. Alors que la gauche est issue d'un extraordinaire malentendu entre le peuple et les idées du depassement de soi pour atteindre la beauté! A ce sujet, Baudelaire ne s'était guère trompé en se moquant des idées socialistes ainsi que Chateaubriand qui le premier parla des communistes comme des gens qu'il n'arrivait pas à comprendre où l'individu n'avait plus de poids dans la soci-èté, mais seulement la masse! Bref, la théorie du socialisme. Etrangement, Victor Hugo qui était intelligent et très riche connaissait parfaitement toutes ces nuances, mais restait à l'ecart de tous ces mouvements socialistes qui secouaient alors le monde et la socièté française, non par mépris, mais parce qu'il se sentait avant tout Français et non internationaliste comme l'entendait le socia-lisme. Car au fond de son âme, il rêvait de devenir l'éducateur du peuple français, comme Rouss-eau, afin qu'il ne se perde pas dans de fausses idées où le bonheur leur serait soi-disant promis. Ne nous ne le cachons pas, mais Victor Hugo etait un homme de droite ainsi que Baudelaire et Balzac, alors qu'Emile Zola, malheureusement, un homme de gauche!

63

En ecrivant ceci, Alfred avait le sentiment de se trahir sur ses idées politiques et devoiler son ave-rsion pour le socialisme qui, selon lui, nivelait tout par le bas en interdisant aux vrais génies d' emerger afin de redonner à la France sa grandeur et sa vocation de mener le monde. Subitement, il se souvint de son adolescence où sa mère, ouvrière dans le textile, dévorait devant lui avec avi-dité toute l'oeuvre des Rougeon-Macquart, alors que lui n'arrivait même pas à en lire une ou de-ux pages sans qu'il ressente un profond dégoût, Ah!Ah!Ah! En fait, à son âge, il ne comprenait pas très bien pourquoi et était souvent chagriné en ne connaissant pas encore sa vraie nature tour-née vers la vie, vers le jeu et un génie qui ne demandait qu'à surgir hors de lui, mais que l'école republicaine allait lui ôter à cause d'un tyran qu'on appelle l'Egalité et s'en morderait les doigts toute sa vie! C'est pour cette raison qu'il s'était jeté dans le jeu d'argent afin de retrouver cette étincelle de génie qui sommellait en lui. Car pour lui, seul le jeu avait encore les attributs du gé-nie avec comme livre préferé durant son adolescence, le joueur de Dostoievsky. Balzac faisait partie aussi de ses auteurs favoris avec sa comédie humaine qui l'avait bien amusé au temps de sa jeunesse extravagante et pleine de folies. Tandis qu'avec Emile Zola, c'était la grande déprime ou la grande descente vers le misérabilisme et l'apitoyement sur le petit peuple. C'était Victor Hugo puissance 4, bref, tout ce qui lui faisait horreur, non par mépris, mais parce qu'il avait senti der-rière la facade de cet homme, le rêve du petit bourgeois, comme l'était celui de tous ces ouvriers acculés au travail. Bref, rien de remarquable et d'extraordinaire, n'est-ce pas? A propos de Balzac, dans sa peau de chagrin, on peut y lire entre les lignes comme un résumé de sa vie où cet homme se ruinant au jeu, involontairement ou volontairement, on ne le saura jamais, remettait en jeu sa vie en se jetant comme un acharné sur sa table de travail afin de continuer son oeuvre, la comédie humaine.

N'ayons pas peur de le dire, Balzac n'avait en rien la mentalité d'un petit bourgeois, comme Emile Zola qui tresorisait son argent comme un écureuil. Le point commun qu'ils avaient tous les deux était leur force de travail, mais avec des buts diamétralement opposés, comme vous l'auriez com-pris. Emile Zola, fils d'immigré italien, voulait reussir socialement, alors que Balzac voulait dev-enir un génie, bref, un continent entre les deux, n'est-ce pas? Et étrangement cette prophétie se ré-alisera où aujourd'hui Zola était plus connu pour l'affaire Dreyfus que pour ses livres que plus personne ne lit à moins qu'on lui donne gratuitement, Ah!Ah!Ah! Et la goutte d'eau qui fit déb-order le vase pour Alfred Swan fut le "J'accuse" de Zola qui eut la lourde conséquence de faire passer le peuple français pour des antisémites! Voilà ce à quoi notre cher Emile était arrivé à fa-ire contre son pays, la France, une chose indigne qu'Alfred ne supportait plus à travers l'Histoire! Car ayant beaucoup d'amis juifs et non juifs, il ne décela jamais chez ces derniers un relent d'an-tisemitisme ou de racisme. En fait, tout ceci démontrait qu'Emile Zola n'aimait pas beaucoup la France, comme tous les socialistes qui étaient portés sur l'internationalisme des idées. Et si l'a-ffaire du capitaine Dreyfus (juif alsacien condamné par l'armée française pour espionnage en vu d'aider l'ennemi, l'empire allemand, fut exploitée politiquement par les socialistes), cela était peu surprenant en montrant les manoeuvres des socialistes qui, par manque de génie politique, étaient obligés d'inventer des scandales ou racisme et antisemitisme auraient été décelés chez les Franç-ais, afin de se donner le beau rôle et de s'accaprer la bonne conscience. Les socialistes disent aux gens de droite : Vous n'êtes qu'une bande de voyous, alors que nous sommes des gens biens parce que nous aimons le peuple!

64

Ah!Ah!Ah! ria soudainement Alfred Swan devant sa table de travail, comme si cette phrase illus-trait à merveille le drame de la socièté française où l'on prenait les gens pour des cons! En pren-ant conscience qu'il pourrait être pris pour un révisionniste, alors que ce n'était pas le cas. En fait, il voulait seulement mettre les choses au clair dans son esprit, mais aussi dans celui des autres qui liront ce livre. Mais intuitivement, il sentit que sa femme Clotilde ne lui permettrait pas et lui demanderait de couper ces pages afin de ne pas effrayer les lectrices qui d'instinct détestaient les choses serieuses et preféraient de loin les histoires d'amour, bref, leur grande affaire. Mais qu' importe! s'écria-t-il avec véhémence, ces pages je les incorporerai plus tard dans un autre livre quitte à inventer un nouvel auteur derrière lequel je pourrai me cacher. Sans conteste, Alfred Sw-an ne manquait pas d'imagination en vu de se faire entendre. Mais n'était-ce pas le point fort de tout romancier?

Mais continuons, mon cher lecteur, d'explorer cette socièté française du debut de second empire où les auteurs de romans ne manquaient pas. A titre d'information, le prix des livres de fictions en l'année 1853 avait été fixé à un franc afin que tout le monde puisse s'instruire sans se ruiner. Bien evidemment, nous ne pouvions pas passer à côté de notre cher Chateaubriand qui mort à Paris le 4 juiller 1848 avait lui-même fermé le couvercle de son cercueil avec ses mémoires d' outre-tombe, Ah!Ah!Ah! Bon debarras! s'éxclamaient avec soulagement les gens qui avaient dû supporter, depuis le debut de la révolution française, les impétuosités de notre grand historien et surtout d'avoir réecrit l'Histoire à sa convenance où François René de Chateaubriand, au milieu de la tempète, se prit pour l'égal d'un Napoleon Bonaparte, même taille, je cois, 1m65, Ah!Ah!Ah! Georges Sand, qui était l'ennemi juré de Baudelaire( à cause de ses idées socialistes et de son féminisme de bonnes femmes ainsi qu'Alexandre Dumas à qui il reprochait son succés facile av-ec ses romans de capes et d'épées et surtout d'utiliser des négres pour les ecrire, bref, l'un des pr-emiers Sulitzer de la litterature), nous plongeait directement dans cette ambiance pesante de l'ép-oque où le socialisme faisait de plus en plus d'adeptes parmi les écrivains et intellectuels pour des raisons evidentes de justice sociale, mais aussi, pour des idées à la mode et populaires. 

65

Pour beaucoup le socialisme était l'avenir du monde et pour les écrivains en mal d'inspiration, une vague terriblement romantique, alors que ce n'était pas le cas. Mais bon, l'erreur est humai-ne, n'est-ce pas? Alfred de Musset en mars 1853 était bibliothécaire au ministère de l'instruction publique en traînant derrière lui une réputation sulfureuse de débauché et d'alcoolique notoire comme Baudelaire. Si je vous parlais de lui de cette façon, ce n'était pas pour assassiner post-mortem notre grand poète, mais plutôt pour se rapprocher de cette époque trouble où les maladi-es de l'âme étaient en expansion, si vous me permettez cette expression. Alfred de Musset se sen-tit très jeune atteint de la même maladie que Baudelaire caractérisée par un monstrueux désoeu-vrement qui le jetait alors dans la débauche et la dépense. Lisez les confessions d'un jeune hom-me de ce siècle et vous comprendrez de quoi je veux parler. Cette dégénérescence de l'âme, si bien décrite par ce dernier, touchait particulièrement les gens sensibles tels que les poètes et les philosophes dont la nature était de chercher la vérité, la quintessence des choses, la beauté, la pu-reté, mais semblait épargner (d'après les rapports de l'époque) les écrivains à succès, les journali-stes et les medecins dont la profession était de faire feu de tout bois. Ajoutons à ceci, les ouvri-ers assommés par le travail ayant perdu toute sensibilité face à la beauté du monde, bref, on sen-tait la décadence arriver de loin et la folie aussi. En Allemagne, Nietzsche le philosophe qui se débattait avec ses déceptions amoureuses, car il était laid comme un crapaud à cause de sa grosse moustache, criait son désespoir en se disant malade de l'homme. Humain, trop humain! criait-il en sombrant dans la folie dont les livres allaient décrire tous les symptômes de ce siècle en déclin qui, selon lui, vous enlevait tout appétit de vivre comme s'il vous suçait la moelle de vos os afin de vous retirer toutes forces vitales où la débauche fut comme le médicament miracle! Son " Au- delà du bien et du mal" était bien évidemment un appel à l'aide et une réponse à cette dégénér-éscence de l'homme, bref, un combat pour la vie afin de redonner à l'homme sa toute puissance dont la nature l'avait dotée à l'origine!

66

Sans exclure dans ce déclin ressenti par toute une génération, le poids de la religion chrétienne voulant imposer "le  bien" à tous les hommes et femmes en les culpabilisant dans les moindres actions dans leur vie quotidienne. Nietzsche, qui était un grand consommateur de prostituées, n' en pouvait plus et était prêt à joindre le diable pour ressentir à nouveau la vie couler dans ses veines. Mais mon cher lecteur, n'allons pas trop loin et retournons chez George Sand, au château de Nohant, où entourée de ses amis artistes, il y règnait encore une certaine joie de vivre, sauf pour Chopin qui faisait des crises quand Aurore (le petit nom intime de Georges Sand) l'aban-donnait tout seul devant son piano pendant que celle-ci fleuretait avec ces nouveaux artistes à la mode, comme Gustave Flaubert, Honoré de Balzac, Alfred de Musset, Eugène Delacroix, Frantz litz, etc. Bref, une vraie éffervescence artitistique et intellectuelle qu'elle souhaitait absolument entretenir pour s'inspirer tout simplement de tous ces gènies, mais aussi, les convaincre de se ranger du côté du peuple et du feminisme, qui pour elle était l'avenir du monde malgré une vie amoureuse très agitée, voire débridée. Mais bon, telles sont les femmes souvent maladroites en politique et prêtes à changer d'opinion politique au prochain amant qu'elle aura, Ah!Ah!Ah! L'a-mour et l' argent passant, bien évidemment, avant la politique! pensait Alfred en se rappelant un fait inouï à propos de sa femme Clotilde, qui souvent lui volait de l'argenr dans ses poches, parce que soi-disant elle n'avait pas assez de monnaie pour acheter du pain ou un litre de lait! Mais quand on vous empruntait 20 euros pour un litre de lait et qu'on ne vous rendait pas la mo-nnaie, n'était-ce point du vol? se demandait-il surpris d'en vouloir subitement à sa femme. Mais à cha-que fois, Alfred ne disait rien et cachait son embarras surtout quand, après avoir fait les courses, elle lui disait : Chéri, ce soir, je vais te faire du bon riz au lait! Mais quel homme pourrait, mon cher lecteur, reprocher à sa femme de lui avoir volé de l'argent après cette attention tout partic-ulièrement touchante? Pas grand monde, n'est-ce pas? Alors Alfred abdiquait et se disait : Espe-rons que ce riz au lait sera bon vu le prix qu'il m'a coûté, Ah!Ah!Ah!

67

Riz au lait ou soupe au lait, n'était-ce pas le programme amoureux que Geogre Sand avait conçu pour Chopin, atteint de tuberculose et bourré d'opium, pour le seduire? Oui, sans conteste. Mais entre nous qui pouvait aimer cette femme qui portait des pantalons et avait masculinisé son prè-nom, sinon un homosexuel? Mais sans croire un instant que Chopin put être un homosexuel, sinon le besoin existentiel d'avoir une mère pour épancher sa tendresse où la musique n'était là que pour exprimer sa solitude où ses valses avait le parfum des fleurs fanées, dédiées à une muse imaginaire. Quant aux autres oeuvres au piano, elles étaient d'une autre facture et exprimaient bi-en les tourments de son époque, où le modernisme et l'industrialisation de la socièté entraînaient des mutations violentes chez les hommes, comme des douches froides sur les membres. Si vous êtes sensible à la musique, vous observerez ces mutations violentes dans ses oeuvres où il aban-donne soudainement la tonalité avec une accélération du tempo pour s'aventurer sur ces terrains chaotiques. Mais comme il est artiste, le retour à la tonalité normale du morceau devient neces-saire, afin ne pas perdre l'auditeur qui a besoin d'être rassuré en terme mélodique. Dans le grand salon, Delacroix expliquait à ses amis que l'art du dessin et de la peinture consistait à saisir à la dixieme de seconde, la chute d'un homme qui tombait, par exemple, de la tour de notre Dame de Paris! Ses amis impressionnés lui disaient : Mais moi, si je voyais un homme me tomber dessus, immédiatement je me pousserais de peur qu'il m'écrase! Aussitôt de grands éclats de rires surgis-saient dans le salon où Georges Sand savourait avec délectation son plaisir et surtout sa reussite d'avoir pu reuni autour d'elle, à Nohant, autant de talents et de personnalités si pleines d'humour et d'intelligences. Son grand regret, c'était Victor Hugo qui avait décliné toutes ses invitations, lui, le grand homme, le poète seul au milieu de la tempête n'aurait certainement pas supporté un seul instant la conversation sucrée de ces salons, comme vous l'auriez facilement compris, mon cher lecteur. Georges Sand se demandait, en regardant Gustave Flaubert, si madame Bovary ce n' était pas elle?

68

Elle, la femme emancipée qui portait des pantalons et choisissait de donner son corps à qui elle voulait en ce siècle si patriarcal et guindé? Gustave flaubert lui souriait et semblait lui dire: Mais non, vous n'etes pas ma Bovary à moi, car vous n'êtes pas si libérée que cela en choisissant de vous appitoyer sur le sort du petit peuple qui souffre, votre fortune faite. Non, madame Bovary était d'une autre trempe et d'un romantisme dont vous semblez ignorer les folles conséquences, puisqu'elle se suicidera après avoir mis en dessus-desous tout le monde des hommes, celui des mâles dominants! Georges Sand aurait pu être pour lui cette madame Bovary peut-être au debut, mais avec le revirement politique de celle-ci vers les idées socialistes, cela l'en excluait totalem-ent. Pour Alfred Swan, les vrais romantiques ne s'abandonnaient jamais à ce genre d'écueil et à ces idées de masse nivelant tout par le bas, car pour eux seule la liberté comptait. En sachant per-tinement que la liberté n'était pas une chose qu'on partageait avec les autres, n'est-ce pas? En constatant autour de vous que ceux qui travaillaient tout le temps n'étaient pas ceux qui changea-ient le monde ou devenaient libres, mais le subissaient, n'est-ce pas? Pendant que Gusave flaubert disait "non" du bout des lèvres à Georges Sand, Chopin qui pianotait était intrigué par une fuite d'eau au dessus de son piano qui faisait une sorte de Tac-tac deplaisant. Celui-ci, fasciné par le rythme régulier de l'eau qui tombait sur la marquetterie de son piano, commença à faire jouer ses doigts sur les touches en suivant ce rythme, mais aussi en essayant de copier le bruit de l'eau. Ca y'est, j'ai trouvé! dit-il soudainement après avoir trouvé la mélodie de l'eau. Ainsi, il comprosera le prélude numero 15 que tout le monde connait, je crois. Si vous êtes sensible à la musique, vo-us entendrez vers les trois quarts du morceau, la mort arriver avec ses accords dissonnants resse-mblant etrangement à l'ouverture d'une grille en fer rouillée peut-être d'une crypte ou d'un cime-tière. Chopin y voyait alors comme sa mort arriver, mais le cachait à ses amis, qui savaient qu'il n'en avait plus pour longtemps puisque atteint de tuberculose! 

69

Mais continuons, si vous le voulez bien, notre petit tour d'Europe et dirigeons-nous vers cette pauvre Italie qui, après avoir été envahie par les Français, par les troupes de Napoleon, se trouva-it désormais occupée par les Autrichiens. Et si Venise n'était plus la ville romantique si bien dé-crite par le seducteur Jerome Casanova, elle était devenue une caserne où le couvre feu à partir de la nuit tombée jetait tous les Vénitiens dans un sombre cauchemar. Ne nous le cachons pas, mais une partie de la population vénitienne quelques années plus tôt avait été très heureuse de la victoire de Napoleon qui avait rétabli les droits civiques, mais aussi permis aux juifs de sortir de leur guetto où la noblesse vénitienne les avaient enfermé pour des raisons de concurrences com-merciales. Lisez Casanova et vous apprendrez que pour se procurer de l'argent, il était obliger de s'aventurer dans des quartiers jugés infréquentables de Venise pour aller chez les preteurs sur ga-ges dont les juifs avaient la spécificité ou le monopole. Ainsi vous apprendrez que Casnova y all-ait avec toute la prudence du monde afin de ne pas être aperçu par des espions qui travaillaient pour la police d'Etat : police d'Etat mise en place par le conseil des dix où un conseil inquisition-nel veillait aux bonnes moeurs ainsi qu'à protéger Venise contre ces espions étrangers qui voulai-ent lui voler les secrets de sa reussite économique. Mais comme tout cela nous semblait bien lointain après ce congres de Vienne de 1815 qui avait accordé à l'Autriche : la Dalmatie, la Lom-bardie et la Vénitie dont Venise faisait partie. Quant à la France, qui avait été battue à Waterloo par la coalition du Royaume-Uni, de l'Autriche, de la Prusse et de la Russie, elle avait retrouvé ses frontières de 1791 malgré le grand talent de négociateur de Talleyrand qui avait permis à la France de garder l'Alsace et la Lorraine, région considérée comme stratégique pour ses mines de fer et de charbon. Quant aux Anglais, il n'avait rien exigé en Europe, vu que leur puissance nava-le leur permettait désormais d'accéder a de nouvelles richesses dans les colonies. Mais ce qu'on retiendra de ce congrès de Vienne, c'est l'apparition de nouveaux conflits d'intêrets entre ces nou-veaux Empires où l'Angleterre se trouvait soudainement l'ennemi de la Russie, et la Prusse de l' Autriche! Ceci n'était pas inutile à signaler au lecteur, afin qu'il puisse comprendre les raisons de ce conflit sur la guerre de Crimée, comme vous le conviendrez. 

Quant à cette pauvre Italie, morcelée en de multiples petits états suite à cette reconfiguration de l'Europe, l'insurrection de Milan du 6 fevrier 1853 fut malheureusement un échec cuisant pour tous les protagonistes d'une Italie libérée et réunifiée. Mais revenons sur les raisons de cet echec, si vous le voulez bien, mon cher lecteur. D'après les rapporteurs de l'époque, cette insurrection fut une totale improvisation de la part des nationalistes Italiens où la précipitation en est la prin-cipale raison. L'idée de depart était d'empoisonner tous les chefs militaires Autrichiens qui allaie-nt se reunir au Palazzo Marino le 31 janvier, le soir du grand bal. Pendant ce temps là, les patriot-es aidés par la population fonderaient sur les casernes qui seraient prises en un rien de temps! Etrange lubie de vouloir empoisonner une poignée d'hommes parmi tous les convives, non? Et l' idée de mettre du poison dans les verres, mais dans quels verres exactement, si ce n'est le risque d'empoisonner tout le monde? Mais qui le fera sans être reconnu, un domestique? Mais la table, où mangerons les hauts gradés, sera forcément surveillee par des gardes, non? Bref, c'est dans ce triste exemple que nous apparait le drame de l'Italie qui, par manque de moyens, était obligée d' inventer des sernarios digne de la Comédia Del Arte pour garder l'espoir, Ah!Ah!Ah! Serait-ce là le grand problème de l'Italie, même aujourd'hui? Une grande farce dont elle n'arrivait pas à se defaire? Un pays de cocagne où il fait toujours beau (d'après les européens) où l'on rit tout le temps. Mon dieu, mais comment peut-on imaginer cette ignoble chose de croire qu'en Italie il n'y a pas de malheureux? Les chefs de l'insurrection, qui avaient tout de même un peu de sens prati-que, déclinèrent ce senario abracadabrantesque pour une révolte armée jouant sur l'effet de surp-rise plus apte à leur assurer une victoire éclatante sur l'ennemi. Malheureusement, les fusils qui devaient leur parvenir depuis la Suisse ne leur parvinrent pas et durent improviser une révolte qui se solda par un échec cuisant. Quant au bilan de celle-ci, on dénombra une dizaine de morts chez les Autrichiens, 895 arrestations chez les insurgés et on pendit les 10 chefs présumés de l'insur-rection. Parmi cette liste de présumés chefs, on dénombra un nombre important de célibataires dont les professions allaient du simple garçon de café au cordonnier, bref, de jeunes hommes qui ne s'étaient pas mariés certainement à cause de la misère, mais qui avaient donné leur vie pour un idéal pour une Italie libre! Existaient-ils encore aujourd'hui des hommes de cette trempe? se de-mandait étrangement Alfred en pensant au plus célèbre des Italiens dénommé Casanova : un hom-me qui ne s'était jamais marié afin de fuir toutes ses responsabilitès pour s'adonner à ses seuls plaisirs, la dolce vita? En pensant à tout cela, il dût s'avouer que ces gens de cette trempe avaient complètement disparu de la surface de la terre! Même en regardant autour de lui, dans cette soci-èté française, il ne vit que des oportunistes prêts à tout pour l'argent et la gloriole. Mon dieu, quel désastre la France d'aujourd'hui! s'écria-t-il en levant les yeux presque au ciel.

71

En passant par cette Italie si touchante, Alfred Swan avait comme une envie irresistible de parler de Casanova, de ce seducteur qu'il avait pris malheureusement comme modèle durant sa folle jeunesse; mais sentant la fatigue l'envahir et l'heure tardive arriver où il était 1 heure du matin, il reposa son stylo et remit son manuscrit dans son tiroir qu'il ferma aussitôt à clef.

Avant d'aller se coucher, il partit dans la cuisine boire un gtand verre de lait afin d'extraire de sa mémoire tous les poisons que le passé et la littérature avaient distillé au fond de son cerveau. C'était pour lui, un rituel immuable auquel il ne fallait pas deroger en tenant beaucoup à sa santé mentale. Bref, une santé indispensable à tout romancier se proposant de revisiter le monde par ses côtés les moins glorieux et surtout éffrayants. Bon, allons nous coucher! dit-il à voix basse en sentant ses jambes se plier malgré elles. En entrant dans sa chambre, il vit que sa femme était dèjà couchée et ronflait presque, entendait-il en enfilant son pyjama. En se glissant sous les draps, il sentit sa femme à des millions de kilomètres de lui, ce qui l'arangeait bien, n'ayons pas peur de le dire. Hum, comme c'est bon de ne pas être emmerdé avant d'aller se coucher! murmura-t-il du bout des lèvres en sachant très bien que demain serait un autre jour.

7 H du matin

Alfred Swan crut un instant être sur un bâteau ivre, quand il se sentit tout à coup baloter de gauc-he à droite par des mains invisibles, comme si on essayait de le réveiller pour une raison mystè-rieuse, alors que son corps demandait un repos bien mérité. Ohé, Alfred! Ohé, Alfred, réveilles-toi! Il est 7 heures! Allez, reveilles-toi, gros fainéant! lui criait injustement sa femme Clotilde. Alfred se reveillant en sursaut lui disait: Mais quoi, il est déjà 7 heures du soir! Mais non, vieux bouc! Il est 7 heures du matin, j'ai dit! Ah bon, alors, il n'est vraiment pas tard! lui balançait-il en se replongeant sous les draps.

Mais vas-tu te? lui cria-t-elle soudainement avec furie. Alfred sous ses draps se sentit tout à coup redevenir un enfant qu'on grondait après qu'il ait fait une bêtise, comme un enfant qui ne voulait pas aller à l'ecole ce jour là et sentit sa haine monter en lui, mais n'osait toujours pas se retourner pour lui montrer son visage plein de haine. Un long silence se fit sentir dans la chambre. Puis sa-chant que c'était le prix à payer pour avoir une vie de couple, il accepta cet étrange duel où la tête, posée sur l'oreiller, il se mit à regarder sa femme qui semblait pleine de pitié pour lui. Un instant, il fallit se lever pour aller l'étrangler, mais se retint en se disant qu'il était un peu tôt pour cette besogne. Alors, mon cher Alfred où en êtes-vous avec mon roman? lui demanda-t-elle subi-tement. Avec votre roman? répliqua-t-il avec stupeur. Oui, bien sûr, avec mon roman, car n'oubl-iez pas, mon ami, que je connais mieux les lectrices que vous, n'est-ce pas? Alfred, sentant une nouvelle fois les griffes de sa femme sur ses livres, semblait attendre le couperet lui tomber dess-us et surtout sur ce qu'il avait écrit la veille. Oh chèrie, mais ne vous inquiétez pas outre mesure, votre roman avance bien! Mais la partie que je traite en ce moment ne vous intéressera certaine-ment pas beaucoup. Ah bon et pourquoi donc? lui demanda-t-elle d'un air étonné. Euh, oui, parce que j'en suis à la partie historique de la guerre de Crimée qui est necessaire d'ecrire, sinon vos lectrices n'y comprendraient rien, c'est mon avis. Oui, elle est nécessaire, mais ne la faite pas trop durer, car mes lectrices veulent de l'action, du sang et surtout de l'amour, bref, un beau ruban au-tour d'un joli cadeau! dit-elle avec l'air d'une poupée barbie. Oui, oui, bien sûr, Clotilde! lança-t-il en s'enfonçant sensiblement sous ses draps afin de fuir le venin de sa femme et surtout la dicta-ture des femmes dont le beau et la selection naturelle en faisait des monstres prêts à faire vivre aux hommes un véritable enfer, au point de préférer le célibat ou le carnage à la petite vie de fa-mille, Ah!Ah!Ah! Bon, tu peux te recoucher! dit-elle d'un ton dictatorial. Replongeant sa tête sous les couvertures, il était étonné qu'on lui parlât de cette façon si méprisante de si bonne heure tout en s'interrogeant sur le côté surrealiste de la situation. Quelques instants plus tard, il enten-dit sa femme lui dire : Bon, je te reveillerai à 8H! Mais celui-ci ne l'écoutait dèjà plus et se rend-ormit avec des rêves bien étranges. 

73

MIDI

Alfred, les yeux encore engourdis par la fatigue, jeta un coup d'oeil sur son reveil et vit qu'il était midi pile! En repositionnant la tête d'oreiller sous sa nuque, il se posait d'étranges questions : mais ne devait-elle pas me reveiller à 8H, Clotilde? se demandait-il complètement désabusé par cette dernière. A côté de lui, la place où elle dormait était vide et sur la table de chevet, elle avait repris sa montre et son portable. Pour lui, elle était sortie de bonne heure s'occuper de ses petites affaires, allez voir son frère, je crois, m'avait-elle dit, il y a quelques jours de cela. Mais bon, c'est quant même étrange qu'elle m'ait parlé de cette façon si odieuse! s'offusquait-il en se demandant soudainement s'il n'avait pas rêvé ou fait un cauchemar? Et comme tout romancier, il savait très bien que la chose ne fut pas impossible, quand on sait que de rester enfermer toute la journée av-ec des morts-vivants, ça devait forcement vous jouer des tours à vos neuronnes et à votre psyc-hisme, pensa-t-il avec raison. Mais n'était-ce pas le prix à payer pour pénétrer chez les morts et leur faire avouer leurs crimes passés ainsi que leurs souffrances? A ce sujet, il pensa aussitôt à ce qu'il avait commencé à ecrire la veille sur Casanova et sur cette Italie empétrée dans sa Comédia Del Arte avec sa Dolce Vita à Rome, à Venise, à Vienne, à Paris en compagnie de ces jolies fem-mes aux yeux noirs que Casanova aimait par dessus tout au point de leur demander si ces yeux étaient leurs vrais yeux ou seulement maquillés? La jeune fille, offusquée, qu'on lui posât ce ge-nre de question, lui retorquait : Mais bien sûr que ce sont là mes vrais yeux, mon cher monsieur! Casanova, emporté par cette réponse si ingénue, en devenait aussitôt amoureux et était prêt à l'en lever! Mais de quelle manière allait-il s'y prendre sans éveiller en elle le moindre soupçon? Voilà où se trouvait sa perversité ou dans sa vie tout se mélangeait aussi bien le réel que le théatre. Mais y' avait-il vraiment une difference entre ces deux scènes où se jouait le destin des hommes? Un mauvais rôle dans une pièce de théatre ne jetait-il pas automatiquement le comédien dans la disgrâce?

74

Et dans la vie n'était-ce point la même chose? Alors choisissons le plus beau rôle grâce à l'argent pour avoir de son côté tous les applaudissements du public! jubilait-il emporté par sa trouvaille. J'ai parfois l'impression que le théatre est plus fort que la vie qui sans les beaux parleurs et les charlatans serait bien triste, Ah!Ah!Ah! riait-il souvent à ce propos. Au point d'abandonner sa lan-gue natale pour adopter la langue française pour ecrire ses confessions parce qu'il sentit très tôt cette langue italienne impuissante, voir ridicule, à traiter des choses sérieuses, comme la littéra-ture et l'Histoire. Et si Jules Cesar avait écrit sa campagne des trois gaules en latin, ce n'était pas anodin, mais parce que le latin symbolisait pour lui une langue à la hauteur pour raconter de gra-nds évenements. Mais avec la langue italienne, aïe, aïe, aïe, où tout chantait, caressait, rayonnait harmonieusement, mais comment lui faire dire des choses sérieuses? se lamentait-il avec raison. En prenant conscience dès son époque du drame de l'Italie qui ferait de sa vie une chose très mo-uvementé, ne nous le cachons pas. En se relevant de son lit, Alfred secoué par ce rêve étrange, se disait : il faudrait que j'en parle ce soir à Clotilde pour y voir plus clair, hum? Puis glissa ses pieds dans ses pantoufles et partit vers la cuisine se préparer son petit-dejeuner. Pour lui, le rituel du petit-dejeuner était primordial pour commencer une bonne journée malgré la vaisselle à sortir, puis à nettoyer. Mais cela, il le faisait de bon coeur sachant qu'il allait boire son café au lait avec ses tartines beurrées sur la terrasse en regardant la baie de Menton où les rayons du soleil scintill-eraient sur la surface bleuté de la mer et qu'il en serait ravi. Après avoir jeté deux cuillérées à café dans son bol, il l'inonda avec du lait bien chaud jusqu'à ras bord, puis se prépara avec gour-mandise deux tartines beurrées nappées de confiture à la fraise qu'il emporta avec prudence sur la terrasse pour voir ce que son imagination lui avait promis. Face à la clarté du ciel, il comprit aussitôt de quoi était fait le bonheur, d'un grand bol de café au lait, d'une bonne santé et d'un paysage superbe qui s'offrait à vous comme pour la première fois. C'était comme retrouver les premères sensations de son adolescence ou de son premier amour! s'émerveillait-il avec une gra-nde émotion.

75

Aujourd'hui, il savourait avec delectation ce plaisir en apercevant à la surface de la mer, l'agitati-on de la houle où des vagues d'écumes semblaient sourire aux gens heureux. Tout en se disant qu'il fallait sacrément avoir une bonne vue pour voir la beauté du monde, sinon tout cela restait très evasif pour ceux qui étaient aveugles de naisssance, volontairement ou involontairement. Mais bon, pour lui, ce n'était pas le cas et se demandait comment remercier ces instants de grâce, sinon dire merci à la nuit qu'il venait de passer où sa mémoire avait été mystèrieusement effacée afin de retrouver la beauté du monde, malgré le cauchemar de 7 H du mat qui l'avait plongé dans un sommeil proche de la mort cérérale. Une sorte de lavage de cerveau qui donnerait enfin à tous les hommes le temps du bonheur? s'interrogreait-il comme un homme qui avait atteint la sages-se. Où un jour, les savants inventeront une machine capable d'effacer leur memoire, afin qu'ils puissent recommencer une nouvelle vie et créer un nouveau monde ou une nouvelle civilisation? réitira-t-il pris de visions futuristes. Puis revenant soudainement à la réalité, il pensait que son plus grand regret, s'il devait mourir pendant la nuit, ce serait de manquer son cher petit-dejeuner, Ah!Ah!Ah! Car partir le ventre vide serait forcément pour lui un mauvais signe, comme vous le conviendrez, mon cher lecteur. Alfred Swan, étrangement, semblait établir dans sa tête une liste morbide : sentait-il la mort arriver après tout ce bonheur qui lui était tombé dessus comme un gros tas de crème chantilly ou bien établissait-il inconsciemment son testament post-mortem? Mon deuxième grand regret, continua-t-il, en exprimant une grande amertume, ce serait de laisser dérrière moi tout mon argent sans en avoir profité jusqu'aux derniers centimes! Oh oui, ce serait sûrement là, mon plus gros regret! pensa-t-il en imaginant sa femme et son fils se jeter sur son compte bancaire comme des requins! (Alfred Swan serait-il un sale égoïste ou bien un être cyni-que, je me demandais?). Mais je vous laisse répondre par vous même à cette question, mon cher lecteur.

76

Moi, si je connaissais l'heure de ma mort, pensa-t-il d'une manière enfièvrée, j'irais la veille claq-uer tout mon argent au casino et faire la fête jusu'au bout de la nuit où je disparaitrais avec le sentiment d'avoir tout vécu le dernier jour! Phantasme du joueur ou bien projet macabre d'un névrosé qui, après avoir tout perdu, se suiciderait dans les toilettes d'un grand casino. Celui de Deauville ou bien de Monte-Carlo? se demandait-il étrangement en établissant sa liste morbide d' actions pour le dernier jour sur la Terre. Monte-Carlo, bien évidemment! lâcha-t-il, car n'était-il pas le plus prestigieux de la planète, hum? Mais pourquoi dans les chiottes, alors qu'une balle da-ns la tête au dessus de la roulette ferait un spectacle grandiose, non? rectifia-t-il comme s'il vou-lait finir sa vie en apothéose. Maintenant, il se voyait le corps étendu sur le tapis vert, un trou da-ns le crane où s'écoulait un petit torrent de sang qui commençait à innonder le velour quadrillé de la roulette. Alfred Swan, avant de mourir, entendrait : Rien ne va plus, rouge paire et gagne! C' est la vie! lâcha-il soudainement en se mettant la tête entre les mains. Mon dieu, je suis un être perdu pour les miens et pour la socièté toute entière! criait-il au fond de son âme en pensant à tous ces rêves morbides. Mais il n'y pouvait rien, car c'était sa nature qui venait de s'exprimer dont il ne pouvait contrecarrer le destin, bref, le suicide programmé! Puis reprenant la liste mo-rbide de ses regrets, il saisit que son troisième grand regret serait de perdre sa femme Clotilde et son fils Aurélien en étant très ému. Enfin, je ne suis pas un monstre! lâcha-t-il du bout des lèvr-es. Et comme tout romantique qui refusait de le reconnaitre(car il était prêt à tout instant à reme-ttre sa vie en jeu sur un simple coup de dès ou coup de tête), il comprit qu'en passant dans l'autre monde, il perdrait ces deux êtres aimés malgré le défaut de sa femme qui ne pensait qu'à l'argent et à son fils qui venait le voir, non pas pour lui demander de ses nouvelles, mais uniquement pour qu'il lui paie ses dettes de jeu!

77

Mon dieu, mon dieu! dit-il comme à regrets, non sans colère, gain ou perte serait-il le principe de la vie tel que l'affirmait la bible à tous les hommes damnés : Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front? Pour Alfred, bien evidemment, cette maxime était fausse vu qu'il ne croyait qu'en une seule vérité qui lui disait : Gagne et tu auras raison! Le reste pour lui n'avait aucune importance, puisque tout découlait de ce petit énoncé qu'aucun grand philosophe n'avait osé écrire ou graver dans le grand livre de la vie, de peur d'être lapidé par l'ensemble de la population qui, il faut dire, a toujours fait partie des grands perdants. Mais n'était-ce point la vérité que tout le monde conna-issait? Alors pourquoi ce peuple de boeufs continuait-il à aller voter en sachant très bien que ses promesses ne seront jamais tenues, sinon comprendre que ce peuple de boeufs était réellement bête? Alfred, qui était un fin politologue, savait intuitivement que ce qui motivait ce peuple de boeufs d'aller voter contre le bon sens, c'était la peur de l'inconnu et non forcement la preuve qu' il était idiot. Et les hommes politiques connaissant parfaitement cette vérité, non écrite, allaient en profiter et se prendre pour les bergers du troupeau où la peur de l'inconnu ou du loup le fais-ait trembler. Pourvu que ce soir, on rentre à la bergerie sains et saufs! se lamentaient les bêtes apeurées. En ecrivant ceci, il ne voulait pas se moquer du troupeau (car la vérité collective n'est pas la vérité individuelle), mais pour dire que ce qu'il manquait à ce troupeau, c'était tout simple-ment du courage : courage qui forcément lui manquerait pour assurer à son pays un grand destin! Telle était la dure loi des moeurs! pensait Alfred qui n'avait jusque là jamais manqué de courage sur les tables de jeu où sa sueur ne venait pas de ses efforts physiques, mais seulement de sa soif de faire partie des gagnants! 

Etait-ce du courage pour autant? se demandait-il parfois. Oui, du moins ça en avait l'air ou tou-tes les apparences, comme Bonaparte sur le pont d'Arcole qui, voyant ses troupes reculées devant l'ennemi, s'y engagea tout seul pour défier le destin. Pour Alfred, nul doute qu'il s'agissait là d'un coup de dés magnifique de Bonaparte face au destin de la France, ce que personne ne démentira, n'est-ce pas? Etant lucide comme un Bonaparte, il savait très bien que mourir était une perte pour les deux parties, mais qu'elle serait plus importante du côté du mort vu que celui-ci allait tout perdre en passant dans l'autre monde : son argent, ses amis, ses plaisirs, etc, bref, la vie. Alors que sa femme et son fils allaient perdre seulement un être délicieux et délicat( c'est ainsi qu'il se voy-ait) et empôcheraient au passage son magot. Pour lui, il n'y avait pas photo et perdre la vie était bien tout perdre. Le seul point positif qu'il voulut bien accorder à la mort, ce fut la perte de tou-tes ses emmerdes. Mais valait-il mieux vivre avec ses emmerdes, qui somme toute faisaient partie de l'existence, que de plus rien ressentir du tout? se demandait-il d'une manière lucide. Pour lui, une nouvelle fois, il n'y avait pas photo. La seule chose à laquelle il semblait s'interesser maint-enant, c'était de croire, avant de mourrir, qu'on penserait à lui quand il serait dans l'autre monde. Peut-être serait-ce là ma dernière grande jouissance? pensa-t-il touché jusqu'aux larmes. Sans conteste, Alfred resterait un joueur jusqu'à son dernier souffle. Et que peut-être avant de mourir, il accepterait de faire une partie de poker avec le diable, qui sait?

78

Après qu'il ait lavé son bol et néttoyé la table méticuleusement, il partit faire un brin de toilette où sa femme n'étant pas là, il pouvait se permettre de se négliger un peu. Ah ça fait tellement de bien de se sentir libre! s'écria-t-il intérieurement. Ainsi disposé, il ne se changea point, mais resta en pyjama, puis regagna son bureau afin de poursuivre son récit sur la guerre de Crimée. Mais étrangement, il se sentit très loin de tout cela, comme si la vie voulait le happer et lui faire vivre de vraies émotions et non ces spéculations sur la littérature et le passé qui, somme toute lui sem-blèrent mortifères, voir recouvertes d'une épaisse couche de poussière. L'envie de se dépoussièrer lui vint soudainement à l'esprit, quand il sentit sur lui une gène ou un élément étranger voulant nuir à sa liberté d'agir. Mais au juste, ne sommes nous pas, nous même, victime de cet empoussi-èrage du temps au point de nous voir vieillir sur place? se demandait-il d'une manière agacée. Alfred avait remarqué que la poussière du temps ressemblait étrangement à du plâtre, mais que personne ne voyait réellement sur son visage s'il ne se débarbouillait entièrement. Pour illuster la chose, une image lui vint à l'esprit où il s'agissait de ces plâtriers-peintres qu'il avait employé un jour pour rénover sa villa à Menton en n'arrivant plus à distinguer les visages, bref, où le plâtre avait crée une sorte de masque blanc proche de l'art statuaire. Alfred avait cru, le temps de ce chantier, parler à des fantômes et non plus à des hommes, ce qui l'avait beaucoup éffrayé. Au point de se dire que ces hommes, le jour du grand débarbouillage, le jour de leur retraite, verr-aient enfin leur vrai visage qui serait un visage de vieux! Le plâtre ayant ni plus ni moins caché les traces du temps, le temps de leur jeunesse. Peut-être s'en suicideront-ils ou peut-être maqui-lleront-il leurs vieux jours de nostalgies blanches? Pour ma part, je ne vieillirai jamais de cette façon! pensa-t-il d'une manière emportée. Et puis, je vous avouerai que j'ai encore la chance de faire jeune auprès de mes amis, mais aussi, auprès des autres. Commes ces gens dans la rue qui m'interpellent en me disant : Ohé, jeune homme! Je ne vous cacherai pas alors mon état de grâce en jouissant comme une femme de me savoir épargné par le temps!

79

C'est peut-être ça, le secret de la jeunesse éternelle, non? se demandait-il en se passant la main da-ns les cheveux comme pour mieux ressentir sa puissance dionysiaque. Il faut dire aussi que ma profession de joueur y est pour beaucoup sur ce secret, je ne peux pas le nier. Car jouer permet à l'homme de ne pas s'ennuyer dans la vie, ce qui est à mon sens la définition même de l'homme int-elligent qui veille aussi bien sur son apparence que sur ses artères. Pour moi, un homme ou une femme qui s'ennuie, c'est un imbécile, un obése en puissance, un homme qui cultivra son ventre au detriment de son cerveau et ce n'est pas mon cas! pensait fièrement Alfred en regardant son ventre plat et musclé. Mais en ce moment ce qui le turlipinait beaucoup, c'était le sentiment de ne pas vivre de vraies émotions, mais plutôt de prendre racine au pied de son bureau tel un caout-chouc! Où à force d'immoblismes, ses pieds semblaient s'être comme enfoncés dans le sol et ses mains nouées à sa table de travail. Bref, un emprisonnement auquel il n'arrivait plus à s'arracher, au point d'imaginer un jour sa femme le découvrir mort au pied de son bureau, telle une veille racine dessechée, Ah!Ah!Ah! Oh mon pauvre Alfred, mais que s'est-il passé! Mais qu'as tu fait de mal pour ressembler à cette horrible chose? Je suis désolé pour toi, mais tu es bon maintenant à jeter à la poubelle! lui lancerait sa femme Clotilde et, disons-le franchement, la plupart des fem-mes qui n'aimaient pas leur petit mari parce qu'il avait un petit zizi( ce qui n'était pas le cas d' Alfred). En général, une bonne femme d'intérieur savait comment éviter ce genre d'écueil en s'ar-mant d'un bon sécateur et d'une éponge afin de soigner ses caoutchoucs. Mais en ce moment, Cl-otilde semblait complèment indifférente à ses états d'âmes et préocupée par d'autres choses, com-me par des histoires de famille. Et l'idée de faire une pause lui vint aussitôt à l'esprit afin de rep-rendre goût à la vie qui, il faut dire, sans elle la litterature ne saurait exister!

80

Alfred, n'ayant plus aucun goût pour le travail, se mit étrangement à regarder sa petite pendule sur son bureau, comme s'il s'agissait d'un objet hypnotique. Celle-ci indiquait 15H30 et le posit-ionnement des aiguilles sur le cadran semblait lui indiquer un ordre magique ou un nombre d'or. En fait, il ne savait pas exactement si c'était le temps qui l'hypnotisait ou bien sa vision materia-lisée par ses aiguilles fluorescentes. Envouté, il resta dix minutes dans cet état quasi végétatif en n'essayant même pas de se faire violence pour en sortir. Ces heures semblaient pour lui comme un grand mystère. L'aiguille des minutes était pointée sur le centre de la terre, alors que celle des heures pointées sur l'horizontalité des choses, l'avenir ou le voyage. Une forme d'anachronisme qu'il ressentait au fond de lui-même tel un chaos où le temps s'abolissait lui-même pour devenir un monde immobile afin qu'on le voit mieux pour le photographier avec précision, pensa-t-il ému de savoir maintenant que le monde ne fut qu'une chimère, qu'un rêve éveillé! Ainsi, il conç-ut que le succès autant que l'insuccés faisait partie eux aussi de ce rêve éveillé. Où pour certains, les veinards, ce rêve était fait de pailletttes, alors que pour les autres, les maudits, un véritable ca-uchemar! Mais l'important pour chacun était de continuer son rêve pour rester vivant. Car grâce à ce continuum personne n'allait s'apercevoir qu'il allait mourir où le riche, dans sa vie dans l'au-delà, allait continuer à croire qu'il était riche et avoir toujours du succés( alors qu'il avait tout perdu en mourant) et le pauvre avoir la surprise de ne plus souffrir de la faim, de la soif et du mépris de ses contemporains! Bref, pour Alfred, c'était la preuve incontestable que la vie était un rêve éveillé et que le joueur qu'il était ne pouvait pas se tromper sur ses intuitions où l'accuité de l'instant était exacerbé à son comble. Pour lui, la nature était une grande machine à calculer qui savait exactement ou placer les pertes et profits. Pour certains, c'était la marque de la justice div-ine, alors que pour d'autres, une simple opération arytmétique!

81

Mais pour le flambeur de casinos qu'il était, cela signifiait beaucoup plus que ça, disons, la poss-ibilité de faire un pari extraordinaire sur la vie dans l'au-delà! Et pourquoi pas s'imaginer, juste avant de mourir, être l'égal d'un dieu afin de festoyer à leur banquet, hum? se demandait-il étran-gement comme s'il commencait à délirer. Attendant une réponse qui ne venait pas, il lâcha des yeux sa pendule pour ouvrir un des tiroirs de son bureau et y chercher quelque chose qu'il ne sav-ait pas lui-même. En l'ouvrant, une bonne odeur de tabac monta aussitôt vers lui comme pour lui rappeler de merveilleux souvenirs( car cela faisait deux anx qu'il avait arrêté de fumer) et de retr-ouver l'odeur de son paquet de cigarettes préféré (des camel) le fit sourire et le mit de bonne hu-meur pendant un instant. Celui-ci n'étant pas visible, il plongea sa main sous une pile de papier et le decouvrit, certes, un peu écrasé, mais encore utilisable, jugea-t-il emporté par sa découverte. Il remarquait que le paquet était déjà ouvert et c'est pour cela que le tabac avait embaumé tout l'es-pace du tiroir durant des années. Pour lui, c'était comme une récompense du temps, mais aussi à ses efforts qu'il avait fourni pour ne plus toucher à une seule cigarette. Et pourtant dans ces casi-nos, ô combien enfumés, combien de fois ne s'était il pas pressé autour de ces tables de jeu pour pouvoir s'enniver de la fumée des autres? s'avouait-il l'air surpris et remplis de nostalgies. Bah! lâcha-t-il en sortant une cigarette du paquet et en la plantant au milieu de ses lévres qui désiraient jouer avec le feu ou la mort. Plongeant à nouveau sa main dans le tiroir et triffouillant à l'inté-rieur, il trouva une pochette d'allumettes portant la publicité d'un casino de la côte d'azur, mais qui ne lui rappelait aucun souvenir tellement il y en avait sur les bords de mer. Puis grattant l'all-umette sur le grattoir, il fut subjugué par la magie de cet instant où un geste si banal pouvait me-ttre le feu à sa cervelle et à bien d'autres choses! pensa-t-il. Puis approchant la flamme de l'extr-émité de sa cigarette, il l'embrasa dans une sorte de fracas et de gresillements en tirant une bou-ffée.

82

Youhaa, mon dieu, comme ça fait du bien de sentir cette fumée pénétrer ses poumons ainsi que tout son être! dit-il emporté par l'émotion. Alfred avait alors l'impression de renouer avec un vie-ux rêve prehistorique où l'homme des cavernes découvrait pour la première fois, grâce au tabac et la fumée, l'extase religieuse qui lui permettait d'entrapercevoir le monde des morts. Où super-stition et religion ne furent point incompatibles pour acceder à ce royaume! pensa-t-il surpris par nos religions d'aujourd'hui qui, pour la plupart monothéistes ne nous faisaient plus rêver, mais plutôt cauchemarder, Ah!Ah!Ah! Peut-être que la vraie religion était morte depuis bien longte-mps et que nous pratiquions aujourd'hui un vieux fossile de religion où les adeptes n'étaient peut-être que des fossoyeurs ou des archélologues de l'âme? se demandait-il surpris par une vér-ité qui semblait lui parvenir du tréfond des âges. Bah, j'ai horreur de ces gens! pensa-t-il en tirant longuement sur sa cigarette, puis en expulsant de sa bouche un nuage de fumée qui ressemblait étrangement à un château en Espagne. Tiens, dit-il, je n'aurai pas cru qu'on pouvait avec une sim-ple cigarette créer de si belles choses! C'est peut-être ça, la vraie religion, une magie à laquelle on accordait tous les pouvoirs afin que l'homme puisse être à nouveau heureux? se questionnait-il afin de découvir la vérité de l'homme. En fait, il ne se rendait pas bien compte qu'il venait d'inve-nter ou de redecouvrir la vraie religion où l'au-dela n'était pas fait d'un enfer et d'un paradis, mais d'une continuation de ce rêve éveillé qu'était la vie : où le riche vivrait eternellement riche et le pauvre libéré enfin de toutes ses souffrances, bref, un monde rétablissant l'ordre cosmique où la culpabilité n'avait jamais existé. Sans nul doute, il avait du génie ou pour certains seulement bea-ucoup d'imagination. Mais entre nous qui pouvait nous interdire de croire que ce qu'il venait de dire n'était pas vrai ou possible? Et que dans cette nouvelle optique ou vision revolutionnaire de voir la religion, il était fort possible que les hommes d'Eglises (ceux que nous connaissions) ne soient en vérité que des fossoyeurs des âmes! En fait, ce qu'il manquait aux hommes pour être heureux, c'était tout bêtement de l'imagination. Imaginez, mon cher lecteur, un jour cette chose possible où les voyous ne seront plus chatiés dans l'autre monde, mais deviendront les meilleurs amis de leurs victimes, au point de les aimer? 

83

Alfred, pensant à tout cela, semblait très ému de pouvoir remettre en question ces grandes reli-gions qui faisaient ni plus ni moins du chantage avec nos âmes. En nous disant avec arrogance : C'est nous qui détenons le secret de la vie dans l'au-delà et si vous ne suivez pas nos règles sur la Terre, vous irez tout droit en enfer! En termes politiques, cela signifait que ceux qui detiendront tous nos rêves auront tous les pouvoirs! Bref, l'argent, le succés, la beauté, la santé, la vie dans l' au-delà etc où les exemples ne manquaient pas, comme vous le conviendrez, mon cher lecteur. Dans son cas, c'était bien évidemment l'argent et le succés qui étaient ses points faibles, bref, ses apparences! comme il aimait à le dire en toute intimité. Mais bon, si je veux continuer ma vie dans l'au-delà à rouler en Maserati, il me faudra bien ici être riche, sinon mon rêve risque de se casser la gueule! pensa-t-il d'une façon pitoyable. Parfois, il avait ce genre d'expression qui le dis-créditait totalement à nos yeux. Mais bon, il était égoïste et ne s'en rendait pas bien compte. La seule chose qu'on ne pouvait pas lui reprocher, c'était sa lucidité en tant que joueur. Car il savait parfaitement qui détenait ses rêves, alors que la majorité des gens ignorait qui les maintenaient en captivité. En vivant dans une sorte de flou philosophique, intellectuel et religieux qui les faisait agir dans tous les sens, comme des girouettes que les médias et les institutions manipulaient pour faire tourner leur business économique et  idéologique où, pris en otage, ils perdaient leur âme pour ne pas être grossier. Comme par exemple, passer à la télé, le grand rêve que leur promettait les médias! Mon dieu, mon dieu, quel triste rêve, alors qu'avec un peu d'imagination, on pouvait voir la vie bien autrement avec ses nuits sans fins passées aux bras des filles au casino et déco-uvrir au petit matin plein de charme, ses pôches pleines d'argent! Voilà ce qu'était pour moi la vraie vie! lança soudainement Alfred en tapant presque du poing sur la table.

84

Et remplir sa vie de bonnes et de mauvaises choses, cela s'appelait tout bêtement l'existence! dit-il avec fougue, en remarquant à maintes reprises que le bonheur venait souvent sans prévenir, co-mme un jeton jeté par hasard sur la table de la roulette qui vous rapportait une grosse somme sans éffort! Sans nul doute, pour Alfred la vie continuerait d'être un jeu. Mais personnellement qui de nous pouvait lui reprocher cette légerté dans la vie, alors que nous-même étions devenus des mort-vivants?

Après qu'il ait fumé la moitié de sa cigarette, il partit ouvrir la fenêtre pour l'écraser sur le rebo-rd, puis souffla sur les cendres afin de les dissiper dans l'air. Ce geste, qui aurait pu être anodin pour la plupart des gens ou des fumeurs( qui était d'écraser les choses, puis de les disperser pour ne plus les voir) ne l'était pas en vérité pour Alfred, qui savait pertinement que c'était sa façon à lui de cacher ses problèmes existentiels aux autres. Sa déprime, c'était bien évidemment son aff-aire à lui et en tant que maître de l'illusion, il ne devait jamais la montrer aux autres ni à sa fem-me, pensait-il en ventilant la pièce où l'odeur de la cigarette avait du mal à partir. A force de jo-uer au jeu d'argent et de côtoyer ces escrocs à la bonne mine, il avait fini par créer en lui une so-rte de monstre jovial ressemblant étrangement à un bouffon( mais qu'il ne devait jamais montrer à personne de peur de se rendre ridicule à ses propres yeux!). Alfred Swan, le dandit léttré, n'était peut-être en vérité qu'un bouffon? se demandait-il pris subitement par un vertige affolant en ref-ernant précipitemment la fenêtre.

Agacé par tout ce qu'il venait de ressentir sur lui-même, il partit aussitôt dans la salle de bain po-ur se regarder dans le miroir et se poser cette étrange question : Suis-je un bouffon ou non? Etr-angement, le miroir lui renvoya une image sur laquelle il n' arrivait pas à faire la mise au point, comme si un flou préexistait malgré tous les bons réglages du photographe. Ennuyé par cette image indéfinie de lui-même et ne le supportant pas, il se mit soudainement à faire des grimaces devant la glace, comme à la recherche de son véritable visage, tel un peintre ayant dans sa palette toute une galerie de portraits à sa disposition.

85

Après quelques essais de grande plasticité, il s'arrêta sur un visage qu'il semblait connaître en lui paraissant fort sympathique et lâcha un soudain éclat de rire, Ah!Ah!Ah! Je te tiens! Je le tiens enfin! s'écria-t-il en se pointant du doigt à travers le miroir. Alfred reconnut en cet instant qu'il était bien un bouffon, mais un bouffon de grande classe avec un charme exquis sans grande ress-emblance avec ces bouffons du roi, petits et gros, nourris et logés gratos pour faire rire la masse ou les grands hommes d'Etat. Non, lui, son bouffon interieur ressemblait étrangement à l'image énigmatique du joker tel qu'on pouvait les voir sur les cartes à jouer. En apparence, pour beauc-oup de gens, il y avait peu de différence entre les deux. Mais pour Alfred, une différence enorme les separait, c'était dans la façon de concevoir la liberté. Car le bouffon du roi, né petit et gros(même dans sa tête) n'avait pas trop le choix et faire rire les autres était pour lui une question de survie. Alors que le joker lui ne se dévoilait jamais, sauf quand on ne l'attendait pas! Mais qui était-il exactement? Personne ne le savait véritablement. Etait-il un monstre prêt à abattre ses en-nemis par derrière ou bien était-il une bonne personne prête à faite le bien sans qu'on le lui dem-ande? Pour lui, il n'y avait pas photo et c'était bien cette dernière proposition qui était la bonne. En étant à l'image de ce joker qui ne riait jamais pour se moquer, mais uniquement pour cacher aux autres ses angoisses existentielles en leur faisant croire qu'il était un homme heureux parce qu'il avait gagné au jeu. Le joker, pour beaucoup de joueurs, c'était la carte de la dernière chance à abattre quand on avait plus un rond à mettre sur la table de jeu. Pour Alfred, c'était exact, sauf que chez lui ce drame se jouait dans la vie de tous les jours où gagner était le but existentiel de sa vie! reconnaissait-il en se regardant troublé dans le miroir. Sachant que gagner dans la vie, c'était gagner l'estime des autres d'une manière ou d'une autre, n'est-ce pas? Mais où les apparences étai-ent souvent trompeuses en se donnant une image heureuse de soi pour les séduire et pourquoi pas par la chance? Mais cette activité des plus solitaires et égoïstes qui soit, vous entraînait malheur-eusement vers la plus profonde des solitudes à la fin de votre vie. Et heureusement grâce à ma ch-ance, j'avais réussi à sauver les apparences! dit-il en s'envoyant un large sourire à travers le mi-roir.

86

Rassuré par tous ses dons de plasticité aussi bien intellectuels que physiques, il fallit tomber am-oureux de lui-même en s'approchant un peu trop près du miroir. Alfred Swan en pygama et panto-ufles aurait pu faire tomber plus d'un top model à ses genoux! pensa-t-il en collant sa bouche contre la vitre du miroir. Lui devenu amoureux de lui-même? Pouvions nous le concevoir, mon cher lecteur? Mais au juste, le joker n'était-il pas ce personnage enigmatique qui pouvait créer la surprise quand il le voulait?

Après ces hauts moments d'intimités entre Alfred Swan et son moi intèrieur, il repartit dans sa ch-ambre pour s'habiller; mais en passant par le couloir, il entendit soudainement la porte d'entrée s' ouvrir! Curieusement, il ne s'y précipita pas, mais resta dans l'ombre du couloir comme pour mi- eux écouter. Quelques instant plus tard, il entendit des voix plaintives resonner dans le salon. Ma-is qu'est-ce qui se passe? se demandait-il intrigué. Alfred, qui semblait très embarrassé de se mo-ntrer en pyjama, préfera plutôt écouter de loin ce qui se disait. Allez, ma p'tite Charlotte, ne ple-ure pas et viens t'assoir sur le canapé, je vais te preparer une tasse de thé. Oh merci, Clotilde, sn-iff..sniff. Et toi, Leslie, tu veux quoi? Moi je veux rien! répondit séchement une petite fille qui semblait désemparée. Charlotte, Leslie, mais que font-elles ici? se demanda-il l'air affolé en les connaissant parfaitement où Charlotte était la femme de son meilleur ami, Jean-René et Leslie l' enfant du couple. Mais ne pouvant plus contenir son embarras, il se decida à sortir et vit soudai-nement apparaitre devant lui, assises sur le canapé, Charlotte avec un gros oeil au beurre noir et Leslie qui lui tenait la main! Mais qu'est-ce qui se passe, ici, non de dieu? lança-t-il avec véhem-ence dans le salon en essayant de trouver sa femme, Clotilde. Mais ne la trouvant pas (car celle-ci était partie dans la cuisine preparer du thé), il se mit à fixer soudainement avec des yeux plein de pitié ces deux êtres assis sur le canapé, puis s'adressant à Charlotte lui demanda : Mais qu'est-ce qui s'est passé?

87

Sniff...Sniff, c'est Jean-René qui nous a mises à la porte! lui répondit-elle dont le visage amoché était rempli de larmes. Comment? Comment il vous à mises à la porte? leur expédia-t-il l'air ind-igné. Oui, il nous a mises à la porte parce que..parce qu'il voulait plus nous voir! lança furieuse-ment Leslie qui souhaitait finir les mots de sa mère, mais aussi dans ses bras. Non, ma petite, ne pleure pas! C'est un salaud, rien qu'un salaud! Comme tous les hommes! lança-t-elle la bouche pleine de venin. Au même instant, sa femme Clotilde sortit de la cuisine avec un plateau entre les mains et lui dit : Oh toi, ici, Alfred? Comment moi, ici? lui retorqua-t-il en ne comprenant pas très bien son expression. A cet instant, il comprit qu'il était de trop dans cette scene, où ces trois femmes le regardaient maintenant avec des yeux plein de reproches, comme celui d'être un hom-me, bref, d'être un salaud! Soudainement, il sentit ce poids insupportable lui peser sur les épaules et partit du salon presque en fuyant. Bon, je vais me changer! dit-il comme pour se justifier.

Mais au lieu d'aller se changer dans sa chambre, Alfred partit s'enfermer dans son bureau pour y retrouver un peu de sérénité. Les coudes appuyés sur la table et se tenant la tête entre les mains, il ne comprenait plus rien à ce qui se passait. Apparemment, son ami, Jean-René, avait pété les plo-mbs! pensa-t-il en se remémorant ces soirées inoubliables qu'il avait passé avec lui dans les plus grands casino de la planète pendant sa folle jeunesse. Rouge de colère contre lui-même et contre ses amitiés pour lesquelles il n'y pouvait rien, ses yeux se remplirent aussitôt de larmes qu'il n'e-ssaya même pas d'arrêter le flot en inondant son bureau telle une petite mare où, à travers le refl-et, il aperçut son visage pour lequel il eut soudainement pitié.

Ce visage n'était pas seulement le sien, mais aussi de son ami pour lequel il avait une amitié sans bornes, jusqu'à la mort! lança-t-il les yeux plein de larmes. Mais comment est-ce possible, mon dieu? se demanda-t-il en s'imaginant tous les scénarios possibles pour celui-ci. Avait-il repris le jeu et perdu une grosse somme d'argent pour mettre sa famille dans une telle situation ou bien était-il devenu fou au point d'être enfermé dans un asile? Un instant, il voulut l'appeler au téléph-one pour lui demander de ses nouvelles ou plutôt des explications. Mais voyant la chose maladr-oite, il y renonça en pensant que ce n'était pas à lui, son meilleur ami, de lui faire la morale. Dé-sespéré de constater les désastres du jeu d'argent dans la vie des hommes, qu'il avait su déjouer en trouvant l'amour auprès de sa femme, il semblait chercher dans sa tête une solution pour sortir son ami de ce gros merdier, si l'on peut dire. Attendons quelques jours! dit-il en voulant jouer le jeu pour lequel il était destiné, bref, le joker. Apaisé, Alfred, sécha ses larmes avec un mouchoir Kleenex qu'il trouva dans son tiroir, puis épongea la petite mare qui se trouvait sur son bureau. Mais ne voulant pas sortir de son bureau, où il se sentit protégé de tous les mots et les maux des hommes, il partit s'allonger sur le canapé qui s'y trouvait, puis s'endormit.

88

1 heure plus tard à la porte de son bureau.

-Toc! Toc! Alfred, tu veux m'ouvrir?

Aucune réponse.

Toc! Toc! Ohé, tu m'entends? Veux-tu m'ouvrir?

Alfred se réveillant en sursaut( mais ne voulant pas ouvrir à sa femme) se campa au bord du can-apé pour lui adresser la parole à travers la porte.

-Oui, qu'est-ce que tu veux? lui demanda-t-il avec une voix étrange.

-Ca va bien, chéri?

-Mais oui, je vais bien...mais qu'est ce que tu veux au juste?

-Tu ne veux toujours pas m'ouvrir, Alfred?

-Non, j't'ai dit.

-Allez, arrête de faire ton sale caractère de cochon et ouvre-moi! lui balança-t-elle en ne sachant pas mieux s'y prendre pour l'énerver encore plus.

-Quoi, tu oses m'insulter maintenant? lui expédia-t-il en sentant la colère monter en lui.

-Allez, ne fait pas l'enfant..et je pense que tu es assez grand  pour agir comme un adulte, hein?

Aucune réponse.

Alfred, désabusé par les propos mesquins de sa femme, se rallongea sur le canapé en se mettant les mains sous la tête.

-Tu disais quoi au juste? lui demanda-t-il en prenant maintenant les choses avec philosophie

-Allez, ne fait pas l'entêté et ouvre-moi maintenant!

-Chérie, je suis désolé, mais qui m'obligerait à t'ouvrir?

-Rhaaa! entendit-il derrière la porte où sa femme était au bord de la crise de nerfs.

Puis soudainement de grands coups de pieds retenirent sur la porte, Bang! Bang! Apparemment celle-ci n' était pas de son avis et voulait le lui montrer (elle qui l'avait toujours mené par le bout du nez!). A ce instant, elle sentit son mari lui échapper, bref, échapper à ses tentacules, une chose qu'elle trouvait insupportable.

89

Bang! Bang! retentit à nouveau sur la porte.

-Oh chérie, je ne pense pas que tu veuilles casser la porte de mon bureau? Et je te rappellerais que c'est interdit par la convention de Genève et des droits de l'homme! lui dit-il en homme civi- lisé.

Gros silence

-Bon, d'accord, tu as gagné, dit-elle épuisée par ce combat qui semblait inégal.

Alfred, entendant sa femme abdiquer, se leva du canapé, mais n'alla pas pour autant lui ouvrir, mais lui dit : Bon d'accord, j'ai gagné! Mais alors qu'est-ce tu voulais exaxctement?

-Oui, chéri, je voulais te demander si Charlotte et Leslie pouvaient rester ici à la maison pendant quelques jours, le temps que les choses s'arrangent?                                                    

-Mais il n'y a aucun problème! Installe-les dans la chambre d'amis où il y a deux lits, dit-il sèche-ment.

-Bon d'accord, dit-elle d'une manière apaisée. Mais avant de s'éloigner de la porte, elle lui dit d' une voix douce : on se revoit tout à l'heure pour le repas, hum?

-On verra, on verra! expédia Alfred qui voulait couper court à cette discution en sachant bien qu' il n'aurait pas le courage d'affronter, pendant le repas de midi, le regard de ces trois femmes posé sur lui comme des yeux inquisiteurs.

En tournant les yeux vers son bureau, il vit que sa petite pendule marquait 11H30. Mon dieu, bientôt midi et il faudrait que je sois parti avant, dit-il effrayé par cette pensée de devoir déjeuner avec Charlotte, Leslie et sa femme( chose que tout homme pourrait comprendre après tout ce qui s'était passé chez lui).

Alfred prudemment se dirigea vers la porte et posa son oreille contre pour voir si sa femme n' était pas toujours cachée derrière. Attentif au moindre bruit et à la moindre parole, il essayait de capter tout ce qui se passait derrière où apparemment, sa femme n'y était plus et un calme semb-lait régner de nouveau chez lui où de temps en temps, il entendait les talons de celle-ci parcourir le couloir. J'espère qu'elle va sortir! dit-il le souffle coupé par l'émotion et dans l' espoir de pou-voir sortir de son bureau sans devoir la croiser.

90

Au bout de plusieurs minutes, qui lui parurent durer une éternité, il entendit des voix venir appar-emment du salon; Alfred, ne voulant pas en lâcher une seule bride, se colla plus près de la porte pour mieux entendre où son corps faisait office de boite de résonance : Charlotte, ne t'inquiète pas, je serai de retour dans une petite demi-heure, le temps d'aller faire les courses au supermarc-hé! entendit-il. Heureux de ce denouement, il esquissa un large sourire et attendit que sa femme sorte. Puis entendant enfin le bruit de la porte claquer ainsi que Charlotte et Leslie partirent dans leur chambre, il se décida à sortir de son bureau en prenant soin d'enlever ses pantoufles pour ne pas faire de bruit, puis se glissa à travers la porte pour se diriger vers sa chambre où il se changea rapidement. Avant de sortir, se sentant un peu lâche de laisser sa femme dans une telle situation, il alla dans la cuisine pour lui laisser un message sur un postit qu'il colla sur la porte du frigo : Chérie, je suis désolé, mais ne m'attends pas pour déjeuner. J'ai des choses ultra-urgentes à faire cet après-midi. Allez bye!

Arrivé dans le garage de la propriété, il vit que la voiture de sa femme n'était plus là, ce qui le ra-ssura. C'était une smart de couleur noire décorée avec des marguerites, bref, une voiture miniatu-re dont les femmes raffolaient pour leur côté pratique aussi bien pour se garer en ville que pour se frayer un passage au milieu de la circulation. Puis il se dirigea vers sa grosse voiture, une Ma-serati de couleur blanche dont il était amoureux fou. Il se souvenait très bien de l'avoir acquise, non à la sueur de son front comme la plupart des travailleurs, mais d'une manière extraordinaire au cours d'une soirée à la roulette au casino de Monte-Carlo : où son propriétaire, ayant tout per-du et voulant se refaire, lui proposa pour la modique somme de 10000 euros, bref, une occasion inespérée qu'Alfred ne pouvait laisser passer dont le rêve était d'en posséder une depuis sa prime jeunesse. Chose extraordinaire, la transaction se fit sans fioritures sur un coin de table à quelques mètres de la roulette où le propriétaire, un homme d'une trentaine d'années, mal rasé et visible-ment au bout du rouleau, lui présenta les papiers du véhicule ainsi que les clefs accompagnées du célèbre trident qui ne pouvait tromper personne. Alfred voulut le payer en chèque, mais celui-ci refusa pour du liquide!

91

Tenant enfin son rêve au bout des doigts, mais étant d'une lucidité à toute épreuve, il exigea un papier de vente pour qu'il n'y eut aucune entourloupe où la signature ferait usage de bonne foi, lui avait-il dit. Le propriètaire, surprenamment, sortit de sa poche intérieure une feuille de papier pliée en quatre sur laquelle tout était écrit : l'espace libre pour qu'Alfred y inscrive son nom et le signe. Le propriétaire avait semble-t-il tout prévu en cas de perte! pensa-t-il comme en admiration devant ce joueur très organisé ou précautionneux. Si vous voulez la voir, elle est de couleur bla-nche à l'entrée du parking! lui dit-il l'air pressé de toucher son argent. En allant chercher l'argent à la banque, il ne put s'empêcher d'aller la voir où, bien éffectivement, il vit sur le parking du casi-no un vrai petit bijou qu'il allait pouvoir piloter dans peu de temps. Une demi-heure plus tard, il remonta au casino et paya la somme convenue au propriétaire qui lui remit en mains propres les clefs du véhicule ainsi que tous les papiers. Il se souvenait très bien ce soir là, qu'il avait peut-être perdu 10000 euros au casino, mais en avait toujours la jouissance grâce au véhicule, ce qui pour lui était une partie gagnante, n'est-ce pas? Le retour à son domicile fut comme dans un rêve où, au volant de sa Maserati, il n'hésita pas à faire un long détour par le front de mer jusqu'à la tombée de la nuit où la promenade des Anglais et la Croisette lui parurent briller de mille feux. Ce soir là, le plaisir et le spectacle furent à la hauteur de cette journée pleine de surprises où ma-îtrisant férocement son nouveau bolide, il se sentit tel un empereur romain détenir entre ses ma-ins comme les clefs de la ville!

Vite dépêchons-nous! dit-il en prenant conscience que le temps passait.

Montant dans sa Maserati, il s'asseya au volant et sentit avec volupté l'odeur du cuir envahir agré- ablement ses narines et lui communiquer une fièvre étrange. Où un désir de puissance et d'indes-tructabilité s'empara aussitôt de tous ses sens, quand il empoigna le volant comme on empoigne une machine de guerre. Après qu'il ait refermé la porte et mis le contact, il entendit sortir de son capot, comme le rugissement d'un tigre qui exacerbait en lui ce sentiment de toute puissance. Hou! Hou! lâcha-t-il en s'admirant à travers la glace intérieure du véhicule où, se passant la main dans les cheveux, il se vit comme un être dionysaque et très féroce. Après qu'il ait fait rugir sau-vagement son moteur, il passa la première et se glissa hors du garage avec l'agilité d'une panthère pour disparaître dans cette jungle humaine qu'on appelle la ville, et plus précisement, la ville de Menton. Mon cher lecteur, profitons qu'Alfred soit sorti pour découvrir cette ville méditérran-éenne aux fantastiques contrastes aussi bien culturels que géologiques. Bref, un paradis sur Ter-re, n'est-ce pas?

92

 

                                                        Fête du citron à Menton

Et si Alfred et sa femme Clotilde s'étaient installés dans ces lieux idylliques, ce n'était pas du tout par hasard, comme vous le conviendrez, mon cher lecteur. Imaginez maintenant, notre cher Alfr-ed, au volant d'une éclatante Maserati de couleur blanche, descendre ces côtes escarpées puis pa-sser par le vieux port pour suivre le front de mer jusqu'a Cannes où il comptait faire une bonne surprise à son ami Jean-René! Apparemment, le joker, c'était lui, l'homme imprévisible prêt à ch-ambouler tous ses plans pour assouvir sa soif insatiable de jeux et de fêtes qui faisait le fondem-ent de sa vie! s'avouait-il en passant au ralenti sur le vieux port comme pour se faire admirer par les touristes. Bizarrement en lui s'entremêlaient d'étranges paradoxes, comme la vanité avec ce désir de plaire au public et de tout partager avec lui! Bref, une grande générosité souvent en opp-osition avec sa course folle après le gain sans parler de son amour pour la solitude et en même temps cette envie irrésistible d'être mis sous les projecteurs. Alfred, malgré toutes les apparences qu'il voulût bien se donner, était une sorte de bouffon bariolés et pour être plus juste, un homme orchestre sachant jouer un peu près de tous les instruments, mais sans pouvoir en jouer un seul parfaitement! Croyez-bien, mon cher lecteur, qu'il n'était pas en conflit avec lui-même, comme pourrait le croire les psychanalystes ou autres psychologues qui déliraient sur tout et n' importe quoi pour se mettre quelque chose sous la dent, Ah!Ah!Ah! Car il était l'homme paradoxal qui visiblement avait su déjouer toutes les analyses de ces experts à l'esprit scientifique et cartésien. Bref, où l'Occident avait encore du mal à se défaire de ses préjugés issus de sa sainte raison, n' est-ce pas? Car pensiez-vous vraiment qu'il était sain pour l'humanité d'anéantir toutes ses contr-adictions ou paradoxes en sachant pertinement que l'humeur des hommes variait souvent comme la couleur du temps où un jour, elle était généreuse, puis le lendemain, féroce, puis égoïste ainsi de suite? Dit d'une autre façon, n'avions-nous pas fabriqué par la Raison des hommes et des fem-mes dépouillés de leur véritable nature? Et si au bout du compte, nos anciens philosophes( épris de raison et de sagesse) s'étaient trompés sur nous, pourrions-nous alors revenir en arrière afin de retrouver cette faculté d'être à nouveau heureux et faire de nos vies une joyeuse fête? Et pour-riez-vous croire un seul instant, mon cher lecteur, que la vie pût être une chose sérieuse en pen-sant bêtement que l'homme sans richesse allait rester enfermer dans sa chambre comme un mort-vivant pour faire plaisir à notre grand philosophe Pascal? C'était bien évidemment se bercer de grandes illusions et bien que nos chers philosophes aient eu pour les hommes de grandes ambiti-ons en matière de sagesse. Car malheureusement rien ne les interdisait d'agir en mal à moins qu' ils ne soient interpellés au moment de leurs méfaits, n'est-ce pas? Bref, la liberté, qu'on a souvent voulu enfermer dans le cadre de la loi, avait finalement beaucoup d'imagination pour ne pas se laisser enfermer là où on le voudrait, n'est-ce pas? C'était semble-t-il la grande leçon de la vie à laquelle pensait Alfred en sortant du port de Menton.

93

Mais pour l'instant, mon cher lecteur, laissons Alfred divaguer dans sa superbe Maserati sur le fr-ont de mer pour nous plonger dans l'Histoire de cette ville de Menton où les contrastes géologiq-ues et culturels sont particulièrement saisissants à nos yeux, comme vous l'avez remarqué sur les photos. Beaucoup de gens pourraient penser que le nom même de Menton pourrait s'agir d'une caractéristique physique d'un grand personnage historique ayant vécu sur les lieux dont le menton prohéminant aurait laissé quelques traces dans le nom de la ville, tel que l'empereur Othon, par exemple. Mais comme nous avons aucun portrait de lui ni aucune statue, nous ne pouvons pas en apporter la preuve, malheureusement. Ce nom de Menton pourrait aussi évoquer la forme d'un menton caractérisée par la côte mentonasque ou bien par ses côtes escapées qu'il fallait grimper où monter pour admirer le superbe littoral où le mot de "montons" serait comme un résumé du nom de Menton ou Mentan plus sonnant dans la langue locale de type occitanne. Tout ceci reste toujours possible, mon cher lecteur, ne nous le cachons pas, même si des experts en langues an-ciennes pencheraient plutôt sur une origine Ligure de ce nom où cette civilisation régna dès le 8 ème siècle avant J-C sur les Aples en Haute-Savoie d'ou la ville de Menthon, puis descendit sur les côtes méditerranéennes du côté Gênois ou Italien. Ainsi de fil en aiguille, Menton deviendra une possession Gênoise sous l'impulsion du comte de Vintimille qui fit construire dès le 13 ème siècle un chateau fort ou bastion sur la colline de Pépin pour défendre la ville des envahisseurs et en particulier de ces aventuriers ou roturiers, comme la famille des Grimaldi (future fondatrice de la principauté de Monaco) qui visera toujours a agrandir son petit royaume. Mais un premier acc-ord de paix aura lieu le 21 Juillet 1262 entre le roi Charles d'Anjou( roi de Naples et de sicile) et la république de Gênes qui lui assurera une certaine stabilité politique en vue de son enrichissem-ent. Et justement, le rocher de Monaco, minuscule promontoire situé non loin, sera emparé par François Grimaldi, l'ancêtre d'Albert de Monaco, le 9 Janvier 1297! Bref, une ville qui sera touj-ours convoitée par tous ces princes ambitieux, non pas seulement pour ses citrons qui en faisait sa principale richesse, mais surtout pour ses ouvertures vers l'ouest et la France.

94

Ainsi Menton sera acquise en monnaie sonnante et trébuchante en 1346 par Charles Grimaldi et restera en possession des princes monégasques durant 5 siècles, ce que les mentonnasques n'appr-écieront guère vu le prélèvement d'une taxe sur leurs citrons par la principauté de Monaco. La ru-pture pour ainsi dire n'était pas loin, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Mais ne nous attardons pas trop sur l'Histoire et rejoignons notre ami Alfred à bord de sa Maserati qui semblait impatient d' arriver à Cannes, la ville des stars! Vitres ouvertes et cheveux au vent, il ouvrit la boite à gants pour se saisir d'une paire de lunettes noires qu'il ajusta sur son visage afin de paraître plus féroce et mystérieux. Dans sa tête des milliers de pensées se bousculaient, comme cette lâcheté qu'il ve-nait de commettre envers ces trois femmes, Clotilde, Charlotte et Leslie, dont il n'était pas prêt à entendre les sévères critiques sur son meilleur ami, Jean-René, pour lequel il avait une amitié ind-éfectible. Mais une lâcheté qu'il assumait entièrement, ce que tous les hommes comprendront, je pense. Car Jean-René représentait pour lui sa folle jeunesse où ensemble ils avaient fait tous les casinos de la planète ainsi que tous les bordels, ne nous le cachons pas, Ah!Ah!Ah! Aussitôt, il esquissa un sourire sur sa bouche en se remémorant ces merveilleux souvenirs lorsqu'il était enc-ore célibataire et en état de bonheur permanent! Bien qu'il aimât sa femme Clotilde, celle-ci malh-euseusement ne pouvait pas lui procurer ce sentiment intense de liberté qui avait fait les joies de sa jeunesse et disons même de ses jouissances extrèmes! En se regardant d'une manière féroce à travers la glace intérieure du véhicule, il semblait comme regretter cet âge d'or en étant désormais marié à Clotilde, qui n'était pas une vilaine fille, mais qui demandait quotidienne des marques d' amour qui à la longue l'emmerdaient terriblement, soyons franc, Ah!Ah!Ah! En fait, ce qu'Alfred avait remarqué à propos des femmes, quand elles étaient ensemble comme par exemple pendant un repas, c'était leur transformation immédiate en d'abominables créatures qui démolissaient avec un grand plaisir leurs petits amis ou leurs maris! En établissant pour chacun d'eux une note de 1 à 10 quant à leurs performances au lit ainsi que sur leur qualité d'être facile ou non à vivre où cer-taines se plaignaient que leur petit ami avait une trop grosse bite, alors que d'autres une trop pet-ite! Décidément, les femmes resteraient des éternelles insatisfaites, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Ah!Ah!Ah! Bien évidemment, en tant que romancier où la morale était extensible comme du cao-utchouc, il aurait aimé écouter les médisances de ces trois femmes afin d'enrichir ses romans où les femmes étaient désormais les dominatrices. Mais sachant que c'était du réel et non de la fict-ion, il était exclu pour lui d'y participer où, prenant forcément la défense de son vieil ami, il aurait été mis en pièces par ces femmes dont le nombre était majoritaire, Ah!Ah!Ah! Toujours à propos des femmes, quand le jeune Alfred allait voir les prostituées pour multiplier ses expériences en matière de jouissances, il demanda un jour à l'une d'elle pourquoi les femmes aimaient faire l'am-our? Bien évidemment, Alfred qui était alors bien jeune pour saisir la très grande naiveté de sa question, provoqua un grand éclat de rire de la prostituée qui lui dit sur l'oreiller : Jeune homme, si les femmes aimaient faire l'amour, c'est parce qu'elles aimaient s'amuser, Ah!Ah!Ah! Ce qui ne le choqua pas du tout en se trouvant bizarrement des points communs avec la prostituée, car qu' est-ce qu'un joueur sinon qu'un jouisseur en puissance, n'est-ce pas?

95

Ce qui l'avait entrainé à se poser des questions philosophiques sur l'utilité ou non de fonder une famille qui tout compte fait était les conséquences d'une bagatelle qu'on appelait une partie de ja-mbes en l'air, Ah!Ah!Ah! Malgré qu'il en voulut parfois à sa femme de ne plus avoir accés à cette liberté totale qu'il chérissait, il admettait en toute honnêteté qu'elle était pour lui, pour l'homme sans limites, un véritable garde fou. Et comme le disait très justement Jean-Jacques Rousseau, le philosophe Suisse, la prévoyance gâchait souvent nos plaisirs, malheureusement. Tout en reconn-aissant avec honnêteté, en tant que romancier de ces dames, que l'amour était un sujet inépuisable aussi bien pour les auteurs que pour les lectrices dont la maladie s'appelait l'Amour! Mais que le mot Amour n'avait par lui-même aucune signification précise s'il n'était employé dans un conte-xte bien défini, comme par exemple, quand votre femme vous demandait le soir de vider la poub-elle, c'était bien évidemment sa façon à elle de vous dire qu'elle vous aimait ou de rallumer la flamme passionnelle qui était en vous, Ah!Ah!Ah! De même quand Clotilde lui volait un billet de 20 euros dans ses poches( parce que soi-disant elle n'avait pas la monnaie pour acheter un litre de lait, mais sans jamais lui rendre la monnaie!), c'était aussi sa façon de lui dire "Je t'aime", mais exprimé, il faut le dire, de la façon la plus maladroite au monde, Ah!Ah!Ah! Mais en tant que fin politologue et amant redoutable, il n'essaya jamais de comprendre les femmes dont les bourdes à répétitions n' avaient qu'un seul but : provoquer l'Amour! En reconnaissant avec franchise que to-us ses romans étaient traversés par un fil rouge qui liait toutes les intrigues entre elles qui s'app-elait la maladresse des femmes, Ah!Ah!Ah! C'est dire tout le potentiel en matière de suspens et de faire rebondir une histoire vers le rêve ou bien vers la catastrophe par ces grandes hystériques, n' est-ce pas? Bref, si l'Amour était difficile à définir sans contexte réel, il restait néanmoins pour les femmes un sujet inépuisable ou elles dialoguaient en permanence avec leur côté opposé qui s' appelait le masculin. En sagissant sans aucun doute d'un dialogue vieux comme le monde où le féminin et le masculin s'affrontaient pour essayer de se comprendre, mais sans véritablement y parvenir, n'est-ce pas? Pour Alfred, en tant que mâle dominant et romancier, il était évident, lor-sque le féminin et le masculin se comprendraient que ce serait la fin du monde, mais aussi celui du Roman. Bref, la victoire triomphante du roman de science-fiction et du polar où l'on parlait peu d'amour, sauf pour sauver l'humanité ou pour arrêter un dangereux psychopathe qui confon-dait malheureusement l'amour et la haine, Ah!Ah!Ah! Toujours à propos d'amour et de sexe, les femmes savaient instinctivement qu'un homme gentil faisait rarement un bon amant! Car pour provoquer l'amour et la bestialité chez un homme, il fallait qu'il soit impulsif afin qu'il satisfasse tous ses fantasmes inavouables, bien évidemment. En fait, pour dire la vérité à notre cher lecteur, les femmes rêvaient d'avoir deux hommes dans leurs vies. Cest à dire un homme gentil à la mai-son pour s'occuper des enfants et du ménage et un homme méchant à mettre dans leur lit, Ah!Ah!Ah! Mais il est vrai, un rêve difficilement réalisable par ces dames, n'est-ce pas? Et apparemment pour ces raisons qu'elles resteraient d'éternelles insatisfaites en voulant, sans être grossier, le beu-rre et l'argent du beurre, Ah!Ah!Ah! Ce qui n'était pas possible à moins qu'elles aient perdu la to-talement raison, n'est-ce pas?

96

Pour Alfred, les femmes n'étaient pas des êtres de raison où dans ses romans, il leur laissait une totale liberté afin d'étourdir le lecteur ou la lectrice en termes d'émotions. Car lui-même en tant que joueur et jouisseur, il arrivait sans difficulté à se mettre à la place des femmes prêtes à décle-ncher la 3 ème guerre mondiale pour une histoire de cul, Ah!Ah!Ah! Et le romancier pour rendre crédible ses romans auprès de la gente féminine devait développer en lui sa partie féminine. C'est à dire la partie la plus folle de son imagination, mais sans pour autant anéantir son être masculin ou sa virilité. Apparemment, un jeux assez dangereux pour n'importe quel auteur homme par la crainte qu'il se transforme en femme, n'est-ce pas? Mais sans véritable danger pour Alfred qui éta-it un joueur né avec cette capacité extraordinaire de perdre la raison volontairement, comme au-tour d'une table de jeux au casino ou bien dans ses romans, puis de la retrouver afin de retrouver le calme et la sérénité. Il est vrai, un jeu très subtil où le féminin et le masculin s'affrontaient avec des armes totalement différentes où dans un roman l'absence de virilité serait un fantasme d'écri-ture, comme une histoire sans actes réels! Et que demandaient d'autres nos chères lectrices, sinon des sensations fortes pour se sentir vivre et exister? En roulant à vivre allure en direction de Can-nes, Alfred avait le sentiment de remonter le temps avec cette horrible crainte que son meilleur ami se soit suicidé après qu'il ait subi de lourdes pertes au jeu! Car lui-même, avant de rencont-rer Clotilde, combien de fois n'avait-il pas été éffleuré par cettte idée de mettre fin à ses jours en sortant du casino au petit matin sans plus aucun rond en poche, sinon 1 euros 50 pour se payer un café? se demandait-il envahi par un mauvais pressentiment. Merde, j'espère qu'il n'a pas fait cette grosse connerie! lâcha-t-il pris d'une rage folle contre lui-même et contre ses amitiés auxquelles il ne pouvait rien changer. Transporté par sa féroce imagination, il se voyait arriver malheureusem-ent trop tard chez son ami où il le découvrait mort pendu aux rideaux de sa salle de bain! Pénétré par une immense douleur, il se voyait soulever le corps inerte de son meilleur ami pour le décro-cher de son gibet de fortune, puis le prendre dans ses bras et le bercer comme un petit enfant ju-squ'à la nuit tombée! Aussitôt des larmes inconsolables inondèrent les yeux d'Alfred qui, pris par une immense émotion, arrêta son véhicule au bord de la route pour ne pas finir dans un ravin! En retirant ses lunettes noires, il remarqua en se regardant dans la glace intérieure du véhicule que son regard avait change et qu'il ressemblait désormais à celui d'un enfant qui avait perdu son mei-lleur camarade de jeu qui s'appelait Jean-Ré pour les intimes! Car les jeunes gens ignoraient sou-vent qu'à un âge avancé, il leur serait impossible de se crèer de nouvelles amitiès en constatant amèrement que leurs derniers amis seraient leurs derniers amis pour la vie! Et Alfred, qui avait fréquenté toute sa vie les salles de casino, en savait beaucoup sur cette solitude qui guettait, non pas seulement le joueur professionnel, mais aussi chacun d'entre nous à la fin de sa vie. Et s'il ne s'était pas créé des amis entre temps, il allait tout droit vers le suicide en pensant subitement à son meilleur ami qui semble-t-il avait oublié leur indéfectible amitié. Mais pourquoi ne m'a-t-il pas appelé pour me demander de l'aide? s'interrogeait-il avec inquiètude en pensant au pire. Dans sa tête semblait surgir un immense incendie en ne sachant plus comment l'éteindre, sinon que par ses propres larmes!

97

Affalé sur le siège de son véhicule, Alfred tomba dans un curieux sommeil afin de taire le chaos qui règnait dans sa tête avec cette possibilité infime de sauver son meilleur ami d'une mort certai-ne! A propos de suicide, beaucoup de gens pensaient qu'il était un acte irréfléchi de la part d'un homme ou d'une femme désespérée. Alors qu'Alfred pensait tout au contraire qu'il était un acte mûrement réfléchi et longuement médité par un être parfaitement lucide! Bien sûr, tout cela pou-vait choquer la plupart d'entre nous qui vivions dans un confort intellectuel qu'on appelait nos préjugés! Mais Alfred n'était-il pas l'homme sans limites que nous connaissions et qui savait de quoi il parlait, mon cher lecteur? Car à force de cotoyer les bas fonds de la nature humaine et tout particulièrement ces escrocs à la bonne mine, il avait remarqué que l'homme était constitué de plusieurs individus ou personnalités qui n'étaient pas forcément d'accord entre elles, lorsqu'il fall-ait prendre une décision importante, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Pour ressembler étonnamm-ent au personnage de Gollum dans les seigneurs des anneaux dont la double personnalité le tortu-rait à chaque fois qu'il devait prendre une decision et tout particulièrement la bonne decision. Et sans bien comprendre pourquoi, il surgissait aussitôt de lui un personnage sournois qui l'inclinait à vouloir du mal à ses amis! Pour Alfred, il était évident que la personnalité la plus mauvaise en nous prenait souvent le pouvoir où le rôle des autres personnalités servaient uniquement de mod-érateur pour éviter le pire, bien évidemment. Et si Jésus-Christ encourageait individuellement les hommes à s'aimer, ce n'était pas anodin, mais seulement pour développer en eux la meilleur pers-onne au monde! Et que finalement vouloir mettre fin à ses jours, c'était uniquement vouloir assa-ssiner cet être malfaisant qui avait pris possession de notre âme, comme le pensait avec sincèrité Alfred qui plusieurs fois fut confronté au suicide. Visiblement, il semblait avoir peu de différence entre un suicide et un crime où tuer un autre ou soi-même revenait au même, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Oui, je sais, une conception totalement révolutionnaire de voir l'humanité qui pou-rrait alors chambouler toutes les lois humaines en matière de justice, n'est-ce pas? Mais au juste, Alfred n'était-il pas un génie quand il poussait ses réflexions jusqu'aux limites de la pensée hu-maine? Mais à vrai dire, un génie qui ne l'intéressait guère, car il n'était pas un intellectuel, mais un joueur dont la seule motivation était de jouir d'une manière ou d'une autre. Je le répète une nouvelle fois à mon cher lecteur, Alfred Swan n'était pas en conflit avec lui-même. Car il avait réussi à sauver les apparences en reussissant économiquement dans la vie, mais aussi à réunifier toutes ses personnalités intéieures grâce à l'homme orchestre qu'il était. Sans pour autant délaisser en ce moment son roman sur la guerre de Crimée qu'il avait mis en stand by pour aller sauver son meilleur ami d'une mort certaine. Un roman historique qui n'avait pas encore de titre pour l'insta-nt, mais qu'il comptait appeler "Victoria" . Un titre haut en couleur qui sous entendait la victoire des femmes dans le prochain millénaire afin de plaire à la gente féminine, mais surtout à sa fem-me Clotilde qui serait chargée de faire sa promotion grâce à son côté femme d'affaire, Ah!Ah!Ah! En pensant à son roman, curieusement, il se demandait ce que pouvait bien faire en ce moment la reine Victoira qui venait de quitter l'amiral Bretjones au palais de Buckingham? Allait-elle s'em-piffrer de cotelettes d'agneaux et de patisseries à la crème pour occuper son ennui ou bien allait-elle s'emparer du conflit sur la guerre de Crimée pour exprimer sa personnalité guerrière?

98

C'est ce qu'il se demandait avec raison dont le roman semblait se continuer tout seul en lui. Et Jo-sépha que devait-elle faire en ce moment dans son chateau de Watergrown avec ses idées de me-urtre à l'égard de son mari, l'amiral Bretjones? se demandait-il pris de passion par cette histoire où un futur empoisonnement se profilait à l'horizon si l'amiral revenait vivant de la guerre! Assai-lli par toutes ces questions qui semblaient l'éloigner de la réalité, Alfred se saisit aussitôt de son portable pour téléphoner à son ami, Jean-René. La gorge nouée par l'émotion pendant quelques instants, il tomba malheureusement sur son répondeur où la voix de ce dernier le mit en émoi : Vous êtes bien chez Monsieur Jean-René Lastier et je suis absent en ce moment. Vous pouvez me laisser un message si c'est pour une raison importante. Merci, bonne journée! Après le bip sonore, Alfred, ne pouvant garder le silence une seconde de plus laissa son message : Oui, c'est moi, Al-fred et je voudrais savoir si cet après-midi on pouvait se voir au Petit Canet pour se rappeler le bon vieux temps, Ah!Ah!Ah! En ce moment, je suis sur la route en direction de Cannes et j'arrive-rai dans une heure au maximum. Allez à tout à l'heure, mon ami! Le Petit Canet dont il faisait référence était un café-restaurant situé sur la Croisette dont il connaissait personnellement le patr-on qui, passionné de cinéma, avait recouvert tous les murs de son établissement par des milliers de photos de stars relatant l'histoire du festival de Cannes. Ainsi régnait à l'intérieur de l'établiss-ement une ambiance mythique qui ne laissait jamais indifférent ni les habitués ni la jeune client-èle alors pleine de projets ambitieux. En raccrochant, Alfred se demandait avec inquiètude s'il n' était désormais pas trop tard pour sauver son meilleur ami? Avec ce grand espoir qu'en cours de route, celui-ci l'appelle et lui dise : Mon cher Alfred, comme d'habitude, je t'attendrai au Petit Ca-net à la table numéro 9 qui nous avait tant porté chance, Ah!Ah!Ah! Cette table portant le numéro 9 était pour eux comme leur point de ralliement qu'ils considéraient comme une table porte-bon-heur quand ils allaient flamber dans les casinos de la Côte d'Azur où souvent ils sortaient gagnan-ts. Au point d'avoir collé au centre, avec l'accord du patron, un jeton de casino tel un talisman. Tous ces souvenirs jouissifs semblaient lui revenir à la mémoire tel un tsunami au point qu'il fai-llit pleurer une nouvelle fois au volant de son bolide!

99

Voici quelques photos du festival de Cannes affichées au Petit Canet.

 

 

 

 

La Croisette

 

Trajet entre Menton et Cannes effectué par Alfred à bord de sa Maserati

Avant de reprendre la route, il repositionna son portable en kit mains libres sur le tableau de bord de sa Maserati afin de ne pas devoir s'arrêter une seconde fois. Pendant que se déroulait ce drame dans sa tête, il faisait un temps magnifique sur le front de mer avec toutes ces odeurs sucrées de pins méditérranéens et le chant des cigales qui semblait s'élever de la Terre, comme une promesse d'amour! A l'horizon s'étendait à perte de vue la mer éternellement bleue où brillait à l'intérieur des étoiles d'or et d'argent éblouissant nos imaginations depuis la création du monde. Instinctive-ment, Alfred remit ses lunettes noires afin de ne pas être ébloui par cette inépuisable beauté qui s' offrait à lui et à tous ceux qui avait encore leur capacité à s'émerveiller. Aussitôt, un sentiment d'amour s'empara de lui en pensant à son meilleur ami dont il avait entendu l'appel au secours en appuyant instantanément sur l'accélérateur. En ce début de l'été et de l'ouverture prochaine du fes-tival de Cannes, la Terre semblait amoureuse, comme une petite Lolita en communiquant sans au-cune pudeur tous ses désirs aux créatures vivantes dont le coeur d'Alfred n'était pas insensible. Sans pour autant croire qu'Alfred eut le coeur d'une midinette, mais avec parfois cet étrange senti-ment de redevenir une petite fille, comme tous les garçons dont l'enfance fut sans sexualité! A ce propos, il se souvenait sans aucune honte de sa soeur qui parfois lui peignait les cheveux comme ceux d'une poupée en lui faisant un chignon, Ah!Ah!Ah! Apparemment, il avait goûté en ces tem-ps bien innocents à une jouissance toute féminime, mais qui pour autant ne l'avait pas transformé en homosexuel, car il se sentait avant tout un garçon avec des attributs masculins, Ah!Ah!Ah! En roulant avec prudence sur les pentes escarpées du rocher de Monaco, il avait l'impression de se re-trouver dans un film d'Alfred Hitchcock " La main au collet" dont les scènes avaient été filmées en grande partie sur le rocher de Monaco et sur la Côte d'Azur qu'on appelait autrefois la Riviera. En se rappelant avec bonheur et tristesse à la fois, la scène où Cary Grant et Grace Kelly mangea-ient du poulet froid à bord de leur décapotable Sunbeam Alpine au bord d'un ravin surplombant la Principauté. Le lieu même où Grace Kelly perdra la vie un 14 Septembre 1982! Dans ce film ple-in de suspens, Grace jouait le rôle d'une voleuse de haute voltige qui écumait tous les hôtels de luxe de la Riviera et, Cary Grant, la pauvre victime soupçonnée injustement à cause de son passé de cambrioleur connu par l'inspecteur qui menait l'enquête. Le suspens du film consistait à Cary Grant a prendre en flagrant délit la voleuse dont il allait bien évidemment tomber amoureux telle-ment elle était sublime. Mais étrangement, Alfred avait en ce moment, un mauvais pressentiment en pensant au film et à la situation désespérée de son meilleur ami où "la main au collet" semblait résonner dans sa tête d'une manière macabre! Et qu'au bout du compte, il était peut-être déjà trop tard pour le sauver avec cette horrible possibilité de le découvrir mort chez lui pendu aux rideaux de sa salle de bain à cause de lourdes pertes au jeu ou à des dettes de jeu qu'ils ne pouvaient plus honnorer? se demandait-il avec inquiètude en regardant avec insistance son portable qui restait désespérement muet.

100

Avec la sombre impression d'être poursuivi sans relâche par la filmographie perverse d'Alfred Hitchcock, alors qu'il faisait un temps merveilleux sur le front de mer où la psychose semblait s' emparer de lui. En imaginant la scène du crime constituée d'une salle de bain et d'un rideau mac-ulé de sang, comme dans Psychose où Marion Crane( Janet Leigt) était sauvagement assassinée dans sa salle de bain par un psychopathe dénommé, Norman Bates (Anthony Perkins). Aussitôt, une peur irrationnelle s'empara de lui avec le sentiment d'avoir la mort à ses trousses en pensant à son ami! Mais pour une raison inconnue ou peut-être pour fuir, il s'engagea sur la départementale 37 qui menait sur les lieux où Grace kelly avait perdu la vie. Puis pour se changer les idées, il all-uma la radio et tomba par hasard sur RMC( Radio Monte Carlo) qui diffusait "Comme un oura-gan", une chanson interprétée par Stéphanie de Monaco, la fille de Grace Kelly. Décidément, il n'y avait pas de hasard! lâcha-t-il du bout des lèvres en étant très perturbé par tous ces évènements qui semblaient étrangement coïncider avec ce qu'il vivait en ce moment. En écoutant avec attention les paroles de la chanson qui disaient " Comme un ouragan, la tempête en moi a balayé le passé, allumé ma vie, c'est un incendie qu'on ne peut plus arrêter", Alfred sembla bouleversé au volant de sa Maserati avec ce sentiment intense de retrouver sa jeunesse qui fut caractérisée par une folle insouciance. Avec cette douce sensation de retrouver une virginité dans le luxe de son bolide en pensant ironiquement aux vieux riches qui donneraient toute leur fortune pour retrouver cet état de grâce qu'on appelle la jeunesse, Ah!Ah!Ah! Visiblement, Alfred par son insolence retrouvée semblait nous montrer qu'il était habité par une jeunesse éternelle grâce à son esprit de joueur et de jouisseur, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Pendant que la chanson "Comme un ouragan" dévas-tait sa mémoire, il semblait ressentir une grande haine( longuement refoulée) envers sa femme qui le faisait travailler comme un nègre sur ses romans, mais aussi parce qu'elle était une voleuse comme toute les femmes, Ah!Ah!Ah! En la comparant presque à Grace Kelly qui dans la main au collet jouait le rôle d'une voleuse de grand luxe. Car il savait en tant que romancier de ces dames qu'il sommellait en chaque femme, une voleuse, comme il sommeillait en chaque homme, un po-rc, Ah!Ah!Ah! A ce propos, il se souvenait un jour de la disparition d'un objet fétiche qu'il avait acheté au cours d'un voyage en Thaïland qui représentait une petite grenouille incrustée de dia-mants. Emporté par la colère, il accusa naturellement sa femme d'etre l'auteure du vol sachant qu' elle avait l'habitude de lui voler de l'argent dans les poches! lui fit-il remarquer sans prendre de pi-ncettes. Mais Clotilde se sentant totalement innocente( comme toutes les femmes) lui répliqua : Mais chéri, pourquoi voudrais-tu que je te vole ta petite grenouille, alors que je pouvais l'admirer gratuitement pendant toute la journée? Alfred, interloqué pendant un instant par la remarque très judicieuse de sa femme, lui demanda ce qu'elle voulait dire au juste? Aussitôt Clotilde lui dit : Mon cher Alfred, tu devrais plutôt demander à ta soeur pourquoi il manque toujours quelque ch-ose à la maison après qu'on l'ait invité à dîner?

101

Mais c'est vrai! lâcha-t-il brutalement en étant ébranlé une nouvelle fois par les intuitions de sa fe-mme qu'il accusait injustement à chaque fois qu'il disparaissait un bibelot dans le salon. Bien, bien, dit-il en prenant conscience soudainement que c'était sa soeur qui le volait, mais sans pour autant disculper sa femme qui jusque avait gardé le secret. Par ces faits évidents, il comprit aussi-tôt qu'il y existait une solidarité entre les femmes qui visiblement refusaient de s'accuser de vols parce qu'elles étaient toutes des voleuses, Ah!Ah!Ah! Et si Clotilde avait gardé le silence jusque là, c'était pour elle toute à fait justifié en ne voulant pas causer de la peine à son mari qui aurait été dévasté d'apprendre que sa propre soeur le volait! A partir de ce jour, Alfred, qui ne voulait pas rompre avec les derniers vestiges de sa famille, prit la décision d'inviter sa soeur uniquement au restaurant, Ah!Ah!Ah! En revenant à la réalité à bord de sa Maserati, il avait le sentiment que son itinéraire ressemblait étonnamment à une mortelle randonnée que la radio accompagnait mai-ntenant d'une manière poignante par une chanson d'Elsa "T'en vas pas!" Submergé par l'émotion en écoutant les paroles où transpiraient nos éternels regrets " Nuit tu me fais peur, nuit ne t'en va pas, nuit tu n'en finis pas comme un voleur. Papa je t'assure arrête ton cinéma!" il se demandait avec angoisse à qui pouvaient-elles être bien destinées : à son meilleur ami ou bien à son père qu' il avait à peine connu? En prenant conscience soudainement par tout ce chaos qui grondait en lui qu'il avait pris sans le savoir son meilleur ami pour un père de substitution! Effondré sur son vo-lant, il n'osa même pas retirer ses lunettes noires pour ne pas voir sur la glace intérieure du véhi-cule son visage déformé par cette horrible vérité, mais se cramponna à son volant comme on se cramponne à une bouée de secours. Mortelle randonnée! Mortelle randonnée! murmura-t-il du bout des lèvres, comme on fredonne un refrain macabre dont le destin était inéluctable. Et si son meilleur ami mourait, ce serait la mort définitive du père! pensa-t-il dégoûté par la vie. En rem-arquant avec lucidité que les jeunes gens, marqués par l'absence d'un père, étaient attirés nature-llement par des personnes plus âgées afin de trouver une figure paternelle à laquelle s'identifier et pour les plus évolués d'entre eux, un père spirituel. C'est ce qui l'avait semble-t-il attiré chez Jean-René qui avait une petite dizaine d'années de plus que lui et pris pour un père de substition. Où à force de cotoyer les bas fonds de l'humanité, par sa nature de joueur et de jouisseur, il avait com-pris qu'il existait chez l'homme trois types de personnalité. La première qui donnait aux autres de l'affection. La seconde qui attendait tout des autres. La troisième qui était indifférente au sort des autres! Sous entendu que la troisième personnalité était peu sensible à la déprime puisqu'elle n'at-tendait rien des autres, n'est-ce pas? En saisissant avec clairvoyance que Socrate et Platon ne fu-rent pas seulement considérés par leurs élèves comme de grands philosophes, mais aussi comme des pères spirituels où porter leurs affections dont la plupart des pères avaient démissionnés de leur fonction paternelle. C'est ce que tout le monde savait, mais que personne n'osait s'avouer ni les pères défaillants fuyant le domicile pour des raisons inavouables, n'est-ce pas? Mais sans en-trer dans les détails sordides, il faut bien comprendre que tout ceci faisait partie entièrement de la nature humaine et qu'on ne changera pas de sitôt, je vous l'assure, mon cher lecteur.

102

Visiblement, la perte possible de son meilleur ami, Jean-Ré, semblait lui causer de grandes angoi-sses existentielles avec le sentiment de revivre ce vide abyssal qu'il avait éprouvé durant son en-fance où l'absence du père avait causé en lui un lourd traumatisme affectif d'ordre masculin, bien évidemment. Car bien qu'il fut aimé par sa mère et même un peu trop selon lui( car elle le laissait faire tout ce qu'il voulait), il sentit très tôt qu'elle n'avait aucune autorité sur lui et sur ses frères et soeurs qui apparemment se dirigeaient tout droit faire vers le désordre mental ou peut-être vers la psychiatrie? s'était-il longtemps demandé en suivant son pacourt personnel plutôt atypique et celui de ses frères et soeurs qui n'était franchement pas merveilleux. Visiblement, l'amour d'une mère ne pourrait jamais combler l'absence d'un père qui représentait pour tous les petits garçons, un héros auquel s'identifier pour se sentir des hommes et non des femmes! Sans parler de ces enf-ants abandonnés par leurs deux parents qui développaient en eux des traumatismes affectifs irrév-ersibles aptes à les transformer en de dangereux psychopathes, n'est-ce pas? Mais sans aller dans ces excés, prenons l'exemple du destin tragique de Marylin Monroe qui fut abandonnée dès son plus jeune âge par ses deux parents pour l'abominable raison qu'ils avaient raté tous les deux leurs carrières à Hollywood! D'après ce qu'on sait sur son histoire, son père était musicien de jazz et ressemblait étonnamment à Clark Gable et sa mère, monteuse de films, rêvait de devenir comé-dienne, mais sans avoir assez de talents pour y parvenir à moins qu'elle n'ait eu pas beaucoup de chance? se demandait avec lucidité Alfred qui en tant que joueur professionnel savait qu'une vie réussie ne pouvait se passer de l'intervention d'une fée qu'on appelle la chance. N'en était-il pas la preuve vivante, mon cher lecteur? A l'évidence, la vie ratée de nos parents faisait porter sur nos frêles épaules des choses bien lourdes, comme une malédiction, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Mais il faut dire, une malédiction que seule notre réussite sociale et économique put conjurer le destin en la transformant en délivrance. Certes, une merveilleuse Happy End pour celui ou celle qui la vivait, mais qu'on voyait rarement se concrètiser dans la réalité, mais seulement à Hollywo-od, Ah!Ah!Ah! Quant à cette figure parternelle recherchée inlassablement par Marylin Monroe, celle-ci s'appelait Clark Gable à cause de sa ressemblance étonnante avec son père que sa mère Gladys lui avait montré un jour sur une photo quand elle était enfant. Mais lorsque Clark Gable se maria avec l'actrice, Kay Williams, Marylin tomba soudainement dans une profonde dépression avec cette terrible impression de perdre une seconde fois son père! Dans le grand salon de sa su-blime villa à Los Angeles, où trônait un beau piano blanc, tous les soirs avant d'aller se coucher Marylin effleurait les touches comme pour se rappeler le souvenir d'un père que rien n'avait pu combler l'absence. En revenant à la réalité, Alfred faisait l'amer constat que Marylin Monroe s'ét-ait suicidée à son domicile, alors qu'elle avait rèussi une carrière extraordinaire à Hollywood ain-si qu'a conjurer sa propre malédiction! Mais apparemment, nous n'étions que des enfants avortés par nos parents démissionaires! remarquait-il avec amertume à bord de sa Maserati en se dirigea-nt vers le lieu où Grace Kelly avait perdu la vie. Pour ne pas accentuer son desarroi, il eteignit la radio en pensant aux quelques souvenirs qui lui restait de son père.

103

Où tous les dimanches après le repas, celui-ci revêtait l'habit d'un magicien pour nous faire des tours de magie! se rappelait-il avec bonheur en esquissant un sourire sur sa bouche. Et nous assis autour de la table, emerveillés, nous le regardions transformer sous nos yeux, une motte de beurre en lingot d'or, puis une poignée de sel de table en cristaux de diamants, puis une bouteille d'eau plate en bouteille de champagne qu'il sortait de son chapeau haute forme comme par magie! Bien évidemment, toute la famille autour de la table voulait y croire parce que nous vivions pauvreme-nt, mais sans être véritablement malheureux parce que nous étions aimés par nos parents! reconn-aissait-il avec honnêteté en detestant le misérablilisme des romans d'Emile Zola et de Victor Hu-go qui en faisaient l'effrayante apologie. Mais une préférence pour les auteurs de la même épo-que, comme Charles Dickens et Jules Vernes dont les romans pétris de fantastique le fascinaient afin de transcender la triste réalité, bien évidemment. Après ce petit flash back dans le passé, il ne faisait aucun doute pour lui que son père avait dû renoncer à ses ambitions d'artistes pour fonder une famille avec sa mère, une ouvrière dans le textile. Il était d'origine italienne et elle était origi-naire de Lille dans la région du Pas-de-Calais où la vie était constamment embrumée par la fumée des usines et un temps souvent maussade! se rappelait-il en éveillant en lui un éternel ennui. Puis un jour, sans prévenir, il quitta le domicile famillial en laissant un mot sur la table où il avait écrit ceci : Je pars, je n'en peux plus! Ce qui plongea subitement notre famille dans un drame inextri-cable où se mèla étrangement un sentiment d'abandon avec un sentiment de délivrance en sachant que maman n'avait aucune autorité sur nous! A partir de ce jour, je compris que sans autorité paternelle toute notre famille allait partir en vrille, ce qu'elle ne manqua pas de faire vu la situa-tion de chacun d'aujourd'hui dont les destins étaient plutôt bizarroïdes, comme celui de ma soeur qui était devenue une cleptomane pathologique! En analysant sa propre situation, de joueur prof-essionnel et de romancier, il avait le sentiment qu'il avait hérité de la nature fantasque de son père et de la nature laborieuse de sa mère, ouvière dans le textile, où tout compte fait écrire des rom-ans revenait à tisser une histoire afin d'élaborer un conte de fée, n'est-ce pas? A ce propos, grâce à ses dons d'artistes hérités de son père, il savait exactement ce qui distinguait l'art du cochon, Ah!Ah!Ah! Car en analysant les livres de ses confrères romanciers et écrivains, il avait remarqué que la plupart ne faisait plus de littérature, mais de la littérature industrielle. C'est à dire en ne constr-uisant plus leurs histoires à partir de leur imagination, mais avec des matériaux chippés à gauche et à droite dans les médias et dans le grand livre des autres. Bref, avec des matériaux prêts à l'em-ploi faciles à intégrer à leurs bouquins pour rentabiliser au maximim leur temps d'écriture, mais aussi afin que le lecteur reconnaisse ses petits, si l'on peut dire. Visiblement, aujourd'hui, nous n' avions plus affaire à des conteurs, mais plutôt à des documentalistes ou à des recycleurs, Ah!Ah!Ah! Ce qui représentait pour Alfred, un joli tour de passe-passe pour les écrivains et les maisons d'editions, mais sans avoir le charme de la magie! reconnaissait-il avec lucidité. Mais un tour de passe-passe auquel il ne voulait pas s'opposer en tant que joueur professionnel et romancier qui savait pertinement que parmi les joueurs il y avait toujours des tricheurs, Ah!Ah!Ah! Mais n'étant ni un moraliste ni un défenseur du passé où soi-disant hier c'était mieux( quelle idée farfelue!), il ne voulait pas se perdre dans ce gouffre où il n'y avait que des cadavres à l'état de squelettes, Ah!Ah!Ah!

104

Afin de ne pas perdre son temps inutilement et garder tous ses sens en éveil où jouir du présent était son unique ambition! Et si l'industrie s'était emparée visiblement de tous les arts( la littéra-ture, la musique, le cinéma, la peinture etc), ce n'était pas un hasard, mais parce que tout le monde le voulait bien afin de se faciliter la vie, n'est-ce pas, mon cher lecteur? C'est ce qu'on appelait tout simplement la modernité ou le progrés auquel personne ne voulait s'opposer pour des raisons évidentes, n'est-ce pas? A part, bien évidemment, les gauchistes qu'Alfred n'aimait pas du tout, non pour des raisons idéologiques, mais pour des raisons de bon sens, Ah!Ah!Ah! Comme en mai 68 où toute une génération de jeunes arriérès mentaux refusaient le confort matériel apporté par la modernité pour vivre comme des hommes préhistoriques au fond du Larzac, Ah!Ah!Ah! Ce qui bien evidemment avait choqué les paysans du coin qui, les pieds toute la journée dans la boue, auraient rêvé étudier à la Sorbonne afin d'avoir les pieds au sec, comme tous ces petits bourgeois en mal de vivre ou en manque d'être confronté à la vraie vie! Tout compte fait, un petit caprice bourgeois qui n'aura duré que quelques mois en se terminant dans le sexe, la drogue et le roch' n'roll, Ah!Ah!Ah! Voilà donc comment s'était terminée la révolution de mai 68, bref, dans la me-rde Ah!Ah!Ah! A cette époque, Alfred enfant se souvenait des mots très dures de sa mère à l'enco-ntre de ces étudiants qui avaient réussi à paralyser économiquement la France en ne pensant pas aux familles nombreuses qui avaient du mal à se nourrir! Et des années plus tard, à l'adolescence, il comprit que les étudiants se moquaient éperdument du sort des familles même de la socièté, car la plupart était des célibataires. Décidément, des gauchistes qui montraient un grand mépris pour le capitalisme, alors qu'ils étaient mués par un très grand égoïsme! Bref, un grand paradoxe qui n'avait pas échappé à sa finesse d'esprit en ne comprenant pas qu'on puisse préférer la misère à la richesse produite par le capitalisme. Bref, des arriérès mentaux dont on avait toujours affaire en France avec les écologistes et les survivants du socialisme qui nous empêchaient d'avancer d'une manière postive. A ce propos, il avait en horreur le cinéma des années soixantes dix où la plupart des films étaient politiques donc mortellement ennuyeux pour lui. Où le travail des cinéastres gauchistes avait consisté à démolir le vrai cinéma, c'est à dire celui qui faisait rêver! constatait-il amèrement dans le luxe de sa Maserati où défilait devant lui le paysage en cinémascope. Remar-quez, mon cher lecteur, si Alfred n'était pas tendre avec ces créatures du passé qu'il appelait vol-ontier des dinosaures, c'était tout simplement pour vous dire la vérité. Car entre nous comment jouir du présent, sinon dire la vérité à tous ceux qui étaient autour de nous? Apparemment pour lui, l'orgasme et la vérité ne faisaient qu'un, alors que dissociés chez la plupart des intellectuels de gauche pour des raisons de mensonges idéologiques pour ne pas voir la réalité en face. Ce qui au-rait forcément de funestes conséquences sur leur état mental en ne sachant plus reconnaitre la bea-uté du monde ni même l'intelligence des autres quand celle-ci se présenterait à leurs yeux, n'est-ce pas? Car artiste avant tout, il était inspiré directement par la nature qui ne trichait jamais avec per-sonne au contraire des mensonges intellectuels fabriqués par des hommes frustrés par la vie, Ah!Ah!Ah! Décidément, des hommes peu doués pour jouir de la vie qui ferait vivre alors, un vrai cauchemar à leurs semblables parce qu'ils étaient malheureux, bref, comme Karl Marx, la bête im-monde, Ah!Ah!Ah!

105

Il parait lorsque "Le Capital" est sorti en librairie en 1867, beaucoup de gens pensaient qu'il sagis-sait d'un livre faisant l'apologie du capitalisme ou si vous voulez d'un mode d'emploi pour deve-nir riche! Mais lorsque ces derniers commençèrent à le lire, ils comprirent aussitôt que ce livre était un canular ou si vous voulez le meilleur moyen pour tomber dans la misère, Ah!Ah!Ah! Décidément que d'escrocs durant ce 19 ème siècle parce que la plupart des gens étaient des igno-rants! constatait avec amertume Alfred en se rappelant un souvenir au Petit Canet où Pascal, le propriètaire, avait refusé d'afficher la moindre photo du festival de Cannes de l'année 1968 pour ne pas déshonnorer son établissement, Ah!Ah!Ah! Tout simplement parce qu'une bande de gauchi-stes parisiens avaient reussi à s'infiltrer dans le palais du festival pour convaincre les cinéatres de faire grève en solidarité avec les étudiants. Ce qui avait bien évidemment rendu furax, non pas seulement le patron du Petit Canet, mais aussi tous les Cannois avec le sentiment d'assister d'une manière impuissante à la prise en otage de leur festival ainsi qu'à la mise à mort du 7 ème art par une bande de Maoistes! Visiblement, la révolution culturelle de Mao avait réussi à pénétrer les frontières de la France pour dértuire toute initiative personnelle en matière de culture, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Pour la simple raison que ces arrièrés mentaux considéraient le cinéma comme une extention du capitalisme, Ah!Ah!Ah! Et pourquoi pas le steak frite avec du ketchup ou bien la guitare Fender pendant qu'ils y sont, Ah!Ah!Ah! Décidément, nous avions affaire à une bande d'abrutis dont le rêve était de détruire la liberté individuelle parce qu'ils ne pensaient qu'au pouvoir et qu'à leur future prise de pouvoir, bref, comme les écolos d'aujourd'hui! En fait, une bande d'hyper égoïstes que le capitalisme n'aurait jamais pu engendrer où visiblement nous avions affaire à des idiots, Ah!Ah!Ah! C'est à dire pour les gens intelligents, un non sens existentiel et sociètal, n'est-ce pas? A ce propos, le patron, passionné de stars de cinéma avait accroché au des-sus de son bar, une pancarte où il avait écrit : Il est interdit à la clientèle de parler du festival de mai 68 au risque d'être mis à porte de l'établissement! Bref, c'était clair, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Bien évidemment, moi et Jean-Ré, nous n'en parlions jamais pour nous consacrer essen-tiellement au jeu d'argent et aux filles qu'on allait embarquer lors de nos virées dans les casinos de la côte d'azur, Ah!Ah!Ah! Quant à "la nouvelle vague" pendant longtemps, il s'était demandé si celle-ci représentée entre autre par François Truffaut et Jean-Luc Godard n'était pas au bout du compte du cinéma de gauche où de l'anti-cinéma? Car vouloir mettre sur grand écran la vie de votre concierge ou bien de la ménagère de moins de 50 ans n'était-il pas la meulleur façon de mettre fin au vrai cinéma, c'est à dire de ne plus faire rêver le spectateur? Il lui semblait comme à Pascal, qu'après 68, le cinéma en France se dirigeait tout droit vers le cinéma des bofs, Ah!Ah!Ah! Dont le point culminant sera atteint en 1973 avec le film de Marco Ferreri " La Grande Bouffe" où l'on pétait et rôtait durant les deux heures du film, Ah!Ah!Ah! Il était évident pour Alfred et pour beaucoup de passionnés de vrai cinéma que Marcello Mastroianni dans ce film avait perdu sa stature de star en jouant le rôle d'un dépressif qui n'arrivait plus à bander, Ah!Ah!Ah! Dès le lendemain de sa projection au palais du festival, le journal La Provence avait titré sa première page : Hier, une grande bouse avait éclaboussé la Côte d'Azur, Ah!Ah!Ah! Suivi de Nice Matin qui avait titré : Un grand pet avait retenti dans le temple du cinéma, Ah!Ah!Ah! Décidement, le ci-néma de gauche avait réussi en quelques années à jeter dans la boue toutes les stars produites par le grand cinéma!

106

A propos de "La Grande bouffe", il était important de signaler qu'il avait été produit par l'acteur Michel Piccoli qui était homosexuel et gauchiste! C'est dire qu'il n'y avait pas de fumée sans feu, n'est-ce pas? En vous assurant qu'Alfred n'avait aucune haine contre les homosexuels ni les gauc-histes, car sa principale occupation était sa propre jouissance et que lui importait alors les problè-mes politiques ou non des autres, Ah!Ah!Ah! Et si certains lecteurs pourraient penser qu'il était un sale hyprocrite, lorsqu'il critiquait les gauchistes d'être des gens irréalistes( en pensant que tout se valait, alors que ce n'était pas le cas!), ils avaient à moitié raison à vrai dire. Car par son add-iction aux jeux d'argent et à sa profession de romancier, il avait tout l'air de vivre aussi dans les paradis artificiels, n'est-ce pas? Tout en précisant à nos chers lecteurs gauchistes ou non que sa débauche à lui se déroulait dans le luxe, alors que celle des gauchistes dans la boue, Ah!Ah!Ah! Au fait singulier qu'en mai 68, ces derniers avaient montré au reste du monde leur attirance pour la boue du Larzac et celle de Katmandou! Afin de vous prouver qu'Alfred, vivant à moitié dans les paradis artificiels, avait aussi gardé les pieds sur Terre, Ah!Ah!Ah! Mais il faut dire un débat qui n'était très nouveau en ressemblant étonnamment au conflit Voltaire-Rousseau symbolsant l' eternel conflit entre les intellectuels et les philosophes. Où Voltaire disait à Rousseau dans une de ses lettres qu'il comptait aller le voir à la campagne afin qu'ils se roulent ensemble dans la boue pour lui faire plaisir, Ah!Ah!Ah! Ce qui ressemblait en tout point à une diablerie de Voltaire qui aimait seulement se vautrer dans le luxe, Ah!Ah!Ah! Pour la simple raison qu'il était devenu très riche grâce à une escroquerie organisée dans une loterie avec la complicité d'un mathématicien Italien. Nous prouvant ainsi que Voltaire n'était pas du tout un philosophe, comme on le désignait à tort dans les livres, mais plutôt un intellectuel où l'escroquerie planifiée faisait partie de son mode de fonctionnement afin de satisfaire son égo surdimentionné. Mais un combat inégal que le pauvre Jean-Jacques ne pouvait en aucune façon remporter contre cet individu sûr de lui, arrogant et de surcroit très riche! Mais auquel Alfred ne porta jamais aucune admiration en étant au bout du compte qu'un tricheur, Ah!Ah!Ah! Assurément, un individu qu'il destestait, car lui-même n'av-ait jamais triché au jeu d'argent pour avoir la conscience tranquille et laissez la chance agir qui, il faut le dire, l'avait bien récompensé! En fait, il avait compris très jeune qu'en ne trichant pas avec les autres, il aurait toute la légitimité de leur dire la vérité où la désertion de son père du foyer famillial n'était pas étrangère, bien évidemment. En concevant désormais à son âge, si l'on était malheureux au sein de sa famille, qu'il valait mieux la quitter avant de la détruire complètement, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Ce que les enfants abandonnés ne pourraient jamais comprendre en ne sachant pas qu'ils avaient peut-être échappé au pire? se demandait-il  avec lucidité, mais sans mépris, comme l'aurait fait les esprits Voltairiens! Certes, une vérité qui semblait abominable à dire. Mais ô combien de fois dans ma vie n'ai-je pas entendu les gens dire qu'il valait mieux être seul que mal accompagné, mon cher lecteur? Décidément, la vérité restait toujours une chose bien difficile à dire à ses contemporains, n'est-ce pas? Ce message s'adressait tout naturellement aux gens courageux et non aux personnes qui comptaient pourrir la vie de leurs familles ou de leurs concitoyens, Ah!Ah!Ah! Comme les gauchistes qui aimaient mieux les étrangers que leurs compatriotes ainsi que les extrémistes de droite qui avaient tendance à idéaliser leurs compa-triotes! Bref, nobody is perfect, n'est-ce pas? Ah!Ah!Ah!

107

Et si Jean-jacques Rousseau était un écologiste avant-gardiste à son époque, il n'avait aucun rapp-ort avec les écologistes d'aujourd'hui pour detester le pouvoir et le mensonge organisé pour y par-venir qu'on appelait le catastrophisme, Ah!Ah!Ah! De plus, il n'était pas un gauchiste, car il croya-it en Dieu! Désormais, une abîme éffrayante séparait le monde d'hier du monde d'aujourd'hui, n' est-ce pas? Mais en ce moment, Alfred semblait préoccupé par ses compatriotes qui montraient de l'exapération ou de la colère à l'égard de leurs institutions républicaine! Ce qui à vrai dire n'était pas une chose nouvelle, je peux vous l'assurer, mon cher lecteur, Ah!Ah!Ah! Mais une crise pour lui, paradoxalement, qui n'était pas liée aux inégalités sociales( car la France était la championne du monde en matière de prestations sociales), mais plutôt aux fustrations produites par l'égalité. Bref, un retournement radical des choses que personne n'aurait pu prévoir lorsqu'on aurait atteint ce paradis social où les pauvres pourraient vivre sans travailler grâce aux prestations sociales. Sous entendu bien évidemment qu'ils ne pétent pas plus haut qu'ils aient le cul au risque de ruiner la France, Ah!Ah!Ah! Visiblement, la France actuelle se trouvait dans une impasse existentielle et civilisationnelle où l'Egalité avait réduit drastiquement la liberté des Français au point qu'ils s'en mordaient désormais les doigts jusqu'au sang! Alors que l'Amerique républiciaine et pragmatique avait choisi la liberté au détriment de l'égalité et s'en portait à merveille vu sa flamboyante réu-ssite économique, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Pour lui, il ne faisait aucun doute qu'en France, on était devenu des idiots a cause de ce dogme mortifère qu'on appelait l'Egalité. Avec la convi-ction qu'il existait sur Terre, une seule égalité qui s'appelait la mort, Ah!Ah!Ah! Ce qui ne voulait pas dire qu'il était pour les inégalités, mais plutôt pour les différences exprimées par la vie foison-nante que tout le monde connaissait, n'est-ce pas? A part, bien évidemment. les Français, où som-meillait en chacun un fonctionnaire, qui n'arrivaient toujours pas à saisir cette notion parce qu'ils avaient développé en eux une idiotie idéologique. Mais nous ne reviendrons pas sur la révolution française, Ah!Ah!Ah! Paradoxalement, aujourd'hui, tous les acquis sociaux des Français semblai-ent se retourner contre eux même et les ligoter, comme des otages ou de vulgaires saucissons prê-ts pour le fumage, Ah!Ah!Ah! Car à quoi pourrait bien leur servir par exemple les 35 heures de travail hebdomadaire ou demain les 26 heures quand toutes leurs libertés seront réduites à peau de chagrin par un système totalitaire qui s'appelle l'Egalité? se demandait-il avec angoisse au vol-ant de sa Maserati impatient d'arriver au lieu mythique où Grace Kelly avait perdu la vie! Il lui semblait évident que la prochaine révolution des Français( s'ils voulaient éviter le chaos pour leur pays) ne serait pas la répétition idiote de la révolution française, mais de savoir gérer leurs frust-rations, Ah!Ah!Ah! Alfred arrêta soudainement sa profonde méditation quand il aperçut devant lui un embouteillage! Aussitôt, il passa en première pour se placer derrière une décapotable avec une impression de déjà vu. Décidément, une bien étrange journée! pensa-t-il en remarquant devant lui, une Sunbeam Alpine occupée par une jeune femme blonde et un homme brun d'âge mûr qui mon-trait de l'exaspération en klaxonnant, comme un fou furieux! Méfiant, par la peur d'être victime d'une allucination sous ce soleil de plomb, il retira ses lunettes noires, puis se frotta les yeux quelques instants et aperçut écrit en clair sur la partie arrière du véhicule, Sunbeam Alpine!

108

Aussitôt dans sa tête se téléscopaient des images du passé et du présent avec cette étrange impres-sion d'assister au tournage de "la main au collet"! Quand tout à coup, un petit gros coiffé d'une chapeau blanc et vêtu d'une chemise débraillée vint à sa vitre pour lui dire avec un fort accent an-glais : Monsieur, je vous prie de sortir de la file, car vous êtes en plein tournage et vous gênez la prise de vue! Alfred, surpris par cette personne débonnaire sortant de nulle part et ressemblant étrangement à Alfred Hitchcock, lui dit : Monsieur, j'aimerais bien satisfaire vos désirs, mais si je sors de la file, je risque de tomber dans le ravin! Et alors? lui dit brutalement l'homme diabolique en ajoutant avec un grand cynisme, mais ne voudriez vous pas participer au tournage du film en précipitant votre véhicule dans le ravin afin de servir le grand cinéma? Ah!Ah!Ah! ria aussitôt Al-fred en pensant à une blague qu'il n'avait jusque là jamais entendu sur le cinéma. Comprenez, cher monsieur, que j'aurais bien aimé exhausser vos voeux; mais en ce moment, je dois aller sauver mon meilleur ami d'un grand péril! Bien, dans ce cas, si vous êtes vous même dans un film, je ne veux en aucune façon gêner son déroulement! lui dit le sosie d'Alfred Hitchcock. Je vous sou-haite, bonne chance, monsieur, en espérant que vous retrouverez l'assassin de votre meilleur ami, Ah!Ah!Ah! ajouta-il par pure perversité. Pendant un instant, il fut choqué par la remarque dép-lacée du grand cinéatre et ferma les yeux en esperant qu'il ne sagissait là que d'un mauvais rêve. Car il était hors de question pour lui de rentrer dans une psychose Hitchcockienne, mais de retr-ouver sain et sauf son meilleur ami! En rouvrant les yeux, il eut la bonne surprise de voir que le monstre avait disparu et lâcha avec un grand soulagement : Quel con, ce petit gros! Mais cons-tatait, non sans inquiètude, toujours la présence de la Sunbeam Alpine où le conducteur hysté-rique jouait du klaxon, comme s'il sagissait d'un jouet pour grand enfant! Les nerfs à vif, il klax-onna à son tour, non pas seulement pour arrêter cette comédie à l'italienne, mais surtout pour voir le visage de ce jeune couple qui semblait être la copie conforme de Grace Kelly et de Cary Grant. Quelques instants plus tard, le jeune couple quelque peu remonté se retourna et il aperçut avec horreur qu'il s'agissait en vérité d'un couple de vieux portant une perruque sur la tête pour imiter leurs idoles, mais surtout pour cacher leur grand âge. Fortement impressionné par tous ces évèn-ements burlesques, il faillit en rire, mais se retint pour ne pas être désagréable avec ces deux fan-tômes sortis du passé qui lui lançèrent de grands sourires Hollywoodiens en faisant des éfforts surhumains, Ah!Ah!Ah! Et comprit, grâce à sa prodigieuse imagination de romancier, que ces 2 vieux nostalgiques faisaient sans aucun doute un pelerinage sur les lieux même où la célèbre sc-ène de la main au collet avait été tournée. Décidément, un bien macabre objet de culte! pensa-t-il en voyant comme par miracle la circulation se débloquer. Mais un objet de culte auquel il ne vou-lait pas s'opposer, car que faisait-il en ce moment, sinon la même chose? Quelques centaines de mètres plus loin, pensant qu'il serait seul ou bien accompagné de quelques uns à se recueillir sur le lieu mythique où Grace Kelly avait perdu la vie, il eut la mauvaise surprise d'apercevoir un nombre assez important de cars déverser leurs flots de touristes. Merde alors! lâcha-t-il avec l'idée de filer tout droit pour éviter l'abominable cohue. Mais en tant que romancier, il lui était imposs-ible de rester bêtement dans son véhicule où dehors, apparemment, il se passait quelque chose d' intéressant à étudier.

109

Car aussitôt que la Sunbeam Alpine fendit la foule en réalisant un parfait traveling inspiré du cin-éma Hollywoodien, tout le monde s'agglutina autour pour demander avec hystérie des autograph-es aux sosies de Grace Kelly et de Cary Grant! Décidément, ces deux là avaient atteint leur heure de gloire, Ah!Ah!Ah! ricana Alfred en essayant de chercher une place où se garer, car tous les cars s'étaient emparés du moindre emplacement. Heureusement sur la montée, il aperçut un espace dé-gagé qui pourrait suffir à sa Maserati sans gêner la ciruclation. Aussitôt, il s'y porta avec toute la prudence du monde pour ne pas glisser dans le ravin avec son véhicule. En posant les pieds sur l' asphalte brûlant, il fut néanmoins heureux de retrouver le plancher des vaches, puis regarda en co-ntre bas les deux momies se faire photographier de long en large par des touristes Japonais et Chi-nois, Ah!Ah!Ah! Tout cela lui semblait affreusement kitch, mais pourquoi pas après tout? pensa-t-il en sachant que le vrai cinéma était mort depuis belle lurette avec l'avènement du cinéma gau-chiste qui avait jeté dans la boue toutes les stars Hollywoodiennes! Par goût du jeu, il aurait bien voulu s'agglutiner à la foule pour demander à ses deux escrocs, un autographe bidon qui serait la pâle imitation de la signature de Grace Kelly et de Cary Grant, Ah!Ah!Ah! Mais jugeant la chose trop pénible pour lui , il préféra se diriger vers un groupe de touristes moins agité qui avait le nez plongé au dessus du ravin où Grace Kelly avait perdu la vie à bord de sa Rover décapotable. Par un détour astucieux, afin d'éviter la foule hystérique, il parvint rapidement à rejoindre le groupe et s'y méla discretement afin d'écouter les commentaires plus ou moins farfelues des uns et des au-tres sur la mort accidentelle ou non de Grace de Monaco. Quand tout à coup, un homme habillé d'une chemise fleurie où se trouvait épinglé un badge avec son prénom et sa compagnie de voy-age, lui dit : Monsieur, je crois que vous avez oublié votre casque pour écouter la visite guidée! Perturbé pendant un instant en ne comprenant pas de quoi on lui parlait, Alfred afficha aussitôt un visage jovial afin de ne pas être repéré par un des guides occupé au bien-être et à la sécurité des voyageurs qu'il avait en charge. Tenez, monsieur, mettez-le sur vos oreilles où Patrick, notre spe-aker, vous apprendra toute la vérité sur la mort de Grace de Monaco! Décidément, je n'attendais pas mieux! s'écria-il en toute discretion en pensant à ses futurs romans qu'il allait pouvoir enrichir d'histoires farfelues, Ah!Ah!Ah! Sans plus attendre, il mit avec grand plaisir sur ses oreilles le cas-que sans fil afin d'écouter le discours marketing des compagnies de voyages pour mettre l'eau à la bouche des touristes. Mais avec cette crainte que la visite guidée soit une version enregistrée qui manquerait alors pour lui de piquant; mais lorsqu'il leva la tête, il aperçut devant lui, perché au dessus du vide où Grace Kelly avait perdu la vie, un jeune homme muni d'un micro-cravate qui faisait de grands gestes, comme s'il mimait l'accident! Apparemment, nous n'étions plus dans un voyage organisé pour les ploucs ou les retraités, mais au théâtre où se déroulait un drame en dir-ect, pensa-t-il en n'écoutant plus un guide touristique, mais un acteur! Sachez mes chers auditeurs et chères auditrices que la mort de la princesse de Monaco n'était pas accidentelle! lança-t-il bru-talement à travers nos casques, comme s'il nous envoyait une bombe entre les oreilles! Aussitôt, j'entendis la foule autour de moi jeter des cris d'indignations face à ce scandale en attendant bien évidemment le nom du criminel où la mafia italienne était forcément impliquée dans le but de s' emparer du Rocher et de tous ses casinos qui drainaient des milliards d'euros!

110

Car en tant que romancier, cette piste de la mafia italienne lui semblait tout à fait crédible, comme à tous ces jeunes retraités qui avaient trimé toute leur vie pour gagner trois sous, Ah!Ah!Ah! Non, non, mes amis, reprit aussitôt l'orateur, il ne sagit pas ici d'un banal accident de la route, comme on en voit tous les jours dans les journaux, mais d'un meurtre perpétré par la mafia et plus pré-cisément par la loge P2 afin de financer son futur coup d'Etat en Italie! Ce qui provoqua aussitôt une onde de choc parmi la foule qui voulut absolument connaitre la vérité sur la mort de Grace Kelly en se rapprochant d'une manière dangereuse de celui-ci qui risquait à tout moment de tom-ber dans le vide! Alfred, pris au piège parmi cette foule, ne put alors que suivre le mouvement général et se trouva en quelques secondes au bord du précipice en s'accrochant aux vêtements des autres pour ne pas tomber. Arrêtez, arrêtez de pousser! lança furieusement le jeune orateur à tra-vers nos casques qui s'était aggripé à un rocher pour ne pas tomber dans le vide. En direct, nous entendîmes son souffle coupé par l'émotion, puis sa respiration reprendre son cours normal quand quelques touristes courageux le sortirent du gouffre afin qu'il puisse poursuivre sa visité guidée comme il était convenu. Merci, oh oui, merci, mes amis de m'avoir sauvé la vie! dit-il avec un gr-and soulagement, puis ria d'une manière incontrôlée, Ah!Ah!Ah! afin de se remettre de ses émoti-ons. Ce qui mit aussitôt la foule de bonne humeur avec le sentiment d'avoir vécu une journée pleine de danger et surtout pour ces gripsous d'avoir rentabilisé leur voyage en autocars, Ah!Ah!Ah! Bref, une émotion qui souvent manquait à la vie des retraités, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Puis reprenant son discours, il dit : Quelques jours plus tôt, le prince Rainier III avait reçu une le-ttre de chantage où on lui proposait d'une manière sordide d'échanger la vie de sa femme contre 50% des revenus annuels du grand casino de Monte-Carlo! Bien évidemment, le prince Rainier prit cela pour une grande plaisanterie et jeta la lettre à la poubelle pour ne plus y penser. Mais lor-sque Grace de Monaco prit sa Rover avec sa fille Stephanie pour l'emmener à son cours de danse, ce mardi 14 Septembre 1982, personne n'aurait pu imaginer le drame qui allait se dérouler dans la Principauté, enchaina-t-il avec un ton funèbre en pointant soudainement le doigt vers le versant opposé au gouffre. Car voyez-vous, Messieurs, Mesdames, voilà l'endroit exact où se trouvait le sniper engagé par la mafia pour assassiner notre belle princesse! Le souffle coupé par l'émotion, la foule se tourna aussitôt vers ce versant escarpé en l'identifiant à une montagne maléfique où la mafia italienne avait planifié le meurtre suite au refus du prince Rainier d'accepter leur odieux racket. Pendant un long moment, il y eut un lourd silence sur le bord de la route où tout le monde semblait se recueillir au fond de lui-même en ne comprenant pas la méchanceté de certains hom-mes avides de pouvoirs. Par contre, Alfred, en tant que romancier, était complètement emballé par l'histoire extravagante du jeune guide qui avait imaginé toute cette histoire afin d'en mettre plein les oreilles aux touristes, Ah!Ah!Ah! Car tout ce qu'il racontait était bien séduisant, mais sans au-cune preuve! pensa-t-il avec réalisme. Mais ne s'en offusqua aucunement, comme tous ces touris-tes prêts à croire à tout ce qu'on leur racontait du moment qu'on occupât leurs mortelles jour-nées, Ah!Ah!Ah! Ce qui ne voulait dire en aucune façon qu'Alfred put s'ennuyer dans la vie, car ce serait comme insulter sa prodigieuse imagination en matière de jouissances, n'est-ce pas, mon ch-er lecteur?

111

Voulant réaliser le crime parfait, reprit le jeune orateur, la mafia avait demandé au sniper de ne pas tuer la princesse d'une balle dans la tête, mais de tirer dans les pneus de sa Rover pour simul-er un banal accident de la route! Ce qu'ils avaient parfaitement réussi à faire, n'est-ce pas, Mesda-mes et Messieurs? lança-t-il avec un brin d'insolence pour maintenir son public en haleine. Qu'on les pende! Qu'on les pende, ces brigants! surgit aussitôt de la foule en colère en croyant désormais connaître la vérité sur la mort de Grace de Monaco. Bref, une vérité qu'elle était prête à avaler comme on avale un cornet de glace vu la chaleur étouffante qu'il faisait sur le bord de la route, ironisait Alfred en essayant de s'extraire avec grand mal de ce four qu'on appelle la foule. Sans pour autant vouloir contredire la version commerciale des tours opérateurs où la mort était dev-enue un spectacle lucratif, Ah!Ah!Ah! Car en étant sur les lieux où le drame s'était déroulé, il eut soudainement une vision où il vit dans un flash, Stéphanie se quereller violemment avec sa mère à bord de la Rover à propos de son petit ami qu'elle n'appréciait guère, puis le véhicule faire une sortie de route pour plonger 120 mètres plus bas dans le ravin! Avant de faire le grand plongeon mortel, Stéphanie dans un reflexe de survie reussit à s'éjecter en s'écrasant lourdement sur le bas côté où elle sentit ses blessures par la grâce de dieu, non mortelles! Emporté par l'émotion, Alfred comprit soudainement que la mort de Grace de Monaco n'était certainement pas liée à un complot mafieux, mais à un banal conflit mère-fille! Et bien qu'il fut séduisant pour le public et les tours opérateurs d'en faire un scénario à la James Bond et tout particulièrement, vu les lieux où s'était déroulé le drame, un film signé par Alfred Hitchcock, n'est-ce pas? ll parait lors du tournage de "la main au collet" qu'Alfred Hitchcock avait dit à Grace Kelly en la prenant par le bras : Ma chère Grace, je vous supplie de ne jamais retourner sur les lieux de ce tournage, où nous avons réalisé ensemble un chef-d'oeuvre pour le cinéma, car cela risque de vous porter malheur! Ce qui avait mis bien évidemment Grace Kelly très mal à l'aise en ne comprenant rien aux propos bien myst-érieux du grand cinéatre Décidément, Hitchcock, dit le petit gros, ne s'était pas trompé! pensait Alfred avec le sentiment que ces lieux étaient hantés par des fantômes du passé. En l'occurence avec l'apparition incidente du grand cinéastre qui lui avait demandé d'une façon diabolique de se jeter dans le vide avec son véhicule afin de participer au tournage! Ce qu'il avait bien évidemment refusé pour ne pas abîmer sa belle Maserati, Ah!Ah!Ah! Avec l'impression de vivre une grande ill-usion avec cet étonnant embouteillage public et automobile sur la départementale 37 qu'il sentit comme une fracture du temps où les évènements l'avaient précipité en allant au secours de son meilleur ami. Comme si son propre film avait percuté violemment le film d'Alfred Hitchcock où la main au collet était désormais équivalent à une corde au cou! Derrière lui, la foule nombreuse et bruyante manifestait son impatience a voir de près le gouffre où Grace s'était tuée un 14 Septe-mbre. Bref, un jour considéré dans la culture populaire, comme un jour maudit, n'est-ce pas? Ep-uisé et voulant rejoindre au plus vite son véhicule, il reussit à s'extraire de la foule en se conto-rsionnant comme un singe pour enfin arriver à l'air libre où il se débarrassa de son casque sans fil en le donnant à un inconnu. Mais ce qui le turlipinait le plus, c'était l'étrange disparition subite de le Sunbeam Alpine!

112

Aussitôt, il alla vers un couple de seniors pour lui demander un petit renseignement: Bonjour Ma-dame et Monsieur, je voudrais savoir si vous n'avez pas vu une décapotable Sunbeam Alpine et la direction où elle était partie? Le vieux couple, très étonné qu'on lui posât ce genre de question sur un lieu touristique, se regardèrent un instant en attendant de l'autre comme une réponse. Mais Alf-red, voyant leur confusion mentale causée par la vieillesse et la chaleur caniculaire, prit son port-able et alla sur Internet pour leur montrer à quoi pouvait bien ressembler une Sunbeam Alpine. Après une recherche rapide sur les sites, où ce modèle de voiture ne manquait pas chez les collec-tionneurs, il leur montra enfin la Sunbeam Alpine, mais qui étrangement n'éveilla en eux aucun souvenir! Nous sommes désolés, jeune homme, mais nous n'avons vu aucune Sunbeam Alpine dans le coin ni la direction qu'elle aurait pu pendre! dirent-ils comme à bout de souffle et dans un état quasi comateux, Ah!Ah!Ah! Mais que cherchait-il exactement Alfred, mon cher lecteur? Une course poursuite Hollywoodienne avec la Sunbeam Alpine pour retrouver ce couple d'escros afin de lui passer les menottes pour vol d'identité ou seulement pour avoir une bonne dose d'adrénali-ne? C'est ce qu'il se demandait comme hébété par la chaleur et par ce lieu énigmatique où les fant-ômes d'Alfred Hitchcock semblaient le mener par le bout du nez! Pris d'une furieuse obsession pour découvrir la vérité, il alla directement vers un groupe de touristes asiatiques afin de pour-suivre ses recherches. Bonjour, Mesdames et Messieurs, pourriez-vous m'indiquer dans quelle di-recttion est partie la décapotable Sunbeam Alpine, car je vous ai vu tout à l'heure prendre des self-ies avec vos idoles et leur demander des autographes. Oui, c'est exact, jeune homme! répondire-nt-il de concert en hôchant la tête vers le bas pour saluer leur interlocuteur, puis dégainèrent leurs portables comme des mitraillettes pour lui montrer les photos en question. Ce qu'Alfred n'avait pas bien évidemment demandé; mais bon, cela faisait partie de la culture asiatique de ne jamais ré-pondre aux questions posées, mais aux convenances millénaires! pensa-t-il avec lucidité. Mais pour une raison inconnue, le visage aussitôt de ces touristes asiatiques s'assombrirent quand ils s' aperçurent que leurs photos avaient disparu de leurs portables! Ce qui provoqua aussitôt une crise d'hystérie où ils se mirent tous à crier comme des fous en pensant que la technologie ait pu trahir leur confiance ou leur totale soumission à cette dernière! Bref, on était pas loin du harakiri, pen-sa-t-il non sans ironie, Ah!Ah!Ah! Photos disparues! Photos disparues! lancèrent-ils épouvantés en lui montrant leurs portables où les photos et selfies de leurs idoles avaient disparu de leurs car-tes mémoires. Quant à ceux, qui avaient peu confiance à la technologie, ils vérifièrent scrupuleu-sement les autographes en leur possession. Mais dès qu'ils consultèrent leurs carnets dédiés à leu-rs stars favorites, ils constatèrent avec horreur que la page concernée était totalement vierge et n' en croyaient pas leurs yeux! Avec l'impression de vivre dans un film de science-fiction où un nu-age magnétique avait semble-t-il éffacé tous les traces des évènements qu'ils avaient vécu récem-ment. Bref, Alfred, n'ayant toujours pas obtenu de réponse à sa question, éclata soudainement de rire, Ah!Ah!Ah! avec le sentiment que tout ce qu'il vivait en ce moment était une grande illusion où rien n'était vrai!  

113

Visiblement provoquée par un mystérieux embouteillage où était apparu une Sunbeam Alpine av-ec à son bord Grace Kelly et Cary Grant, puis un petit gros qui ressemblait étonnamment à Alfred Hitchcok, puis une crise d'hystérie des touristes pour avoir des autographes de leurs idoles, puis un guide touristique délirant qui se prenait pour un grand acteur, puis la soudaine disparition de la Sunbeam Alpine, etc, finit-il par se dire comme épuisé par toutes ces reflexions en retrouvant ses esprits devant ces touristes nippons qui commencèrent à lui casser les oreilles en jacassant co-mme des oies, Ah!Ah!Ah! Sans plus attendre, il décida de partir de ce lieu infernal pour rejoindre son véhicule en espérant qu'il y soit toujours! pensa-t-il avec inquiètude vu les lieux hantés par des fantômes qui visiblement ne voulaient pas le lâcher d'une semelle. En levant la tête au dessus de la foule des touristes, il aperçut avec bonheur sa Maserati garée dans la montée qui étrangem-ent lui fit un appel de phare, comme si elle le pressait de partir au plus vite dans ce lieu maléfique! crut-il comprendre en pressant le pas avec le sentiment qu'elle avait trouvé une âme chevaleres-que dans ce chaos transtemporel. A moins qu'un odieux individu était en train de tripatouiller les fils electriques pour la lui voler! s'imaginait-il épouvanté par cette perspective pour avoir oublié de mettre l'alarme en sortant. Quelques instants plus tard, en arrivant à proximité, il fut soulagé de ne voir personne à l'intérieur, ni sa voiture se mettre à lui parler comme dans la série américaine K2000, ni demarrer toute seule. En supposant que cet appel de phare était dû à l'éclat du soleil ou aux flashs des appareils photos! pensait-il pour se rassurer en montant dans son véhicule. Désor-mais à l'abri, il se sentit à nouveau en sécurité et ferma les yeux pendant quelques instants pour retrouver ses esprits et poursuivre sa mission de sauver coûte que coûte son meilleur ami d'une mort certaine! Aussitôt, il mit le contact pour entendre le rugissement délicieux de son bolide, puis l'air frais de la clim lui caresser le visage, puis il passa en première pour reprendre la départe-mentale 37 qui menait jusqu'au cap d'Ail. Signalons au passage à notre cher lecteur qu'Alfred connaissait très bien la principauté de Monaco pour avoir gagné en 2005 au casino de Monte-Carlo, la coquette somme de 700 000 euros à la roulette! Ce qu'il n'a jamais considéré comme une immense fortune, mais comme un bon début pour réaliser ses rêves dans la vie, n'est-ce pas, mon cher lecteur? En ayant souvent remarqué que la plupart des gens étaient malheureux parce qu'ils leur avaient manqué ce formidable coup de pouce du destin pour sortir de ce trou bien noir où le mauvais sort les avaient plongé dès leur naissance! Alors, ils gâchaient leurs existences dans des activités professionnelles ou autres qui ne leur plaisaient pas du tout et se mariaient avec la première personne venue par manque de choix, bien évidemment. De même frustrés de ne pouvoir choisir leurs amis ou amies, sinon dans le milieu malfamé où ils avaient grandi où la plupart des gens étaient de gros egoïstes qui ne pensaient qu'à leurs gueules, Ah!Ah!Ah! Bref, bonjour la soi-disant entraide entre les pauvres véhiculée par les gauchistes, alors que tout le monde se tirait da-ns les pattes pour reussir au détriment de son voisin de palier, Ah!Ah!Ah! Alfred n'avait pas bes-oin de lire la rubrique des faits divers pour connaître toutes ces choses, car il les avait connu av-ant qu'il devienne riche ou frappé par ce formidable coup de pouce du destin au casino de Monte-Carlo en 2005. Mais sans avoir aucun mépris pour ces gens qui au bout du compte n'avaient pas le choix d'être des gens différents sachant que le destin avait malheureusement décidé pour eux!

114

Ce qui pour lui représentait socialement un grand gâchis humain. Car parmi cette population d' invisibles, il y avait certainement des gens formidables voir des génies, mais qui n'emergeront ja-mais de la société en subissant l'impitoyable mépris de leurs semblables! Il ne faisait aucun doute pour lui que la misère devait être bannie de la socièté, non par souci d'égalité, mais principaleme-nt pour permettre aux gens de devenir eux-mêmes où ils seront les acteurs de leurs vies et non les marrionnettes manipulées par un peu près tout le monde! Croyez-bien qu'Alfred ne faisait aucun-ement l'apologie de l'anarchie, mais de la responsabilté individuelle que tout homme ou toute fe-mme libre connaissait le prix. Mais tant que les gens ne seront pas libres de devenir ce qu'ils sont, j'ai bien peur que cette responsabilité individuelle ne voit jamais le jour! pensa-t-il avec lucidité au volant de sa Maserati. Tout en reconnaissant avec honnêteté que ce gros gain au casino de Mo-nte-Carlo lui avait permis de choisir ses amis ainsi que sa femme, Clotilde. Mais sans croire un seul instant que l'argent pût acheter l'amitié et l'amour en sachant bien que ces choses ne dépenda-ient que des bonnes vibrations entre les personnes, n'est-ce pas? A ce propos, il se souvenait très bien de cette époque où Clotilde fréquentait les soirées mondaines de la Côte d'Azur afin d'épou-ser un millionnaire ou mieux un milliardaire, Ah!Ah!Ah! Malheureusement avec moi, elle n' avait trouvé qu'un demi-millionnaire! semblait-il s'affliger en pensant à ces soirées surréalistes où sans aucune pudeur, sa future épouse affichait sur son visage : Cherche desepérément millionnaire! Ah!Ah!Ah! Bref, on était pas loin de la femme couguar ou de la croqueuse de diamants merveill-eusement interprétée par Marylin Monroe dans le film, comment épouser un millionnaire, Ah!Ah!Ah! Avec un petit air à la Françoise Sagan qui l'avait aussitôt séduit pour engager une conversati-on avec elle afin de mieux se connaitre. Tout en précisant à notre cher lecteur que ces soirées mal-heureusement très protocolaires, ne lui avaient pas permis de mieux la connaître en y étant d'une totale insinsérité, Ah!Ah!Ah! En se présentant un jour, comme une spécialiste des civilisations mesopotaniennes, puis un autre jour, comme exploratrice du grand sud-saharien, puis responsa-ble communication de Patrick Bruel! Ce qu'Alfred n'avait pas beaucoup apprécié, car il n'aimait pas les chansons de Patrick Bruel, Ah!Ah!Ah! Puis une autre fois, comme directrice de casting pour la Spilberg-production, etc, la liste serait longue à énumérer, mon cher lecteur. Bref, il com-prit assez rapidement qu'il avait affaire à une grande affabulatrice ou manipulatrice, comme on dit dans le milieu psychiatrique et judiciare. Mais qui ne l'avait rebuté à faire sa connaissance d'une manière ou d'une autre en essayant pas de s'expliquer les mystères de l'amour! Car un jour, ses amis fortunés lui apprirent qu'elle ne l'appréciait pas beaucoup en le trouvant inintéressant, mais surtout parce qu'il n'avait qu'un demi-million sur son compte bancaire, Ah!Ah!Ah! ricanèrent-ils en se moquant de lui. Ce qui l'avait profondément blessé en croyant jusque là avoir atteint une so-rte de perfection grâce à son argent. Mais pour qui se prenait-elle celle-là? s'emportait il en ne sa-chant pas comment se venger de cette humiliation connue désormais par tous ses nouveaux amis. Peut-être pour Mata Hari, cette aventurière qui bouffée par l'ambition finira au peloton d'exe-cution de l'armée française pour haute trahison? se demandait-il avec fureur

115

Je veux rassurer mon cher lecteur qu'Alfred ne comptait pas sequestrer ou assassiner Clotilde pour si peu de choses avec le sentiment qu'il en était tombé amoureux! Avec son air de garçon manqué qui pour lui ne manquait pas de chien, il pensait que si elle avait lancé cette rumeur sans fondement sur sa personne parmi ses amis, c'était uniquement par maladresse en ne sachant pas comment lui déclarer son amour! Pour lui, c'était une stratégie inconsciente des femmes que Clo-tilde ignorait elle-même en désirant le beurre et l'argent du beurre, Ah!Ah!Ah! Bref, une activité à grand risque pour toute aventurière, n'est-ce pas? C'est à cette époque qu'il avait fait connaissance de Jean-René qui sans véritable fortune était admis dans les soirées de la Jet-set parce qu'il fréqu-entait Agnès Leroux, l'héritière du palais de la méditérranée, le célèbre hôtel-casino de la côte d' azur. Mais laisse tomber cette fille, elle n'en vaut vraiment pas le coup! lui avait-il dit à plusieurs reprises pour le dissuader d'entreprendre cette relation en la suspectant d'être une intrigante qui comptait sucer tout son argent ainsi que celui de tous ses futurs amants quand ils seront tombés entre ses griffes! Mais Alfred, qui en était follement amoureux, n'en crut pas un mot et pensait qu' elle lui était destinée, comme Pénélope à Ulysse! Bref, pour Jean-René, il ne faisait aucun doute que Clotilde( qui s'était présentée à lui sous le nom de Mademoiselle Catherine Lempereur) avait les dents très longues voir très très longues, Ah!Ah!Ah! Mais ne voulant pas être insistant voir de-sagréable avec son ami( sachant qu'il avait un temps libre quasi illimité durant la journée grâce à l'argent de l'héritière du palais de la méditérranée qui lui permettait de vivre sans travailler), il dé-cida un jour d'aller espionner cette Catherine Lempereur. Et comme enfant du pays qui connai-ssait très bien Cannes et la Côte d'Azur, il n'eut aucun mal à localiser son QG qui se trouvait dans le vieux Cannes. Car pour lui, il ne pouvait s'agir en aucune façon d'un logement ordinaire, mais d'un véritable quartier général où elle planifiait ses opérations d'enrichissement personnel ou peut être de pouvoirs, qui sait? A force de traques et de surveillances quotidiennes en toute discrétion( auxquelles il prit grand plaisir par amour du jeu) en quelques semaines, il réussi à dresser l'em-ploi du temps de cette Catherine Lempereur en vu de fouiller son appartement pour découvrir la vérité sur cette femme aux dents très longues. Car tout homme sait que la vérité des femmes se trouve au fond de leurs culottes et quoi de mieux pour la connaître que d'y fourrer son nez? Ah!Ah!Ah! Profitant de l'absence de Catherine( qui faisait tous les mercredis matin son jogging entre 10 heures et midi sur le bord de la Croisette), il n'eut aucune difficulté à crocheter sa serrure grâce à son passé de cambrioleur. Mais aussi parce que la plupart des appartements du vieux Ca-nnes étaient de vieux appartements dont les serrures dataient de la dernière guerre, Ah!Ah!Ah! Au-ssitôt, il entra à l'intérieur en toute discretion, puis referma la porte derrière lui avec le vieux ver-roux qui s'y trouvait, puis partit instantanément vers la fenêtre pour jeter un coup d'oeil au dehors et vérifier si la voiture de Catherine, une Renault Rodeo couleur sable du desert, n'était pas reve-nue. Mais constatant son absence, il afficha aussitôt sur son visage un sourire plein de malices. Car il ne comptait pas cambrioler l'appartement pour la voler, mais seulement pour apprendre un peu plus sur cette aventurière qui au bout du compte voulait lui voler son meilleur ami, Alfred Swan. Comprenez bien, mon cher lecteur, que Jean-René n'était pas contre qu'Alfred puisse trou-ver l'amour auprès de cette fille, comme tombée du ciel ou de la planète Venus, mais à condition qu'elle ne le mit pas sur la paille sachant qu'il était prêt à faire des folies pour elle.

116

L'appartement était plutôt modeste et assez bien entretenu par la maîtresse des lieux, constatait-il en tant qu'expert de la cambriole, car il n'y avait pas d'odeurs intempestives de cuisine qu'on renc-ontre souvent dans les logements sales. Ni ces miettes de pains qui trainaient partout et crissaient sous nos pas quand nous allions rendre visite à nos chers amis célibataires allergiques au ménage, Ah!Ah!Ah! Pour lui, c'était un bon point pour Catherine qui visiblement avait décidé de se loger à moindre coût près de la Cote d'Azur afin de séduire les riches millionnaires, puis de les voler sans état d'âme, Ah!Ah!Ah! Au centre du salon, il y avait un canapé couleur canari et une table basse recouverte d'une plaque de verre sur laquelle il remarqua l'absence de cendrier. Ce qui signifiait pour lui qu'elle ne fumait pas, mais sans pour autant la croire incapable de sniffer un rail de coca-ïne quand elle était déprimée, Ah!Ah!Ah! En face, collé contre le mur, il y avait un meuble télé où était posé un poste de télévision Grundig et un lecteur DVD qui n'étaient pas des modèles récen-ts! remarquait-il avec ses yeux d'ancien cambrioleur qui connaissait parfaitement la valeur des ob-jets à la revente chez les receleurs. Dans un renfoncement à droite, il y avait une petite cuisine à l'américaine qui semblait avoir le strict minimum pour faire la cuisine à la va-vite. Apparemment, Catherine n'était pas être une grosse mangeuse, sinon une grosse mangeuse d'hommes, Ah!Ah!Ah! ironisait-il en se dirigeant vers la chambre où il comptait découvrir la face cachée de cette intriga-nte qui avait l'intention de lui voler son meilleur ami ainsi que semer la zizanie parmi le cercle d' amis fortunés qu'il avait réussi à intégrer grâce au prestige de la famille Leroux. Comme vous l' avez sûrement remarqué, mon cher lecteur, Jean-René avait le sens de l'odorat très développé au point de pouvoir connaître la personnalité d'un individu uniquement en sentant son odeur ou celle de ses objets personnels. C'est grâce à cette faculté extraordinaire qu'il avait pu travailler quelqu-es années plus tôt à Grace comme nez dans l'élaboration des parfums, puis comme oenologue à l' Hôtel Carlton. Mais sans avoir su garder ses emplois, pourtant bien rénumérés, car il aimait trop la liberté et la petite magouille, Ah!Ah!Ah! C'était visiblement sa nature de chien errant qui le fai-sait agir de cette façon si désordonnée et si loin de la raison, n'est-ce pas, mon cher lecteur? De même qu'il n'avait jamais voulu toucher à la came pour ne pas devenir accroc et surtout pour ne pas être l'otage des petits Arabes de son quartier. Car il se sentait avant tout Français et si magou-ille il y eut, celle-ci serait d'identité française, Ah!Ah!Ah! De plus tous ces amis receleurs l'étaient de père en fils et de souche parfaitement française, ce qui représentait pour lui le respect pour la tradition de la voyoucratie française.Tandis qu'avec les Arabes, c'était pas loin du coup de couteau dans le dos pour un mot de travers ou le couteau sous la gorge pour vous extrorquer de l'argent sachant que vous étiez seuls et qu'ils travaillaient en bande organisée ou en gang comme on disait aujourd'hui dans les journaux télévisés. Bref, il sentit très tôt que de travailler avec les Arabes était une activité très dangereuse et s'en était écarté instinctivement pour vivre longtemps, Ah!Ah!Ah! De plus, ces derniers n'aimaient pas la culture, sinon le culture du canabis, Ah!Ah!Ah! C'est dire le fossé qui les séparaient alors de la culture française en ne lisant jamais un seul livre en les considérant comme des livres de leurs anciens colonisateurs! Apparemment, les Arabes étaient in-comptatibles avec la sociète française à cause de leur sentiment d'infériorité qu'ils éprouvaient de-vant les Français ou si vous voulez devant leurs anciens colonisateurs! Comprenez-bien, mon cher lecteur que Jean-René n'était pas raciste, mais seulement réaliste, Ah!Ah!Ah!

117

Car on disait tellement d'aneries dans les médias à propos du racisme. Pour la simple raison qu'on avait déformé abominablement ce mot au cours de notre Histoire pour en faire un synonyme de haine envers les races de couleurs soi-disant inférieures. Alors que le mot signifiait dans la langue française simplement la croyance qu'il existait des races parmi les hommes, comme il existait des races de chiens ou de chats, mais sans y établir une quelconque échelle de valeur. En ne pouvant concevoir un seul instant par exemple que la race des bergers allemand soit supérieure à celle des fox terriers, comme la race blanche de la race noire! Et si la notion de race avait été supprimée id-iotement par nos institutions républicaines, c'était tout simplement pour se débarrasser de ce mot qui prêtait souvent à confusion dans l'esprit des gens. Car pour les gens intelligents, être raciste signifiait simplement reconnaître l'existence de races parmi les hommes, mais sans y établir d'ech-elle de valeur! Alors que pour la plupart des gens, il représentait une attitude haineuse envers les gens de couleurs sous entendu que le blanc était aussi une couleur, mais inattaquable puisque Je-sus Christ, le fils de DIeu, était un homme de race blanche. Décidément, ce mot de racisme avait autant de sens qu'on voulut lui donner pour que chacun puisse défendre les interêts de sa race ou de sa communauté, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Je vous le répete une seconde fois, Jean-René n'était pas raciste dans le sens qu'on lui donnait aujourd'hui, mais dans le sens pratique afin d'être réaliste, Ah!Ah!Ah! Bref, comme dans tous les commissariats de France et de Navarre où l'on était obligé d'être un peu hors la loi en identifiant les individus par leurs couleurs de peaux et leurs caracteristiques physiques afin de les arréter, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Pourtant la po-lice n'était pas raciste d'une manière institutionnelle ou congénitale, mais seulement pragmatique en sachant bien que la grande partie de la petite délinquance était constituée par des Arabes et de blacks, Ah!Ah!Ah! Ce qui ne voulait dire en aucune façon faire du racisme, mais seulement cons-tatter les faits, n'est-ce pas? Par sa propre expérience de petit voyou, Jean-René savait très bien que les petits dealers de drogue ne gagnaient pas grand chose, car il y avait beaucoup de concurr-ences sur le marché et peu de consommateurs, il faut dire la vérité. Et que ceux qui gagnaient gros, c'était les grossistes, peu nombreux en France, mais tous de race blanche, Ah!Ah!Ah! En fait, c'était ni plus ni moins pour les petits dealers un gagne-pain afin de complèter leurs RSA, mais aussi une passion pour le commerce. Car les Arabes aimaient beaucoup commercer et colporter comme leurs ancêtres les caravaniers du désert. Et pour être franc avec vous, mes amis, cette acti-vité d'empoisonnement généralisée de la population leur permettait de ne pas travailler et surtout d'être libre au détriment des autres. Quand Jean-René sortit de ses pensées de petit voyou, il se dirigea instantanément vers un petit couloir qui semblait mener à la chambre de Catherine. Mais en le traversant, il aperçut les cabinets de toilette et décida d'y jeter un coup d'oeil afin de savoir si Catherine était une fille propre! Car il avait remarqué lors de ses multiples cambriolages que les gens sales tiraient rarement la chasse d'eau pour faire des économies, Ah!Ah!Ah! Aussitôt, il acti-onna l'interrupteur pour y voir plus clair et se dirigea vers la cuvette pour soulever le couvercle de la lunette. Et à sa grande surprise, il remarqua que Catherine avait tiré la chasse d'eau ce matin avant de partir faire son jogging! Ce qui constituait pour elle un nouveau bon point si elle voulait épouser son meilleur ami, Alfred Swan, en sachant qu'il aurait detesté que les amis de ses amis soient des crados dans leurs vies privées, Ah!Ah!Ah!

118

Comme vous le voyez, mon cher lecteur, Jean-René avait le sens de l'amitié poussé à ses extrêm-es en voulant le meilleur pour ses amis tel un chien fidèle prêt à mordre si on les attaquait. Déc-idément, on échappait pas à sa nature! remarquait-il en exerçant son flair infaillible dans les cabi-nets de toilettes de Catherine où il sentit une odeur de canard wc! Il avait parfois l'impression d' être un curieux mélange entre Rintintin et Rex, le chien flic dont la mission était de démasquer le criminel qui se cachait sous chaque individu. Bref, entre le chien errant et le chien de chasse, Ah!Ah!Ah! Dans la foulée, il partit dans la salle de bain afin d'exercer à nouveau son puissant odorat où il ne constata aucune odeur suspecte, mais aperçut avec étonnement les petites culottes de Cat-herine suspendues sur un étendoir avec des paires de chaussettes. Visiblement, Catherine était un vrai garçon manqué, bien que pourvue de tous les attributs féminins! pensa-t-il avec pénétration, à moins que ces chaussettes soient celles de son dernier amant? Ah!Ah!Ah! Bref, ne pouvant resi-ster à la tentation, il se saisit d'une de ces petites culottes et la porta en premier à sa bouche pour la goûter tel un mets raffiné, puis la porta à son nez pour la renifler comme une bête. A son grand étonnement, il sentit que la chatte de Catherine avait l'odeur d'un fauve, comme celle d'une panth-ère avec un léger parfum d'adoucisseur pour bébé, Ah!Ah!Ah! Décidément que de fantasmes ré-vélés dans ces petites culottes de femmes! saisit-il avec émerveillement en cambriolant pour la première fois de sa vie l'intimité d'une inconnue qui se croyait plus intelligente que lui et surtout que tous ses amis. Son flair infaillible commençait à payer! se dit-il en se dirigeant vers l'armoire à pharmacie afin de savoir de quels maux elle souffrait dans la vie quotidienne. Mais à sa grande surprise, en l'ouvrant, il n'aperçut pas grand chose d'intéressant, sinon les indispensables pour soi-gner les petits bobos de la vie quotidienne et les maux de têtes dont les femmes étaient souvents sujettes, bref, constitués par une bouteille d'alcool à 90°, d'une boite de pansements et d'une boite d'aspirines. Par ce constat évident, il comprit aussitôt que Catherine avait une santé de fer, comme Alexandre le Grand en vu de s'emparer du monde, Ah!Ah!Ah! Et apercevant sur le bord du lavabo qu'une seule brosse à dents dans un gobelet, il en conclua que Catherine vivait seule en ce mome-nt. Jean-René, tel un fonctionnaire zèlé, notait tout ça dans sa tête afin de rediger plus tard un rap-port sur cette intrigante Catherine Lempereur en vu de le divulguer à ses amis fortunés friands d' anecdotes croustillantes, Ah!Ah!Ah! En entrant dans la chambre, la première chose qui frappa ses narines, c'était l'odeur de sperme qui y règnait, puis en second par la vue d'une paire de menottes accrochées aux barreaux du lit! Visiblement, elle avait passé une nuit torride avec un homme en pratiquant des jeux SM ou sado-maso vu le désordre ambiant et la forte odeur des corps! pensa-t-il en se dirigeant vers le large lit qui n'avait pas été fait ce matin où il s'asseya au bord en aperc(evant sur la table de nuit, un cadre photo retourné sur lui-même. Curieux, il le retourna et fut très surpris de voir Catherine tenir entre ses bras un enfant à côté d'un homme dont le visage avait été découpé avec une paire de ciseaux ou un cutter, bref, on ne savait pas exactement. Tiens, voilà donc, ce que Catherine essayait de nous cacher pour ne pas que nous connaissions son passé où elle avait un fils caché et peut-être assassiné son dernier mari, qui sait? se demanda-t-il en se sais-issant du cadre où transparaissait le temps du bonheur entre une mère et son fils adoré. Tout en remarquant avec psychologie, vu la position du cadre dans laquelle il l'avait trouvé, l'évidente cu-lpabilité de Catherine quand elle pratiquait ses jeux SM avec un homme ou une femme( ce qui n'était pas interdit de le croire!) pensa-t-il tel un fin limier qui visiblement n'était pas au bout de ses surprises.

119

Tout naturellement, il jeta un coup d'oeil sous le lit pour voir s'il ne trouverait pas ces instrum-ents de tortures chers aux adeptes de la SM constitués de fouets, de bracelets écorcheurs ou de laisses de chien destinées aux hommes ou aux femmes à l'esprit dérangé, Ah!Ah!Ah! Mais à vrai dire, il fut un peu déçu de ne trouver aucun attirail de ce genre pour faire souffrir les corps conse-ntants, sinon une boite à chaussures contenant un nombre impressionnant de préservatifs de toutes les tailles et de toutes les couleurs! Apparemment, Catherine était une experte en sexe, ce qui pour lui n'avait aucun rapport avec l'amour, mais la preuve qu'elle était une femme bouffée par l'amb-ition de réussir à tout prix. Bref, une femme très dangereuse pour lui et ses amis! pensa-t-il en se levant pour se diriger instinctivement vers l'armoire afin d'affiner ses investigations. Quand il l' ouvrit, il fut très étonné de voir peu de vêtements féminins, mais un équipement d'escalade const-itué d'une corde, d'un ensemble de baudriers et de mousquetons et d'une paire de chaussures de varape et curieusement, accrochée sur un cintre, une combinaison moulante noire identique à celle que portait Grace Kelly dans la mort au collet pour cambrioler les hôtels de luxe de la rivi-era. Sacre bleu! s'écria-t-il avec cette drôle d'impression de cambrioler l'appartement d'un de ses collègues en saisissant sa situation peu conventionnelle, il faut le dire. Satisfait par ses nouvelles découvertes, il partit aussitôt vers le bureau de Catherine où se trouvait son ordinateur. Avec la certitude qu'il y trouverait tous ses secrets et autres plans machiavéliques à l'égard de ses amis fortunés. Avec calme, il s'asseya et l'alluma en espérant qu'il ne soit pas protégé par un mot de passe, qui mettrait alors tous ses plans à l'eau ainsi que son rapport qu'il voulût aussi précis qu'un rapport du FBI ou du KGB. Avec la ferme intention de convaincre Alfred que cette Catherine Lempereur ou sa Clotilde chérie était une fille dangereuse, non pas seulement pour son argent, mais aussi pour sa vie! A sa grande surprise, l'écran s'alluma sans lui demander aucun de mot de passe et lui souhaita même la bienvenue, comme tout système d'exploitation le fait des milliards de fois dans la journée dans le monde entier. Ce qui le mit aussitôt en joie et alla sans trop réflé-chir dans le repertoire "Mes documents" pour avoir un chance de trouver ce qu'il cherchait. Mais sembla perdu pendant quelques instants quand il vit un nombre impressionnant de dossiers portant des noms à dormir dehors! Mais pour une raison mystérieuse, grâce à son flair infaillible, son regard s'arrêta soudainement sur un dossier portant le nom étrange de Caviar! Aussitôt, son nez se mit à s'agiter comme le museau d'un chien avec le sentiment qu'il avait trouvé la vérité ou du moins ce qu'il cherchait, Ah!Ah!Ah! Car ce mot de caviar était pour lui sans équivoque à propos de ses amis fortunés que Catherine comptait plumer sans aucun scrupule, bien évidemment. Pen-dant un instant, il eut peur de découvrir des photos pornographiques les concernant pour avoir fait la grossière erreur de fréquenter le plumard de Catherine, la dévoreuse d'hommes, Ah!Ah!Ah! Mais quand il ouvrit le dossier, il eut la bonne surprise de voir seulement leurs photos avec d'au-tres inconnus qu'elle avait prises lors de ces soirées mondaines de la Côte d'Azur accompagnées d'un petit commentaire les concernant. En face de la photo de Charles Edouard, un ami qui avait hérité d'une fortune colossale grâce à son père armateur, elle avait écrit : Un homme très très riche, mais qui malheureusement n'aimait pas les femmes et préferait sucer des bites! Ce qui cho-qua profondément Jean-René qui, il faut le dire, ne lui connaissait pas ce genre de pervertion, Ah!Ah!Ah!

120

Néanmoins sans vouloir cracher dans la soupe nauséabonde de Catherine qui lui fournissait des informations intimes sur ses amis fortunés, ce qui n'était pas négligeable! reconnaissait-il. Mais sans aucune intention de s'en servir pour leur faire du chantage, car il était fidèle comme un chien auprès de ces derniers qui, il faut le dire, lui apportaient argent et prestige ou pour le dire vulgai-rement, sa pâtée de luxe, Ah!Ah!Ah! Ce que bien évidemment, les ploucs ne pouvaient saisir en vivant dans les bas fonds de la socièté où ils étaient méprisés à longueur de journée par leurs sem-blables, Ah!Ah!Ah! Car il avait appris très jeune qu'il fallait toujours choisir ses amis parmi les mieux lotis de la socièté. Et après avoir idiotement copié les voyous de son quartier pendant sa jeunesse en se spécialisant dans les cambriolages, il changea complètement de fusils d'épaule en cotoyant la crème de la crème de la Côte d'Azur et s'en léchait désormais les babines, Ah!Ah!Ah! Avec le fort sentiment qu'il y avait en lui un aristocrate que son milieu social avait toujours re-fusé de voir à part ses très riches amis auxquels il avait juré fidélité. Pour lui, il ne faisait aucun doute que la fidélité et la loyauté formaient le ciment de la noblesse et si vous n'aviez aucune de ses qualités, mon cher lecteur, je m'excuse, mais cela montrait que vous étiez un fripon prêt à tout pour réussir, bref, comme Catherine Lempereur, Ah!Ah!Ah! Il avait parfois le sentiment qu'il était admis dans ce milieu doré parce qu'il était un formidable chien de garde. Et que ses investigations semblaient le démontrer, n'est-ce pas, mon cher lecteur? En face de la photo de Jean-Daniel( un jeune homme gâté excessivement par sa mère qui possédait des bijouteries de luxe à Los Angeles et à New York), elle avait écrit : 1/10 au lit, car il bandait mou. Mais adorait que je lui donne des fessées. Bref, un bon à rien qui me prenait pour sa mère! Ah!Ah!Ah! ria aussitôt Jean-René qui commençait à comprendre qu'une bonne partie de ses amis fortunés était des gens tordus, mais s' en offusquait aucunement. Puis faisant défiler sous ses yeux des visages qu'il ne connaissait pas, il tomba soudainement sur celui d'Alfredo qui pour lui était affilié à la mafia marseillaise avec des ramifications sur la Côte d'Azur. En face, Catherine avait écrit : Ce sale type, je ne veux plus le revoir, car il était membré comme un âne et me faisait crier comme une chienne! La prochaine fois, je lui dirai de rester chez lui ou de se trouver une autre fille pour utiliser son défonçoir! Bref, un sale type que je soupçonnais faire partie d'un réseau de criminels! Une nouvelle fois, Jean-René était sidéré par les commentaire de Catherine qui se situaient toujours sous la ceinture, Ah!Ah!Ah! Décidément, elle était une fille qui ne manquait pas de flair, mais en utilisant des mét-hodes qui dataient de l'antiquité en exploitant les vices des hommes pour leur faire cracher leur sperme et leur argent en même temps, Ah!Ah!Ah! Il est vrai, des procédés vieux comme Hérode, mais toujours éfficaces dans nos sociètés modernes, n'est-ce pas, mon cher lecteur? C'est dire que la morale des hommes n'avait véritablement pas changé depuis le debut de l'humanité, Ah!Ah!Ah! En apercevant subitement son nom s'afficher sur l'écran, il eut comme une hallucination. Car il ne vit pas sa photo, mais celle d'un bulldog accompagnée par les mots : Attention, chien méchant! Ah!Ah!Ah! ria-t-il en se tordant les côtes en saisissant que Catherine avait tout compris sur sa personnalité de chien de garde. Sous sa photo de quadripède se trouvait celle de son meilleur ami, Alfred Swan, dont les commentaires semblaient plus élogieux et disons-le au dessus de la cein-ture!

121

Cette photo montrait Alfred Swan dans une soirée mondaine avec une mine resplendissante, alors que tous ses amis présents étaient proches du coma éthilique, Ah!Ah!Ah! Catherine était à ses côt-és et semblait emerveillée par sa sobriété qu'elle avait malheureusement confondu avec une séch-eresse de coeur. A son propos, elle avait écrit : Ce type me fait je ne sais quel effet et semble s'int-éresser à ma personne et non pas à mon cul ou à la souplesse de mon poignet, comme tous ces pervers sexuels qui bien que richissimes n'arrivent plus à bander! J'ai appris dernièrement qu'il tra-înait au Petit Canet avec son chien de garde Jean-René. J'espère un jour le voir sans son dog afin que nous puissions parler d'une manière intelligente et pourquoi allier nos talents pour aller plus loin dans la vie? Quand il vit l'heure avançée de 11H30 sur sa montre barcelet, Jean-René sortit immédiatement de la poche de son veston, une clé USB qu'il inséra dans l'ordinateur pour copier le dossier Caviar riche en informations pour ses futures investigations. Mais par un ancien reflexe de cambrioleur, il passa sa main sous le bureau où il sentit la présence d'une grande enveloppe co-llée visiblement avec du scotch. Avec une main de maître, il reussit à la décoller sans la déchirer, puis versa le contenu sur le bureau. A son grand étonnement, il découvrit 3 passeports et une lias-se de billets de 100 dollars estimée environ à 10 000 dollars! En voilà bien des mystères! lâcha-t-il du bout des lèvres en se saisissant du premier passeport où il aperçut la photo de Catherine po-rtant étrangement le nom de Nora Tayeb, née à Beyrouth au Liban! Mais qu'est-ce que tout cela veut dire? se demanda-t-il comme médusé par sa découverte et par le sentiment d'être tombé sur un reseau d'espionnage international digne d'une serie de James Bond! Sur le deuxième passeport, Catherine s'appelait Clotilde Atherman, née à Tel Aviv en Israël et sur le troisième passeport, elle s'appelait Catherine Lempereur, née à Paris. Et la grande question qu'il se posait était de savoir quelle était sa véritable identité, car tout cela lui semblait bien énigmatique. Mais faisant totalem-ent confiance à son odorat hyper developpé, il passa successivement les trois passeports sous son nez qui soudainement s'arrêta sur celui de Clotilde Atherman, née à Tel Aviv en Israël! Car il sen-tit sur le cuir et le papier, un léger parfum de femme qui apparemment tenait beaucoup à ce pass-eport! Alors que sur les autres, il y avait une odeur impersonnelle d'encre et de papier d'imprim-erie, bref, des documents qui visiblement avaient été peu ouverts, pensa-t-il en étant sûr de son fl-air en le tenant fermement entre ses mains, comme s'il avait pris Catherine en flagrant délit d'us-urpation d'identité pour agir au nom d'un réseau d'espionnage international ou peut-être pour le compte d'une socièté d'assurance en vu d'enquêter sur ses riches amis, qui sait? Par ces faits indis-cutables et sa nature de chien de garde, auprès de ses amis richissimes, il sembla très agité, mais aussi très impatient de découvrir la vérité au point de remuer la queue presque de joie, Ah!Ah!Ah! Mais voyant l'heure passer très vite, il rangea tout le contenu dans son enveloppe, puis la recolla à l'endroit exact avec le scotch qui avait toujours son pouvoir adhésif, puis éteignit l'ordinateur et partit vers la table de nuit pour replacer le cadre photo dans la position où il l'avait trouvé. Avant de partir, il fit le tour de tous les endroits où il était passé pour être sûr de n'avoir rien fait tomber par terre. Car il se souvenait d'une histoire grotesque concernant un de ses collègues qui lors d'un cambriolage avait eu l'imprudence de faire tomber son portefeuille en signant quasiment son crime, n'est-ce pas, mon cher lecteur?

122

Ce qui avait beaucoup facilité le travail de la police pour découvrir l'auteur du vol au point que le journal "La Provence" avait relaté l'événement en première page où l'inspecteur chargé de l'affaire n'avait pas manqué d'humour en disant: Décidément, quand on était peu doué pour voler, il fallait absolument changer de metier, Ah!Ah!Ah! Ce qui avait eu l'effet de faire rire pratiquement la moi-tié de la Côte d'Azur, Ah!Ah!Ah! C'était pour cette raison qu'il vidait toujours ses poches chez lui avant de cambrioler en omettant aucun petit détail, comme ses clés personnelles, les tickets de ca-isse ou de retrait qu'il pourrait faire tomber sur place par étourderie et précipiter son arrestation! Ce qui lui avait permis de n'être jamais arrêté par la police et de garder l'image d'un honnête hom-me au sein de la socièté, Ah!Ah!Ah! Instinctivement, il palpa la poche de son veston où il sentit avec un grand soulagement la présence de sa clé USB au bout de ses doigts! Sans plus tarder, il se dirigea ver la porte pour coller son oreille contre pendant quelques instants afin de n'étre pas vu en sortant. Mais n'entendant aucun bruit dans le couloir de l'immeuble, il sortit, puis referma la porte avec son passe-partout miracle hérité d'une longue tradition de la voyoucratie française, Ah!Ah!Ah!

Retour sur le rocher de Monaco..

Quand Alfred reprit ses esprits à bord de sa Maserati sur la départementale 37, il pensa aussitôt à sa petite Clotilde chérie qui du jour au lendemain s'était mise à fréquenter le Petit Canet pour une raison bien mystérieuse ou peut-être pour une raison évidente pour lui? Et malgré le rapport sulf-ureux que Jean-René lui avait remis sur cette fille intrigante, cela l'avait au contraire poussé à se rapprocher d'elle afin de découvrir l'horrible secret qu'elle semblait cacher qui, n'ayons pas peur de le dire, stimulait son imagination, mais aussi sa libido, Ah!Ah!Ah! Pour Jean-René, il ne faisait aucun doute qu'Alfred était ébloui par les feux de l'amour et qu'il n'y pouvait rien! finit-il par pen-ser en abandonnant toute tentative de lui faire changer d'avis.

Depuis quelques jours, j'avais remarqué que Clotilde s'asseyait toujours à la même place au fond de la salle où se trouvait collée sur le mur, les affiches D'autant en emporte le vent et La vengean-ce d'une blonde, car Clotilde était blonde comme Marylin Monroe! Après qu'elle avait commandé son capuccino, elle sortait de son sac à main, profond comme une poche de kangourou, un cahier d'écolier qu'elle ouvrait sur la table pour écrire dessus je ne savais quoi! Bref, tout cela m'intrigu-ait beaucoup, car Jean-René dans son rapport calamiteux sur cette fille ne m'avait pas parlé de cet-te Clotilde-écrivaine que je voyais désormais sous un autre angle. Car il faut dire, à mon cher lec-teur, depuis mon gros gain au Casino de Monte-Carlo, que je comptais me mettre à l'écriture de romans pour occuper mon temps. Et qu'en voyant Clotilde montrer un intérêt évident pour la litt-érature, tout cela ne pouvait que nous rapprocher, n'est-ce pas? J'espérais seulement qu'elle n'écri-vit pas de romans pornographiques pour ne pas transformer nos vies en enfer, Ah!Ah!Ah! Pendant qu'il se remémorait sa rencontre avec Clotilde, il fut soudainement interrompu en apercevant en contre bas de la route, la Sunbeam Alpine! Tiens donc, mais qu'est-ce qu'ils font là, ces deux zigo-tos? se demanda-t-il en appuyant aussitôt sur l'accélérateur. Après un virage pris avec une grande virtuosité, il se trouva en peu de temps au cul de la Sunbeam qui étrangement zigzaguait au mi-lieu de la route, comme si ses occupants étaient en état d'ivresse!

123

De la fenêtre ouverte de son véhicule, il pouvait les entendre rigoler comme des fous en écoutant à fort volume de la musique Hollywoodienne sortir de l'autoradio! Tiens donc, nos deux imposteurs avaient dû se torcher une bouteille de whisky pour fêter leur pseudo-gloire auprès des touristes, Ah!Ah!Ah! ricana-t-il avec la ferme intention d'en découdre avec eux. Alors qu'il s'apprêtais à les dépasser, l'avant de sa Maserati percuta involontairement la décapotable qui fit aussitôt un tête à queue, puis dérapa longuement sur la chaussée avant de défonçer un petit muret au bord de la rou-te pour plonger dans le ravin. Merde alors! s'écria-t-il comme pétrifié par ce qu'il venait de se pas-ser sous ses yeux. Aussitôt, il arrêta son véhicule, sortit, puis courut jusqu'au petit muret détruit par le choc et aperçut avec horreur au fond du ravin, la Sunbeam s'écraser deux cents mètres plus bas pour s'embraser telle une torche vivante! A peine était-il remis de ses émotions qu'il entendit de l'autre côté de la route : Bravo, Alfred, Bravo! en apercevant comme dans un cauchemar l'appa-rition d'Alfred Hitchcock applaudir l'exploit formidable qu'il venait de lui servir, comme sur un plateau de cinéma, Ah!Ah!Ah! Désolé de vous le dire, mon cher Alfred, mais vous avez maintenant deux morts sur la conscience et pas des moindres, Grace Kelly et Cary Grant, Ah!Ah!Ah! se moqu-a-t-il de lui comme pour enfoncer le clou. Toi, si je t'attrape, je t'écrase la mouille! lui expédia Alfred avec fureur en se mettant à courir après le petit gros. Malgré sa bedaine, Alfred Hitchcock était un homme d'une grande vivacité au point de distancer son poursuivant en se cachant dans la végétation. Mais lorsqu'Alfred fouilla l'endroit où le petit gros s'était engouffré, il constata avec amertume que le grand cinéastre s'était volatilisé, comme s'il s'était fondu dans le décor. En recon-naissant subitement les grandes qualités de dissimulation de notre magicien qui au cinéma faisait des miracles, Ah!Ah!Ah! Puis entendant soudainement du bruit venir du haut de la route, il se pré-cipita vers son véhicule pour ne pas être confondu avec l'auteur de l'accident qu'il venait de pro-voquer. Car en tant que bon Français, il ne voulait pas être emmerdé par la justice qui, lorsqu'elle vous tenait, ne vous lâchait plus, Ah!Ah!Ah! Sous entendu qu'elle était un business comme un au-tre où l'Etat ne comptait pas payer ses fonctionnaires à rien foutre. Le souffle coupé par cette cou-rse folle vers la liberté, il sauta dans sa Maserati, puis démarra en trombe en regardant furtivement dans son rétroviseur où il n'aperçut personne. Houhaa! lâcha-t-il comme soulagé de quitter ce lieu de malheur en prenant de la vitesse pour poursuivre sa mortelle randonnée. Pendant un instant, il pensa au pire pour sa Maserati qui avait dû subir des degâts suite à l'accrochage avec la Sunbeam désormais une épave calcinée au fond d'un ravin où la précipitation l'avait empêché d'aller voir l'avant de son véhicule. A la prochaine étape et en lieu sûr, j'irai voir ce qu'il en est exactement! dit-il en surveillant sa vitesse au compteur pour ne pas être arrêté par les gendarmes qui pourraient le relier au drame qui venait de se passer. Pendant qu'il roulait en direction de Cannes, il se dema-ndait étrangement s'il n'avait pas provoqué intentionnellement cet accident avec la Sunbeam Al-pine pour en finir avec le cinéma de grand-papa? Ou dit d'une façon plus rude tuer ses idoles pour en finir avec la nostalgie? s'interrogeait-il avec l'accuité d'un joueur professionnel dont seul le présent était synonyme de jouissance et non le passé.

124

Quand il arriva au cap d'Ail, il descendit de son véhicule pour aller l'inspecter. En supposant que l'accrochage qu'il avait eu avec la sunbeam Alpine avait dû laisser des traces sur la carosserie. Mais quand il s'accroupit devant la calandre de son véhicule, il remarqua avec étonnement aucun dégât. Quelle histoire de fou! s'écria-t-il avec joie en sachant désormais qu'il n'était en rien sur l' accident qui avait coûté la vie aux sosies de Grace Kelly et de Cary Grant. Ah!Ah!Ah! se mit-il à rire bruyamment au point que des passants le prirent pour un fou. C'était un coup du petit gros, bien évidemment! pensa-t-il en évoquant Alfred Hitchcock qui depuis la départementale 37 ne l' avait pas lâché d'une semelle pour des raisons mystérieuses. Alfred, par son accuité de joueur et de romancier, sentit qu'il n'était pas encore sorti de cette grande hallucination dans laquelle il était plongée depuis le départ de chez lui avec cette idée saugrenue d'aller sauver son meilleur ami d' une mort certaine! Et c'était problablement de sa faute, pensa-t-il, s'il se trouvait dans cette mauv-aise situation coincée entre rêve et réalité. Et si le grand cinéastre le harcelait, au point d'éveiller en lui une psychose, c'est parce qu'Alfred Swan se faisait beaucoup de cinéma dans sa tête, Ah!Ah!Ah! Mais entre nous, mon cher lecteur qui d'entre nous ne se faisait pas un film dans sa tête quand il allait à un rendez-vous amoureux ou d'embauche en vue d'un salaire mirobolant ou bien quand il écrivait un livre avec l'idée qu'il serait un bestseller? Bien évidemment, tout le monde, n'est-ce pas? Mais visiblement, Alfred Swan, romancier de son etat, ne semblait pas terroriser d'aller jusq-u'au bout de son film pour vivre une happy end en sauvant son meilleur ami de la mort. Avec le sentiment d'urgence d'aller sauver son père de substitution pour ne pas redevenir orphelin, pensa-t-il en psychanalisant sa situation. Soulagé par son introspection constructive, il eut soudainement une soif d'enfer et partit vers la terrasse d'un café pour étancher, apparemment, la soif d'un marat-honien. L'endroit était charmant avec sa rue commercante où il y avait assez de gens pour donner vie à la rue sans générer trop de bruit et pouvoir s'écouter, comme à la terrasse d'un café. Quand il s'asseya à l'ombre d'un parasol, il commanda aussitôt une grande bouteille d'eau minérale San Pe-llegrino en vue d'emporter le reste pour poursuivre son voyage extraordinaire. A la première gor-gée, il eut comme un emerveillement de renaître à la vie en rehydratant toutes ces cellules que la canicule et les évènements avaient malnenés jusque là. Houhaa! lâcha-t-il tel un rescapé d'une tra-versée du désert. Ce qui n'était pas totalement faux, pensa-t-il en se rémémorant tout ce qu' il lui était arrivé sur la départementale 37.

125

Quand surgirent soudainement dans sa tête des films mythiques qui lui rappelait sa situation peu commune, comme marathon man, psychose, la chevauchée fantastique, Docteur Jekyll et Myster Hyde, Dracula, Plein soleil, il faut sauver le soldat Rayan, etc. Tout en se demandant bizarrement qui il était dans cette histoire invraisemblable? Apparemment, son imagination de romancier lui jouait un vilain tour comme pour l'éloigner un peu plus de la réalité, se disait-il, non pas terrorisé, mais prêt à se laisser emporter par la tempête qui rugissait en lui. Mais une tempête dans un verre d'eau! ironisait-il en regardant son verre d'eau tel un géant. Sous entendu qu'un romancier était ni plus ni moins un geant de l'existence, n'est-ce pas? Et puis, si son meilleur ami était mort, pensa-t-il avec lucidité, sa femme Clotilde l'aurait déjà appelé au téléphone pour lui annoncer la mauvaise nouvelle. A moins que son corps n'ait été pas retrouvé et qu'il se soit jeté du haut d'une falaise pour disparaître définitivement? s'alarmait-il tout en rejetant ce mauvais scenario de film. Avec dans la mémoire, les images obsessionnelles d'un suicide collectif de baleines sur les plages pour une raison mystérieuse. Où plus on était gros, plus on était déprimé, pensa-t-il en imaginant son meilleur ami échoué sur les côtes telle une baleine en train d'agoniser. Comme si après avoir tra-versé tous les océans du globe, elle n'avait plus aucun rêve à poursuivre! Et n'était-ce pas le cas pour son meilleur ami avec qui il avait tout vécu, comme des ogres ou des géants? se demandait-il pris par le vide affolant de sa vie où tout était désormais réglé comme sur du papier à musique. Pris dans ses hallucinations, Alfred se voyait maintenant en train de pousser son meilleur ami échoué sur la plage vers le large afin qu'il retrouve le chemin de la vie. Et malgré ses efforts surhumains, il arrivait à peine à le bouger tellement il était gigantesque dans sa mémoire! Epuisé, il baissa les bras et retrouva la réalité pour ne pas croire au pire. Personnellement, si j'étais océa-nographe, j'étudierais la déprime des baleines afin de sauver l'humanité d'un naufrage certain! pen-sa-t-il avec serieux en vidant d'un trait son verre d'eau. Car étudier les dauphins, ce n' était pas une science, mais un jeu pour les enfants où aucun suicide collectif n'était à déplorer, n'est-ce pas? Malheureusement, moi et Jean-Ré étions des baleines dans ce monde contemporain qui avait du mal à nous supporter à cause de ses préjugés inaliènables. Et certainement la raison pour laquelle, il avait adoré lire dans son enfance, Moby Dick, le roman de melville. Où Achab, le capitaine du baleinier Pequod, traquait autour du monde, Moby Dick, la baleine blanche qui lui avait arraché la jambe lors d'une précédente expédition. Bien évidemment, une histoire de vengeance où tout l'éq-uipage périra englouti dans les flots à cause d'un fou qui s'appelait le capitaine Achab.

126

Le seul survivant de cette grotesque aventure sera Ismaël, le narrateur de l'histoire qui pourra nous la raconter de son vivant pour notre plus grand bonheur. Comme l'avait bien compris Alfred dans son enfance où les idées fixes de certains pouvaient nous mener tout droit vers le chaos, n'est-ce pas? Comme ces hommes qui vivaient dans le passé avec l'idée farfelue d'appliquer leurs vieux co-ncepts dans le présent en étant d'une totale absurdité pour leurs contemporains. Certains esprits tordus pourraient voir aussi dans la victoire de Moby Dick ou de la baleine blanche, comme la vi-ctoire du blanc occidental détruisant la civilisation humaine. Mais ô combien ils se trompaient, car c'était tout le contraire où la nature remettait les Hommes mégalomaniaques sur Terre où ils n' étaient que des insectes! était-il convaincu et malgré la disparition d'une espèce comme la sienne, celle des baleines, en trouvant le monde trop petit ou étriqué, non pour réaliser ses ambitions de grandeurs, mais seulement pour jouir de la vie. Ce qui s'appelait dans le sens philosophique : vivre pour mourir sans regret! Jean-Ré, son meilleur ami, avait-il fait le tour de l'existence pour n'avoir plus aucun goût pour la vie? se demandait-il en se mordant les doigts jusqu'au sang ou bien se tro-uvait-il en ce moment dans un cap difficile de sa vie, comme au cap horn où les vents étaient fu-rieux. Mais n'étais-je pas son ami pour la vie et l'avait-il déjà oublié par une amnésie générale ou temporaire? Mais comment lui faire retrouver la mémoire et lui dire qu'il n'était pas seul au mo-nde? réitéra-t-il d'une façon poignate, comme pris dans la tempète intérieure de son meilleur ami qu'il n'arrivait pas à joindre au téléphone. Apercevant dans la rue en face une succursale de sa ban-que, Alfred se leva avec une idée derrière la tête d'aller retirer une grosse somme d'argent. Avec la folle idée que son double, Jean-Ré, puisse connaître ses intentions par la pensée, comme ces bale-ines qui communiquaient ensemble à travers les profondeurs pour rompre leur solitude. Et quoi de mieux que de 20 000 euros pour le sortir de ce mauvais pétrin dans lequel il était? pensa-t-il en essayant d'entrer en contact avec son double en s'avancant vers le guichet. Comme deux frères jumeaux qui ne pouvaient vivre sans l'autre, sinon mourir tous les deux! Alfred sentit que sa joie de vivre fut comme le garant pour maintenir en vie son meilleur ami. Et tant qu'il vivrait, Jean-Ré entendrait à distance battre son coeur tel un message d'espoir. Quand il rangea ses 20 000 euros dans une grande enveloppe, il prit un stylo à bille et marqua dessus "pour Jean-Ré" afin d'inscrire dans sa pensée ce voeux inamovible. Espérons qu'il l'ait entendu! murmura-t-il du bout des lèvres. Quand il regagna son véhicule, il fut mitigé de n'avoir reçu aucun appel durant son absence.

127

Ce qui pouvait être aussi un bon message d'après le dicton populaire : pas de nouvelles, bonnes nouvelles, n'est-ce pas? En sortant de la commune du cap d'ail, il aperçut sur les murs les affiches promotionnelles du festival de Cannes qui aurait lieu dans quinze jours. Et comme d'habitude, on nous annonçait un festival du cinéma exceptionnel ainsi qu'un temps merveilleusement ensoleillé. Alors que souvent il pleuvait dès les premiers jours, Ah!Ah!Ah! ria Alfred en pensant à la devise farfelue inventée par les organisateur pour attirer les touristes: Cannes, la ville où il pleut ailleurs! Ah!Ah!Ah! continua-t-il de rire en se regardant tel un monstre à travers la glace intérieure du vé-hicule. Mais c'était dans sa nature de se moquer de tout afin de survivre dans ce monde de brutes! reconnut-il en reprenant le chemin de sa mortelle randonnée. Et ce qui le sauvait certainement, c' était cette faculté de se transformer en bouffon! admettait-il avec honnêteté au regard de son mei-lleur ami, Jean-Ré, qui loyal comme un chien de chasse exécrait la trahison ou l'infidélité de ses maîtres. Un long silence suivit cette grande question existentielle en pensant qu'il avait peut-être trahi son meilleur ami par son absence depuis son mariage avec Clotilde, se reprochait-il amère-ment. Car que savons-nous du mal que nous pouvons faire d'une manière involontaire à nos amis en étant loin des yeux, loin du coeur? insista-t-il en se cramponnant à son volant pour ne pas s' éffondrer. Même s'il avait mis en stand by son roman sur la guerre de Crimée, il avait le sentiment que la guerre dans ce monde n'avait jamais cessé avec cette guerre personnelle qu'il menait mai-ntenant contre lui-même, c'est à dire contre son propre desespoir. Et qui ne serait jamais inscrite dans les livres d'Histoire, mais dans sa mémoire intérieure tel un livre intime jamais dévoilé aux regards des autres. Chacun avait bien évidemment le sien et le cachait à sa façon pour ne pas expr-imer son desarroi devant la dure réalité. Et s'il avait choisi le jeu dans ses dimensions très élasti-ques depuis sa prime jeunesse, c'était pour montrer un visage jovial aux autres, même si son vis-age intérieur n'était pas de cette nature. Mais entre nous n'était-elle pas la meilleur thérapie pour avoir une possibilité d'être heureux, mon cher lecteur? Car vouloir être heureux malgré ses mal-heurs et ses echecs, n'était-ce pas le premier pas pour le devenir? Nul doude qu'Alfred était un joueur et à forciori un adepte de la philosophe orientale où le rêve pouvait devenir réalité en pui-sant dans ses ressources intérieures.  Car qui d'entre nous connaissaient véritablement les pouvoi-rs de l'esprit humain, sinon en les explorant dans le réel? Et en était-il pas la preuve vivante, mon cher lecteur?

128

Enfermé dans sa voiture de luxe, Alfred se sentit tout à coup prisonnier de la modernité et de sa classe sociale. Malgré qu'il ne se sentit jamais comme monsieur tout le monde pour n'avoir jam-ais travaillé pour gagner sa vie, mais gagné un jack pot de 700 000 euros au casino de Monte-Ca-rlo à l'âge de 28 ans. Il était sans aucun doute un cas particulier représentant peut-être 0,1 % de la population, pensa-t-il, en prenant à gauche où un panneau affichait : Cannes 30 kilomêtres. Nous y sommes presque et l'on saura la vérité! lâcha-t-il en serrant les dents telle une bête féroce à l'ap-proche de la réalité. Quitte à défoncer la porte de l'appartement de son meilleur ami afin de savoir ce qu'il en est! jura-t-il en se trouvant dans un flou total de perspective d'avenir. S'imaginant mê-me camper devant la porte pour pouvoir le serrer à nouveau dans ses bras, espérait-il les yeux pl-ein de larmes au point qu'il remit ses lunettes noires pour ne pas avoir pitié de lui à travers la gl-ace intérieure du véhicule. Ainsi, Alfred roula jusqu'à Cannes tel un zombie pour ne pas imaginer le pire. Pourtant, il faisait un temps admirable quand il passa sur la Croisette où les terrasses des restaurants étaient pleines de monde. Malgré quelques embouteillages convenus devant le palais des festivals où les badeaux espéraient voir des stars avant le coup d'envoi ou assister à la mise en place du tapis rouge sur le grand escalier devenu désormais mythique. Armée d'une patience adm-irable, Alfred voulut absolument passer devant le palais des festivals avec sa masérati où il ferait pâle figure devant des lamborghini et des ferrari qui lui piqueraient la vedette. Ce qui ne l'effray-ait aucunement, car la chose la plus importante pour lui n'était plus les apparences, mais d'aller sauver son meilleur ami qui habitait dans le vieux Cannes au 15 rue Georges Clémenceau. Pour une raison mystérieuse, quand il passa devant le palais des festivals, son portable retentit soudain-ement, comme si ce lieu mythique avait le pouvoir magique de transformer la vie en cinéma. Oui, qui est à l'appareil? demanda-t-il en imaginant le pire. Oh Alfred, c'est moi, Jean-Ré, Ah!Ah!Ah! J'ai bien reçu ton appel et je t'attends au petit Canet, vieille branche, Ah!Ah!Ah! Alfred, assommé par le cours des évènements, n'était pas loin de s'évanouir au volant de sa voiture en entendant la voix de son meilleur ami lui dire qu'il était toujours vivant. J'arrive tout de suite! lâcha-t-il, la vo-ix chargée par l'émotion où un sourire se dessinait sur son visage telle une happy end qu'il avait tant rêvée. Quelque minutes plus tard, il reussit à sortir des embouteillages et reprit la route en sens inverse vers la Croisette où se trouvait le petit Canet, le café restaurant de leur folle jeun-esse. Dans sa tête se téléscopaient des milliers d'images où le mot "Délivrance" s'affichait, comme sur un grand écran.

129

Délivrane! Délivrance! lâcha-t-il du bout des lèvres après avoir vécu une psychose Hitchcockienne depuis sa mortelle randonnée. Emu de retrouver la vie, il retira instinctivement ses lunettes noires pour pouvoir regarder la lumière du jour ou de futures retrouvailles avec son meilleur ami l'att-endaient. Mais par supertition, il se refusa pour l'instant toute euphorie avant de pouvoir le serrer dans ses bras, car tout pouvait vite tourner très mal s'il nous arrivait un accident à l'un ou à l'autre, spéculait-il avec la lucidité d'un joueur professionnel. Car qu'en savons-nous? se demandait-il en se garant en face du petit Canet qu'il reconnut au premier coup d'oeil par sa devanture Hollywo-odienne. En oubliant pas avant de sortir de prendre son enveloppe contenant les 20 000 euros des-tinée à son meilleur ami qu'il mit dans la poche de sa veste. Quand il entra à l'intérieur rien n'avait semble-t-il changé où les photos des stars de cinéma étaient toujours affichées clinquantes sur les murs de l'établissement. Pascal, le propriètaire, tel un totem derrière son comptoir, le reconnut au-ssitôt et lui adressa un large sourire, malgré qu'il n'y soit pas venu depuis longtemps. En un insta-nt tout son passé sembla défiler devant lui quand Pascal, qui n'avait pas vieilli d'une ride, vint à sa rencontre. A l'évidence, cotoyer des stars de cinéma quotidiennement semblait l'entretenir et le gar-der éternellement jeune, pensa-t-il, non sans un soupçon de jalousie. Aussitôt, tous les deux se pri-rent dans les bras en se regardant comme deux frères où le temps n'avait pas de prise. Celui-ci con-naissant parfaitement l'art d'accueillir ses clients, lui dit au coin de l'oreille : Va derrière, il t'att-end dans la salle à côté à la table 9 en voulant parler de Jean-René. Merci, Pascal, dit-il dans un état de grande émotion. Intelligemment, Alfred ne voulut régler aucun compte avec Jean-Ré, malg-ré que Charlotte et Leslie, sa femme et sa fille étaient chez lui à Menton apparemment pour viole-nce conjugale. Car égoïste et généreux à la fois, il lui sembla nécessaire de recoller les choses afin de répandre le bonheur autour de lui. Et n'était-il le joker dans cette partie de poker où la vie des autres était en jeu, mon cher lecteur? Quand il entra dans la salle du fond, il aperçut son meilleur ami affalé sur la table, la tête entre les mains et les cheveux grisonnant, comme s'il avait pris un coup de vieux ou pas loin d'être au bout du rouleau! pensa-t-il avec compassion en s'avançant vers la table d'un pas mesuré. Tout à coup, Jean-Ré leva la tête et l'aperçut fringant comme il avait tou-jours été. Sans attendre un instant de plus, il se leva en changeant aussitôt de physionomie en retr-ouvant un semblant de jeunesse et se précipita dans les bras de son ami. Ah, mon cher Alfred, comme ça fait du bien de te revoir en chair et en os, Ah!Ah!Ah! Moi de même et je n'attendais que ça, ma grosse baleine, Ah!Ah!Ah! dit-il en sentant le ventre prohéminant de son ami rebondir sur le sien, plat comme une tablette de chocolat.

130

Jean-Ré avait l'air négligé en étant pas rasé où sa veste blanche n'était plus de première jeunesse, mais froissée et éfillée par endroit en montrant un laisser aller évident dût à des problèmes appare-mment financiers, pensa-t-il avec clairvoyance. Malgré son aspect rugueux, Alfred se laissa embra-sser sur la joue par son ami, comme s'il fut égratiné par la réalité qu'il avait toujours voulu fuir. Pressé fortement tel un gros animal par son ami, il lui sembla que les stars de cinéma affichées sur les mur, les regardaient comme des grands acteurs qui ne jouaient plus la comédie, mais le rôle de leur vie. Où Alfred était le bon samaritain et Jean-Ré le banni de la socièté parce qu'il avait joué avec le feu par son addiction au jeu d'argent. Allez, asseyons-nous! proposa Jean-Ré en entrainant Alfred à prendre place autour de la table 9 où chacun reprit la place qu'il avait toujours eu au petit Canet. C'est à dire face au mur tapissé de photos mythiques pour Jean-Ré et face à la salle pour Alfred Swan qui aimait observer le monde tel un romancier. Quand il s'asseya, Alfred passa auss-itôt la main sur le jeton de casino collé au centre de la table tel un talisman. Jean-Ré fit de même, comme pour renouer leur longue amitié que le temps avait apparemment malmenée. Tu veux bo-ire quelque chose? lui demanda Alfred en posant sa main sur l'épaule de son ami. Pour ne pas dér-oger à la tradition, je vais prendre un martini on the rocks, Ah!Ah!Ah! dit-il afin de ne pas bou-sculer ses vieilles habitudes au petit Canet.  Et moi, un dry martini! expédia Alfred en étant un gra-nd admirateur de James Bond où une affiche de "Tuer n'est pas jouer" était collée à l'entrée de l' établissement pour mettre en garde le client récalcitrant. Ah!Ah!Ah, j'en étais sûr! dit Jean-Ré qui semblait renouer avec la chance d'avoir un ami comme Alfred. Un long silence suivit ce moment en attendant que leurs breuvages magiques leurs soient servis tels des dieux. Quand sans prévenir, Pascal surgit dans la salle en portant sur un plateau ce qu'ils attendaient avec impatience de boire pour fêter leurs retrouvailles que Pascal ne voulut manquer pour rien au monde. Messieurs, j'att-endais ce moment depuis fort longtemps! lança-t-il avec un grand sourire en posant les verres sans se tromper devant leurs vieux amis. Apparemment, ces trois là semblaient communiquer ensemb-le par télépathie ou peut-être pour une banale question de génération? se demandaient-ils étonnés par de telles coïncidences. Puis en toute discretion, Pascal s'éclipsa afin de laisser ses deux amis s'entretenir pas forcément du passé, mais aussi du présent où nos deux acolytes levèrent leurs ver-res en signe du renouement. A ta santé, Alfred! lança Jean-Ré qui semblait regaillardi par un com-pagnon avec qui il avait fait des folies en parcourant les casinos du monde entier ainsi que tous les bordels, Ah!Ah!Ah!

131

A notre éternelle amitié! expédia Alfred très ému en choquant son verre conre celui de Jean-Ré qui tinta comme la pureté d'un cristal. Ce qui les émerveilla comme des enfants et les mit en confiance sur ce qu'ils avaient à regler ensemble où Jean-Ré ne voulut point nier ses difficultés en ce mom-ent, non par hypocrisie, mais par pudeur à l'égard de son ami qu'il n'avait pas revu depuis long-temps. Mais quelques instants plus tard, après qu'il ait bu la moitié de son verre et avalé l'olive de son martini on the rocks, il lui demanda subitement : Ok, tu voulais me voir, mais pour quelle rai-son exactement, mon cher Alfred? En comprenant bien, mon cher lecteur, que Jean-Ré n'était pas émêché par l'alcool, mais voulut connaître les intentions de son meilleur ami à son égard en sac-hant qu'il avait le flair infaillible d'un chien de garde et qu'on ne pouvait pas lui mentir bien longt-emps sans qu'il s'en aperçut. Charlotte et Leslie sont chez moi, lui dit-il sommairement. Mais je ne veux pas savoir pour quelle raison, car tu es mon ami, précisa-t-il apparemment très ému de lui dire la vérité. Tiens donc, je pensais que Charlotte irait chez sa mère à Antibe! répondit Jean-Ré qui voulait répondre quelque chose à Alfred. Non, non, elles sont chez moi à Menton et Clotilde s'en occupe. Après un lourd silence, Alfred lui dit en le regardant dans les yeux : J'parie que tu as encore perdu gros au casino, n'est-ce pas? Jean-Ré, très gèné d'avouer, lui dit avec des yeux de chien battu : Oui, c'est exact et je ne te cacherai pas qu'actuellement, je suis dans la dèche! Mais comment l'as-tu deviné? lui demanda-t-il avec des yeux étonnés. Je l'ai deviné tout simplement, parce que tu es mon meilleur ami et qu'entre amis rien ne peut leur échapper, n'est-ce pas? exp-édia-t-il tel un prophète pour le rassurer. Aussitôt, il sortit de la poche de sa veste l'enveloppe contenant les 20 000 euros et la posa sur la table. Jean-Ré, pour le moins surprit, apercevant son nom marqué sur l'enveloppe, lui dit : C'est pour moi, t' en es sûr, Alfred? T'en es sûr? Mais oui, ma grosse baleine, c'est pour toi puisqu'il y a ton nom marqué dessus, Ah!Ah!Ah! Saisissant cette enveloppe avec des mains tremblantes, il l'ouvrit et aperçut à l'intérieur un tas de billets qui lui était destiné. Et y'a combien? lui demanda-t-il pour ne pas etaler les billets sur la table et passer pour un voyou. Y 'a 20 000 euros et j'espère bien qu'ils vont te servir à sortir du gros merdier dans lequel tu t'es mis, n'est-ce pas? Jean-Ré, les yeux plongés dans l'enveloppe, lui dit :  Sans aucun doute, puis la serra contre sa poitrine avec un large sourire, comme on serre une bouée de sauve-tage. Puis, sans prévenir, il se leva et se jeta dans les bras de son meilleur ami qui en vérité n'att- endait que ça. Je te les rembourserai au quintuple! lui dit-il en l'etouffant presque dans ses bras. Mais non, tu ne me rembourseras rien du tout, car je suis ton ami pour toujours! essayait-il de lui dire, mais sans y parvenir vraiment.

132

Pascal, qui avait entendu ces effusions de sentiment de la part de ses amis, se précipita aussitôt da-ns la salle afin d'être témoin de ses rerouvailles peu communes, il faut le dire. Entre un romancier et un flambeur de casino qu'Alfred voulut absolument sauver pour ne pas perdre son père de subs-titution. Ah!Ah!Ah! ria Pascal en les voyant se tenir tous les deux dans les bras, comme des enfan-ts. Ah comme ça fait du bien de se retrouver! lâcha en émoi Jean-Ré avec le sentiment de n'être plus seul au monde et d'avoir retrouvé sa dignité d'homme. Alfred avait alors le sentiment d'écrire un roman dans le réel où la figure joviale du joker lui disait dans sa tête : Bien joué, Alfred! Je vo-us paye la tournée! lança avec enthousiasme Pascal en retrouvant la bonne humeur dans son établi-ssement dont le metier consistait à rapprocher les gens pour adoucir la dure réalité extérieure. En sachant bien qu'Alfred et Jean-Ré avaient laissé une petite fortune au petit Canet au temps de leurs heures glorieuses. Paradoxalement, les gens dans la salle ne semblaient pas génés par toutes ces ef-fusions de sentiment entre deux amis en se sâchant au petit Canet, au temple du cinéma où des sta-rs Hollywoodiennes affichées sur les murs les observaient avec tendresse. Je reviens dans un inst-ant, dit Pascal en retournant derrière son bar qu'il pilotait tel un capitaine de paquebot. Veux-tu que j'appelle Charlotte pour lui dire que tout est arrangé maintenant? lui demanda Alfred avec to-ute la prudence du monde. Non, non, pas pour l'instant, car j'ai mis l'appartement dans un tel état qu'elle risque d'avoir une crise cardiaque en rentrant, Ah!Ah!Ah! ria Jean-Ré dont le célibat n'avait duré que quelques jours et mis un désordre inextricable chez lui, S'il faut faire le ménage chez toi, je t'aiderais bien volontier! lui dit étonnamment Alfred où faire le ménage dans sa vie lui sembla essentiel pour garder des relations saines avec ses amis. Et le moment tombait à point nommé, pe-nsa-t-il, non sans ironie où deux hommes d'âge mûrs allaient enfiler des tabliers de ménagères po-ur se sentir comme une seule famille. Alfred, tu me surprendras toujours, Ah!Ah!Ah! ria Jean-Ré qui accepta son offre, comme une marque de grande amitié. Ce serait la première fois qu'il ferait le ménage chez lui en sachant qu'au sud, on était des machos! pensa-t-il en prenant conscience qu' il devait changer sa façon d'être après avoir passé une expérience douloureuse dans sa vie. Il était temps de changer! comprit-il en regardant Alfred tel un ange gardien pour ne pas finir dans le can-niveau ou en chien errant. Et se sentit redevenir doux en retrouvant un maître en Swan qui avait su se défaire du jeu d'agent pour devenir un grand romancier. Mais méprisé par le microcosme litté-raire parisien pour être un homme du sud auquel on critiquait la superficialité.

133

Pourtant, il avait toujours considéré les apparences comme une grande importance pour analyser la socièté où la première chose qu'on voyait chez un individu, c'était son apparence, n'est-ce pas, mon cher lecteur? En devinant rarement ce qu'il pensait dans sa tête, sinon vouloir s'harmoniser avec le monde qu'il y avait autour de lui, bien entendu. Où penser n'était pas la faculté du commun des mortels, mais des philosophes et des poètes qui déambulaient dans la rue, comme des illum-inés au risque de se faire écraser par une voiture, Ah!Ah!Ah! Alfred, qui sentait les évènements se bousculer dans sa tête, prit son portable et téléphona à Clotilde sous les yeux appeurés de son ami. Allo, Clotilde, c'est Alfred. Oui, j'ai Jean-René en face de moi au petit Canet et je voudrais que tu dises à Charlotte et à Leslie que tout est arrangé! Mais pour une raison inconnue, Alfred se tut et fit une grimace où Clotilde avait visiblement des choses à lui dire concernant sa fuite de la maison sans explication. Mais comprend bien que c'était pour une bonne cause, ma chérie! lui envoya-t-il au téléphone, comme on envoie des sucreries pour l'amadouer. Pendant ce temps là, Jean-Ré sem-blait médusé par cette conversation annonçant une bonne nouvelle, mais mal reçue par la femme d'Alfred. Décidément, je n'étais pas le seul emmerdé dans ce monde! ricana-t-il intérieurement en pensant aux femmes qui emmerdaient les hommes d'être parfaitement heureux. Après ces fâcheries inutiles au téléphone dont les femmes ont le secret, Alfred reprit le contrôle de la conversation et lui dit : Tu diras à Charlotte et à Leslie qu'elles pourront rentrer dans deux jours, car Jean-René à besoin en ce moment de repos. Mais toi, quand est-ce que tu rentres? lui demanda-t-elle, comme au bord de la crise de nerf. Dans deux jours, chérie, car je ne veux pas qu'il fasse des bêtises pen-dant ce temps là. Bien, si tu crois que c'est la meilleur solution pour lui, je ne t'en empêcherai pas. Mais n'oublie pas que tu as aussi une femme qui t'attend à la maison, petite maman, Ah!Ah!Ah! ria Clotilde pour se moquer d'Alfred qui se prenait pour mère Théresa. Mais Alfred, qui ne voulait pas se fâcher une nouvelle fois avec elle( on pouvait bien le comprendre après tout ce qu'il avait vécu) pensait à un possible suicide de son meilleur ami, non pas physique, mais symbolique en jouant les 20 000 euros au casino pour se refaire. Quand il raccrocha, il dit à Jean-Ré, j'espère que tu ne les joueras pas au casino, hum? Abasourdi par cette question brutale, il lui répondit, mais pour tout l'or du monde, je ne voudrais perdre mon meilleur ami! Alfred, étonné par la franchise de ce dernier, ferma les yeux en affichant sur sa bouche un grand sourire tel un bonze qui avait entendu la voix de Boudha lui dire la vérité. Même si Jean-Ré n' était pas un homme irréprochable, il semblait lui pardonner ses errements dans la vie où sur la côte d'azur tout était exarcerbé par le soleil et l'mmensité bleue de la mer, ce qu'il comprenait entièrement.

134

Et n'étais-je pas comme lui auparavant? se demandait-il dans ses pensées en faisant un bilan positif de cette journée extraordinaire. Jean-Ré, qui avait été d'une très grande franchise avec son ami, ne le regrettait pas pour goûter à nouveau au bonheur. Quelques instans plus tard, Pascal revint avec son plateau où un martini on the rocks et un dry martini semblaient valser au rythme de ses pas. Messieurs, c'est pour la maison, dit-il en voyant nos deux acolytes comme des bienheureux. Merci, Pascal, dirent-ils en même temps par une incroyable coïncidence en le faisant rire, Ah!Ah!Ah! Qui pourtant connaissait bien la nature humaine pour tenir un bar restaurant depuis longtemps, mais à chaque fois surpris par la richesse émotionnelle des hommes qui ne voulaient pas paraître comme des mort-vivants aux yeux des autres. Et tout particulièrement dans le sud de la France où tout était apparence, n'est-ce pas? Visiblement dans le sud, nous étions étions toujours dans la grèce antique où la sagesse des philosophes calmaient les ardeurs et la cruauté de leurs contemporains que le soleil avait frappé dès leur naissance. En trinquant à nouveaux, ils avaient l'impression de trinquer à la santé des dieux pour obtenir richesse et bonheur. En fait, tout ce que les hommes désiraient depuis l'aube de l'humanité. Et Pascal, qui avait apporté son verre avec lui, trinqua pour la prospérité de son établissement où le commerce des hommes était indiscociable à la richesse de la cité. Alfred regarda sa montre et vit qu'il était 17 H en pensant qu'il était temps de partir du petit Canet pour ne pas finir complètement ivre et oublier les leçons de la journée. Quant à Jean-Ré, il regardait avec fascination, l'affiche de Casino Royal collée sur le mur qui semblait lui donner des sueurs froides et lui faire perdre la raison. Mais son ami en face semblait lui dire par télépathie : Non pas question, ce soir c'est retour à la vie normale que tu le veuilles ou non! On prendra ma voiture pour aller chez toi, lui dit Alfred, si ça te gènes pas? Non, c'est parfait, car je suis venu ici en transport en commun puisque je n'avais plus un rond à mettre dans mon réservoir, Ah!Ah!Ah! ria Jean-Ré qui voulait garder sa bonne humeur. Ce soir, nous mangerons à la maison comme de-ux vieux potes, si tu veux? Sans problème, ma grosse baleine si tu as encore quelque chose à man-ger dans ton frigo, Ah!Ah!Ah! Mais ne t'inquiètes pas pour ça, en sortant d'ici on ira faire les cou-rses à Franprix, lui dit Jean-Ré qui désormais avait de l'argent pour inviter son ami dans de bonnes conditions. Mais ne te casses pas la tête pour la cuisine, une bonne omelette aux pommes de terre suffira amplement avec une salade de tomates à l'huile d'olive sans oublier du pain frais, proposa Alfred qui ne voulait pas embarrasser son ami dont l'appartement devait être dans un grand fou-illis. Par une circonstance extraordinaire, ils avaient le sentiment de redevenir des célibataires en renouant avec leur jeunesse qui fut flamboyante, mais avec le regard de l'expérience, pensaient-ils en connaissant désormais le prix de la vie et de l'amitié. On y va quand tu veux! lança Jean-Ré qui était pressé de mettre de l'ordre dans sa vie et tout particulièrement chez lui.

135

Quand Alfred se leva, Jean-Ré le suivit comme un toutou. Sans toutefois être dans une relation maître à esclave sachant que le chien avait besoin d'un maître pour justifier son existence et nulle-ment l'esclave qui était contraint par la force. Nul doute que Jean-Ré avait trouvé un maître en Alfred Swan qui avait tout réussi dans la vie : à devenir un grand romancier et surtout à se débar-rasser de son addiction au jeu d'argent. Ce qu'il admirait beaucoup en voyant en lui un homme d' une extrème intelligence et d'une bonté sans égale envers ses amis. Avec le sentiment qu'il avait atteint un état de perfection qu'il jalousait un peu en tant que chien de garde où ses facultés intelle-ctuelles étaient limitées, alors que son audorat hyper développé. A chacun sa place! pensa-t-il en sortant du petit Canet où il aperçut la flamboyante masérati de son ami. T'as changé de voiture? lui demanda-t-il admiratif devant le bolide de la marque Italienne. Oui, j'ai eu un coup de coeur et je l'ai payé au tiers de son prix. C'était au casino de Monte-Carlo où un joueur me l'a vendu pour 10 000 euros parce qu'il n'avait plus un rond pour jouer, Ah!Ah!Ah! Bien joué, Alfred, t'as senti la bonne occasion pour faire une excellente affaire. Et je t'avouerai Jean-Ré, que pendant cette jour-née, je n'ai pas joué un centime à la roulette en voulant jouir immédiatement de mon bolide, Ah!Ah!Ah! T'es trop intelligent, Alfred. Car tu possède toujours le véhicule, alors que le fric au casino te brûle les doigts à la vitesse d'un éclair, n'est-ce pas? Je le sais bien et c'est pour cela que j'ai pris conscience qu'il fallait contrôler ses pulsions de jeu pour éviter la banqueroute, dit-il en le rega-rdant un peu gèné de lui dire la vérité. Mais ce dernier, sans aucun esprit de vengeance, lui dit : Tu as parfaitement raison et je vais suivre maintenant tes conseils. Quand il entra dans le luxe de la masérati, Jean-Ré eut le sentiment de retourner à la vie normale où ses 20 000 euros lui servirai-ent à retisser les liens avec sa famille et ses amis. Bref, ce que tout homme et toute femme désirait au plus profond de son coeur, n'est-ce pas? Où l'odeur du cuir de l'habitacle semblait l'envelopper et le conforter dans ses nouvelles résolutions de ne plus jeter son argent par les fenêtres, mais de l' utiliser à bon escient pour ne pas tout perdre : ses amis et sa famille sachant qu'il n'était plus tout jeune et que ses forces commençaient à l'abandonner. En bouclant sa ceinture, il eut le sentiment de boucler sa vie d'hier pour la vie d'aujourd'hui où Alfred démarra son véhicule, comme un tigre enragé. Epousant la forme moelleuse de son siège, il n'avait désormais plus peur de l'avenir en regardant son ami s'engager sur la Croisette où il semblait redécouvrir la beauté de la côte d' azur avec sa mer immensément bleue qui l'hypnotisait tel un enfant.

136

T'écris quelque chose en ce moment? lui demanda-t-il subitement en voulant montrer de l'interêt pour son ami écrivain. Alfred, étonné par sa question, lui dit : Oui, bien éffectivement, j'écris en ce moment un roman sur la guerre de Crimée. Car j'ai toujours voulu décrire cette socièté du 19 ème où l'Europe était en pleine reconfiguration après la défaite de Napoléon à Waterloo en 1815. A ce propos, on disait que Napoleon avait perdu parce qu'il avait manqué de chance, ajouta Jean-Ré qui voulait entrer dans cette conversation parce qu'il était fier d'être Français, mais un peu raciste et antisémite sur les bords, comme tous les Français de souche. C'est exact, dit Alfred, car lorsqu'il recrutait un officier dans son armée, il demandait toujours à ses collègues s'il avait de la chance? Pour dire que Napoleon confiait aussi son destin au hasard en sachant bien que tout ne pouvait pas être contrôlé sur un champ de bataille, n'est-ce pas? C'est certain, dit Jean-Ré qui en savait quelque chose sur le fait de confier son destin sur la table d'une roulette. Avec l'impression de ressembler à Napoleon pour avoir perdu des sommes considérables au casino, mais sauvé in extremis par un ami qu'on appelait un allier en situation de guerre. Et qu'il avait très certainement raison, puisque la guerre n'avait jamais cessé depuis que le monde était monde où les cadavres s'ammoncelaient chaque jour autour de nous, comme des montagnes obscurcissant la beauté du monde. Il faut te dire que durant la guerre de Crimée, il y eut plus de morts causés par les maladies que par les com-bats, dit-il à Jean-Ré après qu'il ait fait des recherches sur Internet pour écrire son livre. Tiens do-nc, comme c'est intéresssant! s'écria-t-il en découvrant la fragilité des hommes, malgré un courage exemplaire à braver la mort. Où mourir du typhus ou de la malaria dans un conflit armé fut peu glorieux pour le soldat qui cherchait la gloire et les honneurs, n'est-ce pas? Oh oui et malheureus-ement et le cas pour le gros du bataillon où les honneurs étaient distillés au compte goutte, sinon pour ceux qui avaient montré un courage exemplaire au combat. Où certains combattaient unique-ment pour avoir une médaille et quel que le prix! lança Alfred qui avait appris ces choses en étudi-ant la guerre de Crimée côté Russe où l'on courait après les médailles pour avoir une chance d'être planqué à l'arrière et revenir dans son pays comme un héros, Ah!Ah!Ah! Et d'être blessé légèrement pour être renvoyé chez soi, le rêve pour les soldats les moins courageux, n'est-ce pas? Je ne te di-rai pas le contraire, mais cela faisait partie entièrement de la nature humaine où l'ensemble de la population était envoyé à la boucherie. Et quitte à sauver sa peau, je trouve cela tout à fait naturel, en sachant que mon libre arbitre serait remis en question par un foudre de guerre, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en regardant jean-Ré qui aimait son pays, non par fanatisme, mais prêt à le défendre contre les invasions étrangères. En riant ensemble, ils avaient le sentiment de redevenir des gosses et d'oubl-ier tout à coup leurs vies d'adultes qui ne semblaient pas leur convenir entièrement.

137

Avec ce désir intense d'insouciance qui ne les avait pas quitté depuis l'enfance. Comme si leur cor-ps avait grandi et grossi trop vite au point de le porter chaque jour, comme une vieille carcasse qui finira au fond d'un cercueil. Au fond d'eux-mêmes, ils connaissaient tous cette histoire tragique, mais tellement banale en se passant tous les jours depuis que le monde est monde, n'est-ce pas? Ce qui n'était plus un mystère où les faits étaient là pour nous le rappeler à chaque instant de notre vie en étant témoin de la mort des autres. Ce à quoi nous aurions bien voulu échapper pour vivre en état de rêve permanent ou d'immortalité. Le rêve d'immortalité était-ce le rêve des fous ou bien celui de l'humanité? se demandait Alfred au volant de son bolide où le paysage défilait devant lui, comme une pure fiction. Où tout compte fait tout était artificiel puisque conçu et fabriqué par le délire des hommes. La côte d'Azur, remarqua-t-il, était sans aucun doute un décors entretenu et astiqué tous les jours par l'équipe de la mairie pour faire plaisir aux touristes et aux habitants, Ah!Ah!Ah! ria-t-il intérieurement en lâchant un sourire que Jean-Ré perçut comme un instant de bon-heur ou d'insouciance. Aussitôt, il imprima sur sa bouche le même sourire afin d'être en osmos avec son ami qui tout compte fait lui avait sauvé la vie, savourait-il en ouvrant la fenêtre pour sentir l'odeur des beignets et des glaces envahissant le chemin de la Croisette. Bizarrement, il avait une envie de fraise, comme une femme enceinte. N'allons pas dire qu'il était sur le point d' accou-cher dans la voiture d'Alfred, Ah!Ah!Ah! Mais plutôt en voie de renaissance, comme il arrive à chacun d'entre nous quand les planètes sont alignées sur notre signe astral. Né sous le signe du chien, Jean-Ré se sentit redevenir lui-même après des errements dans les lieux de perdition comme les salles de casino et les maisons closes. Tout ça, était désormais derrière lui, pensa-t-il avec une envie de mordre la vie d'une autre manière disons plus paisible où tout ne serait plus remis en question pour une question d'orgueil ou d'adrénaline. Car on pouvait jouir aussi de la vie d'une manière intelligente et non insensée, n'est-ce pas? En comprenant subitement qu'il avait été durant une grande partie de sa vie, un chien fou. Apparemment, ce chien fou avait retrouvé la raison grâce à son meilleur ami, Alfred Swan. Mais entre nous qui n'avait pas été durant sa jeunesse, ce chien fou qui courait dans tous les sens et mordait tout le monde au passage et pour aller plus loin, la socièté elle-même? Et pour illustrer la folie, l'antiquité utilisait souvent l'image du chien fou qui sans maître errait dans les villes prêt à mordre le premier os qu'il trouverait sur son chemin et pou-rquoi un mollet, Ah!Ah!Ah!

138

A ce propos, il parait que les Athéniens décrivaient Diogène, l'illustre clochard de l'antiquité, com-me un chien fou qui s'en prenait à la population, car sans maître et sans morale. Où l'histoire attes-tait qu'il était mort durant une lutte avec un chien pour un os à dévorer, Ah!Ah!Ah! Décidément, on échappait pas à son destin, remarquait Jean-Ré désormais sauvé de l'éternelle errance des chiens sans collier ou famille. Aussitôt, il se tourna vers Alfred en lui lançant un regard affectueux, non pas de soumission, ce qu'Alfred n'accepterait jamais, mais de reconnaissance mutuelle où la vie de l'un était indiscociable de la vie de l'autre. Il semblait alors flotter dans l'habitacle de la voiture, un monde qu'il connaissait très bien où les atomes s'unissaient harmonieusement pour former la vie rêvée. Tiens, il y a un Franprix juste là! lança-t-il à Alfred en le montrant du doigt. Et par chance, il y avait une place vide en face de la rue où Alfred se gara avec toute la prudence du monde en sac-hant que sur la Croisette des fous furieux frimaient avec leurs gros véhicules. De plus, il y avait une boulangerie à côté de quoi acheter du vrai pain, pensa-t-il, en disant à son ami: N'achète pas de pain à Franprix, car je deteste le pain industriel.  D'accord avec toi, le pain industriel, c'est dégueu-lasse car on a l'impression de manger un sac de farine, Ah!Ah!Ah! rirent-ils de bonne humeur en sortant du véhicule. Et ne fais pas les courses pour une semaine, mais juste pour ce soir, ok? lui dit-il pour qu'il ne prenne pas une heure à faire les courses où l'heure de pointe sonnait dans tous les magasins de la côte d'azur. Ok, je prendrai l'essentiel pour faire ce soir une bonne omelette aux pommes de terres et une salade de tomate à l'huile d'olive sans oublier une bouteille de rosé de provence, bien entendu. Pour le dessert, dit Alfred, je le prendrai à la boulangerie pour ne pas gâ-cher nos retrouvailles en bouffant un truc bourré de colorants et de parfums artificiels. Entière-ment d'accord avec toi, car je souhaite que ce repas soit des plus simples et des plus sains pour renouer notre amitié, n'est-ce pas? demanda-t-il à son ami qui ne pouvait être que d'accord avec lui où la bonne nourriture sur la table était le signe d'un grand respect pour ses amis. Sachant qu'il n'y avait pas de bon repas sans bons amis, ni de bons romans sans bonnes histoires et que les repas indigestes que nous servaient les intellectuels n'étaient pas sa madeleine de Proust, mais une cure de vomissement, Ah!Ah!Ah! Certes, très bon pour le nettoyage de l'estomac, mais très mauvais pour notre système cardiaque, Ah!Ah!Ah! Décidément, Alfred Swan ne pouvait pas séparer la litt-érature de la vie, qui nous offrait de merveilleuses histoires à raconter sans devoir absolument tout inventer de A à Z au risque de dire de grosses bêtises sur les hommes.

139

Où le mensonge ne signifiait rien dans le roman puisque le mensonge faisait partie entièrement de la vie, alors que dire des bêtises, ça se voyait comme le nez sur la figure, n'est-ce pas? Et que men-tir pour dire vrai était le travail de l'écrivain qui ne savait pas vraiment qui disait la vérité dans ses romans, mais entendait très bien ceux qui disaient des bêtises pour tromper leurs semblables. Bref, ou une vérité pouvait être un mensonge pour celui qui était embarqué dans une histoire qui n'était pas la sienne, mais inventée par d'autres. Bref, comme nous tous, n'est-ce pas, mon cher lecteur? En se souvenant d'une partie de poker où ses adversaires s'étaient associés pour le plumer afin de se partager le gain. Et bien évidemment, comme ils étaient quatre à jouer contre lui, il ne pouvait pas gagner, sinon se retirer de la partie et se sentir humilié, n'est-ce pas? Mais comme à cette épo-que, il était un malade du jeu, il preferait jouer jusqu'à son dernier centime quitte à vendre sa Ro-lex où ses bottes de marque pour pouvoir se refaire, Ah!Ah!Ah! Quelle époque de dingue! pensait-il en entrant dans la boulangerie où la vie normale réapparaissait en nous proposant des plaisirs simples sans se ruiner, comme des choux à la crème et des tartes à la fraise pour combler nos frus-trations, Ah!Ah!Ah! Ce qu'on pouvait être con, quand on était jeune! s'écriait-il en admirant derr-ière la banque vitrée le travail des hommes où tout était fait à la main pour le plaisir des yeux et du palais. Vaudrait mieux être vieux avant d'être jeune, pensa-t-il avec regret en commandant quatre baguettes et une tarte au citron meringuée qu'il adorait. Aussitôt sortis de la boulangerie, il rangea tout ça dans sa voiture, puis partit attendre son ami aux portes du magasin Franprix. Car il detes-tait faire les grands magasins et tout particulièrement faire la queue aux caisses où il y avait tou-jours un hurluberlu qui prenait plaisir à créer un embouteillage parce qu'il avait dévalisé tous les rayons en se prenant pour un prince ou bien un autre qui payait ses courses en petites pièces jau-nes, Ah!Ah!Ah! Quitte à payer plus cher, il aimait mieux faire les petits magasins en étant sûr d' être bien acceuilli et servi dans un délai convenable. Car pour lui qui avait les moyens, il était inu-tile de perdre son temps dans des activités sans interêt pour son metier d'écrivain. Où parait-il, les gens en général perdaient un tiers de leur vie à faire les courses, attendre aux caisses, se taper les embouteillages pour aller au boulot, etc! Bref, l'enfer pour le commun des mortels qui n'en avait pas réellement conscience puisque obligé de suivre la marche du monde pour exister économi-quement. Alors que l'écrivain, hors du temps, pouvait observer ses contemporains sans mépris, mais pour comprendre la marche du monde avec laquelle il nourrirait ses romans.

140

Posté devant les portes du Franprix, Alfred observait le monde avec un oeil attentif afin de compr-endre leurs comportements. Où certains entraient dans le magasin avec une impression que le tem-ps leur courait après et qu'ils n'avaient jamais le temps de rien faire. Alors que d'autres, la marche plus lente semblaient prendre plaisir à entrer dans ces temples de la consommation prêts à tout acheter par la pensée ou quand ils en auront les moyens. Bref, avec des yeux plus grands que l'est-omac, Ah!Ah!Ah! Mais n'était-ce pas le grand rêve véhiculée par la socièté de consommation pour donner l'impression aux gens, quand ils pourront tout acheter, qu'ils seront heureux? Ce auquel Alfred ne croyait pas un traitre mot en se sentant parfaitement heureux quand il n'avait plus de besoin à satisfaire. Il est vrai un paradoxe, mais parait-il un grand luxe chez les riches quand ils n' avaient rien à acheter dans la journée, alors qu'ils en avaient largement les moyens, Ah!Ah!Ah! Et si les pauvres savaient tout cela, je pense qu'ils se pendraient à chaque coin de rue, Ah!Ah!Ah! Mais comme ils étaient des durs à cuir, habitués à une vie pénible, il enduraient leur situation avec l'espoir de gagner un jour au loto. En regardant parterre, Alfred aperçut des tickets de grattages de la française des jeux qu'il ramassa par simple curiosité. Car souvent, les joueurs oubliaient de tout gratter par inadvertance. Apercevant des cases non grattées, il s'empressa de les gratter et vit app-araître à sa grande surprise, la somme de 50 euros sur un ticket de millionnaire! C'était pas la for-tune, pensa-t-il, mais c'était agréable de pouvoir rembourser ses courses en se baissant parterre, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en allant aussitôt au bar tabac le plus proche pour encaisser son argent. A ce moment, il comprit qu'il était un homme qui avait de la chance en ramassant un jour un billet de 100 euros devant un SDF qui avait semble -t-il de la merde dans les yeux, Ah!Ah!Ah! Mais comme il n'était pas un cynique, Alfred lui donna 10 euros pour l'aider à manger ou à se payer du tabac à rouler. En sachant bien que les riches devaient aider les pauvres qui malheureusement n'étaient pas doués pour trouver de l'argent faute d'audace et de relations avec les autres. Par son metier d'écri-vain, il devait aimer les hommes et les femmes pour écrire leur histoire, sinon ses livres seraient seulement de l'introspection ne parlant que de lui-même. C'est à dire de la littérature bourgeoise menant à la mort de la littérature pour ne parler que de son nombril, Ah!Ah!Ah! Mais il est vrai, la tendance actuelle de la littérature où la classe sociale favorisée se prenait pour le centre du monde tel qu'on pouvait le voir dans les médias où les écrivains-journalistes étaient la nouvelle race do-minante, malheureusement.

141

Et si en son temps, Honoré de Balsac avait abandonné le journalisme pour la littérature, ce n'était pas anodin, mais par souci d'honnêteté intellectuelle. Sachant que les journalistes ne racontaient pas la vie des gens, mais leur actualité désastreuse, Ah!Ah!Ah! Ce qui par définition n'était la vraie vie en vue de créer une oeuvre d'art, mais un fourre tout inextricable en croyant écrire l'histoire des gens. Alors qu'on en était très loin en choisissant les thèmes d'actualités qui feraient un maxi-mum d'audience auprès des téléspectateurs, mais souvent stériles pour faire avancer la socièté da-ns le bons sens. Car de mon point de vue, on a jamais résolu les problèmes de la socièté française sur les plateaux télés, Ah!Ah!Ah! C'est ce que pensait réellement Alfred Swan, le romancier de ses dames, qui ne mélangeait jamais les torchons et les serviettes en matière de littérature où parler de l'actualité dans ses livres était un aveux de faiblesse, celle de son manque d'imagination. Et s'il en parlait avec parcimonie, c'était pour éviter que ses livres deviennent vite obsolètes, comme les livres des écrivains-journalistes qui finiraient dans les vides greniers, Ah!Ah!Ah! Et bien qu'il s'y frotta au debut de sa carrière littéraire avec " Les iles gourmandes", un livre écrit suite à une invitation du prince de Monaco sur une de ses iles paradisiaques pour une partie de pêche aux gros tout en mêlant des entretiens lègers sur les plaisirs de la vie. C'est ce que sa femme Clotilde lui av-ait conseillé afin d'attirer les médias sur lui dans le but de vendre ses futurs livres aux parfums exotiques et sucrés. Un livre qu'il ne reniait pas, mais qui pour lui suivait de trop près l'actualité où la principauté de Monaco était alors à l'affiche où Albert 2 succèdait à son père, le prince Rai-nier 3. Sans se cacher que ce livre eut beaucoup de succès grâce aux médias et à sa quantité de su-cre à l' intérieur, Ah!Ah!Ah! Pour dire qu'Alfred n'était pas contre la légèreté de la littérature, mais se refusait d'y mettre le pot de sucre pour faire plaisir aux femmes, Ah!Ah!Ah! Car tout compte fait, la bonne santé de sa littérature dépendait aussi celle de ses lectrices dont il refusait l'embom-npoint pour suivre ses aventures extraordinaires. Avec le rêve un jour d'écrire des livres de dieté-tique, mais avec toujours à la fin, un bon dessert à dévorer pour ne pas frustrer ses lectrices, Ah!Ah!Ah! Ce que les professionnels appelaient dans leur jargon du marketing où la récompense dev-ait être la contre-partie de l'effort effectué par le cobaye pour ne pas être grossier. Bref, où faim et satisfaction était le moteur de l'humanité ainsi que celui de la littérature. Car qui d'entre nous lir-ait un livre s'il n' avait pas faim d'histoires ou d'émotion? Bien évidemment, personne. De mêlme que pour ceux qui n'avaient pas le sentiment d'exister, un moyen de combler un manque afin de se créer une famille imaginaire avec femme, enfant et amis en vivant des aventures rocambolesques, n'est-ce pas?

142

Visiblement, Alfred prenait plaisir à laisser vagabonder sa pensée tel un cheval fougueux. En com-prenant que sa littérature se formait dans sa tête sans aucune volonté de sa part telle une mystérie-use alchimie où son bonheur était la clé. En revenant à la réalité, il s'écria : Mais il en met du te-mps pour faire quelques courses! en pensant à Jean-Ré. Pour en avoir le coeur net, il entra dans le magasin pour se placer à la sortie des caisses. Et comme bien entendu, il aperçut son ami bloqué à une caisse où une personne obèse encombrait le passage avec une montagne de marchandises sur le tapis roulant. Décidément, la malchance le poursuivait, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en s'avançant vers la caisse pour lui crier d'aller à la caisse à côté où les clients avaient peu de marchandises à faire pa-sser. D'accord, j'y vais! lança Jean-Ré qui semblait sur une autre planète quand il se trouvait dans un grand magasin grouillant de monde. Après qu'ils aient passé les portes du magasin Franprix, tous les deux poussèrent un ouf de soulagement en remarquant que la socièté de consommation resemblait à un véritable enfer. De retour à leur véhicule, ils apprécièrent à nouveau le silence en reprenant leurs esprits et poursuivre le roman réaliste d'Alfred Swan d'aider son ami à retrouver la vie normale. A voir, Jean-Ré, la tête tournée vers la fenêtre et les yeux perdus dans le vide, il sem-blait quelque peu désabusé par ce retour à la normalité sachant que toute sa vie, il avait flambé dans les casinos et disons le franchement flambé sa vie au temple de l'insouciance et de la dérais-on. Apparemment, faire de simples courses dans un grand magasin l'avait plongé dans un grand dé-sarroi et dans une quotidiennenté qu'il n'avait jamais apprécié la routine. Et quand Alfred déma-rra, il sembla désarçonné comme un enfant qu'on avait rattrapé sur les chemins buissoniers de l'en-fance. Un peu comme Pinocchio, mais dont l'errance avait duré anormalement longtemps puisqu' il n'était plus tout jeune, mais agé d'une soixantaine d'années. Peut-être qu'Alfred avait pitié de lui? se demandait-il en voyant son domicile s'approcher de minutes en minutes avec une véritable crainte sachant qu'il l'avait mis sens dessus dessous après sa grosse crise existentielle. Et si la maj-jorité des gens subissaient une crise existentielle à la quarantaine, Jean-Ré sembla une exception où sa quarantaine fut flamboyante en étant plongée dans les illusions du jeu et de l'insouciance. Certainement, une forme de la jeunesse éternelle qu'il recherchait inconsciemment qu'Alfred n' aurait pas démenti en la recherchant lui-même. Ces deux là avaient visiblement beaucoup de point commun à part leur âge et leur réussite où Jean-Ré était celui qui avait échoué à faire quelque ch-ose de sa vie, sinon un grand vide à force de parier sur le hasard.

143

Et bien qu'Alfred eut remporté un jack pot au casino de Monte-Carlo, ils se ressemblaient étonna-mment par leur existence. Où l'un était le perdant et l'autre le gagnant dans cette vie injuste, mais toutefois améliorable par la grande imagination d'Alfred Swan. Car le roman faisait partie aussi de sa vie où il suffisait simplement de sortir des sentiers battus et des préjugés pour voir les étoiles briller à l'horizon. Alfred, voyant son ami abattu pour des raisons qu'il ignorait, se tourna vers lui et lui dit : Mais ne ten fais pas, à la longue tu te rehabitueras! Aussitôt, Jean-Ré comprit que son ami lui demandait de se réhabituer à la vie de tous les jours, bref, à l'ennui quotidien du commun des mortels. A ces mots très durs qu'il sentit peser trop lourd pour un homme qui avait vécu lon-gtemps dans les illusions, Jean-Ré ne put retenir ses cris et ses larmes qui inondèrent aussitôt son visage tel un torrent de douleurs. Fortement ébranlé par la raction inattendue de son ami, il se gara aussitôt sur le bas côté afin de comprendre la grande peine de son ami. Mais qu'est-ce qu'il y a, non de dieu? lui demanda-t-il en se penchant vers lui. Jean-Ré, les mains ruisselant de ses pleurs, n'av-ait pas vraiment d'explication à lui donner, sinon lui montrer la réaction violente de son corps qui refusait de voir la réalité en face et tout particulièrement l'ennui mortel qui le tuerait en quelques semaines. A le voir déverser des larmes inconsolables dans son véhicule, tel un homme qui avait perdu tout ce qui le faisait tenir debout, il comprit qu'il tenait entre ses mains, la vie de son ami. Mais qui t'interdit d'avoir de l'espoir? lui demanda-t-il en lui posant la main sur l'épaule. Aussitôt, Jean-Ré commença à sécher ses larmes en le regardant comme un prophète. De toute évidence, Jean-Ré avait besoin d'une cure de desintoxication au jeu d'argent, pensait Alfred en le voyant per-du dans un monde qu'il ne connaissait pas où l'adrénaline était perfusée aux comptes gouttes. Et pour compenser celle-ci, allait-il se droguer durement ou peut-être se mettre au sport pour perdre son embonpoint ou bien lire la bible, comme un forcené pour trouver de l'espérance? Tout cela, bien évidemment, Alfred ne le savait pas, ni Jean-Ré qui ne se voyait pas non plus participer à des lotos du troisième âge sur la côte d'Azur où la population n'était plus toute jeune, Ah!Ah!Ah! Où remplir des grilles en carton avec des jetons en plastique n'avait rien de passionnant sinon de ga-gner une cafetière electrique ou une paire de pantoufle grand confort, Ah!Ah!Ah! Tout cela se bousculait dans leurs têtes où apparemment aucune solution était facile à trouver pour un drogué de la jouissance éphémère, comme l'était Jean-Ré. Même Swan semblait dubitatif à lui proposer des activités dont le but était l'écoulement du temps sans faire de vague tel un sage Taoïste.

144

Mais le papillon de nuit qu'était Jean-Ré le supporterait-il? se demandait-il en reprenant la route qui semblait interminable, comme une mortelle randonnée. Visiblement, un roman où le réel et la fiction se confondaient pour Swan en le destabilisant quelque peu. En se demandant avec inquiè-tude s'il n'allait pas être victime à nouveau d'hallucinations, comme sur la départementale 57 où il avait rencontré le sosie d'Alfred Hitchcock et ceux de Grace kelly et de Cary Grant? C'est à dire un film où il n'était plus le scénariste, mais le simple spectateur? Dérouté par la réaction violente de son ami, qui ne lui avait pas donné d'explication claire et précise sur son mal être, il avait le senti-ment de perdre le contrôle des évènements et demarra en trombe tel un homme en colère. Alors que Jean-Ré s'enfonçait dans son siège sans savoir réellement le mal qu'il avait fait à son meilleur ami. Allaient-ils se fâcher pour la première fois de leur vie? se demandaient-ils avec une grande souffrance intérieure sachant qu'Alfred avait fait des efforts colossaux pour le sauver d'une mort prématurée. Et si les 20 000 euros n'avaient servi à rien? s'interrogeaient-ils mutuellement par un destin qui semblait inéluctable. Et pouvions-nous aider quelqu'un qui refusait d'être sauvé parce qu'il se sentait damné parmi les hommes, mon cher lecteur? Sans aucun doute, une rude question pour chacun d'entre nous qui ne pouvions échapper à la superstition ni au complotisme, quand il se trouvait en mauvaise situation, n'est-ce pas? Où l'important était de savoir combien de temps allions nous tenir sans flancher et devenir fou? Telle était la grande question que se posait l'huma-nité durant les crises, les guerres, les épidémies afin de revoir un jour le printemps ainsi que les jours heureux! Pendant sa jeunesse et les longs mois d'hiver dans le Pas-de-Calais, Alfred se dem-andait souvent s'il reverrait un jour le printemps? Car le froid de l'hiver l'angoissait tellement qu'il représentait pour lui la mort où son corps et ses pensées étaient prises par les glaces! En pensant à tout cela, il eut soudainement la nausée avec une envie de vomir cette réalité qui lui serrait l'esto-mac et les tripes. Pour faire passer ce mauvais moment, il prit un bonbon dans un sachet qui était sur la console du véhicule. Tu veux un bonbon? demanda-t-il un peu naïvement à Jean-Ré qui ét-ait plongé dans ses tourments, mais dont la réponse allait être très importante pour lui où un refus serait considéré, comme une rupture définitive. Oui, j'en veux bien un! dit-il en le surprenant agréablement en y voyant comme un espoir de le sauver. En regardant le papier d'emballage, il eut la bonne surprise de voir que c'était un bonbon à la fraise et le mit dans sa bouche avec gourman-dise. A les voir tous les deux sucer leurs bonbons, on avait le sentiment qu'ils étaient redevenus des gosses en faisant énormément de bruit dans la voiture, Ah!Ah!Ah!

145

Quand soudainement, ils éclatèrent de rire pour oublier tout ce qui s'était passé auparavant. Passe-m'en un autre! demanda Jean-Ré qui voulait avoir deux bonbons dans la bouche pour savoir ce que pouvait faire, Ah!Ah!Ah! Tiens, ma grosse baleine! dit Alfred qui l'avait toujours considéré comme un ogre dans l'existence. Et ne t'étouffe pas avec, car je ne veux pas être responsable de ta mort devant la justice, Ah!Ah!Ah! T'inquiète pas pour ça, car j'écrirai mon testament avant de mo-urir dans ta masérati, Ah!Ah!Ah! Quand ils arrivèrent à son domicile au 15 rue Georges Clémenc-eau, Alfred lui laissa le paquet de bonbons qui apparemment avait des vertus thérapeutiques sur son moral en morceaux. L'immeuble n'était pas récent, mais semblait dater des années soixantes dix avec sa façade formée de balcons en enfilades et répliquable à volonté dans les grandes villes où l'espace était limité et cher. Mais par souci de prestige, les promoteurs l'avaient appelé "résid-ence du marquis" avec un petit espace vert où verdure et parterre de fleurs étaient indispensables pour ne pas sentir le bétonnage excessif de la côte d'azur. C'est là où t'habites? lui demanda Alfred qui n'était pas venu le voir depuis très longtemps à son domicile. Et oui, c'est dans cette cage à poule que j'habite, Ah!Ah!Ah! lança-t-il apparemment désabusé de retourner chez lui où tous ses bons et mauvais souvenirs allaient lui sauter au visage quand il ouvrirait sa porte. Quand il l'ou-vrit avec un bruit infernal de clès, Alfred aperçut par dessus de l'épaule de son ami, un apparte-ment plongé dans une grande obscurité. Et Jean-Ré, au leu d'allumer la lumière comme il était co-nvenu, partit à l'intérieur pour visiblement aller ouvrir les volets qui étaient fermés. Heu, ne bou-ge-pas, lui dit-il, car je ne veux pas que tu te romps le cou avec les objets qui traînent parterre. Ok, j'attends! dit Alfred en s'attendant au pire. Quelques instants plus tard, après qu'il ait ouvert les volets, la lumière violente du jour inonda le salon où Alfred aperçut sous ses yeux éffarés un vrai capharnaüm! Hésitant même à entrer à l'intérieur où sur la moquette se trouvait des milliers de photos déchirées formant comme un immense puzzle! C'est quoi ça? lui cria-t-il dessus en se bais-sant au sol pour ramasser une photo de vacances où il était en compagnie de Jean-Ré devant un casino à Macao. La photo était déchirée en deux où les deux amis étaient désormais séparés pour la vie tel que l'avait voulu Jean-Ré, apparemment, très malade psychologiquement. Les autres pho-tos déchirées représentait son couple éparpillé en mille morceaux sur le sol que Jean-Ré piètinait avec une désinvoltutre inouïe. Ce qui mit Alfred Swan dans un grand malaise en regrettant d'être venu ici pour soi-disant faire le ménage. Allait-il lui proposer de recoller toutes les photos pour espérer recoller le passé? se demandait-il en avançant prudemment dans le salon où les objets du quotidien avaient été jetés au sol avec une grande fureur.

146

Excuse-moi, Alfred, de te faire visiter mon appartement dans un tel état, mais il fallait que tu le vois afin que tu m'aides à le ranger avant que Charlotte et Leslie reviennent à la maison. C'est une évidence! lâcha désabusé Alfred en remettant une chaise sur ses quatre pieds et un vase sur un petit meuble. Mais qu'est-ce qui t'a pris, non de dieu? lui demanda-t-il en le regardant droit dans les yeux pendant que ce dernier essayait de cacher derrière lui une corde ramassée sur le divan. Et bien sûr, cette corde que tu caches, c'était pour te pendre, n'est-ce pas? lui envoya-t-il à la figure com-me on envoie un coup de poing. Un long silence s'ensuivit où Jean-Ré parut tétanisé par la situa-tion, comme pris en faute. Mais non, je t'assure, car je comptais l'utiliser pour remorquer ma voit-ure qui est en panne en ce moment. Et bien évidemment, je dois te croire! lui expédia-t-il qui n'en croyait pas un mot. Mais si tu ne veux pas me croire, alors tu n'es plus mon ami! répliqua-t-il brutalement en sachant que son ami avec un coeur d'artichaut. D'accord, je veux bien te croire si ça peut te faire plaisir. Merci, car je n'attendais pas autre chose de toi. Tous les deux semblaient sur le fait accompli où il était hors de question qu'ils se fâchent après avoir fait tant d'effort l'un envers l'autre. Où Alfred avait le sentiment d'être pris en otage par son meilleur ami auquel il ne pouvait plus rien refuser ou faire marche arrière. Avant de cacher cette corde dans un endroit dis-cret, Jean-Ré dénoua le noeud coulant qu'il avait fait pour mettre fin à ses jours, ce qui mit Alfred dans un état de révolte inouïe. Pour éviter de se fâcher encore avec son ami, il partit vers la cuisine afin de se donner une idée du désordre qui régnait dans l'appartement. A peine avait-il franchi le seuil de la cuisine qu'il aperçut une montagne de vaisselle en équilibre sur les bords de l'evier prê-te à tomber parterre. Afin d'éviter la catastrophe, Alfred resta à distance où la cuisine était dans un état pitoyable où la cuisinière avait une épaisse couche de graisse et la petite table ressemblait à un dépotoire où des bols de café trainaient avec un fond noirâtre à l'intérieur et des miettes de pain parterre craquaient sous ses pieds propice à attirer les souris et les cafards. Ah mon dieu, quelle désolation! lâcha-t-il en sachant qu'il allait devoir aider son ami à faire le ménage. Apercevant un tablier accroché sur le mur, il n'hésita pas à le prendre et à l'attacher autour de sa taille pour ne pas se salir durant ce travail digne des douze travaux d'Herule, Ah!Ah!Ah! Retournant au salon pour retrouver son ami, il ne le trouva pas et s'enfonça dans un couloir où parterre il y avait plein de vêtements jetés en grand désordre. Mais qu'est-ce que cette histoire de fou? s'écria-t-il en voulant demander des comptes ou bien des explications à son ami, apparemment dérangé.

147

Jean-Ré, tu es là? Tu es là? appela-t-il en espérant avoir une réponse pour ne pas devenir fou. Fo-ulant les vêtements au sol, il remarqua qu'ils étaient en lambeaux, comme découpés au cutter! Mais quelle folie lui a pris? se demandait-il en entrant dans la chambre du couple où Jean-Ré ess-ayait de remettre de l'ordre en ramassant les vêtements de sa femme qu'il avait déchirés pendant sa crise. C'est le divorce assuré, si ta femme savait ce que tu avais fait de son linge et de ses robes de soirée! lança Alfred comme mis sur le fait accompli. Allez, au lieu de me harceler, va me chercher plutôt des sacs en plastique dans la cuisine pour qu'elle n'en sache rien. Alfred, interloqué, lui ré-torqua : mais que vas-tu lui dire quand elle trouvera ses placards vides? Ne t'en fais pas pour ça, je lui dirai que pendant son absence, nous avons eu un cambriolage et elle le comprendra. Décidém-ent, tu avais la réponse à tout! lui dit-il sèchement en sachant que son ami avait un passé de camb-rioleur dont il connaissait toutes les ficelles de la profession. Bien, si ça peut t'aider à te recon-cilier avec ta famille, je n'en vois pas l'inconvénient. Et prends des sacs de 30 litres si possible pour eviter de faire des allez-retours inutiles. Ok! dit Alfred qui avait le sentiment d'être dans un mauvais scénario de film où il était devenu la boniche à tout faire, Ah!Ah!Ah! Avant de partir, mon cher Alfred, je trouve que ce tablier de ménagère te va très bien, Ah!Ah!Ah! ria Jean-Ré qui semblait abuser de la situation. Mais laisse-moi m'occuper des vêtements et occupe-toi des photos dans le salon qu'on ne jettera pas, mais rangera au garage afin que Charlotte ne les trouve pas dans cet état. Bien, bien, approuva Alfred qui n'était pas prêt à jeter les photos à la poubelle pour les souvenirs qu'elles représentaient toujours pour lui. Et même si elles étaient déchirées en plusieurs morceaux, elles pouvaient être reconstituées comme un puzzle à force d'un travail acharné. Et en tant que romancier, cela ne l'effrayait pas où son travail consistait à reconstituer une histoire et tout particulièrement la sienne, n'est-ce pas? Moques-toi bien de moi, ma grosse baleine, on verra ce qu'on verra! lui expédia-t-il en ne comptant pas se faire humilier par un ami qui avait tous les defauts du monde. Car je veux absolument que tu portes toi aussi un tablier afin que nous soyons à égalité, n'est-ce pas? Si cela peut rassurer ton égo, je n'en vois pas l'inconvénient, Ah!Ah! ria Jean-Ré qui semblait jouer avec le feu ou avec les nerfs d'Alfred. Bien, je vais te le chercher et tu le porteras, comme je l'entends! Mais ne te fâche pas comme ça, Alfred, je plaisantais, Ah!Ah! Ok! répondit-il rassuré par son ami qui semblait avoir entendu son message en entassant les vêtements déchirés sur le lit tel un macabre butin. En passant devant la chambre de Leslie, il remarqua qu'elle était bien rangée et qu'elle n'avait pas subi la folie temporaire de son père qui visiblement ne lui en voulait pas qu'il soit devenu un looser.

148

Ou tout compte fait, un père resterait toujours un père pour ses enfants, alors qu'avec la mère et le reste de la famille c'était une autre question, n'est-ce pas? Et qu'il ne fallait jamais jeter la pierre à ceux qui n'avaient pas fondé de famille ni eu d'enfants afin de ne pas connaître le pire, Ah!Ah!Ah! Apparemment de grands sages qui s'ignoraient. Quand il revint lui apporter son tablier de ménagè-re, avec l'intention qu'il le porte dans un souci d'égalité, Jean-Ré enleva sa veste et le serra autour de sa taille bedonnante. Au point de ressembler à un aubergiste. Ah!Ah!Ah! ria Alfred qui voulait se venger de sa précédente humiliation. Mais ce tablier te va à merveille, ma grosse baleine, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en se pliant en deux. Moques-toi bien de moi, mon cher Alfred, car tu as un travail monumental dans le salon. Je sais bien, mais il n'est que 18 heures pour l'instant et qu'à 20 heures, je pense qu'on aura tous les deux terminés pour manger, hum? Espérons-le, dit Jean-Ré qui avait oublié qu'il y avait une vaisselle monstre à faire dans la cuisine. Mais si t'as terminé avant, tu pou-rrais aussi t'occuper de la vaisselle, hum? lui demanda-t-il d'une manière sournoise. A mon avis, tu auras terminé avant moi de ranger tous ces vêtements dans les sacs en plastique et je n'ai aucune envie de faire ta vaisselle! lui balança Alfred dans un sursaut d'orgueil. Tous les deux, dans leurs tabliers de ménagères à fleurs, semblaient comme deux boniches qui se disputaient le travail à fai-re dans la maison où chacun voulait en faire le moins possible, Ah!Ah!Ah! On avait parfois l'im-pression qu'ils ressemblaient à un vieux couple de célibataires ou d'homosexuels où les disputes étaient leurs raisons de vivre faute de relations avec les autres. Sous entendu que les disputes n' étaient qu'un façon de se fâcher puis de se reconcilier après s'être dit les pires abominations, n'est-ce pas? Et d'après les psychologues, une attitude saine dans un couple pour retrouver l'amour en espérant qu'il n'y aurait pas de morts entre temps, Ah!Ah!Ah! En comprenant bien pour que cela puisse marcher, il fallait qu'un d'entre eux lâche l'affaire ou laisse tomber les armes, c'est à dire le plus faible, n'est-ce pas? Mais dans un couple où il y avait deux fortes têtes, malheureusement, la tragédie était inévitable de toute évidence. Quant à nos deux acolytes, ils n'étaient aucunement des fortes têtes, mais des joueurs dans l'existence. Et quand ils se fâchaient, c'était uniquement pour entretenir le jeu qu'il y avait entre eux. Même si Alfred pouvait avoir le dessus sur son ami, grâce à son petit magôt, il ne voulut jamais en profiter pour le rabaisser en le considérant comme son père de substitution. Car ce serait comme humillier son père qu'il avait peu connu en partant du dom-icile familial quand il était enfant.

149

Et que les souvenirs qui lui restaient étaient plutôt merveilleux, comme ceux d'un prestigiditateur qui lui avait donné le goût de la magie. A laquelle, il n'avait jamais voulu renoncer en voulant faire de sa vie, une féérie. Flambeur dans sa jeunesse où il avait reussi en gagnant un jack pot au casino de Monte-Carlo, puis désormais romancier à succès, il ne comptait pas abandonner sa sou-rce d'inspiration en voulant devenir un petit bourgeois qui l'horrifiait. Sous entendu qu'il n'avait jamais eu l'ambition de devenir riche par le travail, mais par l'audace et la chance qui l'avaient bien servi, n'est-ce pas? En se sentant souvent hors du monde, mais sans pour autant le mépriser pour n'avoir aucune haine envers les autres. Et apparemment aucune revanche à prendre sur la socièté et les hommes qui ne l'avaient jamais torturé d'une manière ou d'une autre pour les avoir peu fréqu-enté dans sa vie de funambule. De toute évidence, un homme chanceux au regard de Jean-Ré qui d'un âge avancé avait le sentiment d'être un loser et proche de la folie. Où parfois, Alfred se l'ima-ginait interné dans un hôpital psychiatrique où il irait le voir tel un vieux père abandonné par sa famille et ses enfants. Etait-ce quelque chose de promonitoire ou bien une chose qui se profilait devant lui où les 20 000 euros ne règleraient que ses problèmes d'une manière temporaire? se de-mandaient-ils en ramassant à quatre pattes les photos déchirées dans le salon. Tout à coup, il pensa à son fils Aurélien auquel il avait acheté un billet d'avion pour la Californie en esperant y trouver un meilleur avenir qu'en France. Et plus précisément pour la Silicon Valley où ce nom représentait désormais un Eldorado pour tous les petits Français qui rêvaient de reussite. Sous entendu que la réussite en France avait été monopolisée par ses élites qui contrôlaient tout de bas en haut de l'éc-helle sociale où tout semblait cloisonné pour empêcher les petites gens d'avoir les meilleurs place pour atteindre le pouvoir. Apparemment, la maladie dont la France était atteinte touchait désorm-ais tous ses concitoyens par une forme de jaunisse ou maladie de rein qu'ils avaient du mal guerir, Ah!Ah!Ah! Et si la France comptait 6 millions de chômeurs, n'était-ce pas dû à son mal de dos de-venu constitutionnel? Où dans cette France paralysée qui ne voulut point se mettre à l'AAH (allo-cation handicapée) pour être en adéquation avec sa longue maladie incurable? Malgré qu'il fut hors système, Alfred Swan pouvait saisir le mal qui rongeait la France par les rapports qu'il avait avec les gens et surtout en regardant les actualités télévisées où tout était apocalyptique où les journalistes mettaient de l'huile sur le feu pour abattre l'Etat et devenir un Etat dans l'Etat.

150

Et zappait aussitôt qu'il entendait ce bruit de fond insupportable qui au bout du compte faisait plus de mal à la France qu'on le crut où les élites journalistiques étaient devenus les fossoyeurs de la république. Où cetains, atteints de démence, se prenaient pour des hommes politiques, alors qu' ils n'étaient que des commentateurs de l'actualité ou des faits divers, Ah!Ah!Ah! Décidément en France, on ne savait plus séparer les torchons et les serviettes parce que les médias faisaient leur petite cuisine entre eux pour prendre le pouvoir. Ce qui n'était pas de la grande gastronomie, mais une cuisine bricolée pour séduire l'opinion par le peu de temps qu'elle avait à réflechir entre me-tro-boulot-dodo, Ah!Ah!Ah! Et pendant que les gens travaillaient, le loup surveillait la bergerie en vue d'en faire son garde-manger, Ah!Ah!Ah! Alfred, qui avait lu dans son enfance les contes de Grim et de Charles Perrault, ne pouvaient pas oublier que l'homme pouvait se transfiguer en n' importe quel animal en sachant que l'homme était un loup pour l'homme et que la horde se trou-vant dans les médias avait actuellement les dents très longues, Ah!Ah!Ah! Visiblement, c'était Ali-ce au pays des merveilles pour les médias et le petit chaperon rouge pour le peuple, Ah!Ah!Ah! Alfred avait laissé un an à son fils pour qu'il reussisse avec des moyens financiers suffisants. Et les lettres qui lui envoyaient étaient plutôt prometteuses où celui-ci avait commencé à rencontrer des Français dans la Silicon Valley qui lui ouvriraient les portes de la reussite. Meme s'il ne fut point informaticien, il savait qu'il était un créatif, comme son père, où ses idées seraient vite reconnues par les autres qui, plongés toute la journée dans les codes informatiques, avaient perdu une bonne part de leur imagination. Et un argument de taille pour se faire admettre dans une communauté d' anciens soixante huitards où il était interdit d'interdire la liberté au peuple qui demandait à s'ema-nciper des Etats oppresseurs. C'est ce qui l'avait compris assez rapidement, lui racontait-il d'une manière enthousiaste dans ses lettres où Clotilde avait quelques craintes sur ses premières impre-ssions où soi-disant tout était possible parce qu'il était en Amérique. Mais son père plus optimiste que sa femme l'encourageait dans cette voix et de croire en ses rêves où la réalité pourrait un jour se transformer en un tour de prestigiditation. Visiblement, ce fils, qu'il avait eu avec une célèbre cantatrice de l'opera Garnier, mademoiselle Joséphine, avait hérité de tous les défauts de son père où tout devait être facile à réaliser dans la vie, sinon vivre l'enfer des travailleurs, Ah!Ah!Ah! En sachant très bien que les gens passionnés n'avaient jamais le sentiment de travailler, mais de s'épa-nouir chaque jour dans leurs activités ludo-professionnelles où la récompense était toujours au rendez-vous. C'est dire qu'on était alors très loin du travail selon Carl Marx, mais dans une Slicon Valley où le bonheur des employés était l'élément essentiel pour développer leur imagination en vue de fabriquer un capitalisme nouveau et libérateur.

151

Et à chaque fois qu'il recevait une lettre de son fils, Alfred débordait d'entousiasme avec le senti-ment qu'une partie de lui-même affrontait le far west. En les considérant comme des lettres de jeu-nesse d'un aventurier dont on ne connaissait ni la fin tragique ou heureuse, n'est-ce pas? Ce billet d'avion ainsi que des finances adéquates pour son séjour en Amérique devaient aussi lui servir à s'éloigner de son milieu bobo-parisien où il vivait avec sa mère, Joséphine, qui ne lui refusait rien. Sous entendu que ce fils devait avoir une vie dissolue aimant les frasques comme son père qui dans sa jeunesse cherchait la jouissance à tout prix. Car plusieurs lois, il lui avait payé ses dettes de jeu pour éviter qu'il en parle à sa mère. De même qu'on disait que ce fils illégitime ou hors ma-riage avec une belle voix de ténor sûrement héritée de sa mère cantatrice. Mais qu'il n'avait jamais voulu travailler en ayant horreur du travail, Ah!Ah!Ah! Décidément, un sort qui ne dépendrait que de la chance! pensait Alfred en ramassant les photos déchirées sur la moquette du salon. Avec le sentiment de revisiter ses souvenirs en morceaux formant un grand puzzle qui lui demanderait un temps incommensurable pour le reconstituer. Ce n'était pas seulement la vie du couple de Jean-Ré qui était éparpillée dans le salon, mais la sienne aussi, sentit-il en commençant à avoir des douleu-rs aux genoux. A un moment donné, il faillit se lever pour aller chercher un balai et tout nettoyer à la va-vite. Mais balayer ses souvenirs de jeunesse avec un balai lui sembla immoral où il risquait de froisser encore plus les photos. De toute évidence, Jean-Ré n'avait jamais aimé sa femme vu les photos du couple mises en morceaux. Et qu'il n'aurait jamais dû se marier pour aboutir à se résu-ltat désastreux devant ses yeux. Où en restant célibataire, il aurait fait de mal à personne en assum-mant sa vie dissolue dans le jeu et les illusions. Et jamais tenté de se suicider s'il n'avait pas eu de responsabilité familiale où la corde retrouvée su le canapé n'était peut-être qu'un simulacre pour qu'il s'apitoye sur le sort de son ami? se demandait Alfred en le suspectant de jouer la comédie ou pour un joueur né de rechercher toujours un peu plus d'adrénaline! Alfred. qui essayait par la pen-sée de recoller quelques photos, sentit que les jours heureux étaient derrière lui et s'en mordait maintenant les doigts. Quand Jean-Ré entra dans le salon avec ses sacs en plastique et qu'il le vit à quatre pattes sur la moquette, il éclata soudainement de rire, Ah!Ah!Ah! Alfred, abasourdi par le sarcasme de celui-ci, leva la tête et le regarda comme un monstre. Apparemment, les rôles avaient changé où le maître était devenu le chien et vis-versa. En étant pas loin de jeter son tablier pour repartir chez lui à Menton pour continuer son roman sur la guerre de Crimée. Sous entendu que cette petite guerre quotidienne avec son ami lui sembla méprisable vu les efforts qu'il avait fait pour le sortir de sa merde où il se sentait embourbé jusqu'au cou.

152

Et si on devait nettoyer son linge sale en famille, Alfred ne supportait plus de laver celui de Jean-Ré dont il ne supportait plus l'odeur nauséabonde. Si c'est comme ça, je pars! dit-il en se levant brutalement et en détachant son tablier pour le jeter au sol. A ces mots sans équivoque, le regard de Jean-Ré aussitôt s'attrista et se précipita vers son ami pour lui demander de rester. Mais non, Alfred, ce n'est pas le moment de tout foutre en l'air! lui dit-il en le serrant contre lui tel un ami qui avait abusé de sa confiance. Pour la première fois, Alfred ne put contenir son émotion et son visage se recouvrit instantanément de larmes qu'il ne voulut point cacher à son ami parce qu'un homme pouvait aussi pleurer sans remettre en question sa virilité. Comprenez bien, mon cher lec-teur, qu'Alfred ne voulut point afficher de la sensiblerie dans ce tableau émouvant où deux hom-mes en tablier de ménagère se réconfortaient l'un et l'autre. Car on oubliait souvent que les jou-eurs nés étaient des êtres solitaires qui avaient rarement l'occasion d'exprimer ce qu'ils avaient au fond du coeur. Et s'ils jouaient souvent leurs vies au risque de tout perdre, ce n'était pas seulement pour l'argent, mais aussi pour faire des rencontres qu'ils n'auraient jamais pu faire en tenps nor-mal. Visiblement, le joueur jouait hors des sentiers battus afin d'atteindre la quintescence des cho-ses où frôler l'abîme lui sembla obligatoire pour renaître à la vie. Avec l'intime conviction d'avoir vécu une multitude de vies où le desespoir et l'espoir se succédaient violemment. Sous entendu que la naissance et la mort étaient d'une violence inouïe pour toute créature vivante, n'est-ce pas? Où la renaissance dont parlait toutes les religions du monde leur sembla comme une expérience personnelle, mais où les jeux de hasard étaient malheureusement proscrits. Ils vivaient sans aucun doute dans le péché pour la majorité du gens, mais entre nous qui ne l'était pas dans ce monde matérialiste où la convoitise était devenue le grand tabou? Mais un homme qui jouait tout ce qu'il avait sur la Terre, n'était-elle pas à l'image du christ qui donnait son dernier sang pour sauver l' hu-manité? Décidément, le joueur était un homme qu'on ne voulut point voir la folie de peur qu'elle nous contamine, n'est-ce pas? A l'évidence, il n'était pas un matérialiste, mais un grand philosop-he qui savait que tout était illusion dans cette vie. Et si beaucoup de personnes jouaient pour de faux, c'est à dire avec des jetons en plastique qui ne représentaient aucune valeur réelle, ce n' était pas dans la nature du vrai joueur qui voulait jouer avec la vie, avec ses tripes. Alfred, épuisé par les remarques désobligeantes de son ami, ramassa son tablier dans lequel il sécha ses larmes trop longuement retenues pour lui où la raison n'était pas étrangère. Et qu'en vidant ce trop plein d'ém-otion accumulée durant ces derniers jours, il se sentit allègé d'un poids énorme.

153

Allez, laisse-moi ramasser les photos, lui dit Jean-Ré, car tu n'y es pour rien dans tout ce désordre. Je le sais bien, mais faisons-le ensemble si tu veux? insista Alfred en remettant son tablier autour de la taille. Et puis après, nous ferons ensemble la vaisselle pour aller plus vite, hum? Jean-Ré, conquit par les initiatives de son ami semblait aux anges en faisant à nouveau équipe ensemble co-mme au bon vieux temps. Car ce qui était assez cocasse dans ce tableau, ne nous le cachons pas, c'était l'image de ces deux hommes à quatre pattes en train de ramasser leurs souvenirs de jeunesse auxquels ils semblaient tenir beaucoup. Alfred, trouvant trop contraignant de les mettre dans un sac en plastique au risque de les froisser, alla chercher un carton dans un placard en vidant son contenu où se trouvait des décorations de noël. Mais Jean-Ré, non moins attentif, ne lui fit aucune remarque désobligeante, car il detestait noël, Ah!Ah!Ah! Car qui d'entre nous aimaient véritablem-ent les fêtes, mon cher lecteur? C'est à dire d'être joyeux sur commande ou à heure fixe malgré un moral dans les chaussettes, hum? Bien évidemment personne. Pour ressembler à tout point de vue à une véritable torture pour tous ceux qui étaient tristes à la fête, n'est-ce pas? Et parait-il plus nombreux qu'on le soupçonnait au sein de la socièté où l'alcool devenait l'élément essentiel pour transformer une soirée funèbre en folle soirée, Ah!Ah!Ah! A ce propos, on disait que les Anglais, après trois pintes de bière, devenaient de charmants convives, Ah!Ah!Ah! Il faisait tellement chaud dans le salon qu'Alfred se leva pour aller boire un verre d'eau dans la cuisine. T'as pas soif? dema-nda-t-il à Jean-Ré qui était tout en sueur à cause de son gros ventre. Si, je meurs de soif! dit-il en se relevant péniblement et en le suivant avec peine. Quand il entra dans la cuisine, Alfred, partit aussitôt vers le placard pour trouver des verres propres, car la vaisselle au bord de lévier n'avait pas été faite depuis des jours, pensa-t-il en ouvrant la porte du placard où il trouva ce qu'il cher-chait. Pendant ce temps là, Jean-Ré apparemment géné par sa négligence maladive, debarrassa la vaisselle de levier pour la mettre sur la petite table sans rien casser. Eh ben voilà, une chose de faite! dit-il heureux d'avoir accompli comme un miracle en permettant à Alfred d'acceder aux robi-nets. Qui n'était alors pas loin de jeter un éclat de rire où tout compte rien n'avait été fait, mais seulement déplacé. Bref, comme de déplacer des idées du passé vers le présent avec le sentiment qu'on inventait quelque chose de nouveau pour apporter aux hommes du travail ou du grain à moudre. En sachant très bien que tout ceci était obsolète où les idées du passé avaient été digéré-es par les hommes et les femmes d'un autre temps où il n'y avait plus rien à sucer pour ne pas être grossier, Ah!Ah!Ah! Apparemment, la politique, c'était de la petite cuisine où l'on ne se culpabili-sait pas de se repasser des plats froids voir périmés au risque de s'empoisonner l'existence, Ah!Ah!Ah!

154'

C'est dire la nullité de nos hommes politiques et la très grande naïveté de nos concitoyens, n'est-ce pas? Mais si ces derniers étaient prêts à manger de la nourriture avariée, faute d'une nourriture fra-iche, c'était de leur entière responsabilité d'avoir les représentants qu'ils méritaient. Bref, un destin qu'ils avaient choisi par ignorance en voulant du tout cuit pour ne pas se casser les méninges, Ah!Ah!Ah! Il parait que les Grecs disaient à leurs concitoyens : si vous ne vous occupez pas de la po-litique, celle-ci s'occupera très vite de vous, Ah!Ah!Ah! Décidément, nos grands démocrates athén-niens avait tout compris où il faut dire que la démocratie était un grand fourre-tout où toutes les opinions se valaient, alors qu'il n'en était rien. Où vouloir la vérité dans un monde démocratique, c'était comme vouloir la dictature de la raison, ce auquel les citoyens n'étaient pas prêts à adopter pour pouvoir mentir en de multiples occasions. Comme pendant les élections où les hommes poli-tiques cherchaient à séduire l'electeur en lui promettant une augmentation substancielle de son salaire s'il votait pour lui ou bien effacer toutes ses contraventions de l'année ou reduire ses imp-ots et pourquoi pas augmenter les minimaux sociaux pour avoir le vote de la plèbe, Ah!Ah!Ah! Bien évidemment, les promesses concernaient seulement ceux qui étaient prêts à les croire, n' est-ce pas? C'est dire la grande naïveté de nos concitoyens qui étaient prêts à avaler des couleuvres faute de connaissances historiques et politiques. A la faute, en grande partie à l'Education Nation-ale qui ne fabriquait plus de citoyens éclairés, mais d'obscurs citoyens qu'on menait par le bout du nez. Ah!Ah!Ah! Néanmoins très pratique pour maintenir la démocratie en place où l'ignorance était le grand cataliseur. Où visiblement, il fallait faire croire aux gens qu'ils étaient intelligents ou du moins qu'ils avaient la possibilité de changer la socièté et leur destin. C'est à dire le grand rêve entretenu par les médias en servant leurs propres interêts et pourquoi pas proposer leurs propres candidats-journalistes au poste suprême de la présidence de la république? Décidément, un spec-tacle pitoyable sur nos écrans où les médias avaient le désir irrépréssible et le rêve diabolique de prendre le pouvoir en détenant le monopole des images. Et même si le CSA( le conseil supérieur de l'audiovisisuel) était là pour surveiller le temps de parole de chaque condidat, la caste des jour-nalistes n'oubliaient jamais de parler de leur candidat dans les débats d'actualités, nous montrant ainsi la grande tricherie médiatique. Et si quelqu'un eut l'audace de le dénoncer, il serait aussitôt déclaré comme un ennemi de la presse! Décidément, la démocratie était désormais un grand fou-rre-tout où le peuple semblait totalement perdu, Ah!Ah!Ah! Comprenez-bien, mon cher lecteur, qu'en pensant cela, Alfred n'était pas un anarchiste ou souhaité décourager les gens d'aller voter, certainement pas.

155

En étant un libre prenseur qui n'avait jamais travaillé de sa vie ni entretenu un réseau d'amis hauts placés pour réussir. Et sans aucun doute une exception d'esprits éclairés dans cette socièté fran-çaise qui, faute d'idées nouvelles, entretenait le passé comme une rente. Et comme tout économi-ste savait, les rentiers étaient les ennemis de la prospérité éonomique d'un pays en achetant des biens immobiliers pour les louer ou bien des postes hautement rénumérés pour assurer leurs ren-tes. D'une certaine façon être député ou ministre pouvait être considéré comme une situation de rente où pendant cinq années voir plus, on avait un gros salaire et des influences dans la socièté, n'est-ce pas? Où la politique consistait à rechercher des positions de rentes payés par les travaill-eurs, Ah!Ah!Ah! Sans aucun doute un grand cynisme de la part de nos hommes politiques, avec l'audace de dire au peuple que sans eux, il y aurait la guerre civile, Ah!Ah!Ah! Sans conteste un jeu pervers entre les élites et le peuple, n'est-ce pas? Où l'on observait un nombre de plus en plus imp-ortant de candidat à la présidence de la république nous annonçant la fin du monde si l'on ne votait pas pour eux, Ah!Ah!Ah! Décidément, on était prèt à tout pour séduire le peuple quitte à lui préd-ire l'apocalypse s'il ne faisait pas son devoir de citoyens! Visiblement trop d'hommes ou de femm-es politiques avait tendance à détruire la politique et la démocratie par un discours usé jusqu'à la corde, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Ou dit d'une autre façon que la démocratie était devenue un grand squelette idéologique où il n'y avait plus rien à sucer ni plus aucune saveur pour le citoyen, Ah!Ah!Ah! Et dans ce cas, pourquoi continuer à voter pour des candidats de plus en plus farfelues, alors que de voter tout simplement pour la démocratie eut suffi? Ce qui je crois, nous éviterait de voter pour le pire en sachant que le monde devenait de plus en plus hystérique, n'est-ce pas? Cer-tes, une démocratie sans visage, mais désirée inconsciemment par le peuple qui souhaiterait en finir avec le monde des images qui, comme nous le savons tous, réduisaient sévèrement nos libe-rtés! Car Alfred ne se sentit jamais aussi libre quand il n'avait pas d'image de lui-même à montrer aux autres. Et si parfois, il cherchait à travers le miroir une image pouvant lui convenir avant de sortir dans la rue, il se sentait affligé d'un tel effort pour sauver les apparences. En sachant bien que le peuple n'était pas si différent, n'est-ce pas? Où un peuple sans visage serait sans aucun dou-te une démocratie élargie peut-être celle de l'avenir du monde? se demandait-il en laissant couler l'eau du robinet quelques instants afin qu'elle soit moins trouble pour pouvoir la boire sans dan-ger. C'est ce que sa mère lui avait appris dans son enfance où l'eau stagnante dans les canalisations pouvait vous intoxiquer sévèrement. Tiens! dit-il à Jean-Ré qui, tout en sueur, n' attendait que ce verre d'eau pour renaître à la vie.

156

Merci, Alfred, lui répondit-il comme s'il s'adressait à son sauveur. De nouveau réhydratés, ils par-tirent dans le salon avec la ferme intention de ranger avant ce soir tout ce carpharnaüm. 1 heure plus tard, quand tout fut néttoyé et rangé, Jean-Ré passa l'aspirateur sur la moquette, comme une bonne ménagère heureuse de finir une partie de son travail. Au bord de l'essoufflement, il prit une pose et s'essuya le front avec son tablier en disant à son ami : on y voit plus clair maintenant, n'est-ce pas? C'est sûr, dit Alfred qui rangeait le carton de photos en bas d'un placard en ne sachant pas où le mettre. Te casses pas la tête, demain je le metterai dans le garage ou si tu te sens le courage, emporte-le avec toi dans ta voiture. A cette étonnante proposition de son ami, il hésita un instant où la reconstitution d'un grand puzzle, dont il faisait aussi partie, ne l'effrayait point en tant que romancier. Mais sachant qu'il avait toujours son roman sur la guerre de Crimée sur la planche, il lui dit : Pas pour l'instant, mais peut-être plus tard quand tous ces évènements seront digérés par nous tous, n'est-ce pas? Entièrement d'accord avec toi, Alfred, ne remuons pas le couteau pendant qu'il est encore dans la plaie. Sage résolution! dit-il en se dirigeant vers la cuisine où la vaisselle sale attendait comme une tâche dans leur histoire. Et si Jean-Ré avait déplacé la vaisselle sur la petite table pour éviter quelle se casse, c'est parce qu'il était superstitieux où la briser accidente-llement aurait été considéré par eux deux comme un mauvais présage. Mais par chance, elle n'avait pas glissé parterre! voyaient-ils avec des yeux ensorcelés de magie pour la rendre aussi propre et étincelante qu'un cristal. Passe-moi d'abord les casseroles! dit Alfred qui voulait faire le plus gros du travail, comme un bon entrepreneur l'aurait fait ave bon sens. En regardant sa situation loufo-que avec son ami, Alfred, le romancier, ne pouvait pas s'empêcher de penser à Bouvard et Pecu-chet, le roman inachevé de Gustave Flaubert ou bien à la pièce de théatre de Samuel Beckett, en attendant Godot. Bref, l'histoire de deux solitaires qui ne pouvaient pas se passer l'un de l'autre, faute de pouvoir vivre autrement, n'est-ce pas? Même si tous les deux n'étaient pas homosexuels, on pouvait bien se demander ce qui pouvait attirer un homme vers un autre, sinon l'amitié ou peut-être comme un gros malentendu, non? Car vouloir résoudre un gros malentendu avec une personne, c'était chercher à savoir comment elle fonctionnait pour en faire un ami et non un enn-emi, bien évidemment. Sous entendu que la mauvaise foi devait être bannie pour établir une vraie relation, sinon on se retrouverait vite dans le festival des mensonges ou des impostures, Ah!Ah!Ah!

157

Aux regards de Bouvard et Pecuchet, qui étaient attirés tous les deux par les mêmes centres d'int-érêts au point d'aller vivre ensemble à la campagne pour entreprendre la redaction d'un grand dicti-onnaire universel, Alfred et Jean-Ré avaient peu de point commun, sinon le jeu d'argent et intelle-ctuellement très différents où Alfred Swan était une sorte de génie ou homme orchestre. Car en multipliant ses centres d'interêts, il avait réussi à se défaire de ses addictions qu'il appelait ses dé-mons concernant le jeu d'argent, l'alcool et la cigarrette. Ce qui semblait banal à dire, mais une vr-aie épreuve de force pour un jouisseur, n'est-ce pas? Pour avoir trouvé de nouvelles formes de jouissance dans l'existence afin de ne pas être piègé à tout jamais dans une prison pulsionnelle où l'on retombait à chaque fois faute d'entrapercevoir le chemin de la liberté. Et visiblement, le cas pour Jean-Ré qui, faute de chance ét de volonté, s'était résigné même à un âge avancé à choisir le hasard comme destin. Ce que Alfred ne voulait pas juger sévèrement en sachant que beaucoup d' entre nous avait laissé son destin au hasard des rencontres ou de la fortune, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Et bien évidemment, c'est ce qu'on appelait la vie pour dire simplement les choses. Sans oublier de dire qu'aucun d'entre eux n'avaient travaillé pour gagner sa vie, ce qui pourrait décon-certer le lecteur lambda qui aurait du mal à s'identifier à ces deux hommes hors système social, bien entendu. Bref, pour n'avoir jamais été soumis à l'autorité d'un chef de bureau ou d'usine. D'une certaine façon des hommes libres qui l'avaient toujours été pour des raisons de nature et non de fainéantise. C'était comme demander à des gens du voyage de travailler dans une usine où ils auraient le sentiment de perdre leur liberté. Bien évidemment, ils refuseraient le poste par prin-cipe en choisissant la liberté totale même au prix de la misère ou de l'incertitude! Ceci n'était pas propre aux gens du voyage et aux joueurs, mais aussi aux militaires qui detestaient travailler pour des raisons d'honneur en préférant le champ de bataille à l'usine, Ah!Ah!Ah! Sous entendu que le guerrier était prêt à mourir au combat et certainement pas le commun des mortels, bien entendu. En fait, tout le monde n'était pas pareil en ne voulant pas le voir, alors qu'il était disparatre par na-ture! concevaient nos deux acolytes en se partageant le travail de la vaisselle où Jean-Ré lui passait les couverts qu'Alfred passait sous l'éponge et l'eau du robinet pour les nettoyer. Ce qui n'était pas pour eux un travail, mais une façon simple de se rapprocher l'un de l'autre en attendant peut-être Godot? Un personnage imaginaire sur lequel, ils semblaient avoir de grandes espérances pour sor-tir grandi de leurs existences? se demandaient-ils inconsciemment en ne disant rien, mais en se pa-ssant les assiettes, comme des testaments de porcelaine. Sous entendu que les premiers inventeurs de l'écriture utlisaient des plaquettes d'argile pour immortaliser leur savoir où recettes de cuisines n'étaient pas à exclure, bien entendu. Ce qui n'était pas indifférent à Alfred, le romancier, où l'écri-ture était devenue une planche de salut pour dissiper ses angoisses et tenir comme en secret l'histo-ire de son âme.

158

En attendant Godot, c'était comme attendre la suite de l'histoire où un troisième personnage all-aient parvenir à réunir deux solitudes qui ne parvenaient pas à fusionner faute d'un élément amalg-amant. Pour certains, Godot s'appelait le sauveur ou Dieu et pour d'autres la marche incessante vers cette possible troisième voie pour sortir d'une voie existentielle sans issue. Et pour ceux qui avaient l'oreille musicale, ils pourraient entendre dans le nom de Godot, celui de godillot. C'est à dire d'une paire de chaussures militaire confectionnée pour les longues marches, Ah!Ah!Ah! Dé-cidément, il n'y avait pas de fumée sans feu, n'est-ce pas? On pourrait meme dire qu'elles étaient indestructibles par la mission qu'elles avaient à accomplir où la marche était l'élément essentiel pour renconter les autres, n'est-ce pas? Comme cet illuminé qui parcourant la terre entière espérait un jour renconter Dieu sur la route, Ah!Ah!Ah! Bref, à chacun son chemin, à chacun son destin! comme le disait la chanson de Tonton David. Et malheureusement, ô combien d'entre nous étions dans une voie sans issue, pas forcément de notre faute, mais à cause d'un point de départ calami-teux dans la socièté? Je suis tombé parterre, c'est la faute à Voltaire. Je suis tombé dans le ruiss-eau, c'est la faute à Rousseau. Ceci voulant dire dans la voix de Gavroche dans les misérables que Voltaire et Rousseau adeptes de la révolution avaient plongé la France dans un chaos abominable! Et même si Victor Hugo ne le croyait pas, Alfred savait lire entre les lignes où Victor Hugo défor-mait considérablement l'Histoire pour ses propres interêts ou gloire auprès du public en défendant la république. Sans n'avoir jamais atténué la misère du peuple, mais seulement écrit des livres, Ah!Ah!Ah! Bref, un sauveur de papier pour le peuple et l'Histoire, n'est-ce pas? Il faut dire qu'Alfred avait toujours détesté le misérabilisme de Victor Hugo ainsi que sa pseudo-éducation du peuple. En pensant que seul l'enrichissement économique du peuple allait le libérer de l'esclavage et pas forcément les idées de masse. A ce propos, il resterait un éternel dandit pour avoir réussi tout seul sans l'aide des autres et encore moins du peuple. Qu'il ne méprisait pas, mais qu'il considérait co-mme une nébuleuse où tout était possible, le mieux comme le pire, Ah!Ah!Ah! Et s'il était devenu individualiste, ce n'était pas de sa faute, mais celle de la socièté française indifférente aux talents des autres à cause de l'égalité qui la minait de l'intérieure à moins qu'ils aient beaucoup d'argent pour s'en extraire, Ah!Ah!Ah! Passe-moi le torchon! demanda soudainement Jean-Ré qui voulait se sentir utile en voyant son ami tout faire. Tiens, grosse baleine! expédia Alfred qui était prêt à ai-der tout ceux qui le demandait, comme Jean-Ré qui semblait avoir repris du poil de la bête. Ce qui le réjouissait en lui laissant la place devant l'égoutoir où ce dernier semblait prendre du plaisir aux tâches ménagères.

159

Ah!Ah!Ah! ria-t-il en détachant son tablier autour de la taille pour le remettre à sa place, puis partit dans le salon pour se préparer un petit whisky en attendant que son ami ait fini. J'arrive dans un instant! répliqua aussitôt Jean-Ré qui avait besoin d'un petit remontant après un travail colossal où les apparences étaient revenues, comme le soleil dans le ciel. Quand il s'affala dans le divan, Alfr-ed regarda autour du lui avec le sentiment que le salon était redevenu un vrai salon avec ses meub-les utiles et décoratifs portant des bibelots et sa table basse vitrée sur laquelle se trouvait un cendr-ier sous la forme d'une roulette de casino et un paquet de cigarettes ouvert. Où à travers la vitre, il pouvait voir des bouteilles d'alcool, comme du whisky, du gin et du porto etc ainsi que des verres. Visiblement, un meuble très pratique où l'on avait pas à se déplacer pour se servir un verre en reg-ardant la télé ou à discuter entre amis, pensait Alfred étonné que tout sembla bien rangé et propre désormais. Mais en se baissant, il aperçut dépasser du divan, une photo qu'ils avaient oublié, mon-trant une image heureuse de Jean-Ré, Charlotte et Leslie à Disney land en compagnie de Mickey! Mais qui à sa grande surprise n'était pas déchirée, comme si elle avait survécu à la tempête. Aussi-tôt, il la posa bien en évidence sur la table basse afin que son ami à son retour puisse la voir de ses yeux et s'en réjouir. Quand il entra dans le salon, Jean-Ré s'arrêta net sur le seuil où il aperçut avec étonnement un ordre qu'il n'avait plus l'habitude de voir depuis des jours. Allez entre, ma grosse baleine, dit Alfred, et viens t'assoir pour boire un verre. Ah!Ah!Ah! ria-t-il en attendant qu'il pren-ne place à ses côtés et le servir. Qu'est-ce tu veux boire? lui demanda-t-il la main tendue vers les bouteilles d'alcool multicolores. J'vais prendre un porto, dit-il en regardant avec étrangeté la photo qu'Alfred avait posé comme une évidence sur la table basse. Il avait alors l'impression que le Jean-Ré qui était sur la photo était une autre personne. Et son ami eut peur à cet instant qu'il eut une crise d'amnésie en le voyant loucher comme un aveugle sur la photo. Tu vas bien? lui demanda-t-il avec inquiètude en lui servant un verre de porto. Mais Jean-Ré ne dit rien et prit la photo entre ses mains pour la rapprocher de ses yeux pour semble-t-il observer les détails. Cette photo te dit vrai-ment rien, hum? lui demanda-t-il avec l'espoir qu'il retrouve la mémoire. Absolument rien! dit-il en la reposant sur la table, puis en humectant ses lèvres dans le verre de porto. Pourtant, on voit bien que c'est à Disney land avec Mickey, non? Oui, ça en a tout l'air, mais ça me dit strictement rien du tout! lâcha-t-il en observant le vide où volait des mouches. Avec le sentiment que son ami avait subi un choc émotif pendant sa crise existentielle où une partie de ses souvenirs s'était en-volée pour survivre à son présent désastreux.

160

Mais t'en fais pas, mon vieux, la mémoire reviendra, dit-il en choquant son verre contre le sien où il attendait comme un miracle de la providence. L'horloge dans le salon marquait 20 heures et l' appetit commençait à leur titiller l'estomac. Mais soudainement, Jean-Ré se leva et demanda à Alf-red : Si je me rappelle, tu m'a bien donné de l'argent tout à l'heure, non? Mais oui, ma grosse ba-leine, 20 000 euros exactement, répondit-il avec fierté. Mais Jean-Ré, qui ne voulait pas le croire, partit aussitôt vers sa veste posée sur le dossier d'une chaise où il fouilla comme un fou. Quelques secondes plus tard, il tira d'une poche, une grande enveloppe où il sentit l'épaisseur d' une liasse de billets de banque à l'intérieur. Ah, c'est ça que je pensais! dit-il comme soulagé que sa mémoire lui soit revenue par miracle. Ah!Ah!Ah! éclata de rire Alfred en étant convaincu que l' argent lui avait permis de retrouver la mémoire qu'il avait occasionnellement perdue. En posant l'enveloppe pleine d'argent sur la table basse où il aperçut la photo, il s'écria : Mais oui, je m'en souviens maintenant, c'était en juin 2002! Ah!Ah!Ah! ria à nouveau Alfred en servant un autre verre à son ami qui sem-blait avoir retrouvé ses esprits ainsi que son appetit en s'écriant : J'ai faim! Moi aussi, et n'oublie pas, ma grosse baleine, que tu m'avais promis une salade de tomate à l'huile d'olive et une grosse omelette aux pommes de terre, n'est-ce pas? Rassures-toi, je ne l'avais pas oublié; mais cette fois-ci laisse-moi faire la cuisine, car tu es mon invité. D'accord, si tu insistes, dit Alfred, qui depuis le début de l'après-midi avait donné beaucoup de lui-même à son ami où se laisser servir fut pour lui comme un signe de reconnaissance. Aussitôt, il partit allumer la télévision pour regarder les infos en laissant son ami se diriger vers la cuisine avec entrain. Sous entendu qu'il était prêt à entendre des mauvaises nouvelles du monde entier, Ah!Ah!Ah! Mais calé confortablement dans le divan, il se sentit indestructible grâce au pouvoir de la télécommande qui lui permettrait de retrouver le si-lence et le calme dans sa tête. Sans se cacher qu'il fallait être bien inconscient voir fou pour rece-voir en pleine figure, le chaos du monde, n'est-ce pas? Et que le travail immoral des médias consi-staient à mettre de l'huile sur le feu afin de faire marcher leur boutique, Ah!Ah!Ah! Et l'on se dem-andait souvent s'ils n'étaient pas heureux qu'un conflit dure pour avoir du grain à moudre dans leurs journaux télévisés? Et que la paix dans le monde signifiait comme l'arrêt de mort des médias et du journalisme. Décidément, des vautours! pensait Alfred en zappant avec la télécommande, co-mme avec une boite diabolique. Pendant un instant, il se demanda s'il n'était pas maso? Car en za-ppant, ce qui le choquait, c'était le nombre incroyable de spots publicitaires qui défilaient sous ses yeux tel un traveling permanent.

161

A l'évidence, la télévision s'était vidée de tout contenu culturel pour devenir une vitrine publici-taire où l'on vendait des voitures comme des pots de yahourt. Après quelques minutes de zapping, qui lui firent mal aux doigts, il tomba sur une émission farfelue où un homme avouait devant le public qu'il vivait avec une poupée en latex! Avec l'arrogance de dire qu'il n'avait plus de problème de couple sachant que sa poupée lui obéissait à doigt et à l'oeil. Et qu'il pouvait la battre sans av-oir de souci avec les associations féministes, Ah!Ah!Ah! Décidément, cet homme avait trouvé le bonheur sans rendre de compte à la socièté! s'étonnait Alfred dont la femme en chair et en os dem-andait chaque jour de l'attention, sinon une crise en perspective. En pressentant à son retour à Menton une scène de ménage qui l'attendait, Ah!Ah!Ah! Mais ce qui semblait horrible à imaginer pour le public, c'était une relation sexuelle entre homme et une poupée en latex! Bien évidemment, les femmes sur le plateau dénonçaient le scandale où si ce phènomène s'amplifiait dans la socièté, elles n'auraient plus de rôle à jouer ni celui d'etre aimées ni de pouvoir engendrer! Apparemment, un seisme civilisationnel avait secoué le plateau télé où les femmes se sentaient les premières con-cernées en étant mises hors course par les nouvelles moeurs des hommes. On se demandait même si le couple était une invention de la socièté et non une chose naturelle? Avec le sentiment que l'h-omme avait envie de retrouver sa liberté après avoir vécu trois millions d'années avec sa femme, Ah!Ah!Ah! Sans aucun doute, une lassitude civilisationnelle qu'on pouvait tout à fait comprendre où la femme était obsédée par le mariage ou la fondation d'une famille, n'est-ce pas? C'est à dire d' une attente des femmes de plus en plus oppressante pour les hommes qui désiraient retrouver leur liberté et surtout leur joie de vivre, Ah!Ah!Ah! Apparemment, le couple était en fin de vie par la multiplication dans notre socièté de sexologues dont les thérapies devaient servir à redonner une raison de vivre au couple dont la libido était en berne, Ah!Ah!Ah! Mais entre nous, mon cher lecte-ur, pouvait-on commander le désir, l'amour? Certainement pas. Et si chez les bourgeois, on disait que l'amour venait après le mariage, grâce à l'argent apporté par les deux époux, ceci semblait au-jourd'hui d'une autre époque, Ah!Ah!Ah! Visiblement, Alfred avait trop bu d'alcool où un brin de folie lui était monté à la tête. Ce qu'il ne trouvait pas désagréable où ses idées défilaient en lui à la vitesse de la lumière et paradoxalement avec une lucidité étonnante. Où étonnamment, la pou-pée en latex avait détrôné la poupée gonflable en ce debut de troisième millénaire, Ah!Ah!Ah! Pour se remonter le moral, il se servit un autre verre afin de remettre du carburant dans son moteur ima-ginatif.

162

Les sens aiguisés, comme une lame de couteau, il entendait venir de la cuisine les bruits de cuis-son des pommes de terre et le tranchage des tomates sur un plan en bois. Ainsi que la voix de Jean-Ré exprimer quelques impatiences à finir la préparation du repas. Pour ressembler étonnamment à un concert d'ustensiles de cuisine pour remplir le ventre des hommes, comme il le fut de tout tem-ps. Où s'entremélait avec le bruit de la télé et de la cuisine, les odeurs redonnant vie à ce lieu où un couple avait autrefois vécu heureux. Tout en se demandant avec inquiètude si ce foyer pourrait retrouver le bonheur? Car bien que Jean-Ré sembla avoir retrouvé le goût de vivre, sa crise exis-tentielle avait dû laisser des traces dans sa mémoire où il sentit un debut de folie avec des crises d' amnésies qui allaient se multiplier dans les prochaines années. Sous entendu que la perte de la mé-moire n'était pas seulement liée à un processus naturel dû au vieillissement des cellules, mais au-ssi à une volonté inconsciente du patient d'oublier des heures terribles! Et combien de fois, mon cher lecteur, n'avons-nous pas essayé d'oublier une mauvaise rencontre qui nous avait détruit mo-ralement? Bien évidemment, je parlais ici des gens qui aimaient prendre des risques dans la vie, comme Alfred et Jean-Ré, et non des personnes qui gardaient toujours le même entourage durant leurs vies pour ne pas être dérangés et écouter la vérité des autres, bien entendu. Et qu'en choisi-ssant le hasard comme destin, Jean-Ré avait sans aucun doute multiplier les incertitudes avec le sentiment d'avoir un grand trou dans le cerveau. Où seule la folie ou l'amnésie générale put com-bler le gouffre pour survivre au présent. Car oublier, c'était une façon de retrouver les fonctions vitales, comme de repartir à zero, n'est-ce pas? Et que de faire un reset dans sa vie fut comme le grand espoir de retrouver le goût de vivre où le bonheur serait accessible, comme pour un nou-veau né. Car en regardant, Jean-Ré préparer le repas avec application pour son ami, celui-ci voulut y croire tel un domestique animé par une folle envie de servir pour oublier son passé en morceaux. A un moment donné, il rêva de devenir un automate pour ne plus avoir affaire à l'humanité. Où dire oui ou non fut comme un langage révé pour simplifier sa vie. Bref, un langage binaire où l'on ne rentrerait plus dans des discutions interminables, mais en employant deux mots pour dire si l'on était d'accord ou pas. Imaginez, mon cher lecteur, comment le monde serait simplifié où les avis seraient classés en deux postitions tranchées! M'aimez-vous, ma tendre amie? Non! répondrait bru-talement la jeune fille convoitée par un jeune homme. Sous entendu que le non serait difinitif sans qu'on revienne à la charge pour faire changer les avis, bien évidemment. Et semble-t-il la raison pour laquelle, les mathématiciens avaient beaucoup de décéptions amoureuses, Ah!Ah!Ah!

163

Mais connaissant la nature humaine qu'est-ce qui différentiait un oui d'un non, sinon la disposi-tion d'esprit dans laquelle on se trouvait, mon cher lecteur? Et si des gens disaient oui à tout bout de champ pour devenir populaire et être aimés, certains n'avaient que le non à la bouche, Ah!Ah!Ah! Des personnes frigides ou bien qui avaient peur de s'engager dans une relation avec l'autre? On disait chez les libertins qu'un non chez une femme voulait dire oui, Ah!Ah!Ah! Ce qui avait de quoi nous déboussoler, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Et lorsque Alfred imaginait dans ses rom-ans d'amour des scènes de sexe afin de faire plaisir aux lectrices, ses héroïnes souvent au moment de l'orgasme criaient : Non, non, non, comme s'il s'agissait d'un interdit ou peut-être d'un rêve qui se réalisait pour elles dans la réalité? De toute façon, quand il allait trop loin dans la description de scènes de sexe, Clotilde lui tapait sur les doigts en lui disant clairement que les femmes detesta-ient la pornographie pour un goût assumé pour l'érotisme. Alors, il coupait ses scènes de sexe, co-mme on coupait une tranche de viande sans éffusion de sang pour ne pas choquer les lectrices où le désir devait durer interminablement et l'orgasme jaillir tel un feu d'artifice dans le corps des fe-mmes. Sous entendu que l'orgasme de l'homme se trouvait au niveau de son penis et celui de la fe-mme dans son corps tout entier. A l'évidence, la sexualité des femmes était un grand mystère pour la majorité des hommes qui ne pensaient qu'à leur queue et à leur propre jouissance, Ah!Ah!Ah! Et s'ils procuraient du plaisir aux femmes, c'était un plaisir totalement égoïste en vue de flatter leur égo monstrueux, Ah!Ah!Ah! Visiblement, les femmes ne connaissaient pas les hommes et vis-ver-sa où le malentendu semblait être le ferment du désir et de l'amour, n'est-ce pas? Mais qui d'entre nous pourraient juger ce que la nature avait jugé bon pour l'expansion de l'humanité? Personne, bien évidemment. Et en tant que romancier, il pensait un jour écrire un roman sur l'homme sans désirs en vue de lâcher une bombe dans la littérature française voir mondiale! C'est à dire un anti-roman où il n'y aurait aucune histoire d'amour, mais la platitude d'une vie où l'émotion serait plate comme l'électrocardiogramme d'un mort, Ah!Ah!Ah! Pourtant, le coeur de l'anti-roman battait en chacun de nous comme la rive d'un autre monde où se dissiperait toutes nos passions pour accéder au bonheur suprème, bref, à l'éveil spirituel. Mais entre nous qui voudraient abandonner ses peti-tes habitudes quotidiennes et ses perversités qui lui procuraient du plaisir pour accéder à un mon-de sans relief, sans émotion? Bien évidemment, peu de monde, n'est-ce pas? Etions-nous alors vi-vant pour le bruit que nous faisions autour de nous? se demandait étrangement Alfred où le chaos du monde lui parvenait depuis la télévision.

164

Devant le flot interminable d'images qui défilaient sous ses yeux, il avait comme le tourni et ferma instinctivement les yeux pour retrouver le calme en lui. Aussitôt, il pressa le bouton off de la télé-commande pour se retrouver assis sur le divan, comme au bord du temps à comtempler l'éternité et la beauté du monde. Bref, après ce déluge d'images représentant le chaos du monde qui l'avait propulsé à désirer le silence et l'immobilité. Revenu à la réalité vraie, il entendit de la cuisine, Jean-Ré casser les oeufs dans un grand saladier, puis les touiller avec force comme s'il touillait un océan! Quelques instants plus tard, le bruit d'une poêle mise sur le feu, puis l'embrasement resse-mblant à la cuisson de l'omelette aux pommes de terre. A laquelle, il semblait impatient de goûter vu l'heure qu'il était. J'espère que t'as coupé les pommes de terre en petits cubes! lança soudain-ement Alfred qui s'y connaissait un peu en cuisine en ne voulant pas se casser les dents sur des pommes de terre pas assez cuites. T'inquète pas, je ne suis pas un novice en cuisine, Ah!Ah!Ah! lâcha Jean-Ré qui n'était pas si idiot que le prétendit son ami grâce à son flair infaillible qui le trompait rarement sur le dosage des épices et la cuisson des aliments. Après un remue ménage dans la cuisine, Jean-Ré s'écria : C'est prêt, j'arrive! Aussitôt, il entra dans le salon avec un grand plat en porcelaine où se trouvait une omelette gigantesque qu'il avait fait avec une douzaine d'oeufs. De son divan, Alfred aperçut avec étonnement venir à lui, un grand soleil doré posé sur un plat où le visage rougi de Jean-Ré ressemblait à celui d'un extraterrestre, Ah!Ah!Ah! Tu l'as vrai-ment réussie! lui dit-il pour le complimenter. Merci, mais sâche qu'on n'a jamais raté une omelette dans ma famille où ma mère la faisait comme sa grand-mère avec un feu vif et beaucoup d'huile afin de la saisir en un tour de main. Je vois que ta mémoire est revenue, Ah!Ah!Ah! ria Alfred en sachant que l'omelette faisait partie d'une longue tradition française et particulièrement appréciée par les gens qui ne voulaient pas attendre des heures avant de manger, Ah!Ah!Ah! Aussitôt qu'il la posa sur la table basse, il repartit dans la cuisine chercher la salade de tomade à l'huile d'olive avec des couverts pour ne pas manger comme des sauvages, Ah!Ah!Ah! Mais voyant qu'il manquait qu-elque chose d'essentiel, Alfred se leva et partit chercher dans la cuisine deux baguettes de pain ain-si que la bouteille de rosé de provence que Jean-Ré avait eu la prévoyance de mettre dans le frigo pour qu'elle soit bien fraîche. Ca, c'est super! dit-il en l'empoignant comme un marin assoifé.

165

Mais trouvant très inconfortable de manger sur la table basse, Jean-Ré lui dit à son retour : Ne penses-tu pas qu'on ne serait pas mieux installé sur la table du salon? Alfred hésita un instant, mais trouva son idée tout à fait judicieuse et lui dit : Oui, tu as tout à fait raison, et posa la boutei-lle de rosé et les deux baguettes sur la table où ils pourront manger face à face comme deux vieux amis. En un éclair de temps, Jean-Ré rapatria les couverts et les plats en faisant attention à ne rien faire tomber en étant très superstitieux. Si tu veux, je peux allumer la télé, lui dit Jean-Ré qui sem-blait au petit soin pour son ami. Pour l'instant, restons entre nous et mangeons dans le calme, car je crains que la télé nous gâche le repas, Ah!Ah!Ah! ria Alfred qui n'était pas né de la dernière ro-sée. Dans le silence apparent d'un appartement situé non loin de la Croisette, ils avaient laissés la fenêtre ouverte où le vent parfois s'engouffrait pour rafraichir les lieux et les visages que les passi-ons enflammaient souvent pour des raisons futiles. Bref, nous étions dans le sud de la France où l' esprit sudiste faisait partie des lieux depuis des millions d'années et qu'on pourrait rien y changer. Heureux à nouveau d'être réunis comme deux célibataires, ils appréciaient le moment unique avec le sentiment de retrouver leur seize ans. Ce qui n'avait aucun rapport avec la nostalgie, mais avec le sentiment de rafraîchir leurs sens qui avaient été émoussés par leurs vies cahotiques. En laissant de côté leurs vies de famille souvent sources d'embarras et de complications, n'est-ce pas, mon cher lecteur? Et pour se rapprocher un peu plus, comme deux frères de sang, ils auraient bien man-gé dans le même plat, comme chez les Arabes où la notion de tribu faisait partie de leurs gènes. Transporté par l'émotion, Alfred brisa avec ses mains la moitié de la baguette qu'il donna à son ami, comme une preuve de fraternité. Pourtant, ils n'étaient pas de fervents républicains ni d'égalit-aristes, mais tout compte fait des hommes sensibles aux autres. C'est à dire sans dogmatisme ou d' idéologie où la présence de l'autre justifiait son existence afin d'être écouté avec bienveillance. Apparemment, il avait retrouvé un monde sensible où la réalité virtuelle des médias n'entrait plus pour dénaturer le présent. Jean-Ré prit le morceau de pain, comme un présent inestimable où le blè de la terre avait toujours réuni les hommes autour du repas depuis des millions d'années. Passe-moi ton assiette! lui demanda-t-il en lui servant quelques rondelles de tomates avec des tranches de mozarella qu'il arrosa d'huile d'olive, comme s'il servait un prince. Puis coupa l'omelette en deux parts où des cubes de pommes de terre dégringolèrent sur la table comme des pierres préci-euses. Oh, oh, oh, lâcha-t-il en donnant sa part à Alfred qui avec sa fourchette récupéra sur la table des morceaux délicieux. Ah!Ah!Ah! ria-t-il comme un ogre dont la faim avait creusé l'appetit et l' impatience à combler un gouffre.

166

Jean-Ré, qui avait une soif d'enfer, sortit du tiroir de la table un tire bouchon pour ouvrir la bo-uteille de rosé de provence. Avec dextérité, il retira le bouchon sans le briser au niveau du goulot, ce qui symbolisait pour lui comme une reussite. Aussitôt, il remplit le verre de son ami, puis le sien, puis trinquèrent en se souhaitant la bonne santé. A ta santé, Jean-Ré, en espérant que tes rêves se réalisent! lança Alfred qui ne jetait pas ses mots par hasard, mais en connaissant bien la situati-on de son ami qui n'était pas merveilleuse. Avec la conviction qu'il devait recommencer une nouv-elle vie pour ne pas devoir encore une fois le ramassser en petits morceaux. C'est à dire abandon-ner son addiction aux jeux d'argent pour s'investir dans le réel et les hommes où la récompense n' était pas immédiate, mais mille fois plus gratifiante que le hasard. C'est à dire par un renversem-ent total de ses valeurs au prix de mille souffrances, ce qu'Alfred admettait entièrement. Mais avec l'habitude, je pense qu'il s'en sortira, pensa-t-il en rafraichisssant son gosier avec ce rosé de prov-ence issu des vignes du soleil. Je suis tout à fait d'accord avec toi, Alfred, et prions que la chance nous sourit à nouveau, Ah!Ah!Ah! lança-t-il maladroitement comme s'il n'avait pas changé de lo-giciel de pensée. Ce qui énerva un peu son ami qui pensait le remettre au travail et non le voir à nouveau cotoyer les salles de casino. Certes, ce n'était pas un banquet des dieux, mais deux homm-es face à face qui n'avaient aucun compte à regler entre eux sauf de profiter du moment présent. Et si les repas de famille en France se terminaient souvent en bataille, ils refusaient de croire à cette funeste tradition où les jalousies et les rancoeurs surgissaient après quelques verres de trop dans le nez, Ah!Ah!Ah! Où l'alcool était sans aucun doute le révélateur de la vérité, mais totalement de-structeur de l'esprit de famille, n'est-ce pas? Car tous les deux s'étaient donnés beaucoup de mal à remettre de l'ordre dans leurs vies : Jean-Ré en admettant qu'il avait été cruel avec sa femme et sa fille en les expulsant du domicile et Alfred en acceptant que son meilleur ami n'était pas irrépro-chable sans toutefois le bannir de son existence. Le repas était simple, mais délicieux, trouva-t-il comme s'il mangeait pour la première fois une salade de tomates à l'huile d'olive et une omelette aux pommes de terre. Avec le sentiment que le repas avait été fait avec amour, comme quand il était enfant où sa mère préparait le repas pour toute la famille. Décidément, il n'y avait pas de bons repas sans bons amis, pensa-t-il avec émotion où tous ses sens semblèrent satisfaits par une bonne fée.

167

Visiblement, Alfred ne pouvait pas se passer de magie dans sa vie où tous les fins de repas dans son enfance se terminaient par un tour de magie réalisé par son père. Un père qui maheureuseme-nt n'avait pas pu réaliser ses rêves d'artistes dans la vie au point d'abandonner sa famille pour disp-araître définitivement. Un lourd chagrin qu'il portait en lui comme une blessure impossible à refe-rmer avec le sentiment coupable que son amour n'avait pas suffit à le retenir! Pourtant, comme les choses se seraient passées différemment s'il avait été à mon côté, jugea-il en faisant une retrospec-tive sur sa vie cahotique et sur celle de ses frères et soeurs dont les destins n'étaient pas formidabl-es sauf pour quelques uns qui étaient entrés dans la fonction publique pour éviter le pire. Un long silence s'installa entre eux où chacun semblait penser à son propre avenir. Et que comptes-tu faire de ces 20 000 euros? lui demanda subitement Alfred. Je pense renouveler la garde-robe de ma fe-mme, Ah!Ah!Ah! dit-il non sans cynisme. C'est je pense, une excellente idée quand tu lui diras que l'appartement avait été cambriolé et ses robes envolées comme par enchantement, Ah!Ah!Ah ria Alfred en connaissant la vérité. Mais je pense qu'elle ne me posera pas trop de questions du mom-ent qu'elle fera à nouveau les magasins avec grand plaisir, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en remplissant à nou-veau son verre de ce bon rosé de provence. C'est comme toutes les femmes, je crois, où les app-arences doivent être sauvées pour avancer dans la socièté avec élégance. Crois-moi, mais sans les femmes nous marcherions dans la rue habillés comme des clochards et nos conversations seraient de vulgaires propos de bistrot, Ah!Ah!Ah! affirma Alfred qui, bien qu'il écrivit des romans d'am-our destinés aux femmes, connaissait bien la muflerie des hommes. Mais il est vrai un contraste et une cruauté nécéssaire pour écrire des histoires d'amour où les femmes perdraient forcément les nerfs tout en montrant un courage exemplaire aux hommes. Ce qui n'était pas une invention de lui, mais de la vie où les plus faibles devaient montrer aux plus forts une impassibilité pour ne pas être ridiculisés. Et le cas pour les femmes, n'est-ce pas? On entendait souvent à tort que le ridicule ne tuait plus aujourd'hui, alors que j'étais plutôt convaincu du contraire sachant que tout ceci se pas-sait au niveau intime et dans le silence des mots, n'est-ce pas? A l'évidence pour Alfred, le rêve des femmes fut de devenir des monstres froids, Ah!Ah!Ah! Et que le mouvement féministe en fut la preuve, n'est-ce pas? Mais des propos qu'il n'avait jamais dit à sa femme Clotilde de peur qu'elle demande le divorce, Ah!Ah!Ah! Décidément, la conversation avec les femmes nous obligeait à être galant, sinon la solitude assurée, n'est-ce pas?

168

Mais pour être des jouisseurs dans l'existence, on ne pas pouvait dire qu'ils souffraient de solitude, nos deux gaillards, Ah!Ah!Ah! Et qu'entre mecs, ils pouvaient se dire les choses franchement sans devoir supporter la réprobation des femmes, bien entendu. Et qu'apparemment, les discutions des hommes et des femmes se trouvaient aux antipodes pour ne pas se faire de cadeaux où les deux es-pèces étaient obligées de cohabiter ensemble pour fonder une famille ou du moins essayer de le fa-ire, Ah!Ah!Ah! Et d'Agnès Leroux, l'héritière du palais de la méditérranée, tu peux m'en parler? lui demanda-t-il soudainement. Jean-Ré étonné par cette question ne voulut point l'éluder sachant que tous les deux fréquentaient à l'époque les soirées mondaines sur la côte d'azur où la guerre des casinos était sur toutes les bouches. Et que penses-tu de sa disparition mystérieuse? lui demanda-t-il sans tabou. Pour te dire la vérité, mon cher Alfred, j'en sais strictement rien du tout sinon qu' avant cela, je vivais un âge d'or où j'étais confortablement entretenu par cette dernière. Oui, je vois, mais n'aurais-tu pas entendu quelque chose à ce propos, toi qui à l'époque fréquentait aussi la voyoucratie de la côte d'azur? Excuse-moi d'être direct avec toi, mais j'aimerais savoir. Auss-itôt, Jean-Ré dressa les oreilles et regarda Alfred avec des yeux malicieux. Comprends bien, mon cher Alfred que je n'allais pas tuer ma poule aux oeufs d'or, Ah!Ah!Ah! ria-t-il avec lucidité. Oui, j'en doute fort; mais je voulais uniquement savoir ton avis, toi dont les sens sont aussi développés qu'un chien de chasse, Ah!Ah!Ah! C'est vrai, mais sâche que je n'ai jamais voulu me mèler de cette affaire où la mafia marseillaise avait l' ambition de s'emparer des casinos de la côte d'azur. Donc, tu penses qu'elle avait disparu suite à un chantage faite au palais de la méditérranée? lui demanda-t-il avec clairvoyance. Oui, mais comme l'exigence de la mafia était si irréaliste où la famille Le-roux devait vendre ses parts pour une bouchée de pain, la négociation échoua et Agnès Leroux disparut sans laisser de traces. Et le meurtre qu'on essayait de mettre sur le dos de son amant, Jean-Maurice Agnelet, était une pure fabulation, mais bien pratique pour la justice et les médias, n'est-ce pas? Bref, digne d'un roman de gare! ajouta Alfred dont l'esprit du romancier refaisait surface. Mais sachant qu'elle n'avait pas un seul amant, pourrais-tu croire qu'un amant jaloux put la faire disparaître? Personnellement, je n'y crois guère avec la certitude que la mafia marseillaise soit la grande responsable de cette disparition en connaissant ses pratiques cruelles. Et pendant que nous en sommes là, sur la guerre des casinos qui n'en finissait pas de s'éterniser sur la côte d'azur, j'av-ais entendu d'un ami qui fréquentait le milieu que le bimoteur transportant la fille de Monsieur Barrière, le grand casinotier de la côte d'azur, avait été saboté par la mafia pour se venger de son insoumission.

169

Mais par chance et aussi pour son malheur, l'héritière du groupe Lucien Barrière avait survecu au crash en étant tétraplégique! Triste destin! lâcha avec compassion Alfred en se tordant les doigts. En fait, la guerre des casinos avait continué tant que les casinos gagnaient de l'argent; mais quand la crise économique arriva avec la guerre du Golfe, elle s'arrêta tout net. Ce qui est une évidence, ajouta Alfred qui avait vécu cette époque dans une fièvre étrange où des fortunes et des notoriétés s'éffondraient comme des châteaux de cartes. Et fort possible que son ami ait perdu de grosses so-mmes d'argent dans les casinos où l'on trafiquait alors les tables de roulette pour ne pas déposer le bilan, pensait-il en le regardant admiratif qu'il ait survécu à cette guerre non déclarée aux joueurs. Bref, à ces fous qui confiaient leur destin au hasard. En l'imaginant retourner à ses anciennes prati-ques de cambrioleur pour éponger ses dettes de jeu, mais sans vouloir lui en parler de peur de lui rappeler de mauvais souvenirs. Et comment va Clotilde? lui demanda-t-il subitement en voulant porter la discution sur un autre sujet qui semblait l'oppresser. Oh, tu ne me croiras pas; mais qua-nd je lui ai dit que j'allais rester avec toi pendant deux jours, elle m'a passé un rude savon! Ah!Ah!Ah! ria Jean-Ré qui n'avait jamais eu de bons rapports avec Clotilde qui le voyait comme un vo-you et une mauvaise fréquentation pour son mari. En sachant bien que tous les deux avaient fré-quenté les soirées mondaines de la côte d'azur pour chercher à se faire entretenir. Bref que tous les deux n'étaient pas si honnêtes qu'ils le prétendirent en évitant de se rencontrer, tout naturellement. Et dans la situation où il se trouvait, pour avoir expulsé Charlotte et Leslie du domicile, cela don-nait à Clotilde tous les arguments pour le détester. Crois-moi, mais elle m'a traité de mère théresa en voulant d'aider! Ah!Ah!Ah! ria à nouveau Jean-Ré qui comprit que Clotilde ne l'aimait vraiment pas et qu'il le savait depuis le premier jour. Mais il faut comprendre aussi que Clotilde n'avait pas une eu une enfance facile où dans sa famille on idôlatrait les garçons et méprisait les filles, dit Al-fred, comme pour lui trouver des excuses à son fort caractère. Mais c'est comme dans toutes les familles, je pense, ajouta Jean-Ré avec perspicacité. Car les filles sont en conflits avec leurs mères, alors que les garçons ont des instants priviliègés avec leurs mères. Alfred étonné par les propos de son ami, qu'il croyait inculte en psychologie, lui dit : Je suis tout à fait d'accord avec toi avec la conviction que les mères entretiennent un dialogue particulier avec leurs fils, c'est à dire avec la partie masculine qu'elle avait engendrée. Oui et sans aucun doute, une fascination réciproque, n' est-ce pas? ajouta-t-il en vue de complèter ses propos, mais aussi pour lui montrer qu'il n' avait pas seulement l'intelligence d'un chien de garde, mais aussi celle d'un homme qui connaissait les hommes.

170

Ce qui l'étonna beaucoup en remarquant qu'il ne le connaissait pas si bien que cela. Tu m'étonn-eras toujours, ma grosse baleine, Ah!Ah! lâcha Alfred conquit par un nouvel ami qui se dévoilait à lui. Et si on parlait peu, on n'en pensait pas pour autant! semblait être la devise de Jean-Ré qui se-mblait avoir appris au contact d'Alfred, le romancier, à exprimer ses sentiments et non plus à abo-yer quand les mots lui manquaient. Et c'était un progrès, jugea-t-il en finissant son repas qui avait été délicieux. As-tu bien mangé? lui demanda-t-il pour être au petit soin pour son ami. C'était dé-licieux, dit-il en pensant au dessert qui l'attendait composé d'une tarte au cirton meringuée qu'il affectionnait tout particulièrement. Jean-Ré, qui semblait avoir changé quelque peu ses habitudes de solitaire, débarrassa la table en empilant les plats les uns sur les autres avec acrobatie pour évit-er de faire des allers-retours inutiles. Alfred, le voyant à nouveau reprendre confiance en lui, ne lui dit rien et priait qu'il ne brisât rien. Le souffle coupé, il attendit que son ami parvienne sans dom-mage jusqu'à la cuisine. Quelques instant plus tard, il l'aperçut revenir tout sourire en tenant à bout de bras, la tarte au citron meringuée ainsi que des assiettes à dessert. Hum, lâcha Alfred en se frottant les mains, c'est le moment du repas que je préfère. Sous entendu que le dessert clôturait le repas qui s'était bien passé, bien entendu. Car qui d'entre nous n'avait pas passé un mauvais repas à cause d'un dessert épouvantable, alors que le reste du repas s'était passé formidablement bien? Peu de monde, je crois. Avec la conviction en France qu'on finissait traditionnellement le repas par du sucré pour digérer la discution qui avait été particulièrement acide, Ah!Ah!Ah! Décidément, les re-pas de famille ou entre amis étaient les épreuves du feu pour connaître ses ennemis, n'est-ce pas? Et si vous vouliez vraiment les connaître, il vous suffisait de les inviter à un repas avec du vin à volonté, Ah!Ah!Ah! Et que ceux qui ne buvaient que de l'eau ou très peu d'alcool avaient très cert-ainement beaucoup de choses à vous cacher en ne voulant pas exprimer ouvertement leurs ranc-oeurs en socièté. Bien évidemment par pure stratégie ou bien par une sobriété qu'on ne voulut point leur reconnaître, n'est-ce pas? A vous de choisir, mon cher lecteur, car sous cette sobriété pouvait aussi bien se cacher un intrigant qu'un homme d'une grande sagesse, n'est-ce pas? Et par expérience personnelle, j'ai connu des gens très sympathiques quand ils étaient à jeun, mais terribl-es quand ils avaient bu un coup de trop, Ah!Ah!Ah! Décidément, un mister Hyde et docteur Jekyll qui se cachait en chacun de nous sans le savoir. De toute façon, en tant que personne pragmatique, j'ai toujours exclu de mes amis, ceux qui avaient l'alcool mauvais pour éviter de recevoir un cen-drier sur la tête, Ah!Ah!Ah!

171

Pendant qu'Alfred coupait le gâteau en deux puis en quatre pour ne pas le mettre en miettes, Jean-Ré dévorait des yeux l'enveloppe sur la table basse qui contenait son argent. Avec le désir de mu-ltipler son plaisir où dessert et argent étaient synonymes de jouissance. Alfred, le voyant distrait un instant, lui servit une part dans son assiette qu'il poussa dans sa direction pour le remettre dans la réalité. Tiens, ma grosse baleine, voilà une grosse part de gâteau comme tu les aimes, n'est-ce pas? A ces mots, il se retourna et aperçut dans son assiette, une chose délicieuse à manger recouverte d' un beau nuage blanc fait d'une meringue légèrement brûlée pour apporter plus de goût et du croq-uant à l'ensemble. En reconnaissant que le travail des hommes consistait à parfaire leurs créations pour le plaisir de leurs semblables. Mais où il lui sembla inutile d'utiliser une cuillère pour y goû-ter en y mordant carrement dedant tel un animal sauvage. Alfred, étonné, le regardait avec fascina-tion où le chien de garde semblait avoir retrouvé ses instincts, mais toutefois raisonnable en tant qu'animal domestique. Ah!Ah!Ah! ria Alfred, mais ne t'étouffe pas, ma grosse baleine, car je tiens encore à toi! Aussitôt, Jean-Ré relâcha une partie de son gâteau dans son assiette, puis partit dans la cuisine chercher une bouteille d'eau qui manquait sur la table. T'inquiète pas, j'ai un estomac en béton et l'indigestion n'a jamais été mon talon d'achille, Ah!Ah!Ah! Ca, je l'avais deviné, ma grosse baleine! dit Alfred qui entama sa tarte au citron meringuée avec philosophie. C'est à dire avec une envie d'écouter ses sens pour jouir du moment présent où le citron, le blé de la pâte, le sucre et les oeufs de la meringue formaient une osmose pour atteindre une forme d'idéal gustatif. Et comme disait justement Thomas Edison : Manger un bon pâté m'a toujours donné des idées! Et pour Alf-red, manger une tarte au citron meringuée lui donnait des idées de romans et tout particulièrem-ent se passant sur la côte méditérranéenne. C'était assez mystérieux, mais combien de romans n' avaient-ils pas été écrits en Angleterre à l'ombre d'une tasse de thé, mon cher lecteur? Et la raison pour laquelle la littérature anglo-saxonne sentait la pluie et le brouillard à découper au couteau? Au point de devoir lire la littérature anglo-saxonne avec des vêtements de pluie? Ah!Ah!Ah! Déci-dément, la littérature se cachait dans toutes nos activités humaines où il suffisait de prendre son temps pour la voir apparaitre sous nos yeux et tout particulièrement sous nos doigts agités de lib-erté. Pour se trouver dans le ventre du monde grouillant de vicères nauséabondes que peu d'hom-mes étaient prêts à explorer, sinon par goût pour la curiosité ou pour la science. Où faire de la littérature revenait à autopsier la socièté des homme sans tomber à la renverse, Ah!Ah!Ah!

172

Et si beaucoup d'écrivains se demandaient souvent comment commencer un récit, il leur suffisait tout simplement de prendre un scalpel et de trancher dans la chair des hommes, Ah!Ah!Ah! Par la force de l'imagination, bien entendu. Et pour les moins sanglants de trouver le début de la pelote de laine de leur histoire pour pouvoir la dérouler et la raconter. Avec la nécéssité d'un grand sens de l'observation digne d'un chirurgien ou d'une couturière, n'est-ce pas? En sachant que ces deux professions avaient beaucoup de points communs, ne nous le cachons pas. Alfred, écrivant, avait souvent le sentiment de recoudre des évènements entre eux que la vie avait déchiré violemment. Comme une petite main d'écrivain qui semblait agir au hasard, mais guidée par une force mys-térieuse qui s'appelait le destin de voir l'ensemble d'une étoffe reconstituée avec honnêteté. Et que le patchwork littéraire n'était pas du tout son style en recherchant à raccorder la vie dans ses plus intimes entrelacements. Avec peut-être un désir inconscient de vouloir recoudre le passé avec le présent? se demandait-il souvent. Car cette faculté qui lui permettait de tisser des évènements entre eux avec le moins de noeuds possibles était liée à la profession de sa mère autrefois tisseuse dans l'industrie textile dans le Pas-de-Calais. Sans aucun doute, consentait-il, que son art venait de là ainsi que de son père, magicien à ses temps perdus, qui lui avait enseigné l'enchantement du mo-nde! A l'évidence, un écrivain était un tisseur d'histoires aimant racommoder les morceaux qui avaient été disséminés par la vie et l'Histoire. C'est à dire un travail ardu pour celui qui voulait la pratiquer sans ménager sa peine, n'est-ce pas? Et entre nous peu nombreux ces hommes et ses fem-mes qui se retranchaient de la vie afin de mieux l'explorer, comme vous le connviendrez. En exc-luant des écrivains, les compilateurs ou ceux qui faisaient du copier-coller dans leurs livres, com-me les écrivains-journalistes ou les personnalités de la télévision. Car une fois de plus, j'ai la cert-itude qu'écrire n'était pas copier ce qu'on disait dans les médias, mais une activité d'une grande solitude qui excluait tout projecteur pendant un temps indéterminé. C'est à dire un sacerdoce où le vrai écrivain ressemblait à un hors-la-loi! Et justement, il y en avait un en face de lui, qui s'appe-lait Jean-Ré, pour avoir marché toute sa vie en marge de la sociète. N'allons pas dire qu'Alfred aimât les voyous, mais plutôt séduit par leur marginalité en refusant le train-train quotidien des hommes esclaves. Car pour lui, il ne faisait aucun doute que l'ensemble de l'humanité avait été mise en exclavage par les puissants, non par la force brutale qu'on appelle le Darwinisme, mais par la force des habitudes où l'homme ordinaire trouvait son destin acceptable pour vivre en socièté. Au point que tout le monde acceptait son sort sans broncher, sauf les voyous ou les hommes lib-res, Ah!Ah!Ah!

173

Et qui devant lui ne le criait pas haut et fort parce qu'il en connaissait tous les risques, Ah!Ah!Ah! Dont on sentait la force transpirer à travers tous ses pores et ses gestes. Où il ne s'agissait plus de se fabriquer une image comme tout le monde pour être admis en socièté, mais d'être soi-même et quelque soit votre avis. Alfred était sans aucun doute séduit par ce côté brut de décoffrage et sans préjugés pour son ami, mais une chose de plus en plus rare à trouver aujourd'hui en France. App-aremment, il avait hérité de sa mère, un côté socialiste où dans le nord de la France, les luttes ou-vrières avaient été féroces. Pourtant, il n'était ni de gauche ni capitaliste pour avoir gagné un jack pot de 700 000 euros au casino de Monte-Carlo à 28 ans. En étant lui même un homme libre que le hasard avait propulsé dans un monde fréquenté par peu de monde, n'est-ce pas? C'est à dire hors de la socièté capitaliste pour s'adonner aux loisirs rêvés par la majorité des travailleurs et travaill-euses. Sans vouloir renier son petit côté socialiste, comme tous ces étudiants dans les années soix-antes dont les héros romantiques étaient les voyous et les terroristes d'extrêmes gauches, Ah!Ah!Ah! Jean-Ré, qui regardait son ami méditer sur une tarte au citron meringuée, sembla intrigué et attendre avec impatience de prendre sa deuxième part. Mais te gènes pas, ma grosse baleine, sers-toi, car moi j'ai plus faim, lui dit-il en finissant sa part avec délice puis en se servant un verre d' eau pour nettoyer son palais. On avait le sentiment en regardait attentivement Alfred qu'il s'était nourri spirituellement et alimentairement vu sa sérénité affichée sur son visage. Aussitôt, Jean-Ré ne tarda pas à prendre sa part pour l'engloutir dans sa gueule comme un chien affamé, mais sans qu'Alfred ne lui fasse la moindre remarque en buvant son verre d'eau avec méditation. A vrai dire, il ne pensait à rien, sinon à ce repas entre deux vieux potes qui se terminait harmonieusement où l'horloge du salon marquait 21 h 30. Tu veux regarder la télé? lui demanda-t-il en le voyant s'ass-oupir un peu sur sa chaise. Vois-tu, je n'ai jamais été un grand amateur de télévision, mais j'ai vu tout à l'heure que tu avais une bibliothèque dans ton couloir. Je peux? lui demanda-t-il pour y je-ter un coup d'oeil. Mais fais comme chez toi et prends les bouquins qui t'interessent, mon cher Alfred. Moi, pendant ce temps là, je vais regarder la télé en espérant tomber sur une bonne émi-ssion, Ah!Ah!Ah! Je te souhaite bonne chance, car la débilité a malheureusement envahi tous nos écrans pour des raisons d'audiences où l'intelligence a fini par prendre ses jambes à son cou, Ah!Ah!Ah! Je le sais bien, mais il y a toujours des émissions moins débiles que les autres, Ah!Ah!Ah! dit Jean-Ré qui était bon public tant qu'il pouvait rire de tout, avec une attirance toute particulière pour les émissions animalières où les animaux ne se posaient pas de questions existentielles.

174

Ce qui n'était pas le cas pour Alfred qui avait atteint une forme d'éveil spirituel où la bêtise hum-aine avait été dépassée pour comprendre le monde hors de la propagande des médias. Où tout co-mpte fait, la publicité avait envahi nos esprits pour nous contraindre à la consommation même pour ce dont nous avions pas besoin! Toujours plus et toujours plus! tel était le slogan ou le mes-sage incantatoire des publicitaires pour faire de nous d'éternels insatisfaits, Ah!Ah!Ah! Et ce qu'il détestait tout particulièrement, c'était les pubs sur la bouffe après 10 heures du soir où tout le mo-nde avait apparemment déjà mangé, n'est-ce pas? Fallait-il alors manger jusqu'à plus faim pour faire plaisir au capitalisme? se demandait Alfred pris par le dégoût. Il avait le sentiment que le cap-italisme voulut faire de nous des obèses dans l'existence afin d'avoir des ventres énormes pour en-gloutir sa production industrielle, Ah!Ah!Ah! Pendant que Jean-Ré partit allumer la télé, Alfred se dirigea vers le couloir, alluma la lumière et aperçut une petite biblihothèque collée contre le mur où des centaines de livres s'offraient aux gens curieux d'esprit. En un coup d'oeil, il remarqua qu' elle était composée de livres sur la diététique, sur l'épanouissement personnel, le boudisme et le Karma, sur l'art de la martingale, de romans comme Madame Bovary, l'insoutenable légereté de l' être, l'étranger ainsi que des livres de cuisines etc. Bref, une bibliothèque très hétéroclite en mat-ière d'ouvrages où Charlotte n'était pas étrangère, pensa-t-il avec raison. Mais où il fut étonné d' apercevoir, entre Madame Bovary et l'insoutenable légereté de l'être, ses propres ouvrages avec "Les iles gourmandes"(un livre d'entretiens avec le prince de Monaco) et Cécilia, la reine Impéra-trice, racontant le destin fabuleux d'une jeune irlandaise qui était devenue impératrice des Baham-as au 15 ème siecle. En saisissant l'un d'eux, il le feuilletta, puis se mit à lire quelques lignes afin de savoir si son oeuvre était toujours d'actualité ou obsolète en tant qu'auteur. Et à sa grande sur-prise, il sembla envoûté par ce qu'il avait écrit depuis fort longtemps en affichant un sourire de contentement sur son visage. Décidément, ça tenait toujours le coup, murmura-t-il du bout des lè-vres, puis l'emporta dans le salon. Arrivé dans l'encadrement de la porte, il dit à Jean-Ré : Sais-tu ce que j'ai trouvé dans ta bibliothèque? Mais oui, je crois savoir, tes livres! expédia-t-il en baiss-ant le son de la télé. Sincèrement, je suis agréablement surpris et je ne pensais pas que tu lisais mes livres, ma grosse baleine. Mais si, mon cher Alfred, Car même si on ne se voyait plus ces dernièrs temps, j'ai toujours suivi ta carrière littéraire avec grand interêt et gardé dans un tiroir tous les articles de presse concernant ta réussite, lui dit-il avec une grande franchise.

175

Légerement bousculé par la confession de son ami, il pressa aussitôt le livre contre sa poitrine co-mme pour le remercier à sa manière. Et je t'assure, quand je lis tes livres, je ne m'ennuie jamais, Ah!Ah!Ah! Mais c'est le but recherché! lâcha le romancier en le regardant comme un lecteur préc-ieux à ses yeux. Et les entretiens que tu avais eu avec le prince de Monaco sur une ile des caraïbes étaient une merveille où il te disait sans suivre aucun protocole ce qu'il pensait dans la vie. Tout compte fait, un bon gars qui n'avait pas la grosse tête, n'est-ce pas? Exactement, en sachant d'une manière réaliste que l'argent n'achetait ni l'amitié ni la confiance! Car à quoi servirait alors l'argent si on avait pas d'amis? lui demanda-t-il d'une manière naïve. A rien, expédia Jean-Ré en regardant son ami comme le meilleur du monde. Je te remercie beaucoup pour ta franchise! lui dit-il en re-tournant dans le couloir pour chercher un livre qui pourrait l'aider à éviter la dictature de la télév-ision. Mais étonnamment, il ne prit pas Madame Bovary pour se dépayser du réalisme violent d'au-jourd'hui, ni l'insoutenable légèreté de l'être où transpirrait les angoisses existentielles des hom-mes et des femmes au temps de la guerre froide, mais un livre sur l'épanouissement personnel dont le titre était : Je veux désormais être heureux sans vouloir me culpabiliser auprès de mes sembla-bles! Ce qui le frappa au premier abord, ce fut le titre qui le mit en prise directe avec son époque où il lui sembla nécessaire, pour retrouver le bonheur, d'évacuer son encombrant passé où la littér-ature n'était pas innocente. En saisissant bien qu'aujourd'hui n'importe quel écrit pouvait faire par-tie désormais de la littérature où l'important n'était plus de raconter quelque chose d'extraordinaire ou d'inédit, mais de banal, comme de confectionner une tarte au chocolat ou au citron pour mettre l'eau à la bouche aux lecteurs, Ah!Ah!Ah! Bref, où désir et satisfaction se suivaient le plus simple-ment du monde sans culpabilité. En se débarrassant une fois pour toute de la lourdeur de la litter-ature du passé où les écrivains se prenaient pour des grands hommes sans n'avoir jamais pu éviter aux hommes les guerres éffroyables! Dans laquelle notre petite histoire serait désormais sans idéo-logie, sans cadre historique oppressant, sans erudition inutile dans le but d'occuper notre ennui des temps modernes et sans nous prendre la tête, Ah!Ah!Ah! En ce moment, Alfred était dans cette dis-position d'esprit où il lui sembla inutile de vouloir creuser le passé, mais de flotter au dessus de la réalité pour se sentir léger comme une plume. Et malgré qu'il entendit du salon, le bruit éffrayant de la télé où Jean-Ré riait comme un fou devant les émissions débiles, il sembla serein devant le chaos du monde.

176

Et apparemment, le livre sur l'épanouissement personnel qu'il avait entre les mains, semblait tom-ber à point nommé, pensa-t-il en se dirigeant vers le salon dans le but de créer une bulle autour de lui sans gêner son ami. Quand il s'asseya sur le divan près de son ami, ce dernier lui dit : Si ça te gênes, je peux arrêter la télé? Mais non, mais non, t'inquiètes pas pour moi, lui dit-il en lui mon-trant la couverture de son livre où il était marqué en lettres bleues : Je veux désormais être heu-reux sans vouloir me culpabiliser auprès de mes semblables. Ce qui provoqua un fou rire de Jean-Ré, Ah!Ah! qui le connaissait forcément pour se trouver dans sa bibliothèque, mais qu'il n'avait certainement pas lu à cause de son addiction au jeu d'argent qui était la plus forte. Mais où il se sentait proche et lointain à la fois pour n'avoir jamais ressenti une once de culpabilité dans sa vie personnelle. Et entre nous savait-il exactement ce que signifiait la culpabilité pour avoir trempé dans des histoires louches voires criminelles qu'Alfred ne voulut point connaître pour ne pas por-ter de jugement? Et était-il assis à côté d'un criminel sans le savoir? se demandait-il avec inquiétu-de en ouvrant le livre sur le chapitre premier où il était question d'oublier les mauvaises expérie-nces du passé ainsi que celles de l'humanité afin de tout recommencer à zero. Et le silence de Jean-Ré sur son passé sulfureux ne nous montrait-il pas une intelligence supérieure et non celle d'un chien de chasse? s'interrogeait-il en essayant d'évacuer les doutes sur son ami qu'il considérait co-mme un père de substitution qu'il ne voulut point perdre en disant une bêtise. Dans sa tête, il ne régnait aucun doute affreux, mais l'assurance que son livre lui permettrait de se créer une bulle où seul le présent comptait. Et sans culpabilité semblait être la leçon du jour où son ami à ses côtés respirait la joie de vivre qu'il ne voulut point briser. Léger, il voulut devenir où les rires de son ami devant les émissions débiles de la télé le rassurait, le mettait de bonne humeur. En sachant que rien ne briserait ce fragile équilibre ou mensonge et vérité seraient occultés pour servir leur amitié indéfectible. Où étrangement, on ne se trouvait pas dans le cadre d'une corruption réciproque, mais dans un échange équitable de procédés pour sauver ce qui pouvait être sauvé et surtout pour éviter de se retrouver seul dans la vie pour des raisons morales et idiotes. Où être intelligent fut de ne pas parler des choses qui fâchaient, admettaient-ils tous les deux en toute conscience. On avait le sentiment que tous les deux s'observaient pour des raisons opposées ou peut-être pour des raisons honorables où la bienveillance était le maître mot.

177

Parfois, ils s'échangeaient des regards qui en disaient long sur leur amitié où des fous rires leurs échappaient pour des raisons mystérieuses. Mais qu'aucun ne voulut transformer en discussion sérieuse puisqu'ils se comprenaient sans rien dire. L'épanouissement personnel, c'était sans aucun doute se sentir vivant sans le patos des erudits et le bavardage intempestif des gens qui n'avaient rien à dire, sinon vous communiquer leur stress, Ah!Ah!Ah! A un moment donné, Alfred sentit qu' il avait atteint un état végétatif, non pas d'un légume, mais celui d'un bien-heureux où le bonheur était accéssible sans aucun effort. Comme s'il avait trouvé la pierre philosophale ou le nirvana en étant proche de son ami où les idées étaient celles d'un être primitif ou d'un homme sans grandes ambitions, sinon atteindre le bonheur le plus simplement du monde. Bref, des hommes de plus en plus rare à trouver dans notre monde contemporain où la réussite économique avait atteint des so-mmets inimaginables! En sachant bien qu'Alfred ne cherchait pas la réussite économique puisqu'il avait gagné un jack pot où le hasard l'avait désigné. Et que sa seule ambition dans la vie fut d'av-oir de la chance pour ne pas perdre son temps dans cet esclavage qu'on appelle le travail sans âme des hommes. Mais sans ressentir aucun mépris pour la masse où son utilité était indispensable pour la marche du monde. Sans nul doute, ils étaient tous les deux des hommes inutiles pour la socièté, reconnaissaient-ils sans aucune culpabilité. Et la preuve évidente qu'ils étaient des homm-es libres où le destin collectif était une grande fantasmagorie imaginée par le peuple. Décidément, le désir d'être utile aux autres n'étaient pas leur voeux pieux où la morale était un véritable handi-cap pour rester libre. Ce qui ne voulait pas dire pour autant qu'ils étaient des êtres immoraux, car qui connaissaient réellement leurs vies dans les moindres détails, sinon qu'eux-mêmes? Et Alfred qui se présentait tel un dandit lettré et civilisé n'avait-il pas commis par le passé des actes imm-oraux pour assouvir sa soif de jeu? Bien évidemment, lui seul le savait et n'était pas prêt à le dire à son meilleur ami pour ne pas détruire son image de bon samaritain. Ce que Jean-Ré ne lui pardo-nnerait jamais en démolissant les illusions qu'ils s'étaient faites sur lui. Etre utile leur sembla co-mme quelque chose de dégoûtant à exprimer dans la vie où les femmes en ce domaine étaient les championnes du monde, Ah!Ah!Ah! Sous entendu qu'il y avait aujourd'hui une hyper inflation de ce type de personnes qui s'affichaient dans les médias avec arrogance et imbécilité. Je veux être utile! Je veux servir à quelque chose! entendait-on du matin au soir dans les médias parce que ces personnes detestaient leur propre liberté, comme pour mieux s'enfermer dans une prison. Bref, le bénévolat à l'échelle planètaire, Ah!Ah!Ah!

178

Ce qui n'était pas de bons exemples à suivre, n'est-ce pas, mon cher lecteur, qui recherchiez la li-berté? Où l'homme libre était une espèce en voie de disparition pour plonger le monde contempo-rain dans un grand marasame avec la perspective à l'horizon d'un profond ennui existentiel. Déci-dément, le livre sur l'épanouissement personnel, qu'il avait entre ses mains, tombait à point nom-mé pour explorer ce nouveau monde où l'Etat-nounou nous ouvrait ses bras, Ah!Ah!Ah! Parce que nous manquions sans aucun doute d'assurance dans la vie, n'est-ce pas? Mais était-ce dû à un ma-nque d'argent ou à la façon dont nous avions été élevés par nos parents? se demandait Alfred dont l'enfance fut d'une grande liberté par la disparition mystérieuse de son père. Et à ce titre, celui-ci ne lui avait-il pas fait un cadeau formidable pour devenir un homme libre? s'interrogeait-il étrang-ement comme secoué par ses intuitions. Soi un homme libre! fut-il le testament laissé par son père avant de s'évanouir dans la nature? Et le comprenait-il aujourd'hui en lisant un livre sur l'épano-uissement personnel où les clefs semblaient être inscrites en lettres invisibles? En regardant sa situation actuelle d' homme libre, il voulut remercier ce père magicien à ses heures perdues dont la disparition fut comme son dernier tour de magie. Car ses ressources intérieures lui avaient permis de trouver un père de substitution en Jean-Ré qui n'eut aucune peine à le considérer comme un fils légitime par leur ressemblance étonnante. C'est à dire par une addiction au jeu d'argent et au jeu en général où, il faut dire, Alfred avait eu plus de chance que son alter ego. Avec la certitude que Jean-Ré était la face cachée de sa personnalité. C'est à dire quelqu'un de taiseux qui n'aimait pas exprimer ses états d'âmes pour x ou y raisons légitimes ou non. Mais qu'Alfred n'eut jamais l'int-ention de lui soutirer pour découvrir la vérité et enrichir ses romans. Car s'il écrivait ses romans en colaboration avec sa femme, l'idée d'y mettre son ami en personnage imaginaire l'aurait fortem-ent embarrassé où Clotilde pourrait y découvrir quelques ressemblances ou voir quelques soup-çons. A moins d'en faire un méchant homme à l'égard des femmes, Ah!Ah!Ah! ria Alfred en rega-rdant Jean-Ré qui s'arrêta soudainement de zapper en coupant le son de la télévision. Y'en a marre, mais y'a vraiment rien à la télé! s'écria-t-il avec exaspération. Mais je te l'avais dit, ce flot continu de publicités qui coupent toutes nos fictions même au milieu d'un suspens est une vraie calamité. C'est ni plus ni moins du sabotage artistique où les artistes sont pris pour des bouches-trous entre deux spots de publicité, Ah!Ah!Ah! Pendant que défilaient les images sans le son, où l'on aurait pu mettre n'importe quel texte farfelue dans la bouche des animateurs télé, Jean-Ré avait le regard hagard et regardait son ami l'air terrorisé.

179

Tu vas bien? lui demanda-t-il comme plongé dans un grand trouble. Mais étrangement, il ne dit rien et regarda soudainement au plafond, comme si les images de la télévision avaient effacé une partie de sa mémoire ou de sa personnalité en le rendant étranger à lui-même. Où l'on sentit à trav-ers son regard térrorisé, un affolement intérieur, comme s'il cherchait à rassembler ses sens qui avaient été éparpillés par les émissions débilles de la télé. Brusquement, il se leva et partit vers le balcon prendre une grande bouffée d'air, puis plongea son nez pendant un long moment dans un pot de fleurs pour reprendre contact avec la nature où l'odeur du végétal et de la terre lui remit les pieds sur terre. Alfred, qui regardait cela d'un oeil étonné, comprit aussitôt la nature de Jean-Ré qui avait besoin d'une grande liberté pour exister où les images imposées par la télévision l'avaient tétanisées au point de le rendre malade. Visiblement, la réalité virtuelle des médias n'était pas sa tasse de thé en préférant l'action où les émotions étaient vraies. Bien que bon public, quand il s'ag-issait de rire devant les emissions de divertissement, il ressentait un profond dégoût après un quart d'heure devant l'écran, où il ne pouvait pas agir ou jouer comme au casino en profitant du bar pre-stigieux de l'établissement où il pouvait discuter avec des inconnus qui avaient le même vice que lui. La télévision était sans aucun doute l'occupation préférée des pauvres faute d'exister et d' agir, n'est-ce pas? Quand il revint s'asseoir près de son ami, il avait repris des couleurs et se servit un cognac pour parfumer sa bouche et son gosier. Mon cher Alfred, je suis désolé, mais j'ai failli per-dre la raison en regardant un peu trop longtemps la télé, Ah!Ah!Ah! Mais je te l'avais dit, elle est un attrape-nigaux où les enfants de la télé sont devenus de grands débiles mentaux, Ah!Ah!Ah! Sur ce plan là, je suis entièrement d'accord avec toi quand on voit ce que la France est devenue, un pays de zombies, Ah!Ah!Ah! Totalement vrai, ma grosse baleine, et je vois que tu as retrouvé tous tes sens, Ah!Ah!Ah! Et comme ça fait du bien! dit-il en se grattant les oreilles comme un chien qui s'était débarrassé de son collier. Quelques instants plus tard, il se mit à bailler qu'Alfred imita en ressentant une lourde fatigue. L'horloge du salon indiquait 22H30 où apparemment, la journée avait été longue pour eux d'eux. Pourtant d'ordinaire, il était un couche-tard en écrivant la nuit pour s'abstraire de tout repère spacial et temporel, mais il semblait vivre ici dans une autre tem-poralité où la fatigue s'invitait tel un troisième personnage. En consultant son portable, il n'ap-erçut aucun nouveau message de sa femme, comme si elle avait tout comprit sur le rapprochement des deux hommes. Où il n'était pas question de relations homosexuelles( ce qui aurait horrifié Clotilde), mais le désir d'Alfred de se rapprocher de son père adoptif.

180

Car qui d'entre nous, dont la famille était entredéchirée, n'avaient pas rêvé un jour de s'entretenir avec un vrai père, mère, frère ou soeur pour se sentir moins seul, mon cher lecteur? Décidément, l'orphelinat à vie était une vraie calamité pour celui ou celle qui la vivait, n'est-ce pas? Et fort possible dans la vie que nous inventions sans cesse une nouvelle famille sans ADN commun, mais par une mystérieuse election. Qui pour Alfred tenait de la magie quand tout cela se produisait en sachant bien que nous avions une chance sur un million de trouver une famille de substitution. Mais l'humanité n'était-elle pas une grande famille que nous avions vite oubliée, mon cher lect-eur? Où il n'était pas question d'aimer tout le monde, mais ceux dont nous nous sentions les plus proches par une étrange alchimie? Et méritions-nous d'être aimés pour ce que nous étions, alors que le hasard y était pour beaucoup? Décidément, Alfred voyait tout sous l'angle  du jeu et du has-ard, comme Jean-Ré qui ne comptait pas s'adonner au boudisme où son Karma était irréccupéra-ble. J'ai sommeil, dit Alfred en regardant son ami proche de l'évanouissement. Moi aussi, dit-il en eteignant la télévision, puis en l'entrainant vers sa chambre d'amis. Quand tous les deux se trouvè-rent debout dans le salon, on remarquait qu'ils avaient étrangement la même taille, environ 1m82, mais des cheveux grisonnants et un embonpoint pour Jean-Ré et un physique de jeune homme pour Alfred qui avait une vingtaine d'années de moins que son père adoptif. Dans le couloir,  Jean-Ré se retourna et lui dit : Je pense que tu entreras sans problème dans un de mes pijamas, Ah!Ah!Ah! J'espère bien, car je déteste dormir en caleçon et en tee-short. Décidément, tu ne changeras pas tes habitudes de petit bourgeois,Ah!Ah!Ah! ria-t-il pour se moquer de lui qui avait réussi toutes ses entreprises. J'espère seulement que tu ne me proposeras pas un pijama à rayures comme celui des bagnards, Ah!Ah!Ah! Mais non, rassures-toi, je n'ai jamais eu ce mauvais goût, mais plutôt pour des pijamas classiques en coton confortable. Bref, à l'ancienne où l'on ne transpire pas dedant pour passer une bonne nuit. J'admire ton sens pratique, car aujourd'hui dans les boutiques on vend n'im-porte quoi même des pijamas kangourou pour être à la mode, Ah!Ah!Ah! J'dirai pas non pour les enfants, mais pour les adultes c'est un vrai cauchemard. Quand ils entrèrent dans la chambre d'amis, Jean-Ré ouvrit une commode et sortit un pijama complet pour Alfred où il était brodé dessus Ted Lapidus. Tiens, une bonne marque! s'écria-t-il qui en matière de luxe s'y connaissait. Pour les pantoufles, je pense qu'elles doivent être sous le lit, dit-il en lui montrant l'endroit où elles se trouvaient. Bien, c'est parfait! dit Alfred en s'asseyant sur le lit comme pour tester sa du-reté ou sa mollesse. Mais ne trouva rien à dire en rebondissant plusieurs fois dessus avec satis-faction.

181

Bonne nuit, Alfred, dit Jean-Ré d'un air affecueux en sortant de la chambre. Bonne nuit à toi aussi! lui dit-il en le voyant s'éloigner comme un membre de sa famille. Assis au bord du lit, il avait le sentiment de redevenir un enfant que son père venait de quitter. Et sans aucun doute, une grande nostalgie pour son enfance où il s'était senti en sécurité auprès de ses parents et de ses frères et so-eurs. Mais le temps avait fait que tout cela avait éclaté quand le pilier de la famille avait pris le lar-ge et rompu tous les liens qui les unissaient. Ce fut un drame pour tout le monde! reconnut-il en pleurant presque au bord du lit et en s'agrippant à la couverture pour ne pas tomber. Je suis déses-pérement un sentimental, s'avoua-t-il en regardant au plafond, comme un enfant qui s'était perdu dans le monde brutal d'aujoud'hui. Et bien que son argent lui permit de supporter cette réalité sans en faire un drame, il sentit qui lui manquait quelque chose dans la vie, comme cette assurance d' être heureux pour toujours. Sentimentale et idéaliste semblaient être sa nature profonde en y vo-yant aucune solution pour résoudre ce problème métaphysique. Comme tout enfant, il regarda au plafond avec l'idée de s'évanouir dans l'atmosphère pour ne plus ressentir aucune souffrance. Av-ait-il atteint un stade du bonheur qu'il n'arrivait pas à gérer? se demandait-il étrangement en bal-lottant ses jambes contre le matelat, comme celles d'une marionnette. Avait-il la réponse ou bien celle d'une machine dont la liberté était limitée par la nature? s'interrogeait-il en enlevant ses chau-ssures, puis ses chaussettes, comme délivré d'un emprisonnement moderne et civilisé. Aussitôt, il sentit à nouveau ses pieds respirer et reprendre contact avec les éléments naturels où ses veines, longtemps conprimées par ses chaussures, se gonflèrent de sang pour sentir la fraîcheur du sol tel un havre de paix. Les pieds ancrés dans le sol, il regarda avec attention autour de lui où la chambre d'amis était recouverte d'une tapisserie orangée avec des formes bizarroïdes, comme des spirales et des losanges. Il avait alors l'impression de voyager dans le temps où enfant dans les années 70, il crut reconnaître sa chambre d'enfant où la couleur orange était la couleur de l'espérance d'une vie nouvelle et meilleur. Où il faut dire, étant pauvre, on dormait à trois dans le meme lit! se souven-ait-il curieusement, alors qu'il l'avait oublié depuis longtemps. Bref, des riminiscences qui lui mir-ent du baume au coeur en sentant soudainement dans la piéce l'odeur de la tarte au chuc, une spé-cialité du Pas-de-Calais, ainsi que l'odeur de la bière. Il ne faisait aucun doute pour lui que les odeurs de l'enfance étaient toujours en lui et qu'un petit déclic magique put suffire à les réveiller d'un long sommeil. Rempli d'émotions, il se mit debout en adressant une prière au ciel qu'il ne vo-yait pas, mais qu'il imaginait telle une voie lactée.

182

Et si parfois dans ses cauchemars d'enfant, il se voyait tomber interminablement du ciel sans sav-oir où il allait atterrir; cette fois-ci, il sembla monter au ciel tel un ange au coeur pur. Dans ce mo-nde absurde, Alfred se définissait comme un homme paradoxal où le flux de la vie était à double sens grâce à une passerelle invisible reliant le passé et le présent sur un claquement de doigts. Claq! et l'ancien monde réaparaissait devant nous avec ses images éblouissantes et ses odeurs de cuisine familliale et celles de ses rues qui formeraient nos goûts pour toujours. L'éveil des sens pour un enfant, c'était le premier jour où il téta le lait sucré et crémeux de sa mère. Un elixir de jouvence qu'il n'oubliera jamais avec l'espoir de le retrouver dans les nourritures terrestres. Au-ssitôt, il se dirigea vers la salle de bain pour se laver les dents et faire un petit brin de toilette. Mais en passant dans le couloir, il entendit un petit ronflement qui l'interpela. Curieux, il alla voir dans la chambre d'à côté où il aperçut Jean-Ré qui s'était couché tout habillé dans son lit. Pas loin d'en rire, mais n'osa pas le réveiller, car il sentit qu'il dormait comme un petit enfant en imaginant fac-ilement ses rêves où il tenait entre ses mains l'enveloppe qui contenait les 20 milles euros. Ah!Ah! sacrée farceur! lâcha-t-il du bout des lèvres en refermant la porte pour ne pas être dérangé par le ronflement d'un bien-heureux. Et si l'argent pouvait le rendre heureux pendant un certain temps, pourquoi pas? se demandait-il en entrant dans la salle de bain où il aperçut son visage se refleter dans le miroir tel un fantôme! C'est à dire avec un visage d'enfant d'une grande pâleur. Pourtant, il n'était pas malade et s'adressa amicalement un large sourire pour prouver qu'il était vivant et heur-eux de l'être. Quand il ferma les yeux pendant quelques instants, où il sentit sa respiration calme et lègère pénétrer en lui, il ne savait pas comment remercier ces moments uniques dans la vie d'un homme où il sembla embrasser toute son existence physique et métaphysique. Qu-nd il les rouvrit, il n'eut point peur de retrouver son visage d'homme où la confiance en l'avenir avait embellie les traits. Mon âme est belle parce que j'aime encore la vie! semblait-il entendre autour de lui telle une romance ou peut-être un futur roman? se demandait-il en se brossant les dents sans emportement ecxessif.

183

 

Le lendemain matin

Vers les dix heures, Alfred se reveilla en apercevant la lumiere du jour traverser la fine épaisseur de ses paupières. Où coincé entre rêve et réalité, il ne voulut point brusquer ce moment magique où la lumière du jour était une promesse de bonheur pour celui qui avait suvécu à la nuit. Car pour Alfred mourir pendant la nuit était son grand cauchemard existentiel, comme tout le monde, je pense. Et saisissant son bonheur d'être toujours en vie, comme dans un rituel quasi animal, il s' étira pour réveiller son corps que la nuit avait engourdi et plongé dans une petite mort. Houhhaa! lâcha-t-il en étirant ses bras et ses jambes comme de grands élastiques aux pouvoirs magiques. Pour pouvoir saisir à nouveaux les choses, comme les objets et les corps, ainsi que de pouvoir marcher dans la rue en sentant le vent caresser notre visage et remplir nos poumons de cette ma-tière vivante qu'on appelle l'oxigène. Apparemment, nous ne faisions qu'un avec la nature et les éléments où un jour nous disparaitrons atomisés par la vie pour rejoindre la voie lactée. En tant que romancier, il était prêt à tout imaginer pour multiplier son existence où l'insondable pensée avait encore quelque chose à nous dire. Où l'important était d'être là quand elle ouvrirait la bouche pour nous délivrer son message magique. Et si beaucoup pensaient que tout avait été dit sur nous tous, ils étaient grossièrement dans l'erreur. Car qui d'entre nous avaient embrassé dans sa vie toute l'existence pour dire une chose si arrogante? Personne, bien évidemment. Et même si les livres étaient un concentré de l'Histoire des hommes et de leur mémoire, ils prenaient souvent la poussière sur les rayons des bibliothèques par la peur qu'ils engendraient, n'est-ce pas? Pour un écrivain, comme pour tous les autres, croire que tout avait été dit était une aberration voir inim-aginable parce qu'il y avait toujours quelque chose à dire ou à écrire tant que le souffle de la vie nous traversait, n'est-ce pas? Tout simplement pour le besoin vital de respirer où tout compte fait respirer était raconter une histoire insolite pour nous sortir de notre prison existentielle qu'on app-elle notre train-train quotidien. Telle était la vocation du conteur, comme celle du magicien qui ne pouvait se passer d'inventer des histoires farfelues ou hallucinantes afin de mieux se connaître pour le meilleur et le pire, bien évidemment. Et si le grand méchant loup cotôyait dans le célèbre conte le petit chaperon rouge, il ne fallait pas s'en étonner, mais comprendre que l'humanité portait en elle, le bien et le mal, n'est-ce pas? Et que de s'écarter du chemin quotidien, emprunté par la plupart d'entre nous, était un risque à courir, mais que le poète ou le conteur était prêt à prendre pour remplir sa gibecière d'histoires éffrayantes ou extraordinaires. Où l'on avait le sentiment que ces lieux étaient fréquentés par les damnés de la terre  parce que bannis de la socièté pour avoir franchi la ligne rouge où désormais aucun retour fut possible.

184

Un monde séparé en deux où la frontière était difficile à tracer où le loup pouvait se transformer en agneau et pourquoi pas, l'agneau en loup? Peau d'âne n'en était-il pas un parfait exemple? Ainsi était le monde des apparences où le conteur était prêt à faire parler les animaux pour entendre la vérité des hommes, comme dans les dessins animés ou dans les fables de La Fontaine, Ah!Ah!Ah! Décidément, mon cher lecteur, nous restions des enfants même avec un statut de notable, Ah!Ah!Ah! Et si à l'école, nous jouions pendant la récréation au ballon prisonnier ou aux gendarmes et aux voleurs, nous serions désormais marqués pour toujours par la dureté de la socièté, n'est-ce pas? Flic ou voyou? se demandait souvent Alfred en écrivant ses romans en pénétrant l'intimité de ses personnages sans leur demander leur avis. Où violer l'intimité des autres allait-il devenir un crime en littérature vu que la socièté se judiciarisait? Serait-ce la fin alors de la littérature? s'inte-rrogeait-il avec inquiètude en sortant du lit pour aller se préparer son petit-déjeuner. Un rituel au-quel il ne dérogeait jamais pour sa santé mentale et physique où un bol de café au lait avec ses tartines beurrées était une chose indispensable pour bien commencer la journée. Sous entendu qu' un ventre vide ne vous emmenerait pas loin, n'est-ce pas? En passant dans le couloir, il jeta un co-up d'oeil dans la chambre de Jean-Ré, qui ne ronflait plus, mais était recroquevillé sur lui-même dans la position du foetus. A côté de lui, comme des objets fétiches, se trouvaient ses chaussures de marque ainsi que l'enveloppe des 20 000 euros qui déchirée pendant la nuit avait éparpillé les billets de banque sur la couverture. Décidément, ma vieille baleine ne changera jamais avec le gra-nd rêve de se réveiller chaque matin sur un tapis de billets, Ah!Ah!Ah! ria Alfred en sachant que son père adoptif n'était plus tout jeune et qu'il lui serait difficile de lui faire changer ses habitudes. Quand il entra dans la cuisine, par habitude matinale, il sortit du frigo le beurre afin qu'il ne soit pas trop dure à tartiner sans utiliser la force d'un hercule, puis la bouteille de lait qui était à moitié vide avec la crainte qu'elle ne puisse pas suffire pour deux personnes, à moins que Jean-Ré prît du café noir le matin? se demandait-il en sortant un bol du placard, puis un pot de café lyophilisé Ma-xwell qualité filtre qu'il appréciait beaucoup pour son côté pratique et son café à 100% arabica. Sachant qu'un écrivain pour se tenir éveillé avait besoin d'une drogue où le café fut la moins no-cive pour sa santé, mais provoquant de l'arythmie cardiaque si on en abusait. La raison pour la-quelle, il ne préparait jamais un litre de café d'avance en préférant le café lyophilisé qu'il pouvait doser selon ses besoins en cafeïne. Pour l'avoir fait déjà un million de fois, il versa le lait dans une casserole, puis la posa sur le feu de la cuisinière électrique qu'il alluma le plus simplement du mo-nde en appuyant sur un bouton.

185

Bien pratique! pensa-t-il en sortant du tiroir, un couteau et une petite cuillière qu'il posa sur la table. Mais ne voyant toujours pas arriver Jean-Ré, il pensa qu'il devait être toujours plongé dans ses rêves de fortune malgré le bruit qu'il faisait dans la cuisine. Mais laissons-le dormir jusqu'à ce que la faim le réveille, le gros animal, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en versant dans son bol deux cuillières à café de maxwell qualité filtre, puis un sucre. Tout en surveillant le lait sur le feu, il partit vers la corbeille à pain où il sortit une baguette avec l'idée de la trancher en deux dans le sens de la longu-eur pour combler sa faim de loup. Quand il entendit le lait monter dans la casserole, aussitôt, il ét-eignit le feu, puis le versa dans son bol avec gourmandise. Où des odeurs de café et de lait péné-trèrent ses narines, comme dans un enchantement matinal. Et si pour les Anglais, le matin sentait les harricots rouges et les oeufs au bacon, les Français auraient vomi en avalant une telle nourri-ture, Ah!Ah!Ah! En sachant bien qu'ils avaient un palais délicat et non les Anglais qui avaient un estomac en acier pouvant manger n'importe quoi pour assièger une forteresse étrangère, Ah!Ah!Ah! On disait d'eux qu'ils étaient des hommes d'actions parce qu'ils mangeaient solidement le ma-tin, ce qui n'était pas entièrement faux en comparaison avec le Français qui chaque matin était un poète, Ah!Ah!Ah! En coupant sa baguette en deux dans le sens de la longueur pour en faire deux tartines géantes, Alfred sifflota comme un pinson. Décidément, on ne pouvait pas changer la natu-re des peuples à moins de leur faire changer la nourriture et le territoire, n'est-ce pas? Parfois, on se demandait si en Angleterre, où il pleuvait souvent, il y eut de vrais poètes? A moins d'être des poètes monarchistes célébrant la puissance du prince? se demandait-il étrangement en beurrant sa baguette avec application. En considérant Sakespeare comme un grand poète, mais pas rigolo du tout, Ah!Ah!Ah! Grâce à la chaleur de la saison, le beurre ramollit assez rapidement et Alfred tarti-na sans effort ses deux tartines géantes avec gourmandise et vénération. Où tout compte fait, la nourriture était un don de la nature et du travail des hommes, n'est-ce pas? Et que de la manger ou de l'engloutir fut comme une marque de confiance envers l'avenir des hommes et de la protection de la planète, comme je le crois, pensa-t-il en trempant sa baguette géante dans son lait tel un ogre. Quand tout à coup, Jean-Ré débarqua dans la cuisine avec les cheveux ébouriffés et ses vêtement chifonnés comme la peau d'un chat sphynx. Eh ben, je vois qu'on ne se laisse pas abattre, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en le voyant avec sa tartine géante entre les mains. On avait le sentiment qu'Alfred Sw-an, le dandit lettré depuis les dernières vingt quatre heures, avait bien changé ou du moins qu'il av-ait repris ses anciennes habitudes de célibataire.

186

Ce qui ne le choquait pas du tout en voulant rester le plus naturel possible avec son père adoptif même au prix d'être ridicule. Plutôt philosophe et poète le matin, il ne prit pas sa remarque comme quelque chose de déplaisant, mais l'invita plutôt à boire son café avec lui, comme deux frères. Je suis désolé, mais j'ai vidé le reste de la bouteille, car elle était à moitié vide, dit-il à l'air navré. T'inquiète pas Alfred, le matin, je ne bois que du café noir, le rassurait-il en s'asseyant en face de lui telle une masse à moitié endormie. T'aurais besoin d'un bon café, Ah!Ah! dit-il en le voyant so-mmnoler et piquer du nez sur la table. Pourtant cette nuit, j'ai dormi comme un gosse, je t'assure, affirma-t-il en se grattant la tête pour essayer de se reveiller ainsi que pour arranger sa coiffure qui lui donnait la tête d'un fou. Mais prends ton temps, ma vieille baleine, car il n'est que dix heures et demi du matin et que tu n'as aucun rendez-vous important dans la journée, Ah!Ah!Ah! Ce qui m' arrange bien, il faut dire! repliqua-t-il en se levant pour se diriger vers le placard où il sortit un bol, un pot de confiture à la fraise et une petite cuillère. Le pot de café liophilisé étant sur la table, il en versa deux cuillères à ras bord dans son bol, puis deux sucres par dessus et partit mettre de l'eau sur le feu. Avec la certitude qu'elle ne déborderait pas de la casserole, il prit une baguette dans la corbeille à pain pour imiter apparemment son ami. C'est à dire deux tarines géantes beu-rrées et nappées de confiture à la fraise, ce qui fit saliver Alfred de n'avoir pas eu la même idée. Dévorant sa tartine géante, qui lui sembla un peu fade, il eut soudanement l'envie d'y mettre de la confiture de fraise. Je peux? lui demanda-t-il en louchant sur le pot de confiture. Fais comme chez toi, Alfred, je pense qu'il en aura assez pour deux, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en versant de l'eau bouillante dans son bol où des odeurs de café enivrèrent ses sens offalctifs avec le sentiment d'émerger à nouveau dans la réalité. En attendant que son ami beurre ses tartines géantes, Alfred se jeta sur le pot de confiture et tartina les siennes avec délectation. Cette odeur de fraise qui montait en lui ressemblait à celle d'un jardin des délices qu'on avait reussi à enfermer dans un bocal en verre grâce à la magie des hommes et de leur savoir faire ancestral. Avec le sentiment de faire partie de cette communauté humaine et naturelle où la satisfaction de chacun était l'ultime raison de vivre. Où la collaboration entre la nature et les hommes était un champ formidable de tous les possibles où la meilleur des choses fut le plaisir. Tout en regrettant malheureusement que le tavail soit sou-vent en opposition avec le plaisir( en ne connaissant personne qui prenait du plaisir en travaillant à part quelques exeptions), il sentit que l'accomplissement d'un travail x ou y fait dans les règles de l'art devait être le plaisir, sinon un travail bâclé ou inutile.

187

La raison pour laquelle, il écrivait toujours ses romans en prenant son temps afin de permettre à une histoire de prendre forme et de s'incarner dans des personnages qui commençaient à dialoguer entre eux comme dans la vie. Tout en déplorant que ceux qui écrivaient un roman par an n'était pas de grands écrivains, mais des chefs d'entreprises adeptes du Taylorisme littéraire, Ah!Ah!Ah! Et puis imaginer, mon cher lecteur, un boulanger qui ne laissait pas sa pâte fermenter pour faire son pain! Que dire d'autre, sinon qu'il ne faisait pas du vrai pain, mais du pain industriel, n'est-ce pas? Comme la plupart des écrivains d'aujourd'hui qui faisaient de la littérature industrielle pour des raisons de rentabilité, ce qu'on pouvait déplorer, non pas seulement pour le lecteur, mais aussi pour la culture. Avec la suspicion de contenir des produits nocifs pour la santé mentale de nos co-ntemporains. Décidément, Alfred ne pouvait séparer la littérature de la vie quotidienne où elle se fabriquait naturellement sous nos yeux à moins d'être aveugles, Ah!Ah!Ah! Et si celle-ci était pl-eine d'elducorants, d'émulsifiants et de colorants artificiels pour lui donner une belle apparence, sans que nous le sachions? se demandait-il avec inquiètude en regardant la composition du pot de confiture de fraise qu'il avait entre les mains. Mais où il eut le bonheur de voir aucun additif alim-entaire commencant par la lettre E, mais du gélifiant et de la pectine qui a vrai dire n'était pas dan-gereux pour la santé en étant d'origine naturelle, ce qui le rassura en reposant le pot sur la table. Jean-Ré le regardait avec étonnement et se demandait à quoi il pouvait bien penser en le voyant méditer sur un simple pot de confiture? Où les écrivains avaient tellement d'imagination qu'ils pouvaient écrire un livre à partir d'une liste de course, souria-t-il en se saisissant du pot de con-fiture pour y plonger sa cuillère avec gourmandise. Penché au dessus de son bol de café au lait, Alfred semblait méditer sur un futur livre polémique qu'il appellerait E412( un additif provoquant des vomissements) pour dénoncer le carnage de la littérature où les additifs artificiels étaient dés-ormais utilisés faute de vrais ingrédients naturels. Où d'après les experts, on pouvait fabriquer un livre en quelques mois grâce à l'IA ou ChatGPT, comme une tarte au flan en trois minutes avec des produits industriels vendus en grande surface ou chez Metro, Ah!Ah!Ah! Et nous faudrait-il pas mettre un jour sur la couverture de nos livres "livre bio" pour ne pas tricher avec nos lecteurs qui tenaient tant à leur santé mentale, mon cher lecteur? Sous entendu que les additifs industriels introduits dans la littérature d'aujourd'hui étaient produits par les GAFAM et les médias donc faciles à mettre en oeuvre grâce au copier-coller, Ah!Ah!Ah! Et en lisant ces livres de masse, n'av-iez vous pas l'impression de les avoir dejà lu?

188

Tournions-nous en rond en ce moment faute d'avoir une vraie vie, mais artificielle? Et dans l'ordre des choses n'avions plus rien à dire en littérature, sinon des banalités pour rassurer nos lecteurs désormais atomisés par la modernité? se demandait Alfred en regardant Jean-Ré comme un sym-ptôme de notre socièté vidée de sa substance intelligible. L'immédiateté serait-elle devenue le nou-veau totem de la jeunesse pour jouir de la vie sans vouloir participer à la vie de la communauté ou mettre sa pierre à l'édifice? Avions-nous affaire à une génération des plus égoïstes au monde qui précipiterait la socièté dans le chaos? s'alarmait-il en engloutissant son café au lait au risque de se noyer. Dans ce charmant tableau matinal, seul Alfred sembla s'inquièter tandis que Jean-Ré avait l' air heureux en dévorant ses tartines géantes en ayant foi en l'avenir. Il avait sûrement raison, pensa-t-il en se redressant stoïquement sur sa chaise tel un bonze qui savait que sur la terre tout était illusion, le bonheur comme le malheur. Et que l'important pour nous était de moins souffrir poss-ible en attendant la résurrection ou la réincarnation. Sous entendu que le bonheur et le malheur parfois se confondaient si forts qu'ils nous rendaient complètement fous! Comme le riche qui ma-lgré son argent n'arrivait pas à être heureux où se plaindre aux autres fut considéré comme indé-cent et tout particulièrement aux yeux des pauvres! Il était évident pour nous les hommes que nous étions des conquérants de l'inutile parce que nous n'arrivions jamais à être heureux ou parvenir au bonheur permanent. Telle était notre malediction à moins de vivre dans l'insouciance totale des jours, comme Jean-Ré, qui ne semblait pas se culpabiliser d'avoir expulsé sa famille de son dom-icile sur un coup de tête? Et savait-il, par une intuition formidable, que tout se résolverait en fai-sant confiance au hasard ou au destin? se demandait-il en le regardant avec étonnement, comme un grand philosophe ou un grand joueur devant l'éternel. Où faire confiance à ses semblables, comme la meilleur façon de résoudre tous nos problèmes existentiels, mon ami? Si tu veux, après on ira faire un tour sur la Croisette! dit Alfred à Jean-Ré qui n'avait pas encore fini son petit-déjeuner. Bonne idée, comme ça on pourra manger au petit Canet et voir nos amis de longue date, Ah!Ah! ria-t-il avec désinvolture. Malgré sa vie trés désordonnée, il avait gardé semble-t-il gardé tous ses amis! saisit-il avec étonnement impressionné par son sens de la fidélité. Alors que sa profession de romancier l'avait plongé dans une grande solitude au point de ne plus savoir c'était quoi rire avec ses amis ou des personnes en chair et en os en étant confronté toute la journée à des personnages imaginaires, semblait-il regretter amèrement. Pourtant, il n'était fâché avec aucun d'entre eux. Ma-is loin des yeux, loin du coeur! pensa-t-il en sortant de table pour aller prendre une douche et puis se changer, comme il se doit.

189

Mais avant d'y aller, il partit dans sa chambre fouiller dans la commode où il trouva un caleçon, des chaussettes et un tee-short de rechange sachant que son ami avait la même taille que lui. Déci-dément, c'était formidable d'avoir une chambre d'amis où l'on était comme chez soi sans devoir déranger le maître des lieux! reconnut-il avec bonheur en allant dans la salle de bain se refaire une nouvelle peau. Pendant ce temps là, dans la cuisine, Jean-Ré avait allumé la radio et écoutait avec émotion" Avec le temps tout s'en va" une chanson de Léo Férré. C'était très émouvant, car la cha-nson parlait de l'amitié et de l'amour qui disparaissaient avec le temps et les vieux jours. Mais avec le paradoxe aujourd'hui d'avoir retrouvé son meilleur ami, Alfred, qui se trouvait chez lui. Et si avec le temps tout s'en va, mais qui nous interdisait de renouer ses liens avec les autres? se deman-dait-il avec le sens de fidélité d'un chien de chasse qui n'avait pas de limite. Loyal et fidéle, telles étaient les qualités qui lui permettaient de rebondir et de sauver sa peau en toute occasion, se dis-aitil en entrant sous la douche où l'eau semblait le caresser de milles délices en le débarrassant des toxines accumullées depuis sa folle course après la mort pour sauver son ami. Quand il recouvrit son corps de bain douche parfumé à l'abricot, il se sentit devenir un fruit à croquer, Ah!Ah!Ah! Mais quand il se rinça, il remarqua dans le bac que l'eau était noire, alors qu'il ne s'était pas roulé dans la boue! s'indignait-il comme un petit bourgeois qui refusait de voir sa propre saleté. Zut alors! s'écria-t-il avec le sentiment d'avoir travaillé comme un forcené depuis hier après-midi. Mais au fur et à mesure que cette saleté disparaissait dans le syphon, il ressentit comme un grand soulagement de voir son corps respirer à nouveau. L'eau avait sans aucun doute un rapport avec la purification du corps et de l'esprit pour toutes les religions! pensa-t-il en savourant ce plaisir où il sembla renaître à la vie. En se demandant étrangement si son enfance dans le Pas-de-Calais où le socialisme avait supplantée la religion catholique fut une grave erreur pour tous les enfants dés-ormais sans dieu? Car quand le travail aura disparu de nos sociètés modernes, mais à quoi croi-ront-ils, sinon à rien? Fallait-il alors revoir toute notre éducation au risque de se rendre ridicule à nos yeux et à ceux des autres? s'interrogeait-il en se séchant avec un serviette, puis en se passant un peignoir qui lui allait pile-poil. Quand il sortit de la salle de bain pour prendre le couloir, il en-tendit de la musique venir de la cuisine où passait à la radio " L'Amérique, je veux l'avoir et je l' aurai" une chanson de Joe Dassin qui le fit presque sourire. En devinant que Jean-Ré, malgré son âge avancé, avait toujours ce rêve de faire fortune en Amérique, Ah!Ah!Ah! Apparemment, il viv-ait toujours dans ses illusions et peut-être avait-il raison? s'interrogeait-il en voulant qu'il soit heureux.

190

Après tout, pourquoi chipoter sur ces choses là où le goût des uns n'était pas forcément celui des autres, n'est-ce pas? Et s'il aimait des chansons ringardes, ce n'était pas l'affaire des autres, mais la sienne, bien entendu! saisit-il en entrant dans sa chambre où était étalé sur son lit ses vêtements de rechange. Qui appartenaient à son meilleur ami dont la taille était la même taille que lui, ce qui le rassura. Aussitôt, il enleva son peignoir pour se regarder en détail dans le miroir afin de voir s'il n' avait pas pris de ventre ou aperçu des tâches suspectes sur sa peau. Mais après quelques minutes d' observations scrupuleuses, il ne remarqua rien d'anormal et que son physique n'avait pas changé depuis des années où la littérature n'était pas étrangère. Car lorsqu'il écrivait ses romans, il grign-otait rarement dans la journée et mangeait à heure fixe une quantité raisonnable de nourriture. Avec la chance d'avoir une femme Clotilde qui n'était pas une grande cuisinière en lui épargnant d' être un fin gourmet, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en se tapant sur le ventre, comme un jeune ado. Quand il termina de se changer, il mit ses vêtements sales dans un sac en plastique qu'il dégotta au fond de la commode. Puis il partit dans la cuisine retrouver son ami qu'il trouva assis devant un nouveau bol de café noir qu'il s'était préparé pour sortir d'une somnolence dont il avait du mal à se débarr-asser. Où peut-être hésitait-il encore à retrouver sa femme Charlotte et sa fille Leslie, comme il me l'avait promis? se demandait avec inquiètude Alfred. Mais ne voulant pas le bousculer à cette heure matinale, il s'asseya en face de lui sans lui poser de questions. En ne craignant pas ce face à face avec son vieil ami pour lequel, il n'avait plus rien à cacher. Par gourmandise, il plongea sa petite cuillère dans le pot de confiture à la fraise pour exprimer son appetit de vivre et le goût pour les bonnes choses. Hum, cette confiture est délicieuse! lâcha-t-il en lèchant sa petite cuillère com-me un enfant. Jean-Ré, amusé par ce petit jeu, lui souria et plongea aussitôt la sienne dans le pot pour imiter son ami, semble-t-il. C'est vrai qu'elle est excellente, dit-il en finissant le pot avec grand bruit. Mais ne lui fit aucune remarque désagréable sur son poids qu'il semblait négilger en attendant le bon moment pour lui parler avec franchise. Jean-Ré, si t'es pas prêt à retrouver ta fem-me et ta fille, dis-le moi carrément. Car je ne compte pas tenir la chandelle indéfiniment! lui expé-dia-t-il sans méchanceté, mais avec l'envie d'éclairer la situation. Mais non, Alfred, c'est pas ce que tu crois! rectifia-t-il en le regardant dans les yeux. Le seul grand problème que j'ai en ce moment, c'est de ne pas savoir quoi leur dire quand je les retrouverai! lui avoua-t-il en étant desespéré par la situation. Mais dis leur que tu regrettes sincèrement ce qui s'est passé et qu'a l"avenir ça n'arrivera plus jamais. C'est simple, non? Et que tu avais profondément changé en faisant passer ta famille avant tes plaisirs égoïstes, Ah!Ah!Ah! ria Alfred pour ne pas apaisentir la situation où Jean-Ré avait l'impression de passer à la rotissoire.

191

Et si tu n'a rien à leur dire, mais qui t'empêches de leur faire un cadeau? lui demanda-t-il en ne manquant jamais d'idée pour répandre le bien autour de lui. Mais quel cadeau veux-tu que je leur fasse après avoir été odieux avec eux? répliqua-t-il avec véhémence en reconnaissant enfin ses to-rts quand il était poussé dans ses retranchements. J'sais pas, peut-être un portable pour ta fille et une belle paire de chaussure pour ta femme, non? Et puis comme tu en as les moyens maintenant, cela devrait les rassurer que tu ne jetes plus ton argent par les fenêtres, mais les utilise à des choses utiles, non? C'est pas faux tout ça, avoua-t-il en plongeant son regard dans son bol de café noir où il semblait y voir un puit sans fond, mais où les idées d'Alfred y jetaient quelques lumières. D'acc-ord, c'est toi qui à raison, reconnut-il en sortant la tête de son bol où un sourire se dessinait en destination de son ami. Alfred, heureux que ses idées aient porté ses fruits, se leva et fit le tour de la table pour le prendre dans ses bras. Ah ma vieille baleine, tu me surprendras toujours, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en sentant son embonpoint qui serait la prochaine étape pour le lui faire perdre. Et de-main à midi, nous irons chercher ta femme et ta fille chez moi à Menton, si tu le veux. Mais à ces mots, Jean-Ré sembla montrer quelques réticences et lui dit : Désolé Alfred, mais je pourrai pas allez à Menton avec toi, car ta femme ne m'a jamais apprécié! Et je n'ai pas envie de la voir pour qu'elle me dise ses quatres vérités. Ah!Ah!Ah! Mais ma femme ne va pas te manger, je te l'assure, mon gros bêta! Ca, c'est toi qui le dis parce que tu ne connais pas les femmes! expédia-t-il bruta-lement en ignorant qu'Alfred écrivait des romans d'amour avec l'idée qu'il devait les connaitre pour pouvoir en parler. Ce qui l'irrita quelques peu, mais sans désavouer son ami. Car qui d'entre nous connaissait véritablement les femmes en sachant qu'elles étaient imprévisibles, n'est-ce pas? Bref, qu'elles pouvaient vous montrer un amour passionné, puis sans raison apparente, une très gr-ande froideur sans en connaître la raison exacte. Où nous étions alors plongés dans le grand my-stère des femmes où il était inutile d'essayer de percer le secret à moins de vouloir devenir fou. Et ô combien d'hommes naïfs l'étaient-ils devenus à vouloir comprendre les femmes où seules les ap-parences comptaient où le petit détail "tue l'amour" fut comme un signe de croix ou de mort? L 'écrivain savait tout ça, bien évidemment, et s'il parlait peu d'amour avec son épouse, c'était pour éviter de se disputer pour des broutilles, Ah!Ah!Ah! Avec comme refuge le roman qui lui seul av-ait l'avantage de ne pas faire réellement de mort, Ah!Ah!Ah! L'art du roman, c'était cette possibilité de s'affronter avec les sentiments où tout le monde se dévoilait selon sa nature, sa fortune ou sa malediction.

192

Où l'amour était sans aucun doute un bon pretexte pour occcuper son éternel ennui quitte à s'ent-re-déchirer avant d'atteindre la sagesse, Ah!Ah!Ah! Où peu de gens savaient que l'amour et la haine dirigeaient le monde telle une épée de damoclèce au dessus de nos têtes ou comme le yin et le yang pour le dire plus simplement. Et si l'impatience caractérisait les femmes, les hommes patients étai-ent souvent les dindons de la farce dans les histoires d'amour, Ah!Ah!Ah! Finalement, le désir n'at-tendait pas où comme le disait très justement Oscar Wilde : succomber au désir, c'était jouir sans attendre! Chéri, c'est quand qu'on fait l'amour? Dans trois jours! répondait l'amant maladroit, Ah!Ah!Ah! Non, non, non, je n'irai pas chez toi! lança avec véhémence Jean-Ré qui refusait de croiser le regard impitoyable de Clotilde qui le clouerait sur place. Bien, bien, bien, dit-il si c'est ce qu tu veux, on fera comme tu le dis. Merci, lâcha-t-il en se laissant tomber sur sa chaise, comme délivré d'un grand poids. Tu les conduiras tout simplement chez moi où je les attendrai avec un grand pla-isir, dit-il en terminant le reste de son café. D'accord, c'est compris, opina Alfred en voulant être souple comme un bambou dans ses décisions. Et alors qu'est-ce que t'attends, ma grosse baleine? T'as vu l'heure, il est 11 heures et tu n'es même pas changé pour aller à la Croisette, Ah!Ah!Ah! lui réprochait-il pour le faire bouger de sa chaise. Oh ne te casses pas la tête pour moi, je suis le recordman du monde pour prendre ma douche et pour me changer, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en se levant pour aller faire une toilette de chat, apparemment. J'en ai à peine pour une petite demi-heure, le rassura-t-il en lui donnant une petite tape dans le dos. C'est ça, c'est ça, on verra bien, dit Alfred à moitié convaincu par les prouesses de son ami. Et si ça t'amuses, comme je le vois, je vais te chr-onomètrer, mon cher champion, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en sortant son portable pour utiliser le chron-omètre. Essaye et on verra bien qui aura raison! repliqua-t-il avec arrogance en se précipitant dans la salle de bain. Il était en meme temps amusé et désopilé par les prétentions de son ami qui visi-blement aimait toujours parier. Et si c'était pas avec de l'argent, c'etait avec ses amis pour les imp-ressionner. Aï, aïe, aïe! se plaignait-il en emportant avec lui le chronomètre dans le salon afin de continuer le livre sur l'épanouissement personnel commencé hier en attendant que son ami redev-ienne raisonnable. Décidément, Jean-Ré était toujours un excessif et qu'il ne changera jamais, pen-sa-t-il en ouvrant le livre sur le chapitre : Comment organiser sa vie le plus simplement du mo-nde? Ce qui n'était pas le cas de son ami qui aimait bien se compliquer la vie pour rien! saisit-il en regardant le chronomètre qui dévorait le temps ainsi que la vie des gens. Mais pourquoi vouloir aller plus vite que le temps, alors qu'on avait tout le temps de faire les choses? se demandait-il av-ec raison sachant qu'on pouvait les organiser sans empressement et surtout sans ce stress qui min-ait nos vies. L'homme était-il donc ce fou qu'on décrivait dans les livres anciens et malheureu-sement oubliés par nos contemporains?

193

Et la question de la folie, comme la question centrale pour l'humanité! admettait-il avec lucidité. En étant la limité à ne pas dépasser pour éviter le chaos dans la socièté, n'est-ce pas? Sous entendu que la folie ne se guérissait pas, mais se soignait avec des lois, de la morale et des medicaments pour les cas désespérés, Ah!Ah!Ah! C'était bien évidemment le conte de la folie ordinaire que je vous racontais, mon cher lecteur, où l'hôpital psychiatrique était à ciel ouvert où les fous se bala-daient en totale liberté, Ah!Ah!Ah! Où visiblement tous le monde cachait sa folie pour ne pas être enfermé dans une camisole chimique par les institutions. Mais un jeu des plus pervers pour chacun d'entre nous où l'on refreinait à chaque instant ses instincts de mort où l'enfer était les autres, n' est-ce pas? A ce propos, Jean-Ré ne lui menait-il pas la vie dure en ce moment avec le sentiment de ronger son frein? se demandait-il fragilisé par l'impatience. Mais plongé dans son livre sur l'ép-anouissement personnel, il prit les choses avec philosophie où son histoire invraisemblable se ter-minerait quand son ami aura retrouvé sa famille au complet. Ce qui ne faisait aucun doute pour lui en voyant le chronomètre manger le temps avec gourmandise. Bref, comme une autre façon d' envisager le temps! remarquait-il en voyant midi arriver et un repas sur la Croisette qui allait lui redonner des forces vitales. Sous entendu qu'un petit-déjeuner à la française n'était qu'un moment de poésie, Ah!Ah!Ah! souria-t-il avec le bonheur de vivre en France. Pour être sans aucun doute, le plus beau pays du monde, mais que les Français avaient du mal à reconnaître tellement ils éta-ient obnubilés par la politique et le pouvoir. Et la raison pour laquelle, ils étaient les gens les plus malheureux du monde en ignorant qu'ils vivaient dans le pays le plus redistributif où l'égalité tel un dogme leur gâchait un peu la vie, il est vrai, Ah!Ah!Ah! Mais entre nous, mon cher concitoyen, pourriez-vous croire un seul instant qu'on pouvait avoir l'égalité et la liberté en même temps ou pour dire les choses plus simplement avoir le beurre et l'argent du beurre sans être la risée du mo-nde entier? Au point qu'à l'étranger, on voyait les Français comme des extraterrestres qui avaient tout pour être heureux, mais qui faisaient la grimace à longueur de journée parce qu'un peuple d' insatisfaits, n'est-ce pas? Alfred, qui était franco-italien, avait la chance d'être épargné par ce pess-imiste congénital des Français en ne se plaignant jamais de ne pas être considéré par les puissants, Ah!Ah!Ah! En frôlant souvent la comédia del arte où la vie n'était en fin de compte qu'un spectacle qui durait le temps qu'on voulut bien lui consacrer. Où pendant très longtemps, les Italiens furent de très mauvais amateurs de théâtre pour être des comédiens dans la vie où le spectacle se trouvait plutôt dans la salle que sur la scène. Et c'est ce qui apparemment séparait les méditérranéens des amateurs de le théâtre où la vie était un spectacle à part entière, Ah!Ah!Ah!

194

Imaginez, mon cher lecteur, le drame pour ces pauvres acteurs obligés de crier pour se faire enten-dre du public! De même qu'Alfred qui avait souvent l'envie de crier sa colère contre les injustices du monde, mais hésitait à le faire dans un monde devenu assourdissant. A cause d'un monde mo-derne où la sono était poussée à fond par les médias, Ah!Ah!Ah! A ce propos, entendait-on encore l'individu ou bien les interêts financiers des groupes audiovisuels, des maisons d'editions, des pub-licitaires ou de la caste des journalistes qui s'était irigée en défenseur de la liberté? L'individu av-ait-il encore son mot à dire dans ce panier de crabes sans être pris en otage par les uns ou par les autres? s'inquiètait-il avec le sentiment d'être pris lui aussi en otage par son ami qui le maintenait dans un suspens idiot. Où tout compte fait, il était l'homme qui attendait, alors que l'autre se fai-sait désirer sans se culpabiliser! remarquait-il injustement en montrant des signes de nervosité. Où d'après les psychanalistes, celui qui arrivait toujours en retard à ses rendez-vous était sans aucun doute un homme ou un femme qui voulait se faire désirer sans bien le savoir, n'est-ce pas? Car qu' est-ce que l'amour ou l'amitié, sinon attendre l'autre, mon cher lecteur? Et ô combien de fois n' av-ions-nous pas été le dindon de la farce dans ses situations sans se sentir ridicule, mon cher collè-gue humilié? Je n'oserais pas les compter. Sans oublier les rendez-vous manqués parce que l'autre nous prenait pour un con, Ah!Ah!Ah! A ce propos, je me rappelle d'un rendez-vous que j'avais pris avec une connaissance dans un bistrot afin de lui faire lire mes premiers essais en littérature. Mais à ma grande surprise, celle-ci n'était jamais venue pour une raison que je n'ai jamais su pour ne s'être jamais excusée. Décidément, nous les écrivains n'étions jamais respectés à moins de passer chez Bernard Pivot à Apostrophes ou dans la Grande Librairie, Ah!Ah!Ah! Et ô combien d'écriv-ains avaient le sentiment d'écrire dans le vide faute de lecteurs ou d'un public? Et s'ils continuaient à écrire, malgré un manque total de reconnaissance, c'est parce qu'ils s'étaient inventés un lecteur imaginaire à qui s'adresser à n'importe quelle heure de la journée ou de la nuit. Sous entendu que la littérature constituait la vie d'un écrivain et les mots sa matière première. Mais qu'il avouait rarement aux autres de peur d'être considéré comme un mort-vivant où tout se passait dans sa tête et non dans la réalité, Ah!Ah!Ah! Car la littérature pour ne rien vous cacher était un tombeau pour l'écrivain qui refusait de vivre réellement. Pour des raisons qu'on ne connaissait pas vraiment, certainement liées à l'enfance, où la vie fut terriblement ennuyeuse, comme je le crois. Et la seule façon d'y survivre était de s'inventer des histoires pour ne pas mourir. Ainsi détaché du monde, il recréait tout dans sa tête où il manipulerait les objets et les personnages pour se sentir vivant dans cette vie qui l'avait exclu pour des raisons mystérieuses.

195

En ne voulant pas devenir l'homme du ressentiment, mais celui qui cherchait le bonheur à tout prix où ses personnages se matérialisaient sous ses yeux, comme dans un grand tour de magie. En fait, seul l'artiste était conscient que la magie faisait partie aussi de la vie, mais dont la recherche demandait beaucoup de patience et d'observations à l'auteur. Sous entendu qu'elle se cachait là où on ne l'attendait pas. Bref, un sacerdoce pour l'écrivain qui au détour d'une phrase découvrait tout un univers auquel il n'avait jamais pensé, mais seulement effleuré l'idée. Visiblement, les mots nous permettaient de créer des mondes merveilleux en les semant sur un feuille de papier où ils allaient nous conduire où l'on se savait exactement. Car l'imagination de l'écrivain était liée à son enfance où les manques d'amour et d'affections ou autres furent de grandes abymes émotionnelles. Et qu'il essayera de combler comme il le pourra en s'inventant des amis formidables et un père de substitition qui avait fui le foyer familial. Où il ne sagissait pas de reconstruire le passé, mais d'en créer un nouveau pour être enfin heureux. A propos de ce père qu'il était en recherche permanente pour l'avoir peu connu, Alfred avait été fortement touché par une émission à la télé relatant le des-tin exceptionnel de Walt Disney. Avec le sentiment qu'il aurait pu être pour lui, un père formi-dable ou un père de substitution! Par l'amour qu'il portait aux enfants dans ses créations animées où l'enfance était le sujet principal en voulant transformer le monde réel en grande féerie afin de tuer notre mortel ennui. Son père, qu'il avait peu connu, avait ce point commun avec Walt Disney en étant un magicien à ses temps perdus qui l'avait fortement marqué dans son enfance. Décidé-ment, la magie était sa recherche permanente à travers la littérature et non les sujets intellectuels ou historiques. Ces derniers n'étant que des pretextes à établir un cadre où la magie opérera entre des personnages ignorant leurs propres pouvoirs magiques. Comme en ce moment où Jean-Ré le maintenait prisonnier de la situation. Mais quand il entendit la porte de la douche s'ouvrir et siffl-oter son goelier, il poussa un ouf de soulagement. Le chronomètre était à moitié terminé et Alfred pensait que son ami avait peut-être gagné son pari pour partir dejeuner avec lui sur la Croisette. J'arrive toute de suite! lança-t-il en courant dans sa chambre comme un gamin. Oh ne te fracasse pas le crâne en étant si proche du but, Ah!Ah!Ah! ria Alfred en consultant le chronomêtre. T'inqui-ète pas, j'enfile un pantalon et une veste et je suis prêt pour la grande virée, Ah!Ah!Ah ria- t-il avec le sentiment qu'il n'avait véritablement pas changé ses comportements.

196

En se faisant beaucoup d'illusions sur son ami qui à la moindre occason était prêt à faire la fête, Ah!Ah!Ah! Espérons qu'il ne dilapide pas son argent en trois jours! craignait-il pour lui avoir do-nné 20 000 euros comme un moyen de sauver son couple. Seul l'avenir le dira! pensa-t-il en le vo-yant débouler dans le salon et glisser les pans de sa chemise sous son pantalon. Alors où en est le chronomètre? lui demanda-t-il  avec empressement pour savoir s'il avait gagné son pari. Alfred, recupéra son portable sur la table basse et lui dit : Tu as gagné; mais avant, il te faudrait enfiler tes chaussures en le voyant en chaussettes, Ah!Ah!Ah! Oh merde alors! s'écria t-il en retournant dans sa chambre et revenir tout essouflé auprès d'Alfred. D'accord, tu as gagné! reconnut-il en arrêtant le chronomêtre et terminer ce pari insensé. Youhais, j'ai gagné comme je te l'avais dit, mon cher Alfred! ne put-il s'empêcher de s'écrier comme un enfant immature. Ce qui mis Alfred de bonne humeur de savoir son ami heureux comme Job. Trois minutes de plus et tu aurais perdu ton pari! précisa-t-il en lui mettant sous le nez son portable. Oui, mais l'important est que j'ai gagné mon pari, n'est-ce pas? lui expédia-t-il en tapotant sur une des poches de sa veste où l'enveloppe des 20 000 euros déformait le tissu. Vu son sourire sur sa bouche et sa bonne humeur, il n'avait semble-t-il rien oublié pour passer une agréable journée avec Alfred. Avec le sentiment d'avoir retrouvé sa jeunesse où il allait pouvoir se montrer sur la Croisette avec les poches pleine d'argent et le teint lustré par la réussite. Et le festival de Cannes étant tout proche, il prévoyait de s'arrêter devant le palais du festival pour ressentir toute l'effervescence des préparatifs. Où tous les hôtels bon ma-rché allaient pris d'assaut par les journalistes et les photographes et les hôtels de luxe reservés par les riches touristes américains et les stars du moment. A l'évidence, le festival de Cannes était une très bonne affaire commerciale pour la municipalité qui remplirait ses caisses avant l'hiver mau-ssade, Ah!Ah!Ah! Il semblait avoir repris du poil de la bête et regardait Alfred comme une bête curieuse qui était plongé dans son livre comme un étudiant studieux. Alors qu'est-ce qu'on fait maintenant? lui demanda-t-il avec cette envie irrépressible de sortir dehors pour se promener la tête au soleil. Mais on y va, mon cher Jean-Ré, je n'attendais que toi avec l'envie d'aller me dég-ourdir les jambes sur la Croisette, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en se levant pour se diriger vers la porte en suivant son ami. Mais ce dernier avant de sortir lui dit : Excuse-moi, mais j'ai oublié quelque cho-se en allant ouvrir le placard du salon où il sortit une boite en carton contenant les photos déch-irées de son couple et celles de leurs vacances en commun. Ah non, s'écria Alfred, compte pas sur moi pour les recoller, car je n'aurai pas le temps de le faire!

197

Comprends-bien que mon metier d'écrivain me prend un temps considérable où l'idée de les reco-ller avec du scotch ou de la colle ne pourra pas donner un resultat satisfaisant, crois-moi. Mais alors comment comptes-tu t'y prendre? lui demanda-t-il d'un air naïf et plein de malice. J'sais pas, mais je pense qu'il faudrait toutes les scanner, puis utilser photoshop pour les reconstituer et les réimprimer à nouveau. Eh ben voilà, tu la tiens la solution, mon cher Alfred, Ah!Ah!Ah! ria Jean-Ré qui sans complexe lui mit le carton entre les bras et le poussa sur le palier. Allez, Alfred, il est temps d'y aller, sinon nous risquons de n'avoir pas de table pour déjeuner au petit Canet. A bout de force, il prit son mal en patience, car rien ne l'obligerait à faire ce travail colossal de recoller les photos que son ami avait déchirées dans un excés de colère contre sa femme. Quand il arriva près de son véhicule, pour ne pas voir ce maudit carton de la journée, il le mit dans son coffre d'où pe-ut-être, il ne sortirait plus jamais! pensa-t-il en vidant son esprit de choses négatives. Dehors, il faisait un temps merveilleux où tous les deux semblaient à nouveau reunis comme deux vieux amis où le temps n'avait pas de prise sur eux. Avec le sentiment que Jean-Ré avait gagné son pari et Alfred amicalement jouer le jeu. Installé confortablement dans la Maserati, Alfred lui dit : Tu devrais boucler ta ceinture! Car pendant le festival, il y a baucoup de flics sur les routes, comme tu le sais. Oui, je le sais bien et toujours prêts à vous mettre une prune pour remplir les caisses de l' Etat, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en arrivant à boucler sa ceinture malgré un ventre prohéminent. Mais ainsi était le sud où les esprits s'échauffaient très vite pour des broutilles où les moindres regards étai-ent épiés ainsi que les gestes parce qu'on était trop attentif à la vie qui se passait autour de nous. Ce qu'on pourrait appeler comme le grand défaut des sudistes prompts à se disputer parce que jal-oux et tyraniques de nature, Ah!Ah!Ah! Avec le sentiment d'avoir le feu à l'intérieur de soi où seu-le la nonchalance aux bords des terrasses des cafés put contrôler la température en sirotant une an-isette bien frâiche. Mais où une partie de cartes fut un bon moyen pour se déclarer à nouveau la guerre, Ah!Ah!Ah! Alfred sortit de la boite à gants ses lunettes noires qu'il plaqua sur son visage pour ne pas être ébloui par le soleil qui tapait fort à travers le parebrse. Alors que Jean-Ré baissa le pare-soleil pour ne pas imiter Alfred et ressembler à un bandit dans une voiture de luxe, Ah!Ah!Ah! Sous entendu que deux hommes portant des lunettes noires dans une Masérati pourraient pas-ser pour la police pour des gens de la mafia! pensa-t-il avec raison pour avoir cotoyé le milieu durant une partie sa jeunesse. Ce qu'il n'avait jamais véritablement avoué à Alfred pour ne pas compliquer leurs rapports amicaux.

198

Une sorte de cosa nostra à la française où la loi du silence était la règle d'or pour ne pas finir sous les balles de la mafia. Et Jean-Ré, en tant que chien de garde, avait bien su manoeuvrer pour se maintenir en vie en avouant rien à son meilleur ami ni à quiconque ni pendant les séances d'inter-rogatoires à la police. Où le casier judiciare devait être long comme le bras pour cambriolages ou violation de domicile en vue de connaître la vie privée des personnes jouant un double jeu dans leur organisation criminelle. En se regardant dans la glace du pare-soleil, il semblait assez fier de lui et comptait passer une agréable journée avec Alfred, qui demarra prudemment vu la circulation importante à cette heure de la journée. Sur son tableau de bord, la pendule marquait midi et la clim commençait à rafraîchir les humeurs où Jean-Ré se mit à l'aise en souriant à Alfred qui derrière ses lunettes noires ressemblait à un robot. Avec le sentiment d'avoir un chauffeur personnel parce que sa femme Charlotte était partie avec l'unique voiture du couple lors de son expulsion du do-micile avec sa fille Leslie. Et puis de toute façon, comme il n'avait plus d'argent pour mettre de l'essence dans le reservoir, il ne le regrettait pas vraiment à moins de siffonner dans les reservoirs des voisins, Ah!Ah!Ah! ria-t-il d'une manière incontrôlée en distrayant Alfred qui se tourna pour lui demander ce qui le faisait rire. Non, non, c'est rien, j'pensais au drôle de couple que tu formais avec ta femme, Clotilde. Ah oui et pourquoi donc? lui demanda-t-il non sans inquiètude. Parce que je vois depuis hier, que ta femme ne t'a pas encore harcelé au téléphone, Ah!Ah!Ah! ria-t-il en se tenant les côtes. Mais c'est parce qu'on s'est convenu ensemble qu'elle ne complique pas trop la situation où je voulais être seul avec mon meilleur ami. Mon meilleur ami? lui demanda Jean-Ré apparemment très ému et aux bords des larmes. Oui, avec mon meilleur ami qui est pour moi co-mme un second père. Car comme tu le sais bien, j'ai très peu connu mon père avant qu'il parte de la maison familiale pour des raisons que les enfants ne peuvent pas comprendre. Jean-Ré, enfoncé confortablement dans son siège, semblait manger ces paroles, comme un plat délicieux qui lui re-montait le moral et prêt à assumer la charge auprès de son ami. Touché par l'émotion, il lui posa la main sur l'épaule pour lui dire d'une façon poignante : Si c'est cela que tu veux Alfred, je veux bien être ton second père et que cela reste entre nous, bien évidemment. Alfred, touché au fond du coeur, saisit cette main avec virilité, comme s'il signait un pacte de sang avec un homme qui ferait partie désormais de sa famille. Ainsi le hasard parfois opérait où l'on retrouvait son double ou son alter ego pour le meilleur des mondes. En étant conscient tous les deux que la chance y était pour beaucoup en la saisissant au bond pour ne pas la laisser passer.

199

Où deux joueurs nés avaient acquis par l'expérience qu'il n'y avait pas seulement l'argent pour établir des relations avec les autres, mais quelque chose d'insaisissable et rempli de mystères. Un mystère qui fascinait tout le monde, les hommes comme les femmes qui s'aimaient pour des rais-ons qu'ils n'arrivaient à s'expliquer. Où la force exercée entre les individus s'appelait l'amour univ-ersel et attirait les coeurs tel un aimant prodigieux. Et tous les jours, nous baignions dans ce cha-mp de force où nous marchions tels des automates guidés par le cosmos. Tu as la chance d'avoir une femme comme Clotilde, lui dit-il avec franchise. Car ma femme est une vraie emmerdeuse, Ah!Ah!Ah! ria Jean-Ré à moitié desepéré par la situation. Oui, je l'admets; mais comprends-bien qu'elle n'a pas eu une enfance facile où elle était délaissée par sa mère. Et pourquoi donc? lui de-manda-t-il avec curiosité en connaissant peu de chose sur sa vie passée. Parce que sa mère vouait un culte pour ses trois garçons en les imaginant un jour entrer au gouvernement de la France. Ah!Ah!Ah! ria Jean-Ré qui n'avait jamais entendu une chose si absurde que celle-là. Et bien évidem-ment, tout cela te fait rire, hum? Mais oui, parce que c'est la meilleur façon de faire de ses enfants des fous ou des frustrés s'ils n'y arrivent pas. C'est pas faux ce que tu dis, car la moitié de sa fam-ille est maintenant sous psichotrope ou suit une analyse psychiatrique pour essayer d'expliquer le pourquoi d'un tel echec. La mère étant bien évidemment la coupable, n'est-ce pas? n'hésita pas à lui dire avec franchise. Oui, cela ne fait aucun doute pour moi, mais entre nous peut-on s'en pren-dre à sa propre mère qui nous a donné la vie malgré ses erreurs? lui répliqua-t-il en ralentissant devant le palais des festivités où la cirulation embouteillait le passage. Merde, c'est toujours la même histoire avec le festival de Cannes où l'on est prit en otage par le cinema et les touristes idiots! s'emportait-il en essayant de prendre son mal en patience. Jean-Ré, calmement, avait posé ses mains sur son ventre et semblait reflechir à la situation où le spectacle avant le spectacle lui paraissait plus interessant que la remise des palmes d'or, Ah!Ah!Ah! En étant sans aucun doute un homme des coulisses pour penser de cette façon où la vraie vie l'interessait plus que le cinéma où tout était artificiel et sans odeurs, regrettait-il pour avoir le flair infaillible d'un chien de garde. Oui, tu me disais que ta femme était une emmerdeuse? lui demanda subtement Alfred. Oui, elle est une vraie emmerdeuse; car lorsque l'on se dispute, elle monte toujours notre fille contre moi en lui disant des horreurs sur ma personne.

200

Faut dire aussi, avec la vie débridée que tu as en vivant du jeu, elle a toute les raisons de croire que tu aies une double vie avec tout un tas de femmes faciles, Ah!Ah!Ah! ria Alfred pour le taqu-iner. Alors là, maintenant tu prends sa défense! s'insurgeait-il contre son ami en ayant du mal à le croire. Mais non, mais non, je n'oserai pas le faire, car je pense sincèrement que ta fille a besoin aussi de son père pour se construire. Et si ta femme joue ce jeu dangereux avec sa fille, cela démo-ntre qu'elle est bête et ne pense qu'a elle. Entièrement raison avec toi, Alfred, approuva Jean-Ré qui n'avait aucun problème relationnel avec sa fille, mais seulement avec sa femme Charlotte qui avait de plus en plus de mal à supporter sa vie de couple avec un funambule. Et bien évidemment, la dernière fois, ça a pété entre vous, n'est-ce pas? lui demanda-t-il en se tournant vers lui, non pas pour lui demander des explication qui étaient désormais simples à comprendre. Oui, et je n'ai pas honte de te dire qu'on s'est battue méchamment. Alors, je l'ai mise à la porte, mais sans savoir qu' elle kidnapperait notre fille! expédia-t-il comme une bombe à Alfred. Quoi, elle avait kidnappé ta fille, Leslie, c'est ce que tu me dis, hum? lui demanda-t-il en retirant ses lunettes noires pour le cr-oire vraiment. Oui et la raison pour laquelle, j'ai tout cassé dans la maison. Et bien évidemment, tu ne savais pas qu'elles étaient parties chez moi à Menton pour se réfugier. Mais non, car j'avais télé-phoné chez sa mère qui ne l'avait pas vue depuis une semaine, mais qui pouvait aussi me mentir pour ne pas que je vienne la chercher de force. Quelle histoire! s'indignait Alfred en attendant que la circulation aux abords de palais des festivités se fluidifie. On avait le sentiment qu'il se jouait un drame dans l'habitacle de la maserati où les deux occupants avaient l'imposibilté de fuir à cause des bouchons et de quitter leur véhicule sans être pris pour des fous par les automobilistes. Et d' après les statistiques, la voiture était la meilleur façon de rompre avec la personne qu'on ne voulait plus voir dans sa vie en lui disant ses quatres vérités avec cette impossibilité de sauter du éhicule roulant  à vive allure, Ah!Ah!Ah! Mais ici, il ne sagissait pas pour Alfred de se brouiller avec son ami, mais de comprendre ce qui s'était passé chez lui, il y a quelques jours. Et bien sûr, ta grosse perte au jeu, elle ne l'a pas digérer, n'est-ce pas? lui demanda-t-il sans vouloir lui faire avouer. Sans aucun doute, mais qui n'était pas la seule raison à notre dispute. Car je suis toujours retombé sur mes pieds sur le plan financier pour ne manquer jamais d'amis prêts à m'aider pour me sortir d'une mauvaise situation.

201

Comprends-bien, Alfred, que tous mes amis sur la côte d'azur sont des amis de longue date que j'ai toujours remboursé avec un grand sens de l'honneur. Et la raison pour laquelle, ma femme et ma fille n'ont jamais manqué de rien, crois-moi. Mais lorsque j'ai compris qu'elle avait kidnappé ma fille sans savoir où elle l'avait emmené, je suis devenu fou au point de tout briser dans la maison! dit-il avec un calme impressionnant. Oui, c'est ce que j'ai pu voir de mes yeux! confirma Alfred en sortant de l'embouteillage comme par miracle. Ouf, lâcha-t-il en mettant le pied sur l'accélérateur pendant que Jean-Ré ouvrit la fenêtre pour respirer l'air chargé d'embruns et d'odeurs de cuisines des restaurants Cannois. Avec le sentiment de reprendre contact avec la vie où ses sens se réglaie-nt à nouveau. Cent mêtres plus loin, ils se garèrent le long de la Croisette pour aller se dégourdir les jambes avant d'aller déjeuner au petit Canet. Comme le temps était merveilleusement beau, il y avait beaucoup de monde qui flanait en regardant aussi bien le bleu de la mer que les hôtels de luxe qu'ils ne pouvaient s'offrir faute de moyens. Mais dans un tel paranoma, l'important était le rêve qu'ils proposaient aux flaneurs et non la réalisation d'une chose complètement folle, comme la réussite. Même si Alfred avait les moyens de se payer une chambre au Carlton, il n'en voyait pas l'utilité où l'écrivain avait besoin seulement d'un petit bureau et surtout pas d'un grand luxe pour faire fonctionner son imagination. Tel était le secret de la création où la vétusté d'une chambre av-ait la vertu de nous faire évader hors les murs. Alors qu'écrire dans une chambre de haut standing, nous piegeait dans une auo-satisfaction néfaste pour notre imagination. Tout ceci était intuitif où Alfred voulait garder cette faculté à s'émerveiller devant les choses même s'il avait les moyens financiers de réaliser quelques uns de ses rêves. Et ne pas vouloir les réaliser, comme une façon de maintenir le rêve en suspend. En résumer, il pensait avec lucidité que de réaliser ses rêves était une façon de les tuer un par un, mais où le rêve d'un rêve lui sembla plus interressant puisque sans limite et menant au sommet de l'art. Quand ils s'arrêtèrent devant l'hôtel Carlton sur la Croisette, Jean-Ré rêvait d'avoir une chambre face à la mer et sortir de l'établissement comme un prince avec tous les regards des touristes se tourner vers lui. Ce qui pour Alfred était ridicule, car une fois l' expèrience faite, on en ressentait plus le besoin ni le plaisir. Bref, où les habitudes des riches dev-enaient alors d'une plate banalité à moins d'en faire un spectacle pour les pauvres, Ah!Ah!Ah!

202

Et les 20 000 euros qu'il lui avait donné pour sortir d'une mauvaise passe semblaient lui brûler les doigts pour avoir désormais les moyens de se payer une suite au Carlton ou au Negresco. Où une envie soudaine de flamber s'empara de lui tel un feu intérieur impossible à eteindre. Tel était le sy-mptôme maladif de tous les joueurs qui ne savaient plus contrôler leurs vies à moins d'être fau-chés, Ah!Ah!Ah! Alfred, le voyant les yeux brûler d'envie et jeter comme des flammes vers l'hôtel, lui posa la main sur l'épaule pour lui dire : Oh ne t'emballes pas trop vite, car ce n'est pas le mo-ment tellement on a de choses à regler, n'est-ce pas? Entendant la voix de son ami, il sembla abattu en retrouvant la triste réalité où il ne sagissait pas de faire les fous, mais de gérer ses amours et ses amitiés avec le moins de  dommages collatéraux. Un peu plus loin, quand ils aperçurent le petit Canet, ils retrouvèrent leur bonne humeur avec l'assurance d'être bien reçus par le patron de l'éta-blissement, Pascal,  et sans se ruiner. Apparemment, l'heure était au retour à la vie normale! pensa-ient-ils tous les deux et malgré que le petit Canet ressembla à un temple du cinéma avec ses mi-lliers de photos de stars affichées sur les murs. Quand ils arrivèrent devant l'établissement, ils rem-arquèrent que le patron avait fait semble-t-il un grand nettoyage de printemps pour acueillir le fes-tival de Cannes. En renouvelant entièrement le mobilier de la terrasse où les couleurs choisies ét-aient plus douces voir pastelles afin que le soleil n'éblouisse pas le touriste lors du déjeuner. Les sièges n'étaient plus en horrible matière plastique faisant mal aux fesses, mais cannés avec des acc-oudoirs pour que le client soit confortablement assis comme un prince. Ce qui émerveilla Alfred et Jean-Ré de voir le petit Canet faire peau neuve où le patron avait dû augmenter ses tarifs avec le renouvelant de sa terrasse, Ah!Ah!Ah! ricanèrent-ils en silence en posant leurs fesses sur des sièges neufs qu'ils semblèrent inaugurer pour la première fois. Tu as vu, Alfred, Pascal à meme changé la carte, remarquait Jean-Ré en la saisissant avec curiosité. C'est vrai, dit Alfred, en se saisissant d' une carte posée sur une table voisine où le festival de Cannes était mis à l'honneur par un graphi-sme hollywoodien pour séduire le public du 7 ème art. C'est vrai qu'elles sont vachement bien fai-tes, mais alors les tarifs, c'est du lourd, Ah!Ah!Ah! ria Jean-Ré qui avait toujours une remarque à faire sur les prix, alors qu'il en avait les moyens. Comme si tout son argent devait être destiné au jeu d'argent et non au plaisir de manger ou de boire avec ses amis. C'était sans aucun doute son grand défaut, remarquait-il, où il devra revoir sa philosophie pour changer son fusil d'épaule et ap-précier la vie normale.

203

Alfred, qui ne jouait plus au jeu d'argent, trouvait plutôt les tarifs raisonnables à quelques jours du festival de Cannes où les touristes allaient claquer leur argent comme des stars, Ah!Ah!Ah! Et les commerçants sur la côte d'azur n'étaient pas dupes de ce changement de comportement chez les touristes afin de les séduire du mieux qu'ils pouvaient. Visiblement tous les touristes dans les res-taurants, dans les hôtels et dans les soirées mondaines allaient être pris pour des stars le temps de la fête du cinéma, Ah!Ah!Ah! Illusion pour les uns et réalité pour les autres? semblait planer au dessus de la Croisette telle une grande interrogation. Pour iaugurer ses 20 000 euros, Jean-Ré proposa à son ami de boire un coktail mis récemment sur la carte pour fêter le 7 ème art. Il s'agi-ssait du grand Marylin, un coktail confectionné en l'honneur de Marylin Monroe dont la carrière fut écourtée par une grave déprime l'entrainant vers son suicide. Habituellement consommateurs de martini on the rock, ils convenaient ensemble que la situation le permettait où malgré le prix de 20 euros le coktail, ils n'auraient aucun regret à le boire en si bonne compagnie. Parfois une brise de vent traversait la terrasse et leur caressait le visage telle une fée. Et un sentiment d'être heureux s'emparait d'eux sans culpabilité. Quand soudainement Pascal, le patron de l'établissement, les aperçut apparemment dans le meilleur de leur forme où la joie de vivre s'exprimait sur leurs vis-ages.